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A propos de livres...
france
28 septembre 2016

Coquelicots d'Irak - Brigitte Findakly et Lewis Trondheim

3418 L'Association - août 2016 - 115 pages

Présentation de l'éditeur :
Lewis Trondheim et Brigitte Findakly forment en bande dessinée comme à la ville un duo depuis de nombreuses années. Si la bibliographie pléthorique de Lewis Trondheim n'a plus de secret pour personne, celle de Brigitte Findakly, son épouse et coloriste, quoique toute aussi importante, reste pourtant moins connue. De Pif Gadget, à ses débuts, au Chat du Rabbin, des Formidables aventures de Lapinot au Retour à la terre, on lui doit la mise en couleurs d'une centaine d'albums. Avec ce livre à quatre mains, pré-publié en partie dans "Les strips de la matinale" du Monde, Lewis Trondheim délaisse pour la première fois les animaux anthropomorphisés pour raconter l'histoire de celle qui partage sa vie, née en Irak, d'un père irakien et d'une mère française à l'orée des années 1960. Coquelicots d'Irak retrace son enfance passée à Mossoul, ville du nord de l'Irak, à une époque où, bien avant l'arrivée au pouvoir de Saddam Hussein, se succèdent coups d'Etat et dictatures militaires. Déroulant le fil de ses souvenirs, on découvre alors une vie de famille affectée par les aberrations de la dictature et leurs répercussions sur la vie quotidienne, jusqu'à un inéluctable exil vers la France au début des années 1970. Une arrivée en France elle aussi difficile, une expérience migratoire faite de difficultés administratives, sociales et culturelles. Dans ce récit qui prend pour toile de fond une triste actualité, Lewis Trondheim et Brigitte Findakly brossent en saynètes percutantes et sans ambages, mais pas moins sensibles pour autant, la trajectoire singulière de la coloriste qui, pour la première fois, occupe le premier rôle dans un livre. Ponctué de photos et de parenthèses sur les coutumes, la culture irakienne et les souvenirs de l'Irak de Brigitte Findakly, on partage avec elle la nostalgie de ceux qui ont laissé derrière eux leur pays d'origine, et les liens fugaces qui subsistent, tout à l'image des coquelicots devenus si fragiles une fois déracinés.

Auteurs : Brigitte Findakly est née en 1959 à Mossoul, Irak, et elle y a grandi jusqu'en 1973. Coloriste de bande dessinée depuis 1982, elle a travaillé pour Pif Gadget, Le Journal de Mickey, Circud, Vécu, Le Journal de Spirou... Elle a colorié de nombreux albums dont Lapinot, Le Chat du Rabbin, Le Retour à la Terre et Rob Azbam.
Lewis Trondheim est né en 1964 à Fontainebleau. Auteur de bande dessinée, co-fondateur de l'Association, co-fondateur de l'OuBaPo, directeur de la collection Shampooing. Marié à Brigitte Findakly depuis 1993, ils ont deux enfants et vivent dans le sud de la France.

Mon avis : (lu en septembre 2016)
Cette bande dessinée raconte l'enfance de Brigitte Findakly à Mossoul, en Irak jusqu'en 1973, puis son exil à Paris.
Le départ de ce récit a été suscité par la destruction des têtes de lions ailés par Daesh à proximité de Mossoul. Brigitte se souvient d'une photo prise par son père d'elle enfant devant ces lions. Sur la photo, on ne voyait déjà pas leurs têtes car c'était Brigitte le sujet principal de la photo et non ces lions...  
Les souvenirs de Brigitte ne suivent pas un fil chronologique et peuvent dérouter un lecteur, mais j'imagine qu'ils ont été écrits et dessinés au moment où ils sont revenus à la mémoire de l'auteure... 
Elle raconte sa jeunesse à Mossoul, la difficulté de vivre en tant que chétien dans un pays majoritairement musulman, l'instabilité politique puis pourquoi ses parents sont obligés d'émigrer en France, le pays d'origine de sa maman. Elle évoque l'exil et son adaptation à un nouveau pays, les retours en Irak pour les vacances... 
Les dessins de son mari, Lewis Trondheim, illustre avec beaucoup de pudeur et de simplicité ce témoignage émouvant.
Voilà une bande dessinée touchante qui reflète la tolérance et le respect. Brigitte évoque avec nostalgie, amour et sensibilité ce pays d'enfance et sa famille. Une très belle découverte.

Extrait : 

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23 septembre 2016

Frères d'exil - Kochka

Lu en partenariat avec Flammarion jeunesse

1507-1 Flammarion jeunesse - septembre 2016 - 128 pages

Illustré par Tom Haugomat

Quatrième de couverture :
Il y a des moments dans la vie 
où ce qu'on croyait solide s'effondre...
Où que la vie t'emmène, Nani, n'oublie jamais d'où tu viens, mais va !

Nani part avec sa famille pour le continent après l'inondation de leur île par une tempête. Mais Enoha, son grand-père, a décidé de rester. Il confie à sa petite-fille des lettres, où il raconte son histoire. Durant son voyage, la fillette rencontre un petit garçon seul, Semeio, auquel son destin sera lié.

Auteur : Kochka est née au Liban d'un père français et d'une mère libanaise. Elle s'installe en France à partir de 1976 et suit des études pour être avocate. Elle quitte le barreau en 1997 et commence à écrire.

