Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
A propos de livres...
challenge
18 avril 2011

Danbé – Aya Cissoko et Marie Desplechin

Lu en partenariat avec Blog-O-Book et Calmann-Lévy

Lu durant le Read-A-Thon Avril 2011RAT_9_10_04_2011

danb_ Calmann-Lévy – février 2011 – 192 pages

Quatrième de couverture :
« J’aimerais que celle ou celui qui lira ce petit livre mesure ce qu’il a de déchirant. Il est mon au revoir à ceux que je laisse sur le quai. (…) Il est mon au revoir à mon enfance de petite fille noire en collants verts, qui dévale en criant les jardins de Ménilmontant. »

Quand Marie Desplechin rencontre Aya Cissoko, elle est touchée par la singularité de son histoire. Née de parents maliens, Aya a connu une petite enfance habitée de souvenirs délicieux, qui prend fin avec la disparition de son père et de sa petite sœur dans un incendie. Élevée par sa mère dans le respect du danbé, la dignité en malinké, Aya apprend à surmonter les épreuves et trouve dans la boxe un refuge.

Auteurs : Aya Cissoko, trente et un ans, championne du monde de boxe anglaise en 2006, est aujourd’hui étudiante à l’Institut d’études politiques de Paris.
Marie Desplechin a écrit une trentaine de livres pour la jeunesse, et une dizaine pour les plus grands. Elle a publié avec Lydie Violet un récit intitulé La Vie sauve, qui a reçu en 2005 le prix Médicis Essai.

Mon avis : (lu en avril 2011)
Ce livre est un récit autobiographique qu'Aya Cissoko a écrit avec Marie Desplechin.
Dès le début du livre Aya nous parle de son père Sagui venu du Mali en France pour travailler puis de sa mère Massiré arrivée en France à l'âge de 20 ans. Le couple aura bientôt quatre enfants : Issa, le fils aîné, puis deux filles Aya et Moussa et un dernier garçon Massou. La vie n'est pas facile, Sagui n'a pas toujours de travail mais la joie règne dans cette famille. Et survient le drame, dans la nuit du 27 au 28 novembre 1986, un incendie ravage l'immeuble, Sagui, le père, et Moussa, la petite sœur, vont mourir. « le feu a  été allumé pour tuer ».
Massiré refuse de repartir vivre au pays comme lui demande la communauté malienne de Paris, et elle s’installe avec ses trois enfants au 140 rue de Ménilmontant. C’est là que Massou, le petit dernier, mourra à son tour, d’une méningite soignée au Doliprane par les médecins moins d'un an après son père et sa sœur. Aya a neuf ans, elle écrit « je suis dans une solitude désespérée » .
Aya est une bonne élève et lorsque sa mère l'inscrira dans un club de sport, elle choisira la boxe. Elle va trouver dans la boxe un refuge et malgré quelques mauvaises fréquentations, elle va tracer sa route : elle devient championne du monde de boxe française en 1999 puis en 2003. En 2006, elle gagne le Championnat du monde de boxe anglaise. Une grave blessure la contraint à abandonner sa carrière sportive et Aya se lance un nouveau défi, reprendre des études. Elle obtient alors une bourse pour suivre une formation à l'Institut d'études politiques de Paris.

Le titre du livre danbé signifie « dignité » en malinké. C'est le code de conduite que Massiré apprend à Aya à respecter pour aller de l'avant dans son existence. Cette mère est admirable et Aya est battante et courageuse.

Voilà un livre plein d'espoir, plein d'amour, un témoignage fort et poignant. J'ai lu ce livre facilement et d'une traite, j'ai été émue par ce beau récit, Aya est une très belle personne.
Merci à Marie Desplechin d'avoir accompagnée Aya Cissoko dans l'écriture de ce livre.

Un grand merci à Blog-O-Book et Calmann-Lévy pour ce partenariat.

Extrait : (page 20)
Quand elle suit son mari tout neuf, Massiré Dansira est donc l'une des premières à quitter le village. Elle y acquiert le statut prestigieux d'aînée. Ma mère, l'aînée, ne parlera jamais à ses proches autrement qu'en bambara. Elle ne s'habillera jamais autrement qu'en jupe longue de wax. Et elle ne laissera plus jamais à quiconque le soin de décider de sa vie. Mais pour le moment, officiellement, elle a vingt ans. Elle vient d'arriver en France. On est en 1976. Au calendrier grégorien. Au village, c'est l'an 1354 de l'Hégire.

Je garde la nostalgie des journées qui n'en finissent pas, de leur matière légère, cotonneuse, des jeux de cache-cache dans les terrains vagues. Mon enfance est une période d'une extrême douceur. Un an après son mariage, Massiré a donné naissance à son premier fils, Issa. Je suis née un an après, en 1978. La petite fille qui me suit, en 1981, porte le nom de Massou. Deux ans plus tard naît un petit garçon, Moussa. Nous vivons tous les six dans quinze mètres carrés, peut-être vingt, au 22 de la rue de Tlemcen à Paris, à proximité du cimetière du Père-Lachaise. Notre immeuble compte sept étages et cinquante-cinq studios. Huit logements par palier, répartis autour de la cage d'un escalier de bois. Nous, c'est le studio 45, au sixième. Même s'ils le voulaient, les habitants du 22 sont trop à l'étroit pour s'ignorer. Personne ne ferme sa porte. Les enfants passent d'un appartement à un autre. Quand Massiré ne peut pas s'occuper de nous, c'est la voisine du cinquième qui nous donne à manger, ou alors celle du premier.
La pièce que nous habitons est meublée d'un grand lit à deux places, d'un petit lit pliable, et d'un lit à barreaux où peut dormir un bébé. Je dors avec Moussa et mes parents dans le grand lit. Massou est dans le lit à barreaux. La nuit tombée, on ouvre pour Issa le lit pliant qu'on place contre la porte. L'espace est si petit, si encombré, que les enfants doivent se percher quand mon père fait sa prière. Sagui garde un lien très étroit à la religion, il fait ses ablutions et prie cinq fois par jour. Il sort alors son tapis de prières et nous grimpons sur le lit. Les prières ne durent pas très longtemps. Il a tôt fait de ranger son tapis et nous pouvons redescendre.

 

 semaine_marie_desplechin
 Semaine Marie Desplechin  du 18 au 24 avril 2011

 

 

Publicité
Publicité
17 avril 2011

Haute fidélité – Nick Hornby

 

 haute_fidelit_  haute_fidelit__1999 haute_fidelit__2004
haute_fidelit__2006 haute_fidelit__10_18

Plon – mai 1998 – 252 pages

10/18 – mars 1999 – 252 pages

10/18 – mai 2004 – 252 pages

10/18 – mai 2006 – 315 pages

10/18 – mai 2010 – 315 pages

traduit de l'anglais par Gilles Lergen

Quatrième de couverture :
"Un roman hilarant, voilà l'événement ! [...] II y a de quoi faire dans cette histoire destinée aux individus coincés et mal coincés entre la trentaine et tout ce qui suit. Rob, bientôt trente-six ans, est mal en point : "Qu'ai-je fait de ma vie ?" se demande ce sempiternel adolescent qui craint de vieillir (même bien), au lendemain d'une rupture, en contemplant les bacs de son magasin de disques pop paumé dans une ruelle de Londres. [...] Pour notre plus grand plaisir, Rob, qui se demande in fine s'il ne serait pas un nul, décide d'entamer la falaise. II récapitule ses amours, depuis le premier, à douze ans, qui dura trois fois deux heures, jusqu'au dernier, une nuit correcte avec une chanteuse américaine, et dresse un inventaire hilarant de ses états d'âme. [...] Tous ceux qui considèrent comme vertige nécessaire le fait de savoir à un moment donné faire durer une relation monogame, se délecteront à la lecture de ce roman post-mélancolique qui célèbre les vertus du rire." Catherine Argand, Lire

Auteur : Nick Hornby est né en 1957. Il est devenu un auteur culte outre-Manche avec ses romans : Haute fidélité, A propos d'un gamin, La Bonté : mode d'emploi, Vous descendez ? (finaliste pour le Whitbread Award), Slam et Juliet, Naked. Il a également écrit des ouvrages de non-fiction, Carton jaune, qui obtient le William Hill Sports Book of the Year Award, et 31 songs, finaliste pour le National book Critics Circle Award. En 1999, Nick Hornby s'est vu remettre l'E.M. Forster Award de l'Académie américaine des Arts et Lettres et remporte en 2002 le W.H. Smith Award For Fiction. Il a signé récemment le scénario du film Une Education, réalisé par Lone Sherfig et nominé aux Oscars. Nick Hornby vit et travaille à Highbury, au nord de Londres.

