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28 novembre 2015

Une forêt d'arbres creux - Antoine Choplin

Lu dans le cadre des Matchs de la Rentrée Littéraire 2015 PriceMinister

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une foret d'arbres creux La fosse aux ours - août 2015 - 120 pages

Quatrième de couverture : 
TEREZIN, RÉPUBLIQUE TCHÈQUE, décembre 1941.
Bedrich arrive dans la ville-ghetto avec femme et enfant. Il intègre le bureau des dessins.
Il faut essayer de trouver chaque matin un peu de satisfaction en attrapant un crayon, jouir de la lumière sur sa table à dessin, pour enfin s'échapper du dortoir étouffant, oublier la faim, la fatigue et l'angoisse.
Chaque jour se succèdent commandes obligatoires, plans, aménagements de bâtiments. Chaque nuit, le groupe se retrouve, crayon en main, mais en cachette cette fois. Il s'agit de représenter la réalité de Terezin sans consigne d'aucune sorte.
Et alors surgissent sur les feuilles visages hallucinés, caricatures. Tout est capté et mémorisé la nuit puis dissimulé précieusement derrière cette latte de bois du bureau des dessins.

Auteur : Né en 1962, Antoine Choplin vit près de Grenoble, où il partage son temps entre l’écriture et l’action culturelle. Il est directeur de « Scènes obliques », dont la vocation est d’organiser des spectacles vivants dans les lieux inattendus, des sites de montagne. Il est aussi l’animateur depuis 1996 du Festival de l’Arpenteur (Isère), qui chaque mois de juillet programme des rencontres inhabituelles entre des créateurs (notamment des écrivains) et le public. Il s’est fait connaître en 2003 lors de la publication de son roman, Radeau, (2003), qui a connu un vrai succès populaire (Prix des librairies « Initiales », Prix du Conseil Général du Rhône). Parmi ses derniers titres : Léger Fracas du Monde (2005), L’impasse (2006), Cairns (2007), et de Apnées (2009), Cour Nord (2010), Le héron de Guernica (2011), La nuit tombée (2012), Les gouffres (2014).

Mon avis : (lu en novembre 2015)
Ce livre est un vrai coup de poing et coup de coeur.
Dans ce livre, Antoine Choplin nous raconte une histoire vraie, celle de Bedrich Fritta, un artiste tchèque déporté au camp de Terezin avec sa femme et son fils âgé de 1 an. Bedrich a été affecté au bureau des dessins techniques, il y dessine et supervise les plans d'aménagement du camp, en particulier, il va devoir avec son équipe dessiner les plans des futurs crématoriums. 
La nuit, en secret, avec quelques uns de ses compagnons, ils dessinent leur quotidien, la réalité du camp. Comme un acte de résistance, ils veulent témoigner et durant quelques heures dessiner "librement". 
Un travers un récit cours, juste, sobre et avec une écriture poétique, l'auteur dessine le ghetto de Terezin avec son l'atmosphère pesante, ses horreurs, la violence, la peur de partir dans ces trains vers la mort, la fatigue des corps amaigris mais aussi ses petits gestes d'humanité, ses lueurs d'espoir, la passion de l'art qui aide à survivre, la résistance... 

Merci PriceMinister pour ce partenariat et cette découverte poignante.

Après cette lecture touchante et forte, je me suis renseignée sur Bedrich Fritta (1906 - mort à Auschwitz en novembre 1944), voici ci-dessous quelques uns de ses dessins :

Bedřich Fritta, Barackenbau, (Auftragsarbeit), Theresienstadt 1942

Dessin "officiel" destiné à la propagande

 

Bedřich Fritta, Cvokárna: Raum mit geisteskranken Frauen, 1943

Bedřich Fritta, Sammelunterkunft, 1943

Bedřich Fritta, Männerunterkunft in der Sudetenkaserne, 1943

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Dessins non officiels

Bedřich Fritta, « Für Tommy zum dritten Geburtstag in Theresienstadt 22.1.1944 », 1943/44

