Albin Michel – août 2008 – 368 pages
Présentation de l'éditeur
Pour la énième fois, Elsa, mère de famille, 4 enfants, regarde le DVD de Chaînes conjugales, le classique de Mankiewicz. La veille, son mari l'a prévenue qu il ne rentrerait pas dans une maison où sa femme regardait en boucle depuis trois mois le même film. L'histoire de 3 amies qui en attendent une 4e. A l'instant d'embarquer pour une croisière, elles reçoivent de la retardataire, une lettre qui gâchera leur journée. Cette dernière les informe malicieusement qu'elle quitte la ville avec le mari de l'une d'entre elles, les projetant pour plusieurs heures dans l'angoisse, les soupçons, la jalousie...
Elsa regarde le film avec deux de ses aînés dont les réparties fusent, corroborant ses appréhensions les plus intimes. Les héroïnes du film lui tendent un miroir, véritable révélateur de sa situation conjugale, dans lequel elle se projette. Elle finit par céder aux larmes, à l'apitoiement, puis au désir de reconquête de ce mari qui ne revient toujours pas...
Comment un film peut être le révélateur d'une situation conjugale, comment peut-on arriver à analyser sa situation à travers une fiction, comprendre que l'amour ne se vit pas à travers les autres mais dans la réalité ? Amour, désamour, non-dits, malentendus, lassitude, désir, peur de la solitude... Alice Ferney explore avec beaucoup d'intelligence, de sensibilité et de subtilité les variations du sentiment amoureux dans le couple, comment s'inventer le pire pour renaître à l'amour.
Biographie de l'auteur
Depuis Le Ventre de la fée (1993), Alice Ferney explore avec talent ces thèmes principaux que sont la féminité, la maternité et le sentiment amoureux. Elle est l'auteur de nombreux succès : L'Elégance des veuves (1995), Grâce et dénuement (1997), La Conversation amoureuse (2000), Dans la guerre (2003) Les Autres (2006), tous parus chez Actes Sud.
Mon avis : (lu en février 2009)
Encore un livre original d'Alice Ferney, mais je ne peux pas dire que j'ai aimé ou pas aimé... J'ai lu le livre avec intérêt : ce livre nous parlent des couples installés dans le quotidien et qui n'expriment plus leur amour. Pour cela, nous suivons avec Elsa et ses deux aînés Noémie(16 ans) et Max (12 ans) une description du film « Chaînes conjugales », scènes par scènes.
Ce livre nous fait réfléchir sur nous-même, sur les apparences et la profondeur des couples... mais après avoir fini le livre, j'ai très envie de voir le film !
Ce livre fait référence au film américain "Chaînes conjugales" de 1949, réalisé par Joseph L. Mankiewicz avec Jeanne Crain, Linda Darnell, Ann Sothern. Trois amies, Deborah Bishop, Rita Phipps et Laura May Hollingsway, embarquent pour une croisière. Mais au moment de partir, elles reçoivent une lettre d'une relation commune, Addie Ross. Celle-ci les prévient qu'elle part avec le mari de l'une d'entre elles. Mais lequel ?
Extrait : (page 16)
Elsa Platte peut encore entendre la phrase, assourdie dans sa mémoire vive, comme si elle s'était cachée sous l'eau lorsqu'il s'était mis à parler. Il ? C'était son mari qui disait : Demain soir et les soirs suivants, prépare-toi à dormir seule. Je ne rentrerai pas. Je ne rentrerai pas dans une maison où ma femme est installée devant la télévision, voit le même film depuis trois mois, ne se lève pas pour me préparer à dîner, et se couche sans me regarder ! Non décidément, l'époux n'est ce soir ni dans le sillage parfumé, ni dans la maison, le lit ou les bras d'Elsa. Elle est seule. C'est la plus triste manière d'être tranquille. Elle peut regarder le film. Elle pense que la perte de l'objet aimé détruit toute la joie de la vie.
Extrait : (page 157)
Autant qu'Elsa Platte le connût, son mari lui semblait doux, pacifique, égal d'humeur, mais peu sensible en vérité. L'un d'ailleurs expliquant l'autre, ou le facilitant : pacifique et sans humeurs parce que pas sensible justement. Non, décidément, elle avait rencontré peu d'hommes aussi intelligents et peu expressifs. Comme si toute l'intelligence se concentrait dans sa forme hypothético-déductive et délaissait le champ intérieur, humain et affectif. Elle avait épousé un cerveau. Un cerveau et un sexe ! Et face à cette unité impassible, Elsa Platte était une fontaine et une éruption. Elle avait ri, parlé et pleuré pour deux en quelque sorte.
Extrait : (page 208)
Joseph Mankiewicz s'amusait à mettre en scène la rouerie féminine, et la complicité des femmes entre elles lorsqu'il s'agit de piéger un homme qui arrange la famille. Car Sadie jouait le jeu, arrêtant juste à temps la mère qui allait faire une gaffe (ton sac est sur la table, ne le cherche pas !). Laisse jouer la petite qui sait y faire, devait penser Sadie. Lora Mae ! Elle menait une partie d'échecs, coup après coup, et cette partie-là, contre un matou séducteur habitué à ce qu'on lui cédât et vivement alléché par de naturels appâts, était facile à mener : Porter Hollingsway, pris dans les filets de l'attirance, était plus prévisible que n'importe quel joueur.
Me voilà bien embêté