Mon avis : (lu en avril 2011)
Rob Gordon tient une boutique de disques vinyls pour des amateurs d'albums rares des années soixante et soixante-dix. Toute sa vie est dédiée à la musique, elle l'aide a affronter le quotidien et elle donne du sens à son existence. Laura, sa dernière compagne, vient de le quitter. Rob se met donc à faire le bilan de sa vie, il veut comprendre pourquoi il n'arrive pas à construire quelque chose de durable avec une femme...
Rob aime faire des Top 5 musicaux ou autres... Aussi le livre commence par la liste des cinq ruptures inoubliables de Rob. Après sa rupture avec Laura, il va chercher à contacter ses ex pour comprendre ses échecs sentimentaux...
Au début, j'ai eu un peu de mal à rentrer dans cette histoire car dans ce livre la musique à une grande importance, et malheureusement pour moi ma culture musicale des années soixante et soixante-dix est totalement nulle... Ainsi les discussions entre Rob et ses deux employés à la boutique Championship Vinyl avec beaucoup de références musicales étaient pour moi plutôt obscures. J'ai donc commencé à voir le film tiré du livre et même si je n'étais pas sensible à la musique, cela m'a aidé à comprendre l'ambiance de l'histoire et j'ai mieux apprécié la fin de l'histoire de Rob et Laura. (Et j'ai terminé de regarder le film après avoir fini de lire le livre).

 

high_fidelity_film2 High_Fidelity_film

Le Film : Une adaptation de ce livre a été réalisée au cinéma en 2000 par Stephen Frears avec John Cusack, Iben Hjejle, Todd Louiso, Jack Black, Lisa Bonet.
Le film est fidèle au roman sauf que l'action du livre se situe à Londres, alors que dans le film, elle a pour cadre Chicago.
Pour en savoir plus sur le film voir l'article de wikipedia, qui est très complet et qui, par exemple, recense les très nombreux morceaux de musique présents dans le film.

Extrait : (page 35)
Laura part à la première heure lundi matin, avec un panier et un sac de voyage. Ça remet les idées en place de voir le peu de choses qu'elle emporte, cette femme qui aime tant ses affaires, ses théières, ses livres, ses gravures et la petite sculpture qu'elle a achetée en Inde. Je regarde le sac et je me dis : Bon Dieu, elle veut me quitter à ce point !

On s'embrasse devant la porte, elle pleure un peu.
« Je sais pas très bien ce que je fais, dit-elle.
- Je m'en rends bien compte, dis-je à moitié en plaisantant. Tu es pas obligée de partir tout de suite. Tu peux rester autant que tu veux.
- Merci. Mais on a fait le plus dur. Je ferais mieux de...
- Alors reste au moins jusqu'à demain. »
Mais elle fait juste la grimace et tend la main vers la poignée.
Ce n'est pas ce qu'on appelle une sortie élégante. Elle n'a pas une main libre, essaie d'ouvrir la porte quand même, n'y arrive pas, alors je l'aide, mais je la gêne, il faut que je sorte sur le palier pour la laisser passer, elle doit laisser la porte ouverte parce que je n'ai pas la clé, je dois me précipiter derrière elle pour attraper la porte avant qu'elle se referme. Et c'est tout.

J'ai le regret de dire qu'une sensation exaltante, de liberté et d'excitation nerveuse à la fois, pénètre en moi par les orteils et me submerge comme une grande vague. J'ai déjà ressenti ça, et je sais que ça ne signifie pas grand-chose – bizarrement, ça ne signifie pas que je vais être au sommet du bonheur pendant plusieurs semaines, par exemple. Mais je sais que j'ai intérêt à en profiter, à en jouir tant que ça dure.
Voilà comment je célèbre mon retour au royaume du Célibataire : je m'assieds dans mon fauteuil, celui qui ne va jamais me quitter, et j'arrache des brins de laine de son bras ; j'allume une cigarette, bien qu'il soit encore très tôt et que je n'en aie aucune envie, simplement parce que j'ai maintenant le droit de fumer dans cet appart quand je veux, sans attendre mon tour ; je me demande si j'ai déjà rencontré la prochaine femme avec qui je vais coucher, ou s'il s'agira d'une inconnue ; je me demande à quoi elle ressemble, si on va le faire ici ou chez elle, et à quoi ça ressemblera chez elle ; je décide de faire peindre le logo des disques Chess sur le mur du salon. (Il y avait un magasin à Camden qui les avait tous – Chess, Stax, Motown, Trojan – décalqués sur le mur de brique derrière l'entrée, et c'était très chouette. Peut-être que je pourrais dénicher le type qui a fait le boulot et lui demander de la refaire en petit ici.) Je me sens mal. Ça va bien. Je vais travailler.

Lu dans le cadre du Nick Hornby's Challenge
Nick_Hornby_s_challenge

Lu dans le cadre du Challenge Voisins, voisines
voisin_voisine
Grande-Bretagne

Déjà lu du même auteur :

Slam Slam juliet__naked Juliet, Naked

16 avril 2011

Sang chaud, nerfs d'acier – Arto Paasilinna

Lu (en partie) durant le Read-A-Thon Avril 2011RAT_9_10_04_2011

sang_chaud__nerfs_d_acier Éditions Denoël – mai 2010 – 217 pages

traduit du finnois par Anne Colin du Terrail

Quatrième de couverture : Linnea Lindeman - une forte femme, poissonnière, chasseuse de phoques et accoucheuse un peu chamane - a une vision : Antti Kokkoluoto, héros aux nerfs d'acier mais au sang chaud, naîtra en 1918, au moment même où la Finlande tout juste indépendante plongera dans la guerre civile, et s'éteindra un beau jour de 1990. Entre-temps, Antti mènera une vie épique, comme seul Paasilinna sait les concocter : plongé tout jeune dans les secrets du métier de commerçant et de maquignon, mais aussi de la contrebande d'alcool, on le verra tour à tour endosser l'habit d'entrepreneur, de père de famille, d'homme politique, et même de champion olympique de tir au pistolet ! La crise de 1929, les affrontements récurrents entre fascistes et communistes, la Seconde Guerre mondiale viendront ponctuer cette truculente saga portée par l'imagination de Paasilinna, qui réussit le pari d'initier le lecteur à l'histoire de la Finlande sans jamais rien perdre de son humour et de sa fantaisie.

Auteur : Arto Paasilinna est né en Laponie finlandaise en 1942. Successivement bûcheron, ouvrier agricole, journaliste et poète, il est l'auteur d'une vingtaine de livres, pour la plupart traduits en français et publiés chez Denoël où ils ont toujours rencontré un grand succès. Citons entre autres Le Meunier hurlant, Le Lièvre de Vatanen, Petits suicides entre amis ou encore Un homme heureux. 