Livre d'image réalisé en 1943 et 1944 pour les 3 ans de Tommy, le 22 janvier 1944

Extrait : (début du livre)
Quand il regarde les deux arbres de la place, il pense à tous les arbres du monde.
Il songe à leur constance, qu’ils soient d’ici ou de là-bas, du dehors ou du dedans. Il se dit : vois comme ils traversent les jours sombres avec cette élégance inaltérée, ce semblable ressort vital. Ceux bordant la route qui relie la gare au ghetto, et qui s’inclinent à peine dans la nudité ventée des espaces. Ceux des forêts au loin, chacun comme une obole au paysage, et dont la cohorte se perd au flanc des montagnes de Bohême. Ceux aussi des jardins de l’enfance et que colorent les chants d’oiseaux. Ceux des collines froides, des bords de mer, ceux qui font de l’ombre aux promeneurs de l’été. 
Ces deux-là sont peut-être des ormes. Des ormes diffus, à en juger par l’opulence décousue de la ramure. Même au seuil de l’hiver, la seule densité des branches réussit à foncer le sol d’un gris plus net. Voilà ce que Bedrich observe un long moment, le jour même de son arrivée à Terezin. Les deux ormes, appelons-les ainsi, de tailles sensiblement égales, jeunes encore sans doute, distants de quelques mètres à peine et confondant ainsi leurs cimes. Par contraste, la clarté laiteuse du jour perçant la ramure au cœur rend à chaque branche sa forme singulière. On voit ainsi combien la silhouette rondouillarde et équilibrée de l’arbre résulte de l’agrégat d’élancements brisés, de lignes rompues et poursuivant autrement leur course, de désordres. Dans ce chaos que ne tempère que cette tension partagée vers le haut, l’œil a tôt fait d’imaginer des corps décharnés, souffrants, empruntant à une gestuelle de flamme ou de danseuse andalouse, implorant grâce ou criant au visage de leur bourreau la formule d’un ultime sortilège, résistant un instant encore à l’appel du gouffre que l’on croirait s’ouvrant à la base du tronc.
Juste derrière les deux ormes passe la clôture de fils de fer barbelés, quatre ou cinq lignes noires et parallèles rythmées par les poteaux équidistants. Drôle de portée avec ses barres de mesure, vide de toute mélodie, et contre laquelle, à bien y regarder, semble se disloquer la promesse des choses. Car à l’œil englobant de Bedrich, les deux arbres naguère palpitants et qui le renvoyaient à la grande fratrie des arbres du monde, lui apparaissent maintenant, par le seul fait de ces barbelés, comme un leurre. Au mieux, ils s’évanouissent en tant qu’arbres pour n’être plus que créatures incertaines, soumises à plus fort qu’elles-mêmes. Pour peu, ils ne seraient bientôt plus qu’une illusion de la perception, jetés en irréalité par le trait de la clôture.
Voilà peut-être pour ce qui est de ce regard du premier jour porté par Bedrich sur les deux ormes de la place de Terezin. S’y entrelacent, en lisière de cette désolation, l’élan et la contrainte, la vérité et l’illusion, le vivant et le mort. À eux seuls, les barbelés ne disent rien, pas plus que les arbres ; ce sont les deux ensemble qui témoignent de l’impensable.
Il repense aux forêts aperçues depuis le train et à cette étrange sérénité que ces paysages lui ont procurée malgré tout. Les forêts portent les espoirs, il se dit. Elles ne trompent pas. On n’a jamais rapporté le cas d’une forêt d’arbres creux, n’est-ce pas ?