Mon avis : (lu en septembre 2016)
Une histoire universelle autour des réfugiés. Dans cette histoire, il s'agit de réfugiés climatiques et non de guerre mais la problématique de l'exil est assez semblable.
Nani, 8 ans, a grandit sur une île du Pacifique avec sa famille, ses parents Janek et Youmi, ses grand-parents Enoha et Moo. Depuis quelque temps, les intempéries menacent l'île, l'eau monte et Nani et ses parents ont décidé de quitter l'île. Enoha et Moo resteront sur l'île, ils sont trop vieux pour entreprendre ce long voyage. Mais Enoha a décidé d'écrire plusieurs lettres à Nani, il les lui confie dans une pochette étanche avant son départ et lui conseille de les lire lorsqu'elle en aura besoin, ce sera comme si son Ipa (grand-père) lui parlait dans son coeur. Dès le départ, le jeune Semeio va se joindre à la petite famille, il sera pour Nani un compagnon rassurant et complice car le voyage sera long et pleins d'épreuves...
Un roman plein d'humanité qui raconte l'histoire d'une famille qui a été contrainte à l'exil, jamais ils n'oublieront leur île, mais plein d'espoir, ils regardent vers un avenir qu'ils espèrent meilleur. C'est l'occasion de réfléchir sur le sujet de l'accueil des réfugiés...
Les illustrations de Tom Haugomat sont également très jolies et expressives. 
Un petit bémol sur la forme du livre : les lettres écrites par le grand-père puis celles écrites par les enfants apparaissent dans le livre sur des pages bleu et écrites en blanc, j'ai trouvé ces pages moins lisibles. Et le pire ce sont les poèmes ou les chansons qui apparaissent dans le livre avec une écriture bleue qui est vraiment bien trop claire pour être lisible.
Sinon, j'ai remarqué qu'il n'y avait pas de lettre n°5... enfin, je pense que c'est surtout un problème de numérotation dans la mise en page et que le lecteur a bien droit à l'histoire en entier...

Merci Brigitte et les éditions Flammarion jeunesse pour cette découverte touchante

Extrait : (début du livre)
Mon nom est Enoha et si j'écris aujourd'hui c'est pour accompagner Nani, ma petite-fille, car elle va bientôt partir. Pour elle je suis Ipa. C'est comme ça qu'on dit grand-père sur notre île. Elle a huit ans.

Ma Nani,
Tu sais toi qu'il est un peu bizarre ton Ipa, mais tu sais aussi qu'il ne raconte jamais n'importe quoi, et tu sais comme il t'aime !
Je t'ai déjà expliqué que ce qu'on voit ne dit pas toujours la vérité. Par exemple, quand les gens ne sont plus là, on croit qu'ils sont sont morts alors qu'ils sont seulement cachés. Les défunts sont dans nos coeurs et, si on se concentre, on les entend murmurer. Et c'est vrai aussi pour les arbres, les rivières, les montagnes et les fleurs...

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21 septembre 2016

Un recteur de l'île de Sein - Henri Queffelec

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Stock - 1944 - 230 pages

Marabout - 1955 - 220 pages

Livre de Poche - 1961 - 241 pages

Presse de la Cité - novembre 1982

Librio - novembre 1998 - 153 pages

Bartillat - juin 2007 - 205 pages

Bartillat - juin 2016 - 205 pages

Quatrième de couverture : 
A l'extrémité de la Pointe du Raz, l'île de Sein est un rocher plat, sans arbres, désespérément sauvage. Là, sous l'Ancien Régime, vivent quelques familles de pêcheurs, âpres, durs, pilleurs d'épaves, superstitieux et violents.
Dans ce lieu maudit, où l'évêque de Quimper ne se donne plus la peine d'envoyer un aumônier du culte tant les candidats sont rares, Thomas Gourvennec, simple pêcheur et sacristain de son état, décide de prendre en charge les âmes à la dérive. Il se heurtera à ces hommes et à ces femmes pris en étau par les rochers... Qu'à cela ne tienne, ils rendront la monnaie de sa pièce à l'existence : certaines nuits, des hommes se retrouvent en bas des falaises, des fermes brûlent, les épaves sont pillées. Au village, on suivra les processions des enterrements sous le soleil glacé, et on verra défiler au gré de la plume d'Henri Queffélec les histoires de femmes, d'enfants en sabots, d'amour, de jalousies, de religion et les récits de grandes tempêtes au goût d'apocalypse.
Le sacristain, Thomas Gourvennec, arbitrera cette lutte entre Dieu et les hommes, entre le religieux et le crime, et tentera, afin que l'île ne sombre pas dans la folie, d'enchaîner les êtres les uns aux autres à travers des habitudes chrétiennes communes.

Auteur : Henri Queffélec (1910-1992) est l'auteur d'une œuvre considérable dans laquelle il a entre autres célébré la Bretagne et la mer. Un recteur de l'île de Sein, paru en 1944, est son plus célèbre roman. Henri Queffélec est le père de l'écrivain Yann Queffélec.

Mon avis : (lu en août 2016)
Voilà un vieux classique dont j'avais souvent entendu parler et que j'ai déniché pendant les vacances. Henri Queffélec offre au lecteur un tableau vivant de l’île de Sein sous l’Ancien Régime. A l'époque, la vie sur l'île de Sein n'est pas facile, il y a les tempêtes, ce rocher est aride et il manque de tout. Un beau jour, leur recteur, venu du continent, n'en peut plus de cette vie rude et isolé et il quitte l'île. Mais aucun prêtre n'est prêt à le remplacer. Les Îliens se sentent alors délaissés par l'Église de Quimper, et par le continent tout entier... Dans ces conditions, Thomas Gourvennec, le sacristain, homme pieux et respecté, est poussé par les Îliens à prendre en main les destinées de la paroisse.
J'ai trouvé ce livre magnifique et très fort, il nous fait découvrir la vie rude des pêcheurs, leur rapport à la religion... L'Ile est l'un des personnages principaux de ce roman, ses descriptions sont très belles et évocatrices en particulier en pleine tempête. L'auteur s'est inspiré d'une histoire vraie pour écrire son roman. Le vocabulaire est très riche, j'y ai découvert des mots qui ne sont plus en usage aujourd'hui et certaines tournures de phrases sont parfois désuètes.

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Ce livre a été adapté au cinéma en 1950 par Jean Delannoy sous le titre Dieu a besoin des hommes avec Pierre Fresnay dans le rôle de Thomas Gourvennec.