 

Mon avis : (lu en avril 2011)
J'avais des réticences à lire le dernier livre de Paasilina car j'avais vraiment été très déçue par le précédent «Les dix femmes de l'industriel Rauno Rämekorpi », sans compter la couverture du livre peu attirante et que je n'ai toujours pas compris... Mais au Salon du Livre de Paris, sur le stand des Lettres Nordiques j'ai eu l'occasion de discuter avec quelqu'un qui l'avait lu et cela m'a donné envie de l'emprunter à la bibliothèque. Et je ne l'ai pas regretté.
Avec ce livre Arto Paasalinna nous raconte l'histoire de la Finlande, bien sûr à sa manière, de 1917 à nos jours. Tout commence par le personnage haut en couleur de Linnea Lindeman, qui est à la fois chasseuse de phoques, accoucheuse et chamane. A quelques jours de la naissance de Antti Kokkoluoto en 1917, elle lui prédit de vivre jusqu'à l'été 1990. Cette prédiction va aider Antti et sa famille à survivre aux difficultés d'abord de la Crise puis de la Guerre qui frappera la Finlande.
Ce livre nous raconte donc toutes les péripéties dont certaines sont plutôt drôles de la longue vie d'Antti.

Avec ce livre, j'ai retrouvé le côté loufoque et décalé des premiers livres de Paasalinna et j'ai beaucoup aimé découvrir l'Histoire de la Finlande au XXème siècle.
Fin 1917, la Finlande obtient son indépendance vis à vis de la Russie. En 1939, la Finlande est attaqué par l'Union Soviétique. En 1941, la Finlande devient, malgré elle, une alliée de l'Allemagne contre l'Union Soviétique. En 1947, la Finlande sort ruinée et ravagée de la guerre, elle est contrainte de payer des lourdes réparations. La Finlande conserve cependant son indépendance. Durant la Guerre Froide, la Finlande adopte une politique de neutralité.

Extrait : (début du livre)
Quand une chamane entre en transe sur une mer en furie, le monde est pris de vertige. Les mouettes heurtent les vagues et les sternes sanglotent.
En cette venteuse journée d'automne de 1917, la harengère, accoucheuse et devineresse Linnea Lindeman relevait ses nasses dans la baie de Botnie. Avec ses trois verveux et sa chaloupe phoquière de trente pieds, elle pêchait en général sur les hauts-fonds de Trullögrundet, à six milles au nord d'Ykspihlaja. Elle avait pris la mer de bon matin. Au fil de la journée, le vent avait forci, mais Linnea n'avait pas peur du gros temps, elle aimait les puissantes tempêtes d'équinoxe. Sur le chemin du retour, elle posa les rames et laissa sa barque dériver vers son port d'attache, vent en poupe, sur les vagues crêtées d'écume.
Soudain son corps robuste fut pris de tremblements. Elle ferma les yeux et entra en contact avec la face cachée de la réalité. Telle la lumière d'un phare, son esprit balaya l'étrange océan secret de la clairvoyance. Une certitude la frappa, issue des hauteurs insondables du ciel, jaillie des nuées d'orage sous les traits d'une orfraie, d'un immense aigle de mer bicéphale ! L'oiseau était porteur d'un envoûtant message, avec deux dates précises. Le 8 janvier suivant, Linnea aiderait à mettre au monde un garçon. Et ce garçon ne mourrait qu'à l'été 1990. Quand une chamane s'endort, son cerveau reste en éveil.

Déjà lu du même auteur :

le_lievre_de_Vatanen  Le lièvre de Vatanen  prisonnier_paradis Prisonniers du paradis

la_cavale_du_g_om_tre La cavale du géomètre  un_homme_heureux Un homme heureux  

la_douce_empoisonneuse_2 La douce empoisonneuse Petits_suicides_entre_amis_2 Petits suicides entre amis 

le_meunier_hurlant Le meunier hurlant

 le_bestial_serviteur Le bestial serviteur du pasteur Huuskonen

le_cantique_de_l_apocalypse Le Cantique de l'apocalypse joyeuse  

les_dix_femmes_de_l_ing_nieur Les dix femmes de l'industriel Rauno Rämekorpi 
 

Lu dans le cadre du Défi Scandinavie blanche
dc3a9fi_scandinavie_blanche
Finlande

Lu dans le cadre du Challenge Voisins, voisines
voisin_voisine
Finlande

Lu dans le cadre du Challenge Viking Lit'
Viking_Lit

15 avril 2011

Des étoiles au plafond - Johanna Thydell

 Lu durant le Read-A-Thon Avril 2011RAT_9_10_04_2011

des__toiles_au_plafond Thierry Magnier – septembre 2010 – 325 pages

traduit du suédois par Agneta Ségol

Quatrième de lecture :
Tout allait bien pour Jenna, quand sa mère est tombée malade. Et franchement gérer le quotidien, les courses, les repas, le ménage, ça n'a rien de drôle. Heureusement il y a Susanna, sa meilleure amie, celle avec qui elle peut fantasmer sur Sakki et partager sa haine pour sa voisine Pénélope, pourtant adulée par tous au collège. Chaque jour, la santé de sa mère se dégrade, Jenna grandit, change, elle comprend que la grande liberté de Pénélope cache quelque chose. Comment rester insensible à l'histoire de cette toute jeune fille qui continue sa vie de pré-ado en affrontant un chagrin trop grand ? Premier roman d'une jeune auteure suédoise, traduit en dix-sept langues, joué au théâtre et adapté en long métrage.

Auteur : Née en 1968 à Göteborg, Johanna Thydell a étudié le cinéma et la mise en scène à Stockholm. Son premier court-métrage reçoit un prix en République tchèque. Elle vit ensuite pendant deux ans à New York comme scénariste et réalisatrice et travaille également pour la télévision.

Mon avis : (lu en avril 2011)
Le livre s'ouvre sur ce poème que Jenna a fait lors d'un cours de suédois :

Si tu meurs, maman, je me ferai mourir.
Oui.
Je me ferai mourir.
Non, on ne dit pas se faire mourir.
On dit se donner la mort.
Ou se suicider.
Donc.
Si tu meurs, maman, je me suiciderai.

Jenna est une adolescente dont la mère est en train de mourir d'un cancer du sein. Et même si elle a honte de le penser, elle a honte de sa mère malade. Jenna ne veut pas faire pitié et elle évite que cela se sache. C'est son secret. Aussi elle vit plusieurs vies à la fois, celle de l'adolescente qui grandit et qui se cherche, celle qui s'occupe de la maison et doit aider sa mère pour faire les courses et les tâches du quotidien, celle de la petite fille qui a du chagrin et qui a peur de l'avenir sans sa maman...
En tant qu'ado, comme sa meilleure amie Susanna, elle se sent moche et totalement fade. Jenna déteste Pénélope, la fille la plus glamour de l'école, qui habite juste au-dessus chez d'elle et qui organise les plus belles soirées du collège où elle n'est jamais invitée. Elle aimerai que Sakki, le garçon qu'elle admire, la remarque.
Le quotidien s'est les séjours de sa maman à l'hôpital et ses grands-parents qui débarquent dans l'appartement et bouleverse son chez-soi.
La petite fille espère un miracle, et se rappelle des souvenirs d'avant la maladie en regardant les étoiles au plafond de sa chambre.
Un jour Pénélope découvre son secret et l'inattendue se produit...

Ce livre est très beau, il raconte une histoire triste et bouleversante qui m'a donné les larmes aux yeux mais qui m'a également fait rire. Jenna est une adolescente formidable et très courageuse. Sa maman, très discrète dans l'histoire est une belle personne.
Ce livre est vraiment un beau message d'espoir et de courage !