 

Déjà lu du même auteur :

le_h_ron_de_guernica Le héron de Guernica 5600 La nuit tombée 

cour_nord Cour Nord choplin_radeau Radeau 98602965 Les gouffres

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21 novembre 2015

Carthage - Joyce Carol Oates

Lu en partenariat avec les éditions Philippe Rey

livre_moyen_282 Philippe Rey - octobre 2015 - 608 pages

traduit de l’anglais (États-Unis) par Claude Seban

Titre original : Carthage, 2013

Quatrième de couverture :
Tout semble aller comme il se doit dans la petite ville de Carthage en ce début de juillet 2005, si ce n’est que Juliet Mayfield, la ravissante fille de l’ancien maire a, pour des raisons peu claires, rompu ses fiançailles avec le caporal Brett Kincaid, héros de retour de la guerre d’Irak. Un héros très entamé dans sa chair et dans sa tête, dont pourtant Cressida, la jeune sœur rebelle de Juliet, est secrètement amoureuse. Or, ce soir-là, Cressida disparaît, ne laissant en fait de traces que quelques gouttes de son sang dans la jeep de Brett. Qui devient alors le suspect numéro 1 et, contre toute attente, avoue le meurtre…
Sept ans après, un étrange personnage surgit qui va peut-être résoudre l’impossible mystère. C’est ce que vise Joyce Carol Oates qui est sur tous les fronts : violence, guerre, dérangement des esprits et des corps, amour, haine. Et même exploration inédite des couloirs de la mort… Un roman puissant et captivant.

Auteur : Joyce Carol Oates est née en 1938 à l'ouest du lac Erié. Son père travaillait pour la General Motors. Elle passe une enfance solitaire face à sa soeur autiste et découvre, lorsqu'elle s'installe à Detroit au début des années 60, la violence des conflits sociaux et raciaux. Membre de l'Académie américaine des arts et des lettres depuis 2008, professeur de littérature anglaise à Princeton. Titulaire de multiples et prestigieuses récompenses littéraires (elle figure depuis des années sur la courte liste des Nobélisables), Joyce Carol Oates figure depuis longtemps au premier rang des écrivains contemporains. Elle a reçu le prix Femina étranger en 2005 pour Les Chutes.

Mon avis : (lu en novembre 2015)
Juillet 2005, Carthage est une petite ville de l'état de New-York, à proximité du Canada. L'ancien maire Zeno Mayfield et sa femme Arlette ont deux filles Juliet et Cressida. L'aînée, Juliet est « la jolie », populaire et aimée de tous et la cadette, Cressida est « l’intelligente », au physique plus quelconque, solitaire et rebelle. 
Lorsque le livre commence, Cressida vient de disparaître, elle a passé la soirée chez une amie voisine et elle n'ai jamais rentré à la maison. Au lieu de rentrer directement, Cressida a été vu en compagnie de Brett Kincaid, l'ex-fiancé de Juliet. 

Brett est un gentil garçon qui s'est engagé dans l'armée américaine par conviction, il est revenu d'Irak grièvement blessé aussi bien physiquement que psychologiquement. Le couple qu'il espérait former avec Juliet n'a pas résisté.
Après plusieurs jours de recherche, on ne retrouve aucune trace de Cressida et tout accuse Brett. Le caporal est perpétuellement hanté par des scènes en Irak et par moment semble oublier le présent. Il finit par s'accuser du meurtre de Cressida sans pourtant expliquer ce qui s'est passé... Ainsi s'achève la première partie du livre mais le lecteur n'est pas au bout de ses surprises et des rebondissements que nous a réservé Joyce Carol Oates...
Nous pensons découvrir un simple fait divers, mais c'est un drame familiale qui va se dérouler sous les yeux du lecteur. 
L'histoire est dense, captivante et prenante, j'ai mis du temps à la lire. La psychologie des personnages est riche, l'ambiance pesante est parfaitement rendue. Une réussite.

Merci Arnaud et les éditions Philippe Rey pour cette découverte.

