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A propos de livres...
polar
30 juillet 2015

Les nuits de Reykjavik - Arnaldur Indridason

les nuits de reykjavik Métailié - février 2015 - 260 pages

traduit de l'islandais par Eric Boury

Titre original : Reykjavíkurnætur, 2012

Quatrième de couverture : 
Erlendur le solitaire vient d'entrer dans la police, et les rues de Reykjavik dans lesquelles il patrouille de nuit sont agitées : accidents de la circulation, contrebande, vols, violences domestiques...
Des gamins trouvent en jouant dans un fossé le cadavre d'un clochard qu'il croisait régulièrement dans ses rondes. On conclut à l'accident et l'affaire est classée. Pourtant le destin de cet homme hante Erlendur et l'entraîne toujours plus loin dans les bas-fonds étranges et sombres de la ville. On découvre ici ce qui va faire l'essence de ce personnage taciturne : son intuition, son obstination à connaître la vérité, sa discrétion tenace pour résister aux pressions contre vents et marées, tout ce qui va séduire le commissaire Marion Briem.
En racontant la première affaire d'Erlendur, le policier que les lecteurs connaissent depuis les premiers livres de l'auteur, Arnaldur Indridason dépasse le thriller et écrit aussi un excellent roman contemporain sur la douleur et la nostalgie. De roman en roman, il perfectionne son écriture et la profondeur de son approche des hommes. Un livre remarquable.

Auteur : Arnaldur Indridason est né à Reykjavik en 1961. Diplômé en histoire, il est journaliste et critique de cinéma. Il est l'auteur de romans noirs couronnés de nombreux prix prestigieux, publiés dans 37 pays.

Mon avis : (lu en juillet 2015)
Après mon excursion en Islande avec la lecture de Temps glacières de Fred Vargas, j'ai eu envie de lire le dernier livre d'Arnaldur Indridason. Cet épisode concerne les débuts d'Erlendur dans la police, il n'est pas encore commissaire mais un simple policier qui
 patrouille la nuit dans les rues de Reykjavik.
Un clochard, Hannibal, a été retrouvé noyé dans les tourbières non loin d'un pipeline où il avait trouvé refuge. L'enquête est vite faite, elle conclue à un accident et l'affaire est classée. Mais la mort d'Hannibal obsède Erlendur. Lors de ses rondes de nuits, il l'avait croisé plusieurs fois et une fois, ce dernier avait même laissé entendre que quelqu'un avait tenté d'incendier la cave où il habitait. Erlendur ne veut pas croire à un simple accident, il décide officieusement de mener sa propre enquête... Le lecteur découvre non seulement cette première enquête d'Erlendur, mais aussi le quotidien de ces simples flics avec les accidents de circulation, les bagarres, les états d'ivresse et les violences conjugales...
Je ne me suis pas rendue compte tout de suite qu'Erlendur n'avait qu'une vingtaine d'année, il est déjà aux prises avec ses démons et ses fantômes... Son caractère et ses intuitions sont déjà plein de promesses. Ce voyage au coeur de Reykjavik est réussi malgré des nuits froides et sombres. 

Extrait : (début du livre)
Les garçons tapotèrent l'anorak vert qui tournoya à la surface de l'eau, puis décrivit un arc de cercle avant de couler. S'aidant de leurs bâtons, ils le firent remonter et furent saisis d'effroi.
Ils vivaient dans le quartier de Hvassaleiti et habitaient les immeubles bordant le boulevard Miklabraut jusqu'au terrain vague de Kringlumyri. La partie nord de ce périmètre était une friche envahie d'angélique et de rumex à longues feuilles. La partie sud était quant à elle une tourbière encore toute lacérée d'entailles d'où les gens de Reykjavik avaient extrait des tonnes de tourbe pour se chauffer pendant la Grande Guerre. Le conflit mondial ayant entraîné une pénurie de combustible en Islande, on avait drainé le marais, tracé des chemins de terre et entrepris la plus importante extraction de tourbe de l'histoire. Cette activité avait occupé des centaines d'ouvriers qui extrayaient le combustible et le faisaient sécher avant de le livrer par tombereaux en ville.
A la fin de la guerre, avec la reprise des importations de charbon et de pétrole, on avait cessé de se chauffer à la tourbe. Les fosses, désormais emplies d'eau brunâtre, étaient restées en l'état pendant longtemps. Quand la ville s'était étendue vers l'est au cours des années 60 et 70, avec la construction des quartiers de Hvassaleiti et de Storagerdi, ces anciennes tourbières étaient devenues le terrain de jeu des enfants. Ces derniers confectionnaient des radeaux, naviguaient sur les mares les plus vastes et faisaient du vélo sur les nombreuses pistes cyclables aménagées sur les collines alentour. Quand le froid de l'hiver arrivait, ces mares se prêtaient parfaitement à la pratique du patin à glace.
Les trois garçons venaient de fabriquer un radeau tout neuf avec des planches glanées sur un chantier, qu'ils avaient soigneusement clouées à deux poutres transversales et enveloppées de plastique isolant. Le plancher de l'embarcation était constitué de bois de coffrage. Ils se propulsaient grâce à de longs bâtons qu'ils enfonçaient dans l'eau opaque, jamais bien profonde. Ils portaient des bottes en caoutchouc pour garder les pieds au sec. Il y avait souvent des gamins qui tombaient et se retrouvaient trempés jusqu'aux os, grelottant, mais tremblant surtout à l'idée de rentrer chez eux comme des naufragés et de se faire gronder par leurs parents.
Ils avaient avancé en douceur vers le boulevard Kringlumyrarbraut, veillant à rie pas trop tanguer pour que l'eau ne vienne pas submerger leur embarcation et ne les fasse pas tomber dans la mare. C'était tout un art, semblable à celui du funambule, qui nécessitait à la fois adresse et esprit d'équipe, mais avant tout du sang-froid. S'ils s'installaient trop près des bords, ils risquaient de chavirer. Les trois copains avaient donc pris tout leur temps pour trouver le point d'équilibre avant de quitter la rive.
La navigation se déroulait parfaitement. Satisfaits de ce nouveau radeau qui voguait joliment, ils avaient effectué quelques allers-retours sur la partie la plus profonde. La circulation ronronnait sur le boulevard Miklabraut, au nord de l'ancienne tourbière dont la limite sud était traversée par des canalisations d'eau chaude qui remontaient vers les grands réservoirs posés au sommet de la colline d'Öskjuhlid. Ce lieu constituait pour eux un autre terrain de jeu où ils trouvaient parfois des petites balles dures de la taille d'un oeuf. Ils s'étaient interrogés sur leur nature. Le père d'un des gamins leur avait dit que c'étaient des balles de golf, ajoutant que certains venaient sans doute pratiquer ce sport dans la zone déserte aux abords du pipeline. Cet endroit baptisé Golfskalatjörn, entre la colline d'Oskjuhlid et la tourbière de Kringlumyri, avait autrefois été le golf de Reykjavik. Cela dit, il doutait que les balles que les gamins avaient trouvées datent de cette époque.

Challenge Voisins Voisines 2015
voisins voisines 2015

Islande

Déjà lu du même auteur :

la_cit__des_jarres La Cité des jarres  la_femme_en_vert La Femme en vert 

la_voix La Voix l_homme_du_lac L'Homme du lac hiver_arctique Hiver Arctique 

 hypothermie Hypothermie la_rivi_re_noire La rivière noire betty Bettý 

la_muraille_de_lave La muraille de lave etranges_rivages Etranges rivages 

91768788 La cité des jarres 95359847 Le Duel

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22 juillet 2015

Temps glaciaires – Fred Vargas

temps glacières Flammarion - mars 2015 - 497 pages

Quatrième de couverture :
"Adamsberg attrapa son téléphone, écarta une pile de dossiers et posa les pieds sur sa table, s'inclinant dans son fauteuil. Il avait à peine fermé l'oeil cette nuit, une de ses soeurs ayant contracté une pneumonie, dieu sait comment. La femme du 33 bis ? demanda-t-il. Veines ouvertes dans la baignoire ? Pourquoi tu m'emmerdes avec ça à 9 heures du matin, Bourlin ? D'après les rapports internes, il s'agit d'un suicide avéré. Tu as des doutes ? Adamsberg aimait bien le commissaire Bourlin. Grand mangeur grand fumeur grand buveur, en éruption perpétuelle, vivant à plein régime en rasant les gouffres, dur comme pierre et bouclé comme un jeune agneau, c'était un résistant à respecter, qui serait encore à son poste à cent ans. Le juge Vermillon, le nouveau magistrat zélé, est sur moi comme une tique, dit Bourlin. Tu sais ce que ça fait, les tiques ?".