Extrait : (page 33 - Chapitre 4)
G&G (C'est comme ça que Jenna appelle grand-mère et grand-père) habitent un trou paumé où il n'y a rien qu'une banque, un kiosque à journaux et un tas de dames qui saluent tous ceux qu'elles croisent. Il faut vingt minutes pour s'y rendre en car.
Mais Jenna et maman ne s'y rendent plus en car.
Elles utilisent le transport communal pour handicapés.
Jenna déteste ça. Mais elle sait à quel point c'est fatiguant pour maman de monter et de descendre du car lors des changements. C'est particulièrement fatigant les jours où elle a mal et surtout quand elle est obligée de se déplacer avec ses béquilles. Au début, maman n'aimait pas le transport communal pour handicapés, elle non plus, mais on s'habitue à presque tout.
Surtout quand on n'a pas le choix.
Jenna a à peine le temps de descendre de la voiture que grand-mère lui saute dessus dans un nuage de noix de coco.
- Bienvenue ! Je ne voudrais pas vous tacher avec mon huile solaire ! hurle grand-mère en les serrant dans ses bras.
- On n'en mourra pas, rit maman.
- Il faut faire attention à soi, dit grand-mère sur un ton indigné en secouant ses cheveux roux et bouclés aux racines grises.
Et elle se met à parler de la couche d'ozone, de l'effet de serre et de tout ce qui a changé, de la chaleur exceptionnelle même en septembre, mais oh comme je suis heureuse que vous soyez là !
Grand-mère ouvre la porte. Une fois dans l'entrée, elle crie tellement fort que Jenna a peur que le miroir (toujours sans taches de doigts) se décroche et s'écrase par terre.
- Aaaalbin, hurle-t-elle. Albin, elles sont là !
Jenna entend des grincements et des craquements dans le salon. Le bruit vient d'un canapé Mes petites mignonnettes ! Vous allez bien ? Ça n'a pas été trop compliqué de venir jusqu'ici ?
Grand-père fait remarquer que maman n'a pas ses béquilles et maman lui adresse un sourire triomphant, il pose quelques questions sur son prochain rendez-vous à l'hôpital et Jenna se dépêche de se glisser entre son gros ventre et maman pour se réfugier dans la cuisine.
Où tout est aussi parfait que d'habitude.
Pas de poussière dans les coins, pas d'objets inutiles qui traînent (en revanche, ils sont nombreux sur les étagères), pas de sac-poubelle oublié sur le palier. Les franges des tapis bien peignées. La vaisselle rincée et soigneusement rangée dans le lave-vaisselle.
Bienvenue chez G&G !
- Maintenant on va prendre le café, annonce grand-mère qui trouve que grand-père et maman s'attarde trop dans l'entrée.
Tout le monde s'installe, tout le monde admire la belle crème fouettée sur le gâteau fait maison, tout le monde prend café pendant une éternité.
- Ça se passe bien au collège, Jenna ? demande grand-mère après avoir discuté tringles à rideaux avec maman.
Grand-mère pose toujours la même question. Et elle veut toujours entendre la même réponse. Que ça se passe bien.
- Oui, ça se passe bien, répond donc Jenna.
- Tu es une bonne petite, Jenna-Penna, dit grand-père tout en mâchant bruyamment du gâteau.
- Oh oui, dit grand-mère. Et tu t'occupes bien de maman quand vous êtes chez vous, n'est-ce pas ? Tu l'aides quand elle a besoin de toi, n'est-ce pas ?
Les mots de grand-mère restent suspendus dans l'air. Un grand silence s'installe autour de la table. On entend l'horloge dans le salon. Dong dong dong. Jenna se dit que c'est un marteau qui tape sur la tête de grand-mère.
Grand-mère supporte mal le silence. Elle tripote et tourne les bracelets en or qu'elle a eus pour son anniversaire.
- Bien sûr qu'elle m'aide, dit maman tout en caressant les genoux de Jenna. Bien sûr.
Grand-mère hoche la tête, bien sûr qu'elle l'aide, bien sûr, et elle se met à parler de Gun la voisine qui a chargé de voiture, des Carlsson qui vont déménager, de la fille de Lasse à Svängen qui va avoir un bébé. Grand-père acquiesce et maman dit ah oui ? ah bon ? et ils sauvent ainsi la situation en se parlant de la vie des autres.
Jenna, elle, ne dit rien.
Il ne faut pas penser de mal de sa grand-mère. Mais parfois Jenna ne peut pas s'en empêcher. Il faut épauler maman, Jenna. Il faut aider maman, Jenna. Il faut penser à maman, Jenna. Ta mère est une battante, Jenna.
Comme si Jenna ne le savait pas ! Comme si Jenna ne voyait rien, ne s'apercevait de rien, ne se rendait pas compte des douleurs de maman, de ses difficultés à respirer, de sa soif, de sa fatigue, de ses nausées. Comme si Jenna vivait ailleurs que dans l'appartement avec maman.
Non.
Elle ne vit pas ailleurs.
Mais il lui arrive de le souhaiter.

Lu dans le cadre du Défi Scandinavie blanche
dc3a9fi_scandinavie_blanche
Suède : Johanna Thydell

Lu dans le cadre du Challenge Voisins, voisines
voisin_voisine
Suède

Lu dans le cadre du Challenge Viking Lit'
Viking_Lit

Livre 39/42 pour le Challenge du 6% littéraire
1pourcent2010

12 avril 2011

Maria – Pierre Pelot

Lu durant le Read-A-Thon Avril 2011RAT_9_10_04_2011

maria Editions Héloïse d’Ormesson – janvier 2011 - 128 pages

Quatrième de couverture : 
Les Vosges, sous l’Occupation. Maria est institutrice. Un matin, les maquisards viennent la chercher devant sa classe. Jean, son mari, est collabo. Elle n’en savait rien. Pour avoir été la femme d’un traître, pour l’avoir aimé, Maria paiera. Marquée à vie par la cruauté de ceux que la France élève bientôt au rang de héros, elle ne révélera jamais le châtiment qui lui a été injustement infligé.
Soixante ans plus tard, un jeune homme arrive dans cette contrée, à la recherche d’une pensionnaire de la maison de retraite. Dans son périple l’accompagne la voix envoûtante d’une conteuse qui, sur les ondes de la radio locale, évoque l’histoire de ces terres où gèlent les eaux de la Moselle.
Avec Maria, Pierre Pelot revient à sa géographie intime, honorant, dans une langue percutante et sensible, une région rude et secrète.

Auteur : Né en 1945 à Saint-Maurice-sur-Moselle où il vit toujours, Pierre Pelot a signé plus d'une centaine de livres, du polar à la SF. Il est l'auteur notamment de L'Eté en pente douce, C'est ainsi que les hommes vivent (prix Erckmann-Chatrian), Méchamment dimanche (prix Marcel Pagnol), L'Ombre des voyageuses (prix Amerigo Vespucci) et La Montagne des boeufs sauvages.

 

Mon avis : (lu en avril 2011)
Après avoir vu la présentation de ce livre à la Grande Librairie, j'ai eu très envie de le découvrir.
« Méfiez-vous des apparences », c'est le sous-titre du livre, et il a son importance.
Tout commence de nos jours, sur une route, dans les Vosges, à la tombée de la nuit. Un jeune homme vient rendre visite à Maria, l'une des pensionnaires de la maison de retraite. Maria est également une conteuse, elle raconte chaque jour sur la radio associative locale l'Histoire des Vosges et des ses habitants depuis le Moyen-Age.
En parallèle, le lecteur découvre que Maria a été la victime d'un événement sous l'Occupation allemande en octobre 1944. Ces faits qui vont bouleverser sa vie à jamais.
Ce livre raconte l’histoire de Maria, une histoire émouvante, bouleversante, pleine d'humanité et qui va nous surprendre dans les toutes dernières pages par un rebondissement final inattendu.
Pierre Pelot a une très belle écriture et ses descriptions des Vosges sont pleine de poésie et d'amour pour sa terre et ses habitants.
Des longs passages racontant l'Histoire des Vosges entrecoupent l'histoire de Maria, j'avoue en avoir survolé certains passages car j'avais hâte de connaître la conclusion de cette courte histoire.
A découvrir !