 

Extrait : (début du livre)
Il doute du témoignage de ses yeux qui virent le printemps sur l’île et il voudrait croire qu’il a vu des mirages. Il n’est pas possible que des aubes glorieuses, se déployant dans le fond du ciel, aient éclairé ce morceau de récif…
Sur le continent, des maisons humaines, des fermes qui se disent pauvres, mais où la lande étincelle dans les cheminées plus belle qu’à la floraison de Pâques ; les animaux, derrière la cloison, qui réchauffent les maîtres ; le fumier gras, dehors, qui suinte comme du beurre ; les petites fenêtres qui emprisonnent dans l’air le froid, la pluie et le vent, et les obligent, pour réclamer pitance, à ne passer qu’un bras maigre qui tâtonne ; villages terrés contre le sol, paysans et pommiers, monotonie heureuse et rabougrie du temps.
Dix années. Mais rien ne doit plus, aujourd’hui, le retenir dans l’île… Certitude illusoire. La mer, le dépaysement, la solitude morale ont détruit son courage et, si l’on résistait à son entreprise, en poursuivrait-il le dessein ? Qui sait si son refuge, loin d’être la prière, ne serait pas la folie. Auprès des lavoirs, tandis que les femmes battent et rincent, les innocents jouent dès le matin. Ils s’assoient sur des mottes de terre un peu hautes et, levant la tête, la tournent de droite à gauche et de gauche à droite comme s’ils voulaient la dévisser. Ils rient des vaches qui courent. Quel repos ! Quel éloignement des bouffées et des clameurs atlantiques ! Comme il est loin le pillage des heures, du bien-être et de la chaleur par les bandes armées du vent !…
Dix années.
À la fin de la troisième année, c’est Anne Le Berre qui sort lever des lignes à cent mètres du port, derrière un rocher tranquille. La mémoire prétend que des alouettes, dans cet après-midi de juin, chantaient parmi les haubans du ciel. Une brume tombe, mouillée comme une grève après la marée, une brume qui sent le sable et le sel. Hypocrite, elle enveloppe tout. Les formes des maisons s’affaiblissent, s’exténuent. La brume se dissipe… Homme et barque ont disparu.
N’est-ce pas plus terrible encore, à la fin de l’antan, la mort de Louis Yvinec ! La disparition d’Anne se conforme à une sagesse de l’horreur : personne n’a rien vu ni rien entendu et personne ne sait rien. Mais personne n’a vu Yvinec sauter en pleine nuit dans sa barque ni s’éloigner à la voile… et tout le monde raconte qu’il a trouvé une épave, un baril, de malaga ou de rhum, et croisé pour attendre la nuit : il grimperait chez lui en cachette et enterrerait le baril. La tempête croisait aussi. On entendait gronder la bise comme un chien qu’un autre chien irrite. La tempête éclata… Personne, ce jour-là, n’a rencontré Yvinec et, si l’on demande aux pêcheurs d’où ils connaissent l’histoire de l’épave, ils crachent et se dérobent derrière des mots. Le prêtre ne les soupçonne pas de mensonge. Ils détiennent une science effrayante et lui, pauvre terrien, il ne lutte pas contre eux.

20 septembre 2016

L'élégance des veuves - Alice Ferney

Lu en partenariat avec Audiolib

l'élégance des veuves Audiolib - août 2016 - 2h54 - Lu par Dominique Reymond

Quatrième de couverture :
Au rythme des faire-part de naissance et de mort, voici la chronique de destins féminins dans la société bourgeoise du début du xxè siècle. Fiançailles, mariages, enfantements, décès... le cycle ne s'arrête jamais, car le ventre fécond des femmes sait combler la perte des êtres chers. C'est avec l'élégance du renoncement que l'on transmet ici, de mère en fille, les secrets de chair et de sang, comme si la mort pouvait se dissoudre dans le recommencement. En toute éternité…
Un court roman intemporel sur le cycle de la vie et la place de la femme, adapté au cinéma sous le titre « Éternité ».

Auteur : Docteure en sciences économiques, Alice Ferney publie son premier livre en 1993, Le Ventre de la fée. Très vite appréciée des critiques et des libraires, elle publie ensuite une dizaine de romans, dont L’Élégance des veuves en 1995, Grâce et dénuement en 1997, ou, plus récemment, Cherchez la femme (2013) et Le Règne du vivant (2014). L’ensemble de son œuvre est imprégné de thèmes portant sur la féminité, la maternité, le sentiment amoureux.

Lecteur : Étudiante aux conservatoires de Genève puis de Paris, Dominique Reymond a été l’élève d’Antoine Vitez. Elle a joué sous sa direction comme sous celle d’autres grands dramaturges : Klaus Michael Grüber, Jacques Lassale, Bernard Sobel, Luc Bondy… Également présente à la télévision et au cinéma, on la voit chez Olivier Assayas, Claude Chabrol, Philippe Garrel et Benoît Jacquot mais aussi chez de jeunes réalisateurs… Elle a reçu un prix d’interprétation pour son rôle dans Y aura-t-il de la neige à Noël ? de Sandrine Veysset. Dominique Reymond a déjà enregistré pour Audiolib Suite française d’Irène Némirovsky.

Mon avis : (écouté en septembre 2016)
J'ai beaucoup aimé redécouvrir ce court roman dans sa version audio. L'écriture est limpide, douce, précise, pleine de poésie.

Voici un portrait sensible de femmes, de mères ou d'épouses sur trois générations.
Valentine mariée à Jules aura huit enfants. Après vingt ans de mariage, Jules laissera Valentine veuve.
Henri, l'un de leur fils, épousera Mathilde et ils auront beaucoup d'enfants. Gabrielle, la meilleure amie de Mathilde, épousera Charles, par obéissance à ses parents, après l'avoir rencontré une seule fois. Ils auront de nombreux enfants...
 
Le lecteur découvre la vie de ces femmes, du début du XXème siècle, destinées à se marier, à aimer un mari et à enfanter. Elles arrivent à trouver le bonheur et la force de vivre grâce aux bonheurs familiaux et malgré les drames qui endeuillent. 