Auteur : Fred Vargas est née en 1957, il s'agit là de son nom de plume pour l'écriture de romans policiers. Passionnée d'archéologie, pendant toute sa scolarité, elle ne cesse d'effectuer des fouilles. Elle suit des études d'histoire, s'intéresse premièrement à la Préhistoire puis choisit d'orienter son parcourt sur le Moyen-Âge. Fred Vargas a quasiment créé un genre romanesque : le Rompol. Avec 13 romans à son actif, tous parus aux Éditions Viviane Hamy, elle a été primée à plusieurs reprises notamment pour Pars vite et reviens tard qui se voit récompensé du Grand Prix des Lectrices de ELLE en 2002, du Prix des libraires et du Deutscher Krimipreis (Allemagne). Fred Vargas a su créer des personnages étonnants et attachants. Le plus célèbre des commissaires vargassiens, Jean-Baptiste Adamsberg, et son acolyte, Adrien Danglard, constituent des personnages récurrents des ouvrages de l'auteur. Les livres de Fred Vargas sont traduits dans une quarantaine de pays et sont adaptés au cinéma ou la télévision.

Mon avis : (lu en juillet 2015)
Étant une inconditionnelle de Fred Vargas, lorsque j’ai appris qu’elle sortait un nouveau livre, après plus de quatre années d'absence, j’étais vraiment impatiente de le découvrir. J’ai eu l’occasion de voir l’émission de La Grande Librairie où Fred Vargas était invitée et la promotion sur son livre a été plutôt bizarre... J'avais donc un peu peur de découvrir cette nouvelle aventure d'Adamsberg. J'avais tort, car cette enquête difficile d'Adamsberg et son équipe est très réussie.
Cela commence par plusieurs morts maquillés en suicide avec la présence d'un mystérieux dessin laissé à côté de chaque victime par un tueur en série... Adamsberg explore alors deux pistes : les premières victimes ont participé, dix ans auparavant, à un voyage en Islande où ils ont été prisonniers de la brume sur une petite île pendant plusieurs jours, elles sont également membres de la société des "amis de Robespierre" et participent à des reconstitutions en costumes des séances des assemblées pendant l'époque de la Terreur. Adamsberg hésite, son équipe est partagée et un soupçon de rébellion apparaît... Tout est là pour captiver et pour tenir en haleine le lecteur !

Extrait : (début du livre)
Plus que vingt mètres, vingt petits mètres à parcourir avant d'atteindre la boîte aux lettres, c'était plus difficile que prévu. C'est ridicule, se dit-elle, il n'existe pas de petits mètres ou de grands mètres. Il y a des mètres et voilà tout. Il est curieux qu'aux portes de la mort, et depuis cette place éminente, on persiste à songer à de futiles âneries, alors qu'on suppose qu'on énoncera quelque formule d'importance, qui s'inscrira au fer rouge dans les annales de la sagesse de l'humanité. Formule qui sera colportée ensuite, de-ci de-là : « Savez-vous quelles furent les dernières paroles d'Alice Gauthier ? »
Si elle n'avait rien à déclarer de mémorable, elle avait néanmoins un message décisif à porter, qui s'inscrirait dans les annales ignobles de l'humanité, infiniment plus vastes que celles de la sagesse. Elle regarda la lettre qui tremblait dans sa main.
Allons, seize petits mètres. Depuis la porte de son immeuble, Noémie la surveillait, prête à intervenir au premier vacillement. Noémie avait tout tenté pour empêcher sa patiente de s'aventurer seule dans la rue, mais le très impérieux caractère d'Alice Gauthier l'avait vaincue.
— Pour que vous lisiez l'adresse par-dessus mon épaule ?
Noémie avait été offensée, ce n'était pas son genre.
— C'est le genre de tout le monde, Noémie. Un de mes amis – un vieux truand par ailleurs –, me disait toujours : « Si tu veux garder un secret, eh bien garde-le. » Moi, j'en ai gardé un longtemps, mais il m'embarrasserait pour grimper au ciel. Encore que, même ainsi, mon ciel n'est pas gagné. Débarrassez-moi le plancher, Noémie, et laissez-moi aller.

Avance bon sang, Alice, ou Noémie va courir vers toi. Elle s'appuya sur son déambulateur, se poussa sur neuf mètres, huit grands mètres au moins. Dépasser la pharmacie, puis la laverie, puis la banque, et elle y serait, à la petite boîte postale jaune. Alors qu'elle commençait à sourire de son succès proche, sa vue se brouilla et elle lâcha prise, s'effondrant aux pieds d'une femme en rouge qui la reçut dans ses bras en poussant un cri. Son sac se répandit au sol, la lettre s'échappa de sa main.
La pharmacienne accourut, interrogeant, palpant, s'activant, tandis que la femme en rouge rangeait dans le sac à main les objets éparpillés, puis le déposait à ses côtés. Son rôle éphémère s'achevait déjà, les secours étaient en route, elle n'avait plus rien à faire là, elle se remit debout et recula. Elle aurait aimé se rendre encore utile, exister un peu plus sur la scène de l'accident, donner au moins son nom aux pompiers qui débarquaient en force, mais non, la pharmacienne avait tout pris en main, avec l'aide d'une femme affolée qui disait être la garde-malade : elle criait, pleurait un peu, Mme Gauthier avait absolument refusé qu'elle l'accompagne, elle habitait à un jet de pierre, au 33 bis, elle n'avait commis aucune négligence. On chargeait la femme sur un brancard. Allons ma fille, cela ne te regarde plus.
Si, pensa-t-elle en reprenant son chemin, si, elle avait vraiment fait quelque chose. En retenant la femme dans sa chute, elle avait évité que sa tête ne frappe le trottoir. Peut-être lui avait-elle sauvé la vie, qui pouvait prétendre le contraire ?

Déjà lu du même auteur :

Ceux_qui_vont_mourir_te_saluent Ceux qui vont mourir te saluent l_homme_aux_cercles_bleus L'Homme aux cercles bleus

Debout_les_mort Debout les morts Un_peu_plus_loin_sur_la_droite Un peu plus loin sur la droite

sans_feu_ni_lieu Sans feu ni lieu l_homme___l_envers L'Homme à l'envers

Pars_vite_et_reviens_tard Pars vite et reviens tard sous_les_vents_de_neptune  Sous les vents de Neptune

Dans_les_bois__ternels Dans les bois éternels un_lieu_incertain Un lieu incertain

les_quatre_fleuves Les Quatre fleuves (BD) vargas L'Armée furieuse 

 

 

27 juin 2015

Les nuits de la Saint-Jean - Viveca Sten

Lu en partenariat avec Albin Michel

9782226317148g Albin Michel - avril 2015 - 368 pages

traduit du suédois par Rémi Cassaigne

Titre original : I grunden utan skuld

Quatrième de couverture : 
L’angoisse monte à Sandhamn : une  jeune fille a disparu au cours de la nuit. Sous une pluie battante d’automne, l’inspecteur Thomas Andreasson et ses collègues ratissent l’île, en vain : Lina Rosén reste introuvable et l’enquête conclut à une noyade accidentelle.
Quelques mois plus tard, Nora Linde décide de prendre quelques jours de vacances au cœur de l’hiver à Sandhamn avec ses deux petits garçons. Son mari la trompe et elle a besoin du calme de l’île pour réfléchir. Mais, en jouant dans la forêt, Adam et Simon font une macabre découverte : des restes humains enfouis dans un sac sous la neige. Est-il possible que ce soit le cadavre de Lina ? Et quelle est cette ombre, tapie dans la nuit, sous les fenêtres des Rosén ? Pourquoi ?
Malgré l’absence de pistes, Thomas et son amie Nora ont un étrange pressentiment : l’assassin de Lina rôde encore et n’en a pas fini avec sa sinistre mission.
C’est avec cette nouvelle enquête de l’inspecteur Thomas Andreasson et de Nora Linde que Viveca Sten s’est imposée comme la Nº1 des ventes en Suède.