Extrait : (début du livre)
Un peu de blanc dans beaucoup de pluie, la méchante neige s'était mise à tomber en même temps que la nuit, à la sortie de la ville illuminée.
Des nœuds de fatigue s'étaient serrés plus durs entre ses épaules, les ankyloses et les crampes dans ses cuisses et mollets. Il avait failli s'arrêter sur une aire de stationnement, puis dans un café en bord de rue du premier village traversé, après Remiremont, mais il avait résisté, se disant qu'il touchait au but, qu'il ne lui restait guère plus d'une vingtaine de kilomètres – une vingtaine de kilomètres, après plus de 700 -, et il avait pris la voie rapide au flanc de la vallée qui filait presque droit à l'écart des villages.
La neige pourrie s'était épaissie. Les flocons plaqués au pare-brise tenaient une seconde avant de fondre. Cette averse voltigeuse l'avait surpris. C'était peut-être un peu tôt dans la saison. Il y avait encore beaucoup de feuilles aux arbres, jaunes et flamboyantes, pareilles à des flammes durcies. La neige, en principe, tombait après la chute des feuilles, non ? Il l'avait toujours cru, en tout cas.
Mais en vérité il ne savait rien de l'hiver ici. Ni des températures de saison.

Il ne savait rien de la région. Ça ne lui était jamais vraiment venu à l'esprit qu'on pût y vivre. Son père qui en venait ne lui en avait jamais vraiment parlé. Ou alors si loin qu'il ne s'en souvenait plus, n'en gardait que des images brumeuses et vagues. Quelques clichés, bien sûr, à se mettre sous la dent, pas mieux. La ligne bleue des Vosges, les bûcherons vosgiens, la Bête des Vosges, l'affaire Grégory... Comme des sortes d'accrocs dans un paysage lisse de montagnes rondelettes couvertes de sapins.
Il les avait aperçues au loin, les montagnes, en cache dressé devant l'horizon, un peu avant que le ciel se change en encre boueuse et que la nuit mélangée à la fange céleste s'affale, écrabouille et noie tout cela dans la brume sale et la bouillasse de neige et de pluie.

 

Lu dans le cadre du Challenge Petit BAC
logo_challenge_Petit_BAC
"Prénom"

Publicité
Publicité
10 avril 2011

Marina – Carlos Ruiz Zafon

 

marina marina_jeunesse 

Robert Laffont – janvier 2011 – 303 pages

Pocket Jeunesse – janvier 2011 – 331 pages

traduction de l'espagnol par François Maspero

Quatrième de couverture :
Dans la Barcelone des années 1980, Oscar, quinze ans, a l'habitude de fuir le pensionnat où il est interne. Au cours de l'une de ses escapades, il fait la connaissance de Marina. Fascinée par l'énigme d'une tombe anonyme, Marina entraîne son jeune compagnon dans un cimetière oublié de tous. Qui est la femme venant s'y recueillir ? Et que signifie le papillon noir qui surplombe la pierre tombale ? S'égarant dans les entrailles d'une terrifiante cité souterraine, s'enfonçant dans les coulisses d'un inquiétant théâtre désaffecté, Oscar et Marina réveillent les protagonistes d'une tragédie vieille de plusieurs décennies.

L’auteur : écrivain catalan, Carlos Ruiz Zafón vit à Los Angeles, où il est également scénariste. L'Ombre du vent, prix Planeta (2004), prix du meilleur livre étranger – roman (2004), a aussi sélectionné pour le prix Femina étranger.

Mon avis : (lu en avril 2011)
Ce livre est l'un des premiers romans de Carlos Ruiz Zafon publié en Espagne en 1999. Il est publié en France en 2011 dans deux éditions une adulte et une jeunesse. Comme dans ces livres suivants, Nous retrouvons la ville de Barcelone personnage à part entière de son livre et une atmosphère de mystère.

Au début du livre, nous sommes dans les années 80, Oscar Drai, âgé de quinze ans, est retrouvé sur le quai de la gare de France à Barcelone après avoir disparu des son internat pendant une semaine. Le livre va nous raconter pourquoi il a disparu. Quelques semaines auparavant, Oscar a rencontré Marina, elle habite avec son père une mystérieuse maison qui semble abandonnée. Ils ont le même âge et Marina entraîne avec elle Oscar à résoudre un mystère : pourquoi dans un vieux cimetière de la ville de Barcelone, une vieille dame voilée visite-t-elle chaque fin de mois une tombe anonyme ornée du dessin d'un papillon noir ? Leur enquête va les faire découvrir un certain Mihail Kolvenik, savant fou, ayant vécu à Barcelone dans les années quarante et cinquante, elle va les mener également dans des lieux effrayants.

Il y a dans ce livre un mélange de réalité et de science-fiction et l'intrigue se déroule comme un roman policier. Tout est empreint de mystère, d'ombre comme nous l'annoce la toute première phrase du livre. «  Nous ne nous souvenons que de ce qui n’est jamais arrivé »
J'ai plutôt bien aimé ce livre les personnages sont attachants et la conclusion du livre plutôt inattendu même si j'avais très rapidement deviné certaines choses.

Mon livre préféré de Carlos Ruiz Zafon reste cependant le premier que j'ai lu, c'est à dire « L'ombre du vent ».

Extrait : (début du livre)
Nous ne nous  souvenons que de ce qui n’est jamais arrivé, m’a dit un jour Marina. Il aura fallu que s’écoule une éternité pour que je finisse par comprendre le sens de ces mots. Mais mieux vaut commencer par le début, qui, dans cette histoire, se trouve être la fin.
En mai 1980, j’ai disparu du monde pendant une semaine. Sept jours et sept nuit durant, nul n’a su où j’étais. Amis, camarades, professeurs et même la police se sont lancés à la recherche de ce fugitif que déjà certains croyaient mort ou devenu soudain amnésique et perdu dans des rues mal famées.

Une semaine plus tard, un policier en civil a cru me reconnaître : la description du garçon disparu concordait. Le suspect errait dans la gare de France, comme une âme en peine dans une cathédrale de fer et de brume. L’agent s’est approché de moi avec des précautions digne d’un roman de la Série noire. Il m’a demandé si je m’appelais bien Óscar Drai et si j’étais le garçon disparu de son internat sans laisser de traces. J’ai acquiescé sans desserrer les dents. Je me souviens du reflet de la voûte de la gare dans ses verres de lunettes.
Nous nous sommes assis sur un banc du quai. Le policier a allumé posément une cigarette. Il l’a laissée se consumer sans la porter à ses lèvres. Il m’a dit qu’il y avait un tas de gens qui m’attendaient pour me poser des questions auxquelles je devais me préparer,  afin de leur donner de  bonnes réponses. J’ai acquiescé de nouveau. Il m’a regardé dans les yeux, en m’étudiant. « Parfois, a-t-il dit, raconter la vérité n’est pas une bonne idée, Óscar. » Il m’a tendu quelques pièces et m’a demandé de téléphoner au directeur de l’internat. Il a attendu que j’aie terminé, puis m’a donné de l’argent pour un taxi et souhaité bonne chance. Je lui ai demandé comment il savait que je n’allais pas disparaître à nouveau. Il m’a observé longuement. « Seuls disparaissent ceux qui ont un endroit où aller », s’est-il borné à répondre. Il m’a accompagné dans la rue, où il m’a dit adieu sans me questionner davantage. Je l’ai vu s’éloigner dans le Paseo Colón. La fumée de sa cigarette intacte le suivait comme un chien fidèle.
Ce jour là, le fantôme de Gaudi sculptait dans le ciel de Barcelone des nuages impossibles sur un azur qui blessait les yeux. J’ai pris un taxi pour l’internat où je supposais que m’attendait le peloton d’exécution.    