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Ce livre vient d'être adapté au cinéma par Tran Anh Hung sous le titre d'Eternité avec Audrey Tautou, Mélanie Laurent, Bérénice Bejo, Jérémie Rénier et Pierre Deladonchamps

 

Extrait : (début du livre)
ARTHUR ET JULIE BOURGEOIS EURENT cinq filles. Deux d’entre elles moururent jeunes. Les trois autres, Hélène, Henriette et Valentine, convolèrent en justes noces. D’elles sont issus dix-huit petits-enfants, quarante-trois descendants à la deuxième génération, cent cinquante-quatre à la troisième, et à ce jour quatre-vingts déjà à la quatrième.
C’était un bourgeonnement incessant et satisfait. Un élan vital (qu’ils avaient canalisé), un instinct pur (dont ils ne voulaient pas entendre parler), une évidence (que jamais ils ne bousculaient), les poussaient les uns après les autres, à rougir, s’épouser, enfanter, mourir. Puis recommencer. Les uns après les autres ils savaient que telle était la meilleure tournure des choses : que le Seigneur bénisse des alliances, que les jeunes ventres enflent dans l’allégresse, et que les anciens bercent des nouveau-nés propres et emmaillotés. Le grand arbre familial étendait ses branches de plus en plus loin, année après année éparpillant des feuilles, au gré des mariages les enfants quittant les parents, dans l’espace entier. “Dieu ne nous a pas créées pour être inutiles”, telle était la devise des femmes de cette famille. Elles se la transmettaient de mère en fille, de même qu’elles se murmuraient l’instant venu – à demi-mot pour ne pas troubler la décence – des secrets de chair, de sang, et d’enfants. Car les épouses étaient toutes accaparées par cette tâche : procréer. Et Dieu qui les guidait, à qui chaque soir elles offraient leur journée, ce Dieu-là se chargeait de bénir leur couche, et de pardonner aux époux la douceur des caresses en soufflant autour d’eux des petits enfants. Ainsi les couples étaient féconds, comme si la terre avait été si belle qu’il fallait enfanter des êtres capables de s’en émerveiller. Ou si cruelle qu’il fallait apprendre à compter, parmi ceux qui naissaient, lesquels survivraient.

Déjà lu du même auteur :

34600726_p Grâce et Dénuement  34598603_p L'élégance des veuves

36351383_p Les autres 36347183_p Paradis conjugal

56990671_p Passé sous silence

16 septembre 2016

La légèreté - Catherine Meurisse

legerete-couv Dargaud - avril 2016 - 136 pages

Quatrième de couverture : 
Dessinatrice à Charlie Hebdo depuis plus de dix ans, Catherine Meurisse a vécu le 7 janvier 2015 comme une tragédie personnelle, dans laquelle elle a perdu des amis, des mentors, le goût de dessiner, la légèreté. Après la violence des faits, une nécessité lui est apparue : s'extirper du chaos et de l'aridité intellectuelle et esthétique qui ont suivi en cherchant leur opposé la beauté. Afin de trouver l'apaisement, elle consigne les moments d'émotion vécus après l'attentat sur le chemin de l'océan, du Louvre ou de la Villa Médicis, à Rome, entre autres lieux de renaissance.

Auteur : Catherine Meurisse est une illustratrice, dessinatrice de presse, scénariste et dessinatrice de bandes dessinées française.

Mon avis : (lu en septembre 2016)
Ce jour là, Catherine Meurisse s'est réveillée en retard et elle n'est pas arrivée à l'heure à la conférence de presse de Charlie Hebdo... Elle a donc échappé au drame et n'a pas été tuée comme ses amis mais elle a été touchée à jamais. Elle a perdu ses amis, l'envie de dessiner et sa légèreté... Comment se reconstruire après un drame pareil ? Il lui a fallu du temps pour digérer ce 7 janvier 2015 et ses suites.
Dans cet album, Catherine Meurisse raconte avec une sincère émotion, tout d'abord les évènements, puis l'après avec sa lente reconstruction, elle mélange ses souvenirs, son état d'esprit et de l'humour noir... Elle a été placée sous escorte policière, elle a du mal à comprendre l'ampleur des réactions après attentats, le "Je suis Charlie"... Elle va tenter de chercher l'apaisement dans la beauté, celle des paysages, celle de l'art...
Un album magnifique à découvrir absolument.

Extrait : 

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14 septembre 2016

Sortie de classe - Laurent Torres

Lu en partenariat avec Albin Michel

1540-1 Albin Michel - septembre 2016 - 272 pages

Quatrième de couverture :
Issu d’une famille bourgeoise, Julien est professeur de français dans un collège de banlieue. Tout en racontant son quotidien difficile, il se remémore ses propres années de lycée. Dans les deux époques, un personnage sert d’ancrage : Louis, un ancien camarade de classe taciturne, et Sofiane un de ses élèves exclu. Dépassé par sa propre impuissance et par les paradoxes du système éducatif, Julien interroge sa fonction – de professeur, de citoyen et d'homme. Une saisissante radiographie de l’école, le roman d’une génération désenchantée.

Auteur : Laurent Torres a 40 ans. Sortie de classes est son premier roman.

Mon avis : (lu en septembre 2016)
Ce livre est classé comme un roman et je pense qu'il faut le prendre ainsi, plutôt que comme un livre témoignage.
Le narrateur, Julien est un professeur de français d'un collège de banlieue. Il est issu d'une famille aisée et il est en décalage avec ses élèves. Il nous parle de son quotidien dans ses classes, avec ses collègues, sa hiérarchie, les parents d'élèves... 
Un jour, après avoir essayé d'interroger l'un de ses élèves, Sofiane, ce dernier reste muet et son malaise renvoit Julien vers son passé. Il va peu à peu se souvenir de sa propre scolarité et de sa rencontre avec Louis, un élève différent, avec lequel il était devenu ami. 
Nous suivons donc en parallèle les souvenirs de Julien et son présent dans son collège de banlieue. 
J'ai trouvé cette lecture intéressante et agréable à lire. Ces deux histoires font réfléchir le lecteur sur le système éducatif aujourd'hui et dans les années 80. 

Merci Aurore et Albin Michel pour cette lecture instructive.