Auteur : Viveca Sten vit près de Stockholm avec son mari et leurs trois enfants. Après une brillante carrière juridique, elle s'est lancée dans l'écriture. Sa série, qui met en scène l’inspecteur Andreasson et l’avocate Nora Linde sur l’île de Sandhamn, compte déjà 5 tomes. Succès phénoménal en Suède et dans le monde, elle est publiée dans une quinzaine de pays et vient d’être adaptée en série pour la télévision. Diffusées en France sur Arte sous le nom Meurtres à Sandhamn, les deux premières saisons ont atteint plus d’un million de téléspectateurs. Comme ses héros, l'auteur possède une vieille maison familiale sur l'île de Sandhamn et y a passé tous les étés de sa jeunesse.

Mon avis : (lu en juin 2015)
J'ai passé un très bon moment en découvrant cette nouvelle aventure de  l’inspecteur Thomas Andreasson et de Nora Linde.
Durant l'automne, une jeune fille disparaît sur l'île de Sandhamn. L'inspecteur Thomas Andreasson participe aux recherches mais sans succès. Quelques mois plus tard, Nora Linda, l'amie d'enfance de Thomas,vient se reposer sur l'île avec ses deux fils. Et lors d'une promenade en forêt, les enfants découvrent un morceau du corps de la jeune fille, qui a été assassinée... En parallèle, le lecteur est plongé dans le passé de l'île à travers un carnet intime trouvé dans la maison léguée par tante Signe.
L'intrigue est bien mené et à côté de l'enquête le lecteur découvre le quotidien de l'île et de nos deux personnages principaux de la série.

Au fil des différents tomes de la série, je me sens de plus en plus proche de Nora et Thomas et j'attends avec impatience la suite de leurs aventures.

Merci Arthur et les éditions Albin Michel pour ce partenariat.

Extrait : (début du livre)
MARIANNE S’ARRÊTA dans le vestibule. Les chaussures étaient en vrac. Machinalement, elle se pencha pour les ranger par paires, bien alignées. Elle découvrit alors qu’il manquait les Timberland claires de Lina.
Leur absence l’effraya. Pourquoi Lina n’était-elle pas rentrée cette nuit ?
Pensive, elle ramassa un bonnet lancé dans un coin. Sa fille laissait traîner ses affaires partout, en désordre. Elle aurait au moins pu prévenir qu’elle ne dormirait pas à la maison.
Et s’il lui était arrivé quelque chose ?
Glacée par cette idée, Marianne retint son souffle.
Et si elle s’était blessée en tombant de vélo ? En cette saison, un accident était vite arrivé. Les étroits chemins de gravier étaient glissants en automne. Elle avait dit à Lina d’être prudente quand elle était partie voir les Hammarsten à Trouville.
Malgré elle, l’inquiétude l’envahit. Le cœur lui manquait, elle avait des palpitations, tout se mettait à tourner devant ses yeux.
Du calme. Respire. 

Les jambes en coton, elle gagna l’agréable cuisine rustique et se laissa tomber sur une chaise. L’été précédent, elle avait repeint les chaises au soleil, près du ponton. Lina l’avait aidée. Elle avait taché son bikini, ça les avait amusées.
Marianne alla prendre un verre dans le placard au-dessus de l’évier pour boire un peu d’eau. Sa respiration se fit plus régulière. Lina devait être restée chez les Hammarsten. Forcément. Où serait-elle passée, sinon ?
Le ronronnement familier de la cafetière sur le plan de travail la rassura. Elle allait boire une tasse de café, bien tranquillement. Après, il serait dans les huit heures, et Hanna Hammarsten téléphonerait pour confirmer que Lina avait passé la nuit chez eux sans prévenir.
Comme font les filles de son âge.
Et elles en riraient ensemble de bon cœur, comme deux mamans complices à propos du comportement prévisible de leurs ados.
Elle aurait un petit sourire gêné de s’être ainsi rongé les sangs, et Lina trouverait qu’elle la couvait comme une mère poule.
« Arrête de t’inquiéter, maman. Change de disque. Je ne suis plus un bébé, tu vois ? »
Hanna la comprendrait très bien. Toutes les mères s’inquiétaient. Surtout quand elles avaient des filles. Cela faisait partie du jeu.
Elle pensait en avoir fini avec les veilles et les nuits agitées maintenant que Lina était grande. Quelle erreur ! Aujourd’hui, quand elle n’arrivait pas à s’endormir avant le retour de Lina, elle regrettait l’époque où elle était petite, où ce qui pouvait lui arriver de pire, c’était de se réveiller après avoir fait un cauchemar. On y remédiait par un câlin et éventuellement un biberon de bouillie. Si cela ne suffisait pas, restait à la porter dans le grand lit, où elle ne tardait pas à se rendormir. On y gagnait des petits coups de pieds dans le dos toute la nuit, mais ce n’était rien comparé à l’anxiété qui la rongeait ces dernières années.
Le café était prêt.

Elle regarda à nouveau l’heure. Huit heures moins le quart. Elle attendrait huit heures pour appeler. Pas une minute de plus. Ça restait assez matinal, mais elle ne serait pas capable d’attendre davantage.
Sa tasse favorite, un gros mug en porcelaine bleue, l’attendait sur le devant du placard. Le seul fait de le voir la rassura. Tout était comme d’habitude. Deux morceaux de sucre, un bon nuage de lait, et son café était prêt. Fort et sucré, comme elle l’aimait. Voilà, ça allait beaucoup mieux.

Déjà lu du même auteur :

la_reine_de_la_baltique La Reine de la Baltique 9782226259776g Du sang sur la Baltique

Challenge Petit Bac 2015 
98438537_o
Prénom ()

Challenge Voisins Voisines 2015
voisins voisines 2015
Suède

Challenge Trillers et Polars
2014-2015
 
100142514
catégorie "Même pas peur" :  20/25 

20 mai 2015

Les petits vieux d'Helsinki - Minna Lindgren

Lu en partenariat avec Calmann-Levy

les petits vieux d'Helsinki Calmann-Levy - avril 2015 - 352 pages

traduit du finnois par Martin Carayol

Titre original : Kuolema Ehtoolehdossa, 2013

Quatrième de couverture : 
En plein coeur d’Helsinki, venez découvrir la résidence du Bois du Couchant…
D’apparence charmante, il ne fait en réalité pas si bon finir ses jours dans cette maison de retraite où le drame ne cesse de frapper.
Olavi, l’ancien combattant, est convaincu que son infirmier a abusé de lui sous la douche ; son ami Reino, prote et grand séducteur, se voit confiné au service de démence lorsqu’il dénonce le scandale en pleine partie de cartes ; et Tero, le jeune cuistot, est retrouvé pendu. Pour Siiri et Irma, il n’y a aucun doute : quelque chose de louche se profile au sein de l’administration
de la résidence. C’est alors que les deux amies se décident à enquêter, épaulées par un chauffeur de taxi Hells Angels qui connaissait bien Tero.
Entre tension artérielle, pertes de mémoire, surdité et déambulateur, l’enquête va s’avérer ardue, d’autant plus qu’Irma est soudainement internée de force dans la section fermée de la résidence…
Mais pour Siiri, pas question de jeter l’éponge !