Déjà lu du même auteur : l_ombre_du_vent L'ombre du vent le_jeu_de_l_Ange Le jeu de l'Ange

Lu dans le cadre du Challenge Voisins, voisines
voisin_voisine
Espagne

Lu dans le cadre du Challenge Petit BAC
logo_challenge_Petit_BAC
"Prénom"

7 avril 2011

Meurtres en soutane – P.D. James

Lu en partenariat avec Blog-O-Book et le Livre de Poche

meurtres_en_soutane meurtres_en_soutane_2003 meurtres_en_soutane_2011

Fayard – mai 2001 – 454 pages

Livre de Poche – mars 2003 – 507 pages

Livre de Poche – août 2010 – 507 pages

Présentation éditeur :
St Anselm, un collège de théologie fondé au xixe siècle et situé sur un promontoire isolé et venteux de la côte sud-est de l'Angleterre, accueille une vingtaine d'étudiants qui se destinent à la prêtrise anglicane. Lorsque l'un d'eux, Ronald Treeves, est découvert mort au pied d'une falaise, enseveli sous une coulée de sable, son richissime père adoptif, Sir Alred Treeves, demande à New Scotland Yard de réexaminer le verdict de « mort accidentelle » énoncé à l'issue de l'enquête. Le commandant Dalgliesh, qui a lui-même fréquenté le collège au cours de son enfance, accepte de venir passer un week-end sur les lieux pour ce qu'il croit devoir n'être qu'une vérification de routine. En réalité, il va se trouver confronté à l'une des plus sordides affaires de sa carrière. Car d'autres visiteurs sont attendus ce même week-end au collège, et tous n'en ressortiront pas vivants.
P.D. James a trouvé avec ce petit collège de théologie un cadre idéal pour un roman policier, un monde presque clos où fermentent les passions. Outre les quatre ecclésiastiques qui dirigent l'établissement et assurent les principaux cours, outre la vingtaine d'étudiants et l'infirmière Margaret Munroe, il y a Gregory, le professeur de grec excentrique, Emma, la très belle professeur de poésie, Eric, le factotum qui élève des cochons et qui reçoit tous les quinze jours dans son cottage sa demi-soeur incestueuse... Tout est en place pour tisser une intrigue complexe dont les lectrices et lecteurs suivront les entrelacs avec une délicieuse angoisse.

Auteur : Née à Oxford en 1920, Phyllis Dorothy James a exercé diverses fonctions à la section criminelle du ministère anglais de l’Intérieur jusqu’en 1979. Mélange d’understatement britannique et de sadisme, d’analyse sociale et d’humour, ses romans lui ont valu les prix les plus prestigieux, dont, en France, le Grand Prix de Littérature policière, en 1988. Anoblie par la reine en 1990, elle est l’auteur de nombreux romans policiers, d’un roman de science-fiction et d’un « fragment d'autobiographie » (Il serait temps d'être sérieuse...). Derniers ouvrages parus : La Salle des meurtres (2004), Le Phare (2006), Une mort esthétique (2009).

Mon avis : (lu en avril 2011)
J’ai lu avec beaucoup de plaisir ce roman policier d’un style classique, avec une ambiance très « british » comme je l’aime beaucoup. Saint Anselm est un collège de théologie sur la côte du Suffolk. L’endroit est isolé proche de la mer et battue par les vents venant du large. Un élève est retrouvé mort au bas de la falaise. S’agit-il d’un accident ? D’un suicide ?
Quelques jours plus tard, la vieille dame qui a découvert le corps meurt d’une crise cardiaque.
Le père de l’élève n’étant pas satisfait des conclusions de l’enquête, Dalglish, qui connaît ce monastère y ayant passé des vacances lorsqu'il était adolescent, est envoyé sur les lieux.
Le collège de St Anselm est menacé de fermeture.
Le lecteur suit le cours de l'enquête en même temps que les inspecteurs. C'est un huis clos, avec une ambiance pesante, un enchaînement d'évènements, de meurtres et une enquête passionnante avec son lot de rebondissements. Les descriptions précises du cadre sauvage de bord de mer avec des falaises et où règne la tempête m'ont fait rêver. L'écriture est très agréable, et on lit facilement ce livre sans vouloir le lâcher avant la conclusion. J'ai vraiment beaucoup aimé cette lecture.

Un Grand Merci à Blog-O-Book et au Livre de Poche pour m’avoir permis de découvrir ce livre.

logo_bob_partenariat

Déjà lu du même auteur : une_mort_esth_tique Une mort esthétique

Lu dans le cadre du Challenge Voisins, voisines
voisin_voisine
Grande-Bretagne

Lu dans le cadre du Challenge Petit BAC
logo_challenge_Petit_BAC
"Objet"

2 avril 2011

La Trilogie berlinoise – Philip Kerr

la_trilogie_Berlinoise trilogie_berlinoise_ la_trilogie_Berlinoise_ldp

Le Masque – novembre 2008 – 836 pages
Livre de poche – janvier 2010 – 1015 pages
Livre de poche – novembre 2010 – 1015 pages

Prix Livre de poche des lecteurs Policiers 2010

traduit de l'anglais de Gilles Berton

Quatrième de couverture :
Publiés pour la première fois dans les années 1989-1991, L'été de cristal, La pâle figure et Un requiem allemand évoquent l'ambiance du Ille Reich en 1936 et 1938, et ses décombres en 1947 Ils ont pour héros Bernie Gunther, ex-commissaire de la police berlinoise devenu détective privé. Désabusé et courageux, perspicace et insolent, Bernie est à l'Allemagne nazie ce que Phil Marlowe était à la Californie de la fin des années 30 : un homme solitaire témoin de la cupidité et de la cruauté humaines, qui nous tend le miroir d'un lieu et d'une époque. Des rues de Berlin " nettoyées " pour offrir une image idyllique aux visiteurs des Jeux olympiques, à celles de Vienne la corrompue, théâtre après la guerre d'un ballet de tractations pour le moins démoralisant, Bernie va enquêter au milieu d'actrices et de prostituées, de psychiatres et de banquiers, de producteurs de cinéma et de publicitaires. Mais là où la Trilogie se démarque d'un film noir hollywoodien, c'est que les rôles principaux y sont tenus par des vedettes en chair et en°os.*Heydrich, Himmler et Goering...

Auteur : Né en 1956 à Édimbourg, Philip Kerr a fait ses études de droit à l'université de Birmingham. Auteur de douze romans traduits en plus de 25 langues et de nombreux scénarios, il s'est lancé récemment dans la littérature pour jeunes adultes. Écrite près de vingt ans après la Trilogie berlinoise, la suite des aventures de Bernie Gunther, La mort, entre autres est paru en 2009.

Mon avis : (lu en mars 2011)
J'ai mis plusieurs jours à lire ce gros pavé de plus de mille pages, en effet, ce livre regroupe 3 livres publiés indépendamment dans les années 1989-1991.

L’été  de cristal : L’histoire se passe en 1936, à Berlin à la veille des Jeux Olympiques.
Bernie Gunther, ancien inspecteur de la police berlinoise est devenu détective privé. Un riche industriel lui demande d’enquêter sur la mort de sa fille et de son gendre. Leurs corps ont été retrouvés calcinés dans leur maison incendiée. Des bijoux ont disparus du coffre fort. Les polices Kripo, Orpo, Sipo et Gestapo se livrent une guerre d'influence tout comme Heydrich, Goering et Himmler. C'est la monté du nazisme.

La pâle figure : Nous sommes toujours à Berlin, mais en Septembre 1938, la conférence de Munich est en cours, les Allemands s'interrogent sur une future guerre. Bernhard Gunther, le détective privé, est engagé par une riche veuve victime d'un maître chanteur. Mais il est également obligé par Heydrich de mener une enquête pour retrouver un tueur en série qui rode dans les rues de Berlin et s'attaque depuis quelques temps à des jeunes filles. Pour cela il est réintégré dans la Kripo en tant que Komissar.

Un requiem allemand :
Nous retrouvons Bernie Gunther, après la guerre, dans le Berlin de 1947. Un Berlin occupé, détruit par les bombes, où règne le marché noir, la prostitution, et où l'on craint les exactions des soldats russes. Bernie Gunther est contacté par un officier de la police secrète soviétique pour enquêter sur le meurtre d'un officier américain et innocenter un certain Emil Becker emprisonné à Vienne. Gunther avait connu Becker lorsqu'il appartenait à la Kripo en 1940. Il part donc à Vienne qui est également occupé par les Alliés et les Soviétiques, il se trouve mêlé aux services secrets américains et russes de l'après-guerre...