Extrait : (début du livre)
On ne m’aimait pas assez.
C’est pour ça que j’ai disparu. À dix-neuf ans. Ma vie jouée à pile ou face !
Dans cet espace immense – sauvage – des pins répétés à l’infini, les pentes abruptes des Adirondacks pareilles à un cerveau plein à éclater.
La réserve forestière du Nautauga : cent vingt mille hectares de solitudes montagneuses, boisées, semées de rochers, bornées au nord par le Saint-Laurent et la frontière canadienne, et au sud par la Nautauga, le comté de Beechum. On pensait que je m’y étais « perdue » – que j’y errais à pied – désorientée ou blessée – ou, plus vraisemblablement, que mon cadavre y avait été « balancé ». Une grande partie de la Réserve est sauvage, inhabitable et inaccessible, excepté pour les marcheurs et les alpinistes les plus intrépides. Presque sans interruption, pendant trois jours, dans la chaleur du plein été, des sauveteurs et des bénévoles menèrent des recherches, se déployant en cercles concentriques de plus en plus larges à partir d’un chemin de terre en cul-de-sac qui longeait la rive droite de la Nautauga, à cinq kilomètres au nord du lac Wolf’s Head, dans la partie sud de la Réserve. Une zone située à une quinzaine de kilomètres de Carthage, État de New York, où mes parents avaient leur maison.
Une zone touchant le lac Wolf’s Head, où, vers minuit le soir précédent, des « témoins » m’avaient vue pour la dernière fois en compagnie de l’agent présumé de ma disparition.
Il faisait très chaud. Une chaleur grouillante d’insectes après les pluies torrentielles de la fin du mois de juin. Les sauveteurs étaient harcelés par les moustiques, les mouches piqueuses, les moucherons. Les plus tenaces étaient les moucherons. Cette peur panique particulière inspirée par les moucherons – dans les cils, dans les yeux, dans la bouche. Cette peur panique d’avoir à respirer au milieu d’une nuée de moucherons.
Et pourtant vous êtes forcé de respirer. Si vous essayez de ne pas le faire, vos poumons respireront pour vous. Malgré vous.
À la fin de la première journée de recherches, les chiens n’ayant pas réussi à repérer la piste de la jeune disparue, les sauveteurs expérimentés n’avaient que peu d’espoir de la retrouver en vie. Les policiers en avaient encore moins. Mais les jeunes gardes forestiers et ceux des bénévoles qui connaissaient les Mayfield étaient déterminés à y réussir. Car les Mayfield étaient une famille bien connue à Carthage. Car Zeno Mayfield était une personnalité en vue à Carthage, et beaucoup de ses amis, de ses relations et de ses associés s’étaient joints aux sauveteurs pour chercher sa fille disparue, que la plupart ne connaissaient que de nom.
Aucun de ceux qui se frayaient un chemin à travers les broussailles de la Réserve, exploraient ravins et ravines, grimpaient les pentes rocailleuses et escaladaient, parfois avec difficulté, les parois zébrées d’énormes rochers en chassant les moucherons de leurs visages, n’acceptait de penser que dans une chaleur qui dépassait les 32 degrés à la tombée du jour le corps sans vie d’une jeune fille, un corps peut-être dénudé ou enfoui dans le sol, poissé de sang, serait prompt à se décomposer.
Aucun d’entre eux n’aurait voulu exprimer l’idée brutale (familière à tous les sauveteurs expérimentés) qu’ils pourraient bien sentir l’odeur de la fille avant de la découvrir.

Déjà lu du même auteur : 

nous__tions_les_Mulvaney Nous étions les Mulvaney  fille_noire__fille_blanche Fille noire, fille blanche 