Auteur : Née en Finlande en 1963, Minna Lindgren est journaliste freelance et chroniqueuse, écrivain. Elle a écrit des ouvrages de non-fiction sur la musique classique et a obtenu le prestigieux Bonnier Journalism Prize pour son article sur le décès de son père.
Minna Lindgren est reconnue dans son travail pour ses écrits fantasques sur des thèmes aussi variés que l’opéra ou la mort.
Avant d’écrire, elle a travaillé à la radio-télévision publique nationale de Finlande. Les deux premiers volets de sa trilogie des Petits vieux d’Helsinki ont connu un vif succès dans son pays et le dernier tome paraîtra en 2015 en Finlande.

Mon avis : (lu en mai 2015)
Lorsque j'ai reçu ce livre et la proposition de rencontre avec le traducteur à l'Institut Finlandais, j'ai toute suite vu une analogie avec le livre Le vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire... Un titre et une couverture assez proche... Ici ce n'est pas la Suède, mais la Finlande, "Les vieux" sont en majorité des "vieilles", et alors que le vieux fuyait sa maison de retraite, ici, la maison de retraite du Bois du Couchant est au centre du livre.
Siiri, Irma et Anna-Lisa sont trois nonagénaires de cette résidence située au coeur d'Helsinki, elles sont très différentes mais également très copines. Lorsque le jeune cuisinier des lieux va être trouvé pendu, nos trois amies sont bien décidées à découvrir ce qui se trame au Bois du Couchant...
Ce roman n'est pas vraiment un roman policier car nos enquêtrices sont assez farfelues et n'ont plus une très bonne mémoire... Cette histoire est surtout un prétexte pour découvrir Helsinki à l'occasion des balades en tram de Siiri, pour écouter les souvenirs de ces nonagénaires énergiques et loufoques, les voir face au monde moderne. L'auteur a voulu dénoncer les problèmes de la prise en charge des personnes âgées par la société finlandaise. Car il se passe de drôles de choses au Bois du Couchant...
Le rythme du livre est plutôt lent, parfois un peu brouillon cela reflète bien l'état d'esprit de nos héroïnes qui utilisent canne et déambulateur et dont les pertes de mémoires brouillent un peu l'évolution et la résolution de leur enquête.
J'ai passé un bon moment à suivre les péripéties de nos petits vieux d'Helsinki qui savent profiter de la vie malgré leur grand âge...
Ce livre est le premier d'une trilogie, le second tome doit paraître à l'automne prochain.

Extrait : (début du livre)
Chaque matin à son réveil, Siiri Kettunen constatait qu'elle n'était toujours pas morte. Puis elle se levait, se lavait, s'habillait et grignotait son petit déjeuner. Cela se faisait lentement, elle avait tout son temps. Elle lisait le journal avec soin et écoutait les matinales à la radio, de façon à sentir qu'elle faisait bien partie du monde. Vers 11 heures, elle partait souvent pour une balade en tamway, mais ce jour-là elle n'en eut pas la force.
Dans l'espace de convivialité de la résidence du Bois du Couchant, les lampes puissantes rappelaient l'atmosphère d'une salle d'attente chez le dentiste. Sur les canapés, quelques vieillards assoupis attendaient le déjeuner. Dans un coin, l'ambassadeur, Anna-Liisa et Irma jouaient à la canasta sur une table de jeu couverte de feutrine. L'ambassadeur était plongé dans ses cartes, Anna-Liisa commentait tous les coups et Irma semblait frustrée de voir la partie avancer si lentement. Puis elle aperçut Siiri, et ses yeux s'éclairèrent. 

 

 

Challenge Petit Bac 2015 
98438537_o
Géographie (4)

Challenge Voisins Voisines 2015
voisins voisines 2015
Finlande

Challenge Trillers et Polars
2014-2015
 
100142514
catégorie "Même pas peur" :  19/25 

29 avril 2015

Le Syndrome du pire - Christoffer Carlsson

 Lu en partenariat avec Babelio et les éditions Ombres noires

le syndrome du pire Ombres noires - mars 2015 - 352 pages

traduit du suédois par Carine Bruy

Titre original : Den Osynlige Mannen Från Salem, 2013

Quatrième de couverture :
Stockholm, fin de l'été 2013. Une jeune droguée, Rebecca Salomonsson, est abattue dans un foyer pour femmes. Trois étages plus haut, dans son appartement, Leo Junker est réveillé par les lumières des voitures de police. Flic, il travaille aux affaires internes, la division la plus mal vue, celle des "rats" qui enquêtent sur leurs collègues. Suspendu depuis "L'affaire Gotland", au cours de laquelle il a commis une erreur qui a coûté la vie à un policier, rongé par la culpabilité, Leo s'étiole dans son nouveau job. Alcool, errances nocturnes, sa vie ressemble à un lent naufrage. Mais, dans le meurtre Salomonsson un indice le frappe particulièrement, qui fait ressurgir à sa mémoire des personnages troubles de son adolescence: Julia et John Grimberg. De plus, des messages énigmatiques arrivent à son portable. Et pourquoi a-t-il le sentiment diffus d'être suivi? Quand la réalité se délite, à quoi peut-on s'attendre, sinon au pire? 
Déjà traduit dans plus de 16 pays, Le Syndrome du pire a été élu roman policier de l'année par l'Académie des auteurs de roman policier suédois. Ce prix a déjà récompensé de grands noms du polar tels que Stieg Larsson, Henning Mankell, Johan Theorin ou Åke Edwardson.

Auteur : Christoffer Carlsson est né en 1986. Titulaire d'un doctorat en criminologie, il enseigne cette discipline. En 2012, l'European Society of Criminology lui a décerné le Young Criminologist Award pour son travail de recherche sur la rédemption des anciens criminels. 
Le Syndrome du pire a été élu roman policier de l'année par l'Académie des auteurs de romans policiers suédois.

Mon avis : (lu en avril 2015)
Leo Junker fait partie de la police, il est acuellement suspendu après "L'affaire Gotland" qui s'est terminé en fiasco. Depuis, il déprime et se réfugie dans l'alcool et les nuits blanches. Et voilà qu'une jeune droguée est assassinée dans le foyer pour femmes situé au 1er étage de l'immeuble de Leo Junker. Réveillé par les lumières des gyrophares, il ne peut pas s'empêcher d'aller voir la scène de crime et des souvenirs de son enfance ressurgissent...

Dans ce roman policier, le lecteur va découvrir l'enquête présente mais également les souvenirs d'enfance de Leo et les errances présentes de Leo.
La construction de ce roman policier suédois est originale mais je n'ai pas été captivée par ce livre, Leo Junker est attachant, mais je devais en attendre trop à cause de la phrase présente sur la couverture  « Élu roman policier de l’année en Suède »...

Merci Babelio et les éditions Ombres noires pour ce partenariat.

Extrait : (début du livre)
À mon réveil, il fait noir et j’ai la certitude que quelque chose est arrivé. Du coin de l’œil, je vois un flash. De l’autre côté de la rue, la façade du bâtiment est frappée par des lumières bleues aveuglantes. Je me coule hors de mon lit, gagne la kitchenette, bois un verre d’eau et glisse un comprimé de Serax sur ma langue. J’ai rêvé de Viktor et de Sam.
Le verre vide à la main, je me dirige vers le balcon et ouvre la porte-fenêtre. Le vent, chaud mais humide, me fait frissonner et je découvre l’attroupement en contrebas. Une ambulance et deux voitures de police sont garées devant l’entrée. Un agent tend un ruban bleu et blanc entre deux réverbères. Je perçois des voix étouffées, le crachotement d’une radio de police et le clignotement silencieux des gyrophares. Et au-delà, la rumeur d’un million d’habitants, le son d’une capitale provisoirement assoupie.