Ces trois enquêtes indépendantes sont l'occasion de découvrir l'atmosphère inédite de l'Allemagne à plusieurs époques troubles. Les intrigues sont passionnantes et le personnage de Bernie Gunther, détective privé hostile au régime nazi, est vraiment sympathique. Il m'a fait penser à Nestor Burma. Les descriptions sont très réalistes, l'auteur s'est beaucoup documenté sur les faits historiques et j'ai été très intéressée. J'aurai peut-être encore mieux apprécié ces trois enquêtes si je ne les avais pas lu à la suite. Je vais donc attendre un peu avant de lire la suite de « La Trilogie berlinoise » qui est paru en 2009, sous le titre de « La mort, entre autres ».

l__t__de_cristal   la_pale_figure    un_requiem_allemand 

Extrait : (début du livre)
Ce matin, au coin de Friedrichstraße et de Jägerstraße, deux S.A. démontaient une des vitrines rouges où est affiché chaque nouveau numéro du Stürmer. Der Stürmer est le journal dirigé par Julius Streichder, le propagandiste antisémite le plus virulent du Reich. Ces vitrines où s'étalent les dessins à moitié pornographiques de jeunes Aryennes soumises à l'étreinte de satyres au nez crochu sont destinées à attirer et titiller les esprits faibles. Aucun individu décent ne veut rien avoir à faire avec ça. Les deux S.A. déposèrent le panneau dans leur camion, déjà à moitié plein de vitrines identiques. Ils opéraient sans ménagements, car deux ou trois vitres étaient brisées.
Une heure plus tard, je revis les deux même S.A. en train d'emporter une autre vitrine installée à un arrêt de tramway devant l'hôtel de ville. Cette fois, je m'approchai pour leur demander ce qu'ils faisaient.
- C'est pour les Olympiades, m'informa l'un d'eux. On nous a ordonné de les faire disparaître pour ne pas choquer les étrangers qui viendront assister aux Jeux.
A ma connaissance, c'était la première fois que les autorités faisaient montre de tels égards.
Je rentrai chez moi dans ma vieille Hanomag noire et mis mon dernier costume présentable en flanelle gris clair qui m'avait coûté 120 marks trois ans auparavant. Il est d'une qualité qui devient de plus en plus rare dans ce pays. Tout comme le beurre, le café et le savon, le tissu qu'on utilise à présent n'est qu'un ersatz, pas très solide, quasiment inefficace contre le froid en hiver et très inconfortable en été.
Je me contemplai dans le miroir de le chambre et parachevai ma tenue avec mon plus beau chapeau. Une coiffure de feutre gris foncé à large bord, entouré d'un ruban de soie noire. Un modèle fort répandu. Mais, comme les hommes de la Gestapo, je le porte d'une manière particulière, le bord rabattu sur le devant. Cela a pour effet de dissimuler mes yeux, de sorte qu'il est plus difficile de me reconnaître. Un style lancé par la police criminelle de Berlin, la Kripo, au sein de laquelle je l'avais adopté.
Je glissai un paquet de Muratti dans la poche de mon veston et, serrant sous mon bras avec précaution une porcelaine Rosenthal emballée d'un papier cadeau, je sortis dans la rue.

baby_challenge_polar
Lu pour le Baby Challenge - Polar organisé par Livraddict
Livre 13/20 Médaille de bronze

Lu dans le cadre du Challenge Voisins, voisines
voisin_voisine
Grande-Bretagne

d_fi_1000
Lu dans le cadre du Défi des Mille organisé par Fattorius

31 mars 2011

Prochains Challenges...

Ces derniers jours, je n'ai pas résisté à m'incrire à de nouveaux challenges...

RAT_9_10_04_2011
Pour commencer, je renouvelle l'expérience du Read A Thon, le 9 avril 2011 de 10h à 22h : comme en octobre dernier, je reste sur un Mini Read A Thon de 12 heures !

Venez vous inscrire !

semaine_marie_desplechin
Stephie du blog
Mille et une page
nous invite à Semaine Marie Desplechin  du 18 au 24 avril 2011

 swap___2__l
Swap à 2 Pal organisé par Lili Galipette
J'ai reçu le questionnaire de ma swappée Mrs Pepys
et je suis dans la préparation de mon colis...
La révélation des colis est fixée au 30 avril 2011 !

Destination_Cambodge
Challenge Destination Cambodge : 2 juillet 2011

proposé par evertkhorus
Le challenge consiste à découvrir un pays à travers sa littérature et/ou sa culture. Pour cela, il s'agit de lire un livre se passant au Cambodge ou écrit par un Cambodgien et d'en faire la critique le 2 juillet 2011. Vous pouvez aussi ce jour-là nous présenter des recettes, de la musique, des photos, des carnets de voyage... En attendant, le livre choisi reste secret !

Nick_Hornby_s_challenge
Nick Hornby's Challenge
proposé par Sofynet
L'objectif : lire un certain nombre d'ouvrages, et voir au moins une adaptation de roman de l'auteur, avant le 31 mars 2012.

27 mars 2011

L'homme inquiet – Henning Mankell

l_homme_inquiet Seuil – octobre 2010 – 551 pages

Quatrième de couverture :
Wallander a réalisé ses rêves : vivre à la campagne avec son chien. Et il est devenu grand-père d’une petite Klara. Sa fille Linda vit avec le père de l’enfant, incroyable mais vrai, un financier aristocrate. Le beau-père de Linda, ancien officier de marine haut gradé, disparaît après avoir évoqué avec Wallander la guerre froide et les sous-marins russes dans les eaux territoriales suédoises. Puis la belle-mère est retrouvée morte. Soupçons d’espionnage. Au profit de la Russie ? Des États-Unis ? Wallander mène une enquête parallèle à celle de la police de Stockholm et des services secrets.

Auteur : Henning Mankell, né en Suède en 1948, est devenu mondialement célèbre grâce à ses fameuses enquêtes de l'inspecteur Kurt Wallander : une série de polars qui a commencé en 1991 avec Meurtriers sans visage et s'est vendue à des millions d'exemplaires dans le monde. Gendre d'Ingmar Bergman, dont il a épousé la fille Eva en secondes noces, Mankell a également écrit des livres pour la jeunesse, des romans dont le magnifique Les chaussures italiennes, paru en 2009, des pièces de théâtre. Depuis 1996, l'écrivain partage sa vie entre son pays natal et le Mozambique, où il dirige le Teatro Avenida.

 

Mon avis : (lu en mars 2011)
Même si je n'ai lu que les deux premières enquêtes de Wallander, je n'ai pas résisté à la tentation de d'emprunter à la bibliothèque et de lire cette nouvelle enquête que la couverture annonce comme la dernière du fameux inspecteur. Et j'ai savouré avec beaucoup de plaisir cette enquête.

Tout commence avec la disparition du beau-père et de la belle-mère de sa fille Linda. Håkan von Enke est un ancien officier de marine à la retraite. Un beau jour, il disparaît sans laisser aucune trace. Son fils Hans et Linda demandent à Wallander de participer à l'enquête, il va se rendre à Stockholm rencontrer Louise la femme de Håkan pour essayer de comprendre la raison de cette disparition. Quelques jours plus tard, Louise disparaît à son tour...
Cette enquête qui va entraîner entraîner Wallander dans une histoire d'espionnage militaire, dans les profondeurs sous-marines et l'histoire politique de la Suède durant les années de la Guerre froide.