petite soeur, mon amour Petite sœur, mon amour mudwoman  Mudwoman 

le_myst_rieux_Mr_Kidder Le mystérieux Mr Kidder 

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18 novembre 2015

Les amis du Paradis - Caroline Vermalle

Lu en partenariat avec les éditions Belfond

les amis du paradis Belfond - octobre 2015 - 252 pages

Quatrième de couverture : 
Antoine est un jeune homme timide qui rêve d'être un héros. Rose est une violoncelliste de talent, mais qui a perdu sa flamme intérieure. Et le Paradis est un somptueux cinéma, où le vieux Camille invite à rêver en projetant des films tous les dimanches soirs. Lors d'une nuit glaciale, une tempête de neige enveloppe le petit village, et Camille meurt. C'est à Antoine qu'il revient de continuer à faire vivre le Paradis, seule animation du village. Mais des choses étranges se passent. Dans le cœur solitaire d'Antoine, Camille n'a pas disparu, il est même là qui lui parle et le conseille chaque fois qu'Antoine se retrouve seul dans le cinéma, presque abandonné. Et puis surtout la mairie décide de vendre le Paradis, et le promoteur qui compte l'acheter va le détruire pour profiter du terrain. Soudainement Antoine n'est plus seul et c'est tout le village qui va se battre pour sauver le cinéma de Camille, la mémoire du village. Même Rose, la discrète musicienne, revenue dans la maison de son enfance depuis quelques semaines... Se souviendra-t-elle d'Antoine avec qui elle avait joué, enfant, aux châteaux de sable, plusieurs juillets de suite ? Est-ce seulement dans les films projetés au Paradis que des femmes comme Rose tombent amoureuses d'hommes comme Antoine ?

Auteur : Après des études de cinéma, Caroline Vermalle a travaillé à Londres pour la BBC, fait le tour du monde, puis s'est installée en Vendée, juste en face de l'Île d'Yeu, qui lui a inspiré L'Île des beaux lendemains (2013). Les amis du Paradis est son quatrième roman pour adultes. Elle a également publié un roman pour la jeunesse, Sixtine (2013).
Mon avis : (lu en novembre 2015)
Le Paradis est le vieux cinéma de Villerude-sur-Mer une station balnéaire familiale de Vendée. Camille est le vieux projectioniste du cinéma, tout les dimanches, il fait revivre la salle en programmant de vieux films. Antoine est mécanicien, vivant de petits boulots, il n'a pas quitté sa ville d'enfance. Il est toujours prêt à venir réparer les projecteurs de Camille lorsque l'urgence s'en fait sentir.
Rose est une grande violoniste, usée par les nombreuses tournées dans le monde entier, elle a tout plaqué et est venue se réfugier dans la maison de vacances de son enfance qui appartenait autrefois à ses grands-parents. Depuis son retour à Villerude-sur-Mer, elle vient chaque dimanche au cinéma. Elle va y croiser Antoine qu'elle ne reconnaît pas. Ce dernier, lui, l'a reconnu mais n'ose pas l'aborder. Il y a plus de vingt ans, Antoine et Rose ont joué plusieurs étés ensemble sur la plage...
Un soir de tempête, Camille meurt brutalement et Antoine, seul à savoir faire fonctionner les vieux projecteurs, reprend non sans peine le cinéma. Celui-ci est en danger, la mairie veut le vendre pour le détruire car il est coûteux... Antoine va avoir des soutiens inattendus et trouver sa voie. Je ne vais pas en raconter plus car la quatrième de couverture est déjà trop bavarde...
J'ai bien aimé cette histoire, les personnages d'Antoine et Rose sont très attachants. Le Paradis ne peut que nous faire penser au film Cinéma Paradiso (film que j'ai très envie de revoir), l'histoire est différente, mais le lecteur imagine un lieu comparable, plein de surprises et de magie...
Comme Rose, j'ai la chance d'avoir passées toutes mes vacances d'été depuis que j'ai l'âge de 3 ans dans une petite station balnéaire bretonne... Il s'y trouve également un vieux cinéma qui était paroissial et qui est devenu municipal depuis quelques années... A ma connaissance, il n'a jamais été menacé, mais notre maison de vacances n'ayant pas de télé, la séance de cinéma est une institution à chaque séjour... En particulier lors des séjours à Pâques ou à la Toussaint pour profiter d'une soirée bien au chaud... Dans cette lecture, j'étais donc totalement en phase avec les souvenirs de Rose et Antoine
Merci au éditions Belfond pour cet envoi surprise.
Extrait : (début du livre)
"Ferme la porte, Rose, ma puce, pour pas que les moustiques rentrent." C'était l'été, le néon de la cuisine était allumé au-dessus de mamie qui faisait la vaisselle et on était un peu mélancoliques. C'était le dernier soir des vacances.
On avait passé l'après-midi à la plage. Une immense plage longue qui semblait toujours à marée basse tellement elle était grande. Il n'y avait pas trop de monde, parce qu'ici, c'était une petite station balnéaire de Vendée entre Notre-Dame-de-Monts et Noirmoutier, et que "c'est pas comme sur la Côte d'Azur, où ils sont serrés comme des sardines". On avait eu de la chance, cette année, il y avait eu du soleil, sauf pour le feu d'artifice du 14 juillet où il avait plu comme vache qui pisse. En cette dernière journée, il avait fait un temps superbe et on en avait si bien profité qu'on avait pris un coup de soleil sur l'épaule. On avait fait un château de de sable un peu moche, mais qui avait des fortifications stratégiques décorées de coquillages, et qui avait bien résisté quand la mer était montée. On s'était fait un nouvel ami grâce au château, ce qui était idiot, vu qu'on partait le lendemain. On avait pris le dernier goûter dans les pins, des biscuits au chocolat ramollis par la chaleur mais qui croquaient sous les dents à cause du sable au fond du sac. On avait étendu une dernière fois les serviettes élimées à côté des maillots, où il restait encore quelques algues dans les plis.   