Je retourne à l’intérieur, enfile un jean, boutonne une chemise et passe la main dans mes cheveux. Sur le palier : un ventilateur qui tourne quelque part derrière le mur, le frou-frou discret de vêtements, une voix basse qui marmonne. Quelqu’un a pressé le bouton d’appel de l’antique ascenseur et la cabine amorce sa descente dans un grincement métallique, qui fait vibrer toute la cage.
— On ne peut pas mettre cette saloperie d’ascenseur hors-service ? siffle quelqu’un.
La cabine couvre le bruit de mes pas tandis que je descends l’escalier qui s’enroule autour de la petite cage. Je m’arrête au deuxième étage et attends. Sous mes pieds, au premier, quelque chose s’est produit. Et ce n’est pas la première fois.
Il y a plusieurs années, une association caritative, aidée par la donation d’une personne qui ne savait plus quoi faire de son argent, a acheté le vaste appartement du premier étage. Le groupe a transformé les lieux en un centre d’hébergement pour les marginaux et l’a baptisé Chapmansgården. Ils sont inspectés au moins une fois par semaine, en règle générale par des bureaucrates blasés envoyés par les services sociaux, mais souvent aussi par la police. Le centre est géré par une ancienne assistante sociale, Matilda ou Martina, je ne me souviens plus de son nom. Elle est âgée, mais inspire davantage le respect que la plupart des officiers de police.
En jetant un coup d’œil par-dessus la rampe, je constate que la porte en bois du centre est ouverte. Les lumières y sont allumées. La voix agacée d’un homme est tempérée par celle, plus douce, d’une femme. La cabine passe devant moi, elle me dissimule aux regards tandis que je la suis jusqu’au premier étage. Les deux agents en faction se figent en m’apercevant. Ils sont jeunes, bien plus jeunes que moi. L’ascenseur s’immobilise au rez-de-chaussée et soudain, tout devient très silencieux.
— Fais attention où tu marches, dit la femme à son collègue.
— Installe le périmètre, répond-il en lui tendant le rouleau de ruban bleu et blanc, ce qui lui vaut un regard noir.
— Toi, tu t’en charges, moi, je m’occupe du type.
Elle a retiré sa casquette et la tient à la main. Ses cheveux sont relevés en queue-de-cheval et on dirait qu’elle a subi un lifting. L’homme a une mâchoire carrée et un regard doux. J’ai le sentiment qu’ils sont tous les deux secoués parce qu’ils n’arrêtent pas de consulter leur montre. Sur les épaulettes de leur uniforme, il n’y a qu’une seule couronne dorée, pas de galons. De simples gardiens de la paix donc.
Il se dirige vers la cage d’escalier avec le ruban. Je m’efforce de sourire à la femme.
— Écoutez, dit-elle, il s’est passé quelque chose et j’aimerais que vous ne quittiez pas le bâtiment.
— Je ne sors pas.
— Que faites-vous ici alors ?
Je tourne les yeux vers la large fenêtre du palier, qui donne sur l’immeuble d’en face. Il est encore baigné de lumière bleue.
— Je me suis réveillé.
— Vous avez été réveillé par les gyrophares ?
J’acquiesce, sans vraiment savoir ce qu’elle pense. Elle paraît surprise. Je détecte une odeur âcre et ce n’est qu’à cet instant que je remarque à quel point elle est pâle et que ses yeux sont injectés de sang. Elle vient de vomir.
Elle incline la tête très légèrement, presque imperceptiblement, et fronce les sourcils.
— Nous sommes-nous déjà rencontrés ?
— Je ne pense pas.
— En êtes-vous sûr ?
— Je suis policier, je tente, mais… non, je ne pense pas que nous nous soyons déjà rencontrés.

 

Challenge Voisins Voisines 2015
voisins voisines 2015
Suède

 

Challenge Trillers et Polars
2014-2015
 
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catégorie "Même pas peur" :  18/25 

Challenge Petit Bac 2015 
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Mort (3)

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22 mars 2015

Les loups blessés - Christophe Molmy

Lu en partenariat avec les Editions de la Martinière 

les loups blessés Editions de la Martinière - mars 2015 - 334 pages

Quatrième de couverture :
Ce sont deux loups blessés. L’un par une vie de braquages, d’extorsions, d’années passées en prison : Matteo Astolfi, un criminel de haut rang. L’autre par son métier, la pression de sa hiérarchie, les trahisons de ses indics : Renan Pessac, commissaire à Paris. Leurs deux destins vont se percuter. De braquages en filatures, ils vont se chercher, se traquer. Chercher tous deux à échapper à leur destin, pour connaître l’impossible rédemption. Jusqu’au grand chaos.

Auteur : Christophe Molmy est chef de la Brigade de Recherche et d’Intervention (BRI), dite aussi Brigade de l’antigang, à Paris. Spécialiste du grand banditisme, Il a commencé sa carrière dans la Police Judiciaire à Marseille, et a longtemps travaillé à l’Office Central pour la Répression de Banditisme (OCRB). Il a 45 ans et c’est son premier roman.

Mon avis : (lu en mars 2015)
Tout commence avec le braquage de deux convoyeurs de fonds qui tourne mal, les deux convoyeurs ayant été froidement tués pour un butin de seulement soixante mille euros. Le lecteur sait que les coupables sont deux frères, Imed et Nordine Belkiche, connus plutôt dans le trafic de drogue, et le jeune Doumé Astolfi, Corse et frère de Matteo, un caïd du grand banditisme.
Du côté de la police, il y a le commissaire Renan Pessac est chef du Service central de répression du banditisme et l'équipe de Philippe Lelouedec. Pour obtenir des informations, Renan Pessac est en relation avec deux indics : Tania, une prostituée, devenue une amie et le Grand.
Grâce à l'auteur, qui est lui-même dans la police, le lecteur découvre le dessous de la profession, les méthodes de filatures, d'écoute, de renseignement, le vocabulaire... C'est plutôt intéressant et instructif.
Nous allons suivre durant tout le roman policier, le jeu du chat et de la souris entre bandits et policiers.
J'ai trouvé quelques longueurs à l'intrigue pas si palpitante que cela. Mais j'ai trouvé ce livre très bien documenté et donc très intéressant pour connaître le fonctionnement des indics et d'une enquête policière.
Merci Anaïs et les Editions de la Martinière pour cette découverte.

Extrait : (début du livre)
À l’abri dans un hall d’immeuble, Matteo Astolfi cherchait à reprendre son souffle, plié en deux, dos au mur, les mains posées sur ses genoux. Les muscles de ses cuisses étaient en feu et sa gorge si sèche qu’il chercha un peu de salive pour parvenir à déglutir. Après la fusillade, le calme qui régnait là avait quelque chose d’irréel. Dehors, le bruissement de la rue ressemblait à une brise intemporelle, comme une étrange mélopée chargée de l’inquiétude des passants. Au milieu du trafic, qui reprenait lentement, il entendait leurs murmures tandis qu’ils cherchaient à glaner des détails sur l’événement qui venait de secouer le quartier. Les sens aux aguets, il épiait le moindre mouvement, et chaque son résonnait comme une menace. Derrière la vitre opaque de la porte, les silhouettes, pareilles à celles d’un théâtre d’ombres, dansaient sur le trottoir. Matteo s’efforça au calme pour retrouver ses esprits et tenta de se redresser. Une pointe de feu fusilla son ventre, le renvoyant dos au mur. Tout était allé si vite, qu’il s’était mis à courir sans réfléchir, sans même réaliser qu’il était blessé, avant que sa chair meurtrie ne commence à diffuser une douleur aiguë dans tout son corps. Maintenant, son abdomen le lançait atrocement. Il souffla à petits coups et tenta de se concentrer sur le décor de ce film noir dont il était devenu l’acteur. Les murs sales et décatis qui l’entouraient lui arrachèrent une grimace de dégoût, il s’en détourna en fermant les yeux. Ici, tout suintait la misère et la crasse. Tout n’était que laideur. Cette bâtisse ressemblait à son monde, finalement, et tout était sa faute. Ses jambes faiblirent et il glissa lentement au sol. Il serra les dents pour ne pas se mettre à hurler. Son organisme ne secrétait plus d’endorphine, une souffrance atroce lui déchirait les entrailles à chaque respiration. La peau de ses mains avait pris une teinte blafarde qui l’effrayait. Prudemment, il glissa une main sous son teeshirt pour chercher la plaie du bout des doigts, mais la douleur le secoua de tremblements. Un goût métallique et salé inonda sa bouche, il cracha un peu de sang, considérant, vaguement hébété, la tâche brune qu’il venait de lâcher sur les carreaux de ciment défraîchis. Ses jambes étaient engourdies par l’humidité qui montait du sol. Quand tous ses membres furent paralysés par le froid, il cessa de lutter et se sentit flotter jusqu’à ce que la lumière s’éteigne. Plongé dans le noir, plus rien ne pouvait l’empêcher de se laisser couler. La pièce se mit à tourner autour de lui et il s’évanouit, enfin. Lorsqu’il reprit connaissance, le mur jaune pisseux était toujours là, en face de lui. Rien n’avait changé, ni ici ni dehors, et il sut qu’il allait devoir faire un choix. Il pouvait encore se battre, lutter pour se remettre debout et s’enfuir. Ou bien abandonner et mourir ici.