Extrait : 

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8 septembre 2016

Dent d'ours - tome 4 - Amerika bomber - Yann et Henriet

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Dupuis - mai 2016 - 48 pages

Quatrième de couverture :
Début mai 1945. Une étrange aile volante révolutionnaire survole New York et largue sur l'orgueilleuse cité une bombe qui contient une tonne d'uranium. La ville est complètement détruite et en proie aux flammes et les victimes se comptent par centaines de milliers. L'oberleutnant Werner Zweiköpfiger, espion US infiltré dans l'aviation allemande, se réveille : ce n'était qu'un cauchemar. Mais ce rêve, c'est aussi le fantasme d'Hitler et la mission du flugkapitän Hanna Reitsch, l'amie d'enfance de Werner : bombarder New York pour sauver l'honneur du IIIe Reich. Alors que les Alliés sont persuadés que la guerre est finie et ont pour seule obsession de récupérer Werner Von Braün, l'inventeur des fusées V1 et V2, et un maximum de savants allemands avant les Russes, Hanna, elle, n'a pas renoncé à mener à bien l'ultime mission du Führer.

Auteurs : Yann Lepennetier, dit Balac ou Yann, est un auteur de BD. 
Après ses débuts dans la publicité et l’architecture, ce Marseillais s’est lancé dans la bande dessinée en 1974 en dessinant pour Spirou à Bruxelles où il habite désormais. 
Remercié par le journal pour dessins irrévérencieux, il avait noué des liens forts de franche camaraderie avec Conrad avec qui il a notamment réalisé les Innommables en 1980 et lancé la Tigresse blanche en 2005. 
Ses premiers scénarios l’avaient conduit dans l’univers de Franquin avec le Marsupilami en 1989 et de Gosciny avec Lucky Luke sans oublier son one-shot sur une aventure de de Spirou.
Il écrit depuis pour de nombreux dessinateurs comme Berthet (Pin Up, Yoni, les exploits de Poison Ivy), Simon Léturgie (Spoon White), Félix Meynet (les Eternels) avec ou encore Herval (Tiffany), René Hausman (Les Trois cheveux blancs, Le Prince des écureuils), Yslaire (Sambre), Joël Parnotte (Le Sang des Porphyre).
Sa production est très diversifiée, avec des séries humoristiques, voire la reprise de classique (Le Marsupilami, avec Batem, Lucky Luke, avec Morris, Kid Lucky avec Conrad (sous le pseudonyme commun Pearce) et Jean Léturgie). 
Sa série Narvalo dessinée par Erik Juszezak devrait voit son épilogue en 2008 avec un second tome en plus de 54 planches. Le Sang des Porphyres est prévu en 4 albums dont 2 sont parus. Son actualité est par nature riche. En 2008 il a sorti le 2ème tome de Tiffany et le 3ème des exploits de Poison Ivy.

Né le 15 février 1973, Alain Henriet nourrit dès son plus jeune âge ses appétits bédéphiles dans les Stranges qu'il achetait en occasion sur les marchés, mais également dans Mickey Magazine, puis dans diverses séries de chez Dupuis. Il s'inscrit à l'académie des beaux-arts de Liège. Ses premières publications arriveront à cette époque, il participera à l'aventure du magazine ''Brazil'' dans les trois numéros existants. 
À la même époque, toujours à l'académie de Liège, Alain gagne un concours de BD organisé par le journal de Spirou (deux planches publiées dans le numéro 3044), il se retrouve à jongler dans sa dernière année d’études entre la rédaction du journal (où il était en stage) et l'école. De là naîtront ses premières planches dans le journal de Spirou. 
En 1998, Alain est engagé à la rédaction de Spirou magazine comme correcteur et maquettiste. Il y travaille toujours, mais uniquement le mardi. C'est lors d'un festival qu'il rencontre Olivier Vatine. Celui-ci préfère la première version d'Une pizza à l'oeil à leur projet de S.F. Le soir même, ils décident de relancer la machine du tueur aux péripéties humoristiques. De là suivra la trilogie "John Doe "aux éditions Delcourt. La série finie, les protagonistes décident de prendre chacun leur envol. 
À cette même époque, Olivier Vatine cherchait un dessinateur pour la série "Golden Cup". Fort de leur collaboration sur John Doe, celui-ci propose la série à Alain. De là suivra la collaboration avec le scénariste Daniel Pecqueur et, par la suite, la rencontre avec Manchu (grand spécialiste de science fiction) pour les designs très réalistes des véhicules. 
Alain signera également avec les éditions Dupuis pour un album : "Pandora Box".
Aujourd'hui, il collabore avec Yann pour la série" Dent d'Ours" aux éditions Dupuis.

Mon avis : (lu en août 2016)
Je pensais cette série terminée, mais j'ai eu la surprise de découvrir qu'après les 3 premiers épisodes qui racontaient les parcours de 3 enfants originaires de Silésie qui étaient devenus pilotes des armées allemande et américaine, ce nouvel épisode était le premier d'un nouveau cycle. La fin de la guerre est proche et Hanna et Werner se sont retrouvés. Ils ont chacun des objectifs contraires... Hanna, fidèle au führer, se prépare à piloter la nouvelle aile volante destinée à bombarder New-York. Et Werner a pour mission de tuer Hannah pour éviter la mort de milliers de personnes... En parallèle, les Alliés et les Russes font le course pour récupérer les scientifiques allemands pour leur propre camp...
Même si j'ai moins aimé cet épisode qui donne à cette histoire une tournure plus science fiction, cette bd est toujours aussi efficace et le coup de crayon est toujours aussi réussi. La fin de l'épisode nous laisse en plein suspens et donc nous encourage à lire la suite...