Déjà lu du même auteur :

l_avant_derni_re L'avant-dernière chance 9782714456656 Une collection de trésors minuscules 

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11 novembre 2015

Berezina - Sylvain Tesson

Lu en partenariat avec Babelio et les éditions Audiolib

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Audiolib - juillet 2015 - 4h51 - Lu par Franck Desmedt

Guérin - janvier 2015 - 199 pages

Quatrième de couverture : 
« Un vrai voyage, c’est quoi ?
– Une folie qui nous obsède, dis-je, nous emporte dans le mythe ; une dérive, un délire quoi, traversé d’Histoire, de géographie, irrigué de vodka, une glissade à la Kerouac, un truc qui nous laissera pantelants, le soir, en larmes sur le bord d’un fossé. Dans la fièvre…
– Ah ? fit-il. 
– Cette année ce sont les deux cents ans de la Retraite de Russie, dis-je.
– Pas possible ! dit Gras.
– Pourquoi ne pas faire offrande de ces quatre mille kilomètres aux soldats de Napoléon ? »
Sylvain Tesson embarque l’Empereur dans son side-car pour une épopée carnavalesque et réjouissante.
Entraîné dans une effraction du temps, le lecteur enjambe les siècles avec jubilation.

Auteur : Sylvain Tesson est un écrivain voyageur. Géographe de formation, il effectue en 1991 sa première expédition en Islande, suivie d’un tour du monde à vélo. Il traverse les steppes d’Asie centrale à cheval et publie alors L’immensité du monde. En 2004, il reprend l’itinéraire des évadés du goulag et publie L’Axe du LoupUne vie à coucher dehorsDans les forêts de Sibérie (Prix Médicis essai 2011) et S’abandonner à vivre lui valent une reconnaissance grandissante.

Lecteur : Élève du Cours Simon, Franck Desmedt s’est illustré authéâtre dans des pièces classiques et contemporaines. En 2000, il fonde sa propre compagnie à Bordeaux où, depuis 2011, il dirige un théâtre : l’INOX. Comédien à l’affiche de Dernier coup de ciseaux (Molière de la meilleure comédieen 2014). Il collabore régulièrement avec France culture et France Inter.

Mon avis : (lu en novembre 2015)
Berezina est un récit d'aventure original, c'est l'histoire de copains qui décident de refaire en plein hiver la route qu'avait suivi Napoléon et la Grande Armée lors de la retraite de Russie en 1812. Sylvain Tesson décide de revivre cette épopée en side-car, accompagné de quatre amis (deux français et deux russes). Ils vont partir de Moscou et rejoindre Paris en passant par
Minsk, Vilnius, Varsovie et Berlin. Sylvain Tesson a voyagé en compagnie de témoignages écrits de survivants, comme les mémoires de Caulaincourt, le secrétaire de Napoléon, ou du sergent Bourgogne. Au jour le jour, le lecteur suit le voyage de Sylvain et ses quatre amis, les témoignages historiques et les réflexions de l'auteur. Ces deux épopées sont difficilement comparables mais passionnantes à suivre confortablement et chaudement installé dans notre fauteuil... Le récit moderne est émaillé d'anecdotes et largement arrosé, alterne avec celui de Napoléon et sa Grande Armée. Voilà une belle aventure originale qui nous fait traverser l'Europe au rythme des 80 km/h maximum des motos Oural dans des conditions météorologiques hivernales...