 Challenge Petit Bac 2015 
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Challenge Trillers et Polars
2014-2015
 
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catégorie "Même pas peur" :  16/25 

28 février 2015

Six fourmis blanches - Sandrine Collette

Lu en partenariat avec les éditions Denoël

six fourmis blanches Denoël - janvier 2015 - 288 pages

Quatrième de couverture :
Le mal rôde depuis toujours dans ces montagnes maudites. Parviendront-ils à lui échapper ? 
Dressé sur un sommet aride et glacé, un homme à la haute stature s’apprête pour la cérémonie du sacrifice. Très loin au-dessous de lui, le village entier retient son souffle en le contemplant. 
À des kilomètres de là, partie pour trois jours de trek intense, Lou contemple les silhouettes qui marchent devant elle, ployées par l’effort. Leur cordée a l’air si fragile dans ce paysage vertigineux. On dirait six fourmis blanches… 
Lou l’ignore encore, mais dès demain ils ne seront plus que cinq. Égarés dans une effroyable tempête, terrifiés par la mort de leur compagnon, c’est pour leur propre survie qu’ils vont devoir lutter.

Auteur : Sandrine Collette est née en 1970. Elle partage sa vie entre l'université de Nanterre et ses chevaux dans le Morvan. Six fourmis blanches est son troisième roman.

Mon avis : (lu en février 2015)
C'est mon premier livre de Sandrine Collette, une auteur qui est en train de se faire un nom dans le monde du roman policier et que j'avais très envie de découvrir. La rencontre a été réussie. Le lecteur suit en parallèle deux histoires différentes. Celle de Mathias, il a pris la suite de son grand-père et devenu le « sacrificateur » de la vallée. Il sait éloigner les mauvais esprits de la montagne. De nombreux paysans font appellent à ses dons.
Celle de Lou, Elias, son compagnon, et quatre autres randonneurs qui s'apprêtent à faire une randonnée de trois jours dans les montagnes d'Albanie accompagnés de leur guide Vigan. 
Comme on peut s'y attendre les deux histoires vont se rejoindre... 
J'ai beaucoup aimé les descriptions de cette nature sauvage et parfois hostile, l'atmosphère qui devient de plus en plus angoissante, impossible de lâcher son livre avant la fin... Un roman policier palpitant, inquiétant et glaçant (au propre comme au figuré) vraiment très réussi et je poursuivrai avec cette auteur !

Merci Célia et les éditions Denoël 

Extrait : (début du livre)
Le mal suinte de ce pays comme l’eau des murs de nos maisons tout le long de l’hiver. Enraciné en nous, telle une sangsue fossilisée sur une pierre. C’est ce que disait mon grand-père, et avant lui son père, et le père de son père : depuis toujours ces montagnes sont maudites. Qui se souvient que quelque chose de beau y ait été conçu, s’y soit développé? Que de contreparties à notre présence ici, que de compromis pour nous donner, parfois, le sentiment de bien vivre. Les vieux répètent à l’envi que les mauvais esprits ont choisi cet endroit pour venir mourir; qu’ils y agonisent des années durant, crachant des imprécations sur nos roches et nos forêts malingres. Nous sommes de trop dans ces vallées; nous en payons le prix fort. Nous aurions dû abandonner ces terres où nous n’avons jamais été les bienvenus. Si seulement nous étions raisonnables. Mais nous sommes faits de la même caillasse, refusant de céder une once de terrain, acharnés à faire pousser les tubercules qui nous permettent de tenir amaigris jusqu’au printemps suivant. Heureux d’un rien, aussi. Nous observons stupéfaits les gens des villes étrangères investir notre région pendant les vacances. Ils sont rares encore; mais leur nombre augmente chaque année, et nous avons cessé de les compter. D’eux, nous ne voyons que rires, artifices et argent. Ils s’approprient nos montagnes et se moquent haut et fort de nos superstitions. Nous nous taisons : nous qui naissons ici, qui y restons jusqu’à ce que la mort blanchisse nos os, nous savons de quoi les esprits sont capables. Le malheur a tant frappé nos aïeuls; personne ne croit qu’il ait arrêté de nous tourner autour. Et si certains d’entre nous le pensent, ils continuent à faire comme si, pour ne pas provoquer. Devant l’abîme des montagnes, quand le vent siffle aux oreilles son étrange mélopée, chacun peut sentir sa présence. Bien sûr qu’il est là. Le mal. Le diable, disent les anciens. Tous nos actes sont soupesés au regard de cette unique question : cela le fera-t-il resurgir? Nos vies se rythment et s’épuisent à prendre garde. Même dans les grands moments de fête, nous désignons des veilleurs, postés aux coins des falaises, qui surveillent les chemins des villages. Comme si le mal ignorait les sentiers détournés qui finiront par le mener à l’un d’entre nous : superstition toujours. Mais c’est notre façon de lui montrer notre respect. D’espérer que cela l’éloigne. Nous lui offrons prières et cadeaux, tels les païens d’une autre époque, presque sans réfléchir — par réflexe. Quand cela ne suffit pas, il nous prend un vieillard; parfois un enfant. Le mal est mon compagnon de chaque jour. S’il disparaissait, je m’évaporerais du même coup. Mais jamais il ne s’achèvera, je le sais : pour cela, il faudrait que le monde s’arrête.

 Challenge Petit Bac 2015 
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Animaux (2)

Challenge Trillers et Polars
2014-2015
 
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catégorie "Même pas peur" :  14/25 

8 février 2015

L'effet papillon - Jussi Adler Olsen

Lu en partenariat avec Albin Michel

l'effet papillon Albin Michel - janvier 2015 - 648 pages

traduit du danois par Caroline Berg

Titre original : Marco effekten, 2012 

Quatrième de couverture :
Si William Stark n’avait pas été intrigué par un SMS envoyé du Cameroun, René Ericksen, son boss au Bureau d’Aide au Développement, n’aurait pas été obligé de se débarrasser de lui. Si Marco, un jeune voleur gitan n’avait pas trouvé refuge là où le cadavre putréfié de Stark végète depuis trois ans, son oncle, chef d’un réseau mafieux, n’aurait pas lancé ses hommes à ses trousses à travers tout Copenhague pour l’empêcher de révéler à la police l’existence de ce corps qu’il a enterré de ses propres mains...
Pour stopper cet engrenage de la violence, l’inspecteur Carl Mørck et l’équipe du Département V doivent retrouver Marco. Et remonter la piste d’une affaire dont les ramifications politiques et financières pourraient bien faire vaciller l’intégrité politique du Danemark.
Grand Prix policier des lectrices de Elle, Prix polar des lecteurs du Livre de poche, le Danois Jussi Adler-Olsen est une figure désormais incontournable du thriller scandinave.