Extrait :

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Déjà lu de la même série :

92014366 Dent d'ours - tome 1 : Max  9782800160078_1_75 Dent d'ours - tome 2 : Hannah

105621445 Dent d'ours - tome 3 : Werner

4 septembre 2016

La suture - Sophie Daull

Lu en partenariat avec les éditions Philippe Rey

la suture Philippe Rey - août 2016 - 208 pages

Quatrième de couverture : 
Alors qu’elle vient de perdre Camille, sa fille de seize ans, Sophie Daull se penche sur le passé de sa mère, Nicole, une femme mystérieuse, disparue elle aussi, il y a trente ans. Munie de maigres indices – quelques lettres et photos tenant dans une boîte à chaussures –, elle entreprend de déchiffrer les lieux et paysages où Nicole a vécu, les visages qu’elle a connus, et tente de reconstituer ainsi une existence troublante.
À larges aiguillées joyeuses, poétiques ou bancales, l’auteure va coudre passé et présent, fiction et réalité, grand-mère et petite-fille, dans ce roman en forme d’enquête généalogique, qui vagabonde dans la France de l’après-guerre jusqu’aux années 80.
Se dessine ainsi la figure de Nicole, dont la frêle beauté et la timidité intriguent, porteuse d’une énigme qu’elle semble elle-même ignorer, chahutée depuis l’enfance par les rudesses d’une vie sans ménagement. Nicole, que le lecteur débusquera avec émotion derrière ses larges lunettes et la fumée de ses Gitanes…

Auteur : Sophie Daull est née dans l'est de la France. Comédienne, elle vit à Montreuil et travaille partout. Camille, mon envolée est son premier roman.

Mon avis : (lu en août 2016)
J'avais été bouleversée par le premier livre de Sophie Daull, j'étais donc curieuse de découvrir son deuxième livre. Après la perte brutale de Camille, sa fille, l'auteur se tourne vers le passé de sa mère, Nicole, décédée également trop tôt. L'auteur a en sa possession peu d'indices : quelques photos, des lettres, des bulletins de salaire... Elle va donc enquêter et partir sur les traces de sa mère à Coulommier, Le Blanc (Indre), Contrexéville et Belfort...
J'ai apprécié cette lecture, cette quête d'une fille qui cherche à mieux connaître sa mère. J'ai pensé au livre
Les gens dans l'enveloppe - Isabelle Monnin que j'avais découvert l'année dernière, mais ici l'auteur est plus impliquée dans l'histoire puisqu'elle enquête sur ses origines. Ce livre est l'occasion de faire revivre sa mère dans son souvenir. Régulièrement, Sophie Daull évoque Camille, la petite-fille qui n'a jamais connu sa grand-mère... Sophie Daull lui confie ses pensées, ses interrogations dans sa quête.
Une écriture agréable et une quête émouvante.

Merci Arnaud et les éditions Philippe Rey pour ce livre plein de sensibilité.

Extrait : (début du livre)
Ma mère avait 26 ans quand je suis née, 45 quand elle est morte, moi 19.
Elle n'a donc jamais connu ma fille, qui est née quand elle en aurait eu 58, j'en avais 32.
Ma fille est morte à 16 ans, quand j'en avais 48, ma mère en aurait eu 74.
Si l'on considère que ces deux disparitions furent, selon la formule consacrée, brutales, qu'elle est la probabilité que ces deux mortes bavardent au ciel ?
Voltigeante arithmétique.
On dirait un énoncé de problème de maths, avec des trains qui déraillent et des robinets qui fuient. Sauf que là, ce sont des vies qui fuient et des destins qui déraillent.

De cette mathématique du fracas et de la perte, je vais poser une équation à deux inconnues : le passé de ma mère, le futur de ma fille. Brouillons éternels. Clairement, ces deux inconnues le resteront pour toujours.

Je vais reprendre le fil générationnel que la mort a trouvé marrant de couper entre ses dents, telle une couturière capricieuse et impatiente, et je vais raccommoder les trous, faufiler des pièces aux coudes et genoux de ce grand squelette prématurément décharné. Je vais les coudre ensemble.

Déjà lu du même auteur : 
105626639 Camille, mon envolée 

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28 août 2016

Un peu plus loin sur la droite - Fred Vargas

Lu en partenariat avec Audiolib

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Audiolib - juin 2016 - 7h32 - Lu par Philippe Allard

Viviane Hamy - mars 1996 - 255 pages

J'ai Lu - octobre 2005 - 256 pages

Quatrième de couverture :
Embusqué sur le banc 102, celui de la Contrescarpe, Kehlweiler, « l’Allemand », avise une drôle de « bricole » blanchâtre égarée sur une grille d’arbre. 
Ce petit bout d’os humain – car il s’agit de cela – l’obsède jusqu’à ce qu’il abandonne ses filatures parisiennes pour rallier Port-Nicolas, un village perdu au bout de la Bretagne.
Et l’attente commence dans la salle enfumée du vieux Café de la Halle. Il écoute, il surveille, de bière en bière, de visage en visage… Et, sans trêve, par les routes humides et les grèves désertes, il fait courir son assistant, Marc Vandoosler, le médiéviste rencontré dans Debout les morts.
Qui tue ?

 

Auteur : Fred Vargas est née en 1957. Médiéviste et titulaire d’un doctorat d’Histoire, elle est chercheur en Histoire et Archéologie au CNRS. La quasi-totalité de son œuvre – les « rompols » comme elle appelle ses textes policiers – est publiée aux Éditions Viviane Hamy. Primés à plusieurs reprises, adaptés au cinéma – Pars vite et reviens tard – et à la télévision, traduits dans plus de 40 langues, ses livres sont des best-sellers en France comme en Allemagne et en Italie.

Lecteur : Né à Bruxelles en 1968, Philippe Allard est comédien, improvisateur et musicien, mais également acteur de doublage (films, documentaires et séries) depuis 1995 : il a entre autres prêté sa voix à la version française de House of Lies (Don Cheadle). Il a déjà enregistré pour Audiolib, entre autres, Le vol des CigognesUne Vérité si délicateTrois mille chevaux vapeur et Ceux qui vont mourir te saluent.