Dans ce livre, Wallander, devenu grand-père d'une petite Klara, prend conscience de son âge et se met à redouter la vieillesse avec ses maux et ses angoisses. Elle se manifeste chez lui par des troubles de la mémoire qui le terrifie. Au cours de son enquête, Kurt Wallander revient également sur son passé en faisant comme un bilan de ses années d'enquêtes dont il évoque quelques souvenirs. Il passe également le témoin à sa fille Linda qui travaille elle-aussi dans la police à Ystad. Wallander est un personnage si attachant, tellement humain, le lecteur se sent proche de lui.

Il est donc bien sûr triste de quitter Kurt Wallander avec cette neuvième enquête, mais pour moi, je ne le quitte pas tout à fait, puisque j'ai encore ses enquêtes n°3 à n°8 à découvrir et à savourer !

Extrait : (page 17)
L'année de ses cinquante-cinq ans, Kurt Wallander réalisa à sa propre surprise un rêve qu'il portait en lui depuis une éternité. Plus exactement depuis son divorce d'avec Mona, qui remontait à près de quinze ans maintenant. Ce rêve était de quitter l'appartement de Mariagatan, où les souvenirs douloureux étaient incrustés dans les murs, et de partir s'installer à la campagne. Chaque fois qu'il rentrait chez lui après une journée de travail plus ou moins désespérante, il se rappelait qu'il avait autrefois vécu là en famille. Il lui semblait que les meubles eux-mêmes le regardaient avec un air désolé et accusateur. 

Il ne se faisait pas à l'idée qu'il continuerait à vivre là jusqu'au jour où il serait tellement vieux qu'il ne pourrait plus se débrouiller seul. Il n'avait même pas atteint la soixantaine, mais le souvenir de la vieillesse solitaire de son père le hantait. S'il avait une certitude, c'était qu'il ne voulait pas reproduire le modèle. Il lui suffisait d'apercevoir son reflet dans la glace en se rasant le matin pour constater qu'il ressemblait de plus en plus au vieux alors que, dans sa jeunesse, il avait eu plutôt les traits de sa mère. L'âge venant, son père paraissait peu à peu prendre possession de lui, tel un coureur qui serait resté longtemps embusqué dans le peloton de queue et qui, à l'approche de la ligne d'arrivée, passait à l'attaque. 
L'image du monde qu'avait Wallander était assez simple. Il ne voulait pas être un solitaire aigri, ne voulait ni vieillir seul en recevant la visite de sa fille et de temps à autre, peut-être, celle d'un ancien collègue qui se serait soudain souvenu qu'il était encore en vie. Il n'entretenait aucun espoir édifiant comme quoi Autre Chose l'attendait après la traversée du fleuve noir. Il n'y avait rien là-bas que la nuit d'où il avait émergé à sa naissance. Jusqu'à ses cinquante ans, il avait entretenu une peur confuse de la mort, et du fait de devoir rester mort si longtemps, pour reprendre la formule qui résumait le mieux, pour lui, son sentiment. Il avait vu trop de cadavres au cours de sa vie et rien sur leurs visages muets ne suggérait qu'un Ciel eût recueilli leur âme. Comme tant d'autres policiers, il avait assisté à toutes les variantes imaginables de la mort. Juste après son cinquantième anniversaire - célébré au commissariat par l'achat d'un gâteau et par un fade discours de la chef de police de l'époque, Lisa Holgersson, qui s'était contentée d'aligner un chapelet de platitudes - il avait commencé à évoquer dans un carnet, acquis pour l'occasion, tous les morts qui avaient un jour ou l'autre croisé son chemin. Une activité macabre, dont lui-même ne comprenait pas du tout pourquoi elle l'attirait tant. Parvenu à son dixième suicidé - un toxicomane d'une quarantaine d'années affligé de tous les problèmes qui puissent exister -, il laissa tomber. Le type, qui s'appelait Welin, s'était pendu dans le grenier de son squat. Il s'était arrangé pour se rompre les vertèbres cervicales et éviter ainsi d'être étranglé à petit feu. Le légiste avait par la suite confié à Wallander que le stratagème avait réussi, et qu'il était mort sur le coup ; ainsi cet homme avait réussi à être pour lui-même un bourreau compétent. Après cela, Wallander avait abandonné les suicidés et consacré stupidement quelques heures à essayer de se rappeler plutôt les jeunes morts, y compris les enfants, qu'il avait vus au long de sa carrière. Mais il y renonça vite, c'était trop désagréable. Dans la foulée, il eut honte et brûla son carnet, comme s'il s'était laissé aller à un penchant pervers, un penchant défendu. Au fond, se dit-il, il était quelqu'un de foncièrement jovial. Il devait juste s'autoriser à cultiver un peu plus cet aspect de lui-même. 
Mais la mort l'avait toujours accompagné. Il lui était aussi arrivé de tuer. Par deux fois. Dans les deux cas, l'enquête interne avait conclu à la légitime défense. 
Ces deux êtres humains dont il avait causé la mort, c'était sa croix, tout à fait personnelle, qu'il portait en lui. S'il ne riait pas souvent, il le devait à ces expériences subies malgré lui. 

Un beau jour, cependant, il prit une décision cruciale. Il s'était rendu à Löderup pour discuter avec un agriculteur victime d'une agression, non loin de la maison où vivait autrefois son père. En revenant vers Ystad, il aperçut le panneau d'une agence immobilière signalant une maison à vendre au bout d'un chemin gravillonné. La décision surgit de nulle part. Il freina, fit demi-tour et emprunta le chemin. Le corps de ferme à colombages devait à l'origine former un quadrilatère tronqué, mais l'une des ailes avait disparu, peut-être suite à un incendie. Il en fit le tour. C'était une belle journée au début de l'automne. Il se rappellerait le vol d'oiseaux migrateurs qui était passé en ligne droite, plein sud, juste au-dessus de sa tête. A priori seul le toit avait besoin d'être refait. La vue qu'on avait depuis la maison était éblouissante. On devinait la mer au loin, peut-être même distinguait-il la forme d'un ferry arrivant de Pologne, en route vers Ystad. Cet après midi-là, au mois de septembre 2003, il entama en quelques instants une histoire d'amour avec la maison solitaire. 
Il remonta dans sa voiture et se rendit tout droit chez l'agent immobilier à Ystad. Le prix n'était pas si élevé qu'il ne puisse prendre un crédit dont il aurait les moyens de rembourser les traites. Dès le lendemain, il était de retour sur les lieux en compagnie de l'agent, un jeune homme qui s'exprimait d'une voix forcée et donnait l'impression d'être complètement ailleurs. La maison, expliqua-t-il à Wallander, appartenait à un jeune couple originaire de Stockholm qui avait choisi de s'installer en Scanie ; mais ils ne l'avaient même pas encore meublée qu'ils décidaient de se séparer. En parcourant les pièces vides, Wallander sentit qu'il n'y avait rien de caché dans ces murs-là qui fût de nature à l'effrayer. Et le plus important de tout, qui ressortait très clairement des explications de l'agent : il allait pouvoir emménager tout de suite. Le toit tiendrait le coup quelques années encore, avec un peu de chance. La seule urgence était de repeindre certaines pièces et de remplacer la baignoire ; voire d'acheter une gazinière neuve. Mais la chaudière avait quinze ans d'âge, la plomberie et l'électricité à peine davantage. Ça irait. 

Lu dans le cadre du Challenge Voisins, voisines
voisin_voisine
Suède

Lu dans le cadre du Challenge Viking Lit'
Viking_Lit

Livre 38/42 pour le Challenge du 6% littéraire
1pourcent2010

Déjà lu du même auteur :
tea_bag  Tea-Bag  les_chaussures_italiennes  Les chaussures italiennes

meurtriers_sans_visage_p Meurtriers sans visage Les_chiens_de_Riga_2 Les chiens de Riga

Publicité
Publicité
<< < 10 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 > >>
A propos de livres...
Publicité
A propos de livres...
Newsletter
55 abonnés
Albums Photos
Visiteurs
Depuis la création 1 376 839
Publicité