Auteur : Né à Copenhague, Jussi Adler-Olsen a étudié la médecine, la sociologie, le cinéma et la politique. Ancien éditeur, il connaît un succès sans précédent avec sa série bestseller Département V.

Mon avis : (lu en février 2015)
Ce livre est le cinquième épisode de la série Département V où l’inspecteur Carl Mørck est le personnage principal. Jusqu'à présent, je n'avais lu que le premier tome de cette série et lorsque l'on m'a proposé de lire celui-là , je n'ai pas hésité. Ne pas avoir lu les épisodes 2, 3 et 4 ne m'a absolument pas gênée pour apprécier celui-ci.
Le lecteur découvre plusieurs histoires : celle de William Stark qui travaille au ministère au Bureau d'Aide au Développement et s'occupe d'un projet au Cameroun, celle de Marco, un adolescent de quinze ans, qui a quitté la bande de voleurs dirigée par son oncle Zola et bien sûr l'équipe du Département V.
Après un voyage en Afrique, William Stark disparait mystérieusement.
Marco ne veut plus être un voleur, il voudrait devenir un garçon normal, faire des études, apprendre un vrai métier. Être libre... Le jour, où il entend qu'il devient gênant et que Zola demande à ses sbires de le mutiler, Marco s'enfuit en pyjama, pieds nus, dans la nuit. Dans sa fuite, il découvre par hasard le cadavre d'un homme enterré dans le bois situé derrière les maisons du clan. Le voilà donc malgré lui l'effet déclancheur d'une multitude d'évènements, il va devoir se cacher pour échapper à de nombreux poursuivants... Parallèlement, le Département V enquête sur la disparition de Stark, Carl Mørck découvre que le jeune Marco détient des informations importantes mais il est difficile de le rencontrer...
Une histoire palpitante, le jeune Marco est très attachant et j'ai bien aimé redécouvrir l'équipe du Département V avec Carl Mørck, Assad, Rose et les autres...

Merci Arthur et les éditions  Albin Michel pour la redécouverte de cette série.

Extrait : (début du livre)
Le dernier matin de la vie de Louis Fon eut la douceur d’un murmure.
Il se leva de sa couche, les yeux pleins de sommeil et la tête un peu lourde, donna une petite tape sur la croupe de la gamine qui lui avait caressé la joue pour le réveiller, essuya la morve qui coulait du nez brun de la petite et glissa les pieds dans ses tongs posées sur le sol en terre battue.
Il s’étira et cligna des yeux dans la pièce baignée de soleil, emplie des caquètements stridents des poules, et des cris plus éloignés des garçons, occupés à couper des régimes de bananes en haut des musas.
Quelle paix, songea-t-il en humant l’odeur épicée qui se dégageait du village. Seul le chant des Pygmées bakas autour d’un feu de camp sur l’autre rive du fleuve pouvait lui procurer plus de plaisir que ce parfum-là. Il était toujours heureux de retourner dans le territoire de Dja et le village bantou reculé de Somolomo.
Les gosses couraient derrière la hutte, un nuage de poussière rouge se levait sous leurs pieds nus, et leurs piaillements aigus faisaient s’envoler les oiseaux tisserins des cimes des palmiers.
Il avança dans le rai de lumière, alla s’accouder au rebord de la fenêtre et adressa un large sourire à la mère de la fillette qui égorgeait le poulet du jour devant sa hutte, juste en face.
Il ne savait pas encore que ce serait son dernier sourire.
À deux cents mètres de là, l’homme maigre et son guide débouchèrent du sentier qui traversait la palmeraie, et il lui suffit d’un regard pour deviner qu’ils n’étaient pas animés de bonnes intentions. Il reconnaissait la silhouette musclée de Mbomo pour l’avoir rencontré à Yaoundé, mais l’Européen aux cheveux blancs, il ne l’avait jamais vu.
« Qu’est-ce que Mbomo vient faire là ? Et qui est l’homme qui l’accompagne ? » demanda-t-il d’une voix forte à la mère de la fillette.
Elle haussa les épaules. Il n’était pas rare de voir des touristes à la lisière de la forêt tropicale humide, pourquoi s’en préoccuperait-elle ? C’était sans doute des Européens fortunés qui venaient passer quatre ou cinq jours avec les Bakas dans l’immense chaos de la jungle Dja !
Mais Louis avait un mauvais pressentiment. On sentait une gravité émaner de ces deux hommes, une complicité aussi. Il y avait un problème. Le Blanc n’était pas un touriste et Mbomo n’avait rien à faire dans le secteur sans que Louis en soit informé. C’était lui qui dirigeait le programme danois d’aide au développement, et Mbomo n’était que l’homme à tout faire des fonctionnaires de Yaoundé. C’était comme ça que ça marchait.
Les deux hommes sur la piste là-bas n’étaient-ils pas sur le point de faire une chose que Louis n’était pas supposé voir ? Il le craignait fort. De manière générale, il y avait beaucoup de choses bizarres dans ce projet. Tout allait trop lentement, les informations circulaient mal ou pas du tout, l’argent se faisait attendre ou n’arrivait pas. Bref, ce n’était pas ce qu’on lui avait promis à l’époque où on l’avait recruté pour cette mission.

Challenge Petit Bac 2015 
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Animal (1)

Challenge Voisins Voisines 2015
voisins voisines 2015
Danemark

Challenge Trillers et Polars
2014-2015
 
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catégorie "Même pas peur" :  13/25 

24 janvier 2015

L'avenue des Géants - Marc Dugain

 Lu dans le cadre du Challenge
 
"Écoutons un livre"
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avenue des geants avenue_des_geants liv-4014-avenue-des-geants

Ecoutez lire - février 2013 - 10 h - Lu par Bernard Métraux

Gallimard – avril 2012 – 368 pages

Folio - septembre 2013 - 432 pages

Quatrième de couverture : 
Al Kenner serait un adolescent ordinaire s'il ne mesurait pas près de 2,20 mètres et si son QI n'était pas supérieur à celui d'Einstein. Sa vie bascule par hasard le jour de l'assassinat de John Fitzgerald Kennedy. Plus jamais il ne sera le même. Désormais, il entre en lutte contre ses mauvaises pensées. Observateur intransigeant d'une époque qui lui échappe, il mène seul un combat désespéré contre le mal qui l'habite. Inspiré d'un personnage réel, Avenue des Géants, récit du cheminement intérieur d'un tueur hors du commun, est aussi un hymne à la route, aux grands espaces, aux mouvements hippies, dans cette société américaine des années 60 en plein bouleversement, où le pacifisme s'illusionne dans les décombres de la guerre du Vietnam.

Auteur : Né en 1957, après avoir vécu les sept premières années de sa vie au Sénégal, Marc Dugain revient en France avec ses parents. Il intègre quelque temps plus tard l'Institut d'études politiques de Grenoble, où il étudie les sciences politiques et la finance, avant de prendre la tête d'une compagnie d'aviation. Mais l'écriture l'a toujours démangé. Aussi, il se décide à prendre la plume, et signe "La Chambre des officiers" en 1998. Ce premier roman reçoit près de vingt prix littéraires et est adapté au cinéma. Il sort ensuite "Campagne anglaise", "Heureux comme Dieu en France", "La Malédiction d'Edgar" et plus récemment "Une exécution ordinaire" (2007), et se constitue peu à peu un lectorat fidèle. Friand d'horizons lointains, Marc Dugain vit au Maroc depuis 2001.

Lecteur : Bernard Métraux est un acteur et metteur en scène français spécialisé dans le doublage. Il est la voix française régulière de Bill Murray. Il est aussi la voix de Kevin Spacey dans American Beauty.

Mon avis : (écouté en janvier 2015)
J'ai mis plus de temps que prévu à relire ce livre coup de cœur et coup de poing. J'ai trouvé le ton du lecteur un peu monocorde mais heureusement les chapitres sont assez courts et reprendre plusieurs fois la lecture d'un chapitre n'est pas trop contraignant.
Pour mon billet, je reprends l'essentiel du billet fait lors de ma première lecture...