Mon avis : (écouté en août 2016)
Cette relecture en mode audio de ce livre de Fred Vargas m'a beaucoup plu. J'en gardais quelques souvenirs mais je l'ai redécouvert avec grand plaisir. Le héros de ce polar n'est pas comme d'habitude Adamsberg mais 
Louis-Ludwig Kehlweiler, ancien du ministère de l'intérieur, accompagné accompagné de Bufo, son fidèle crapaud... C'est un ami d'Adamsberg qui possède un réseau national d'indicateurs, tout commence avec la découverte d'un petit os humain dans une crotte de chien sur une grille d'arbre à côté du banc 102... Une découverte insignifiante, mais qui obsède Kehlweiler. Comment cet os est arrivé là ? A qui appartient cet os ? Avec l'aide de Marc (spécialiste du Moyen-Age) et Mathias (le préhistorien) déjà rencontrés dans "Debout les morts", l'enquête va mener Louis-Ludwig Kehlweiler entre Paris et la Bretagne...
Les nombreux personnages rencontrés sont hauts en couleurs, l'histoire est prenante et l'intrigue pleines de surprises et de rebondissements. J'ai passé de très bons moments en écoutant cette histoire captivante lu avec beaucoup de talent.

Merci Audrey et Audiolib pour cette relecture très plaisante.

Extrait : (début du livre)
- Et qu'est-ce que tu fous dans le quartier ?

La vieille Marthe aimait discuter le coup. Ce soir, elle n'avait pas eu son compte et elle s'était acharnée sur un mot croisé, au comptoir, avec le patron. Le patron était un brave type mais exaspérant pour les mots croisés.
Il répondait à côté, il ne respectait pas la consigne, il ne s'adaptait pas à la grille. Pourtant il aurait pu servir, il était calé en géographie, ce qui était curieux parce qu'il n'avait jamais quitté Paris, pas plus que Marthe. Coule en Russie en deux lettres verticales, le patron avait proposé "Ienisseï ".
Enfin, c'était mieux que de ne pas parler du tout. Louis Kehlweiler était entré au café vers onze heures. Ça faisait deux mois que Marthe ne l'avait pas vu et il lui avait manqué, en fait. Kehlweiler avait mis une pièce dans le flipper et Marthe regardait les trajets de la grosse boule. Ce jeu de dingue, avec un espace fait exprès pour paumer la boule, avec une pente à remonter au prix d'incessants efforts, et que, sitôt atteinte, on redévalait aussi sec pour se perdre dans l'espace fait exprès, l'avait toujours contrariée. Il lui semblait que cette machine n'avait de cesse, au fond, de donner des leçons de morale, une morale austère, injuste et déprimante. Et si, par emportement légitime, on lui foutait un coup de poing, elle tiltait et on était puni. Et il fallait payer pour ça en plus. On avait bien tenté de lui expliquer que c'était un instrument de plaisir, rien à faire, ça lui rappelait son catéchisme.
- Hein? Qu'est-ce que tu fous dans le quartier ?
- Je suis passé voir, dit Louis. Vincent a remarqué des trucs.
- Des trucs qui valent le coup ?
Louis s'interrompit, il y avait urgence, la boule du flipper filait droit vers le néant. Il la rattrapa d'une fourchette et elle repartit crépiter vers les hauteurs, mollement.
- Tu joues mou, dit Marthe.
- J'ai vu, mais tu parles tout le temps.
- Faut bien. Quand tu fais ton catéchisme, t'entends pas ce qu'on te dit. Tu ne m'as pas répondu. Ça vaut le coup ?
- Ça peut. Faut voir.
- C'est du quoi? Politique, crapuleux, indéterminé ?
- Ne braille pas comme ça, Marthe. Ça te fera des ennuis un jour. Disons que ce serait de l'ultraréac qui se trouve là où on ne l'attendrait pas. Ça m'intrigue.
- Du bon ?
- Oui, Marthe. Du vrai, appellation nationale contrôlée, mis en bouteille au château. Faudrait vérifier, bien sûr.
- Ça se Passe où ? C'est à quel banc ?
- Au banc 102.
Louis sourit et lança une boule. Marthe réfléchit. Elle s'embrouillait, elle perdait la main. Elle confondait le banc 102 avec les bancs 107 et 98. Louis avait trouvé plus simple d'attribuer des numéros aux bancs publics de Paris qui lui servaient d'observatoires. Les bancs intéressants, cela va de soi. C'est vrai que c'était plus commode que de détailler leur situation topographique précise, d'autant que la situation des bancs est généralement confuse. Mais en vingt ans, il y avait eu des changements, des bancs mis à la retraite, et des nouveaux dont il fallait s'occuper. On avait dû numéroter des arbres aussi, quand les bancs manquaient dans des emplacements clefs de la capitale. Il y avait aussi les bancs de passage, pour les petites histoires. À force, on en était au n°137, parce qu'on ne réutilisait jamais un ancien numéro, et ça se mélangeait dans sa tête. Mais Louis interdisait qu'on ait des aide-mémoire.
- Le 102, c'est celui avec le fleuriste derrière? demanda Marthe en fronçant les sourcils.
- Non, ça c'est le 107.
- Merde, dit Marthe. Paye-moi un coup au moins.
- Prends ce que tu veux au bar. Il me reste trois boules à jouer. 
Marthe, elle n'était plus aussi performante. À soixante-dix ans, elle ne pouvait plus rôder comme avant dans la ville, entre deux clients. Et puis elle confondait les bancs. Mais enfin, c'était Marthe. Elle n'apportait plus beaucoup de renseignements mais elle avait d'excellentes intuitions. Son dernier tuyau remontait bien à dix ans. Ça avait foutu une merde salutaire, ce qui était l'essentiel.
- Tu bois trop, ma vieille, dit Louis en tirant le ressort du flipper.
- Surveille ta boule, Ludwig.
Marthe l'appelait Ludwig, et d'autres l'appelaient Louis. Chacun faisait son choix, il avait l'habitude. Ça faisait cinquante ans maintenant que les gens balançaient d'un prénom à l'autre. Il y en avait même qui l'appelaient Louis-Ludwig. Il trouvait ça idiot, personne ne s'appelle Louis-Louis.
- T'as amené Bufo ? demanda Marthe en revenant avec un verre.

 

Déjà lu du même auteur :

Ceux_qui_vont_mourir_te_saluent Ceux qui vont mourir te saluent l_homme_aux_cercles_bleus L'Homme aux cercles bleus

Debout_les_mort Debout les morts Un_peu_plus_loin_sur_la_droite Un peu plus loin sur la droite

sans_feu_ni_lieu Sans feu ni lieu l_homme___l_envers L'Homme à l'envers

Pars_vite_et_reviens_tard Pars vite et reviens tard sous_les_vents_de_neptune  Sous les vents de Neptune

Dans_les_bois__ternels Dans les bois éternels un_lieu_incertain Un lieu incertain

les_quatre_fleuves Les Quatre fleuves (BD) vargas L'Armée furieuse 

temps glacières Temps glacières 

En audio 

94114487 L'homme aux cercles bleus 

pars et reviens tard_CDlivraphone Pars vite et reviens tard

 

22 août 2016

De terre et de mer - Sophie Van der Linden

Lu en partenariat avec Babelio et les éditions Buchet Chastel

de terre et de mer Buchet Chastel - août 2016 - 144 pages

Quatrième de couverture : 
Au début du siècle dernier, Henri, un jeune artiste, parvient sur l’île de B. après un long voyage.
Venu rendre visite à la femme qui s’est détournée de lui, il y séjournera vingt-quatre heures, le temps pour lui de déambuler dans ce paysage envoûtant, et d’y faire des rencontres singulières.
Jusqu’à la chute finale, le lecteur chemine à la suite du héros dans cette atmosphère vibrante, rendue par une écriture impressionniste aux multiples résonances.

De terre et de mer est le troisième roman de Sophie Van der Linden. Après La Fabrique du monde, L’Incertitude de l’aube, l’auteur confirme encore son talent et dépeint avec acuité l’expression des sensations et des sentiments.

Auteur : Née en 1973, Sophie Van der Linden vit à Conflans-Sainte-Honorine. Elle a publié des ouvrages de référence sur la littérature pour la jeunesse, dont elle est spécialiste. Elle a déjà publié deux romans (La Fabrique du monde et L'Incertitude de l'aube)

Mon avis : (lu en août 2016)
Début du vingtième siècle, Henri, jeune artiste peintre, arrive sur l’île de B. pour rendre visite à Youna, la jeune femme qu'il aime et qui ne répond plus à ses lettres. Il a entrepris ce long voyage pour avoir une explication. Sur l'île, la jeune femme s'est installée dans la maison de sa grand-tante et a repris son activité d'herboriste. Elle a conquis son indépendance et la liberté et rien ne l'empêchera de la garder. Econduit, Henri devra passer la nuit dehors et avant de reprendre le bateau du retour, il fera quelques rencontres...
Dans ce livre, tous nos sens sont en éveil, à travers l'œil du peintre, la description de cette petit île est pleine de couleurs et de nuances comme sur un tableau, les odeurs de la végétation, de la mer, les bruits de la nuit... 
La couverture du livre est superbe, c'est un tableau de Jean-Baptiste Corot qui illustre parfaitement l'atmosphère de ce court roman. Voilà une jolie balade pleine de poésie de 24 heures sur cette petite île avec des rencontres improbables, amusantes ou marquantes et surtout une conclusion magnifique. J'ai beaucoup aimé !

Merci à Babelio et aux éditions Buchet Chastel pour cette très belle découverte

Extrait : (début du livre)
Les nuages n’étaient plus ici ceux, charnus et lourds, de la campagne de Paris. Mobiles, gracieux et diffus, ils semblaient, comme lui, attirés par la mer, pourtant encore lointaine. Depuis que son train avait quitté la halte Bel-Air sur ce dernier embranchement progressant vers le nord, Henri scrutait le paysage et guettait l’irruption de l’aplat bleu qui signalerait aussi bien l’arrivée imminente du train à sa destination que le début d’un autre voyage, celui pour l’île de B.

Enfin, ce n’était pas un voyage, tout juste une traversée. Et courte encore, une demiheure sans doute. Mais Henri n’avait jamais que peu vogué.
Son regard s’accrochait à la cime des arbres, s’attardait sur les mamelons, piquait  dans les vallons, s’envolait dans les masses d’air frais que ce temps encore un peu instable ne manquait pas d’insuffler au calme paisible d’un ciel estival.

Le train parvint à R. sans qu’Henri eût aperçu la moindre perspective marine. Rien de bleu ne perça à l’horizon de ce diorama désarticulé qu’est le paysage fuyant sous l’oeil du voyageur ferroviaire.
De la gare, il gagna le port en traversant la ville. Débouchant d’une rue sombre et humide, comme le sont toutes les rues de cette cité granitique, encombrée par les charrettes à chevaux convoyant la production
maraîchère de l’arrière-pays, il vit enfin la mer, sans pouvoir cependant s’attarder à sa contemplation tant il était soucieux d’attraper le dernier sloup qui le déposerait sur l’île à une heure raisonnable pour rendre
visite.
Une fois le point d’embarcation repéré, il rejoignit une courte file de passagers. Lorsque vint son tour, Henri, dans la fatigue de son long voyage, dans l’encombrement de son bagage et de son bouquet de fleurs acheté à la hâte lors d’une correspondance, dans son impatience et, surtout, dans son trouble inexplicable, causé par le carillon de l’église sonnant quatre heures, posa un pied sur l’embarcation somme toute légère d’un mouvement qu’il aurait voulu leste mais qui, dans ce désordre, y imprima un bruit sourd et une franche oscillation. Les passagers ayant déjà pris place à bord durent se cramponner subitement pour ne point perdre l’équilibre. S’ils ne prononcèrent mot, ces îliens, pour la plupart, en eurent toutefois en réserve pour cet étranger sans usage ni manière.
De l’air ! Cet air-là ! Comme il m’a manqué en vérité. Henri oublia l’incident lorsqu’il put enfin lever le nez, humer les ressacs iodés de l’eau du port claquant le quai, et se tourner vers le large s’offrant maintenant à son regard. Il avait vécu son enfance et le début de sa jeunesse sur la côte.
Pourtant, ses origines paysannes l’avaient toujours maintenu éloigné de la navigation. La mer n’en demeurait pas moins pour lui une source de joie et d’apaisement.

Déjà lu du même auteur :

 9782283026472-5ae6f La fabrique du monde

 

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