Marc Dugain s'est inspiré de la vie d'un tueur en série américain des années 70 pour créer le personnage d'Al Kenner. Le 22 novembre 1963, jour de l'assassinat de John Fitzgerald Kennedy, la vie d'Al va basculer, encore adolescent il commet son premier meurtre. Il est alors interné dans un hôpital psychiatrique et rencontre des psychiatres qui l'écoutent. Son intelligence lui permet d'apprendre beaucoup de la psychiatrie.
Al Kenner est hors norme, il mesure 2,20 m et a un QI exceptionnel, supérieur à celui d'Einstein. Il aime les grands espaces et en même temps il est renfermé sur lui-même, il est lucide et il connaît très bien le mal qui le ronge et fait beaucoup d'effort pour vivre avec. Son contexte familiale est terrifiant, il a toujours été considéré comme un monstre par sa mère et son père ne s'est jamais interposé pour le protéger des maltraitances de sa mère.

Entre roman policier et roman américain, Marc Dugain a construit avec beaucoup de talent cette histoire prenante et passionnante de la vie d'Al Kenner. L'auteur tente de comprendre sa psychologie et le lecteur s'interroge : naît-on tueur ou le devient-on ? Al Kenner est à la fois attachant et d'une froideur et d'une lucidité troublante. Ce livre est également l'occasion de découvrir les États-Unis des années 60 et 70 avec la guerre du Vietnam, les communautés hippies...
Ce roman ne peut pas laisser indifférent le lecteur.

Malgré mon esprit trop occupé par autre chose, j'ai bien aimé cette relecture.

Extrait : (début du livre)
Comme chaque mois, elle lui fait face après s'être installée lourdement sur sa chaise. Elle sort les livres de son sac, une dizaine. Pour la plupart ils ont une couverture cartonnée. Il y jette un coup d’œil rapide, et les pose devant lui. Elle sourit d'un trait fin sans le regarder en face. Elle fait en sorte depuis des années de ne jamais croiser son regard, ce qui l'oblige à beaucoup tourner les yeux. Elle baisse souvent la tête. C'est l'occasion pour lui de voir le sillon de sa calvitie au milieu de son crâne s'élargir. Elle a les cheveux longs et il est difficile de dire quand ils sont propres. Même propres, ils n'ont pas l'air de l'être. Elle a dû être passablement jolie, pour autant qu'on puisse distinguer une ancienne beauté derrière des traits bouffis. Affaissé il l'est aussi, mais il a de bonnes raisons de l'être. Alors qu'elle, on se demande. Il aime bien cette femme. En fait, il en est venu à conclure qu'il l'aime bien parce qu'il ne ressent rien pour elle, ni amour ni haine. Parfois un peu d'agacement. Il lui en veut d'être la seule personne à lui rendre visite. Il lui en veut pour les autres qui ne le visitent jamais, ce qui est un peu injuste vu qu'il n'y a plus d'autres. Il est assez perspicace pour avoir remarqué que depuis longtemps elle a quelque chose à lui dire. Mais quoi ? Il n'en sait rien. Il sent juste la pesanteur d'une parole qui ne s'exprime pas. C'est au-delà de la timidité. Elle n'est jamais vraiment naturelle devant lui. Elle compose. Assez maladroitement et souvent sa voix est en décalage avec ses expressions. Parfois il la sent illuminée, parfois complètement éteinte. Elle a de gros seins flasques qui finissent une gorge fripée. Pour une femme qui doit avoir la soixantaine il ne trouve pas cela très reluisant. Mais il lui est reconnaissant de ne pas le faire fantasmer. On ne tire pas sur un moteur sans essence. 
- Vous avez parlé avec les journaux de ce qu'on avait évoqué ? 
Elle prend un temps pour répondre. Rien d'extraordinaire à cela, elle prend toujours un temps pour répondre comme si elle se sentait une responsabilité. 
- Oui. A plusieurs journaux de la côte. Ils sont int... comment dire, intrigués. Ils réfléchissent. Mais je crois que cela peut se faire. 
Ses yeux se remettent à tourner. Quand elle fait comme ça, il lui écraserait son poing sur la tête, mais au fond il n'en a pas très envie. Et puis il imagine les dégâts que cela causerait pendant qu'elle continue de sa voix où chaque mot semble s'excuser de sortir de sa bouche petite pour un visage de cette taille. Elle doit avoir du sang indien. Pas du sang frais, du sang qui remonte au début du siècle où on leur a réglé leur compte. 
- C'est un peu risqué pour eux, vous comprenez... 
- Vous voulez dire comme critique littéraire ? 
- Oh non ! Là-dessus ils se feront leur propre opinion. C'est plus de révéler qui vous êtes ou pas. Et s'ils ne disent pas qui vous êtes, on pourrait le leur reprocher un jour. En même temps, ils se disent qu'à révéler votre identité, ils pourraient faire un coup. Enfin, les médias... quoi... 

Déjà lu du même auteur : 

l_insomnie_des__toiles L'insomnie des étoiles avenue_des_geants Avenue des géants

 Challenge Petit Bac 2015 
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Taille (2)

Challenge Trillers et Polars
2014-2015
 
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catégorie "Même pas peur" :  12/25 

4 décembre 2014

La femme tatouée - Pieter Aspe

Lu en partenariat avec les éditions Albin Michel

9782226312334g Albin Michel - octobre 2014 - 296 pages

traduit du néerlandais (Belgique) par Emmanuèle Sandron

Titre original : Onvoltooid verleden, 2004

Quatrième de couverture : 
Sacrée découverte dans un grand restaurant de Blankenberge, sur la côte belge : le corps sans vie d’une (très jolie) femme au fond d’un vivier à homards. Sur sa fesse gauche, un mystérieux tatouage, la lettre M en caractère runique, emblème d’un groupuscule d’extrême-droite. Le commissaire Van In et le fidèle Versavel se lancent sur ses traces pour se retrouver au cœur d’une véritable guerre entre catholiques intégristes, cellules islamistes et néo-nazies…
Toujours aussi mordant, toujours aussi réjouissant : le maître du polar flamand excelle à mêler suspense et humour.

Auteur : Pieter Aspe (nom de plume de Pierre Aspeslag) est un écrivain belge de langue néerlandaise, né à Bruges le 3 avril 1953. Pieter Aspe est devenu célèbre grâce à la série des enquêtes du commissaire Van In. Celles-ci mettent en scène les sympathiques policiers Pieter Van In, Guido Versavel et la substitute Hannelore Martens. La plupart des histoires se déroulent à Bruges et sont l'occasion de découvrir la ville, ses arcanes et sa vie sociale.

Mon avis : (lu en décembre 2014)
J'avais découvert cette série belge il y a quatre ans avec La mort à marée basse et je n'ai donc pas hésité à accepter de recevoir ce nouvel épisode (la quinzième enquête si les comptes de wikipédia sont bons). J'ai retrouvé à Bruges le commissaire Pieter Van In et son adjoint Guido Versavel dans une enquête qui commence avec la découverte du cadavre d'une jeune femme dans le vivier à homards d'un grand restaurant de la côte belge. La victime a sur sa fesse gauche un mystérieux tatouage. Il y aura d'autres morts, des rebondissements, des fausses pistes et beaucoup de bières bues... 
Voilà un roman policier très agréable à lire, bien rythmé, des policiers attachants qui donnent envie de les suivre pour cette enquête difficile. Il faut vraiment que je me procure d'autres enquêtes du commissaire Pieter Van In, ce dernier me plaisant autant que les commissaires Adamsberg (Fred Vargas) ou Erlendur (Arnaldur Indridasson)...

Merci Arthur et les éditions Albin Michel pour ce moment de lecture distrayant.

Extrait : 

Déjà lu du même auteur :

la_mort___mar_e_basse La mort à marée basse 

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catégorie "Même pas peur" :  11/25

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