Le lecteur est très agréable à écouter et l'on peut trouver dans l'étui du CD une carte générale pour suivre le périple de Sylvain et ses compagnons étapes par étapes.

Merci Babelio et les éditions Audiolib pour ce partenariat. 

Extrait : (début du livre)
LES IDÉES DE VOYAGE jaillissent au cours d’un précédent périple. L’imagination transporte le voyageur loin du guêpier où il s’est empêtré. Dans le désert du Néguev, on rêvera aux glen écossais ; sous la mousson, au Hoggar ; dans la face ouest des Drus, d’un week-end en Toscane. L’homme n’est jamais content de son sort, il aspire à autre chose, cultive l’esprit de contradiction, se propulse hors de l’instant. L’insatisfaction est le moteur de ses actes. « Qu’est-ce que je fais là ? » est un titre de livre et la seule question qui vaille.
Cet été-là, nous frôlions chaque jour des icebergs plaintifs. Ils passaient tristes et seuls, surgissant du brouillard, glaçons dans le whisky du soir. Notre voilier, La Poule, voguait de fjord en fjord. La lumière de l’été, brouillée par la vapeur, allaitait jour et nuit les côtes de Baffin. Parfois, nous accostions au pied d’une paroi de six cents mètres plantée dans l’eau. Alors, déroulant nos cordes, nous nous lancions dans des escalades. Le granit était compact, il fallait pitonner ferme. Pour cela, nous avions Daniel Du Lac, le plus vaillant d’entre nous. Il était à l’aise pendu au-dessus de l’eau – davantage que sur le pont du bateau. En ouvrant la voie, il délogeait des blocs. Les rochers nous fusaient dans le dos et claquaient l’eau avec un bruit d’uppercut dans une mâchoire coupable.
Cédric Gras suivait, soulevé par cette vertu : l’indifférence. Moi, je redoutais de redescendre. À bord du bateau, l’atmosphère n’était pas gaie. Dans le carré, chacun lapait sa soupe en silence. Le capitaine nous parlait comme à des chiens et nous prenait, le soir, pour son auditoire. Il fallait subir ses hauts faits, l’entendre dérouler ses vues sur cette science dont il s’était fait le spécialiste : le naufrage. Il y a comme cela des napoléons du minuscule ; en général, ils finissent sur les bateaux, le seul endroit où ils peuvent régner sur des empires. Le sien mesurait dix-huit mètres.
Un soir, avec Gras, nous nous retrouvâmes sur le pont avant. Des baleines soupiraient à la proue du bateau, nageaient mollement, roulaient sur le côté : la vie des gros.
« Il faut renouer avec un vrai voyage, mon vieux. J’en ai marre de cette croisière de Mormons, dis-je.
— Un vrai voyage, c’est quoi ? dit-il.
— Une folie qui nous obsède, dis-je, nous emporte dans le mythe ; une dérive, un délire quoi, traversé d’Histoire, de géographie, irrigué de vodka, une glissade à la Kerouac, un truc qui nous laissera pantelants, le soir, en larmes sur le bord d’un fossé. Dans la fièvre…
— Ah ? fit-il.
— Oui. Cette année, en décembre, toi et moi, nous devons aller au Salon du livre de Moscou. Pourquoi ne pas revenir à Paris en side-car ? À bord d’une belle Oural de fabrication russe. Toi, tu seras au chaud dans le panier, tu pourras lire toute la journée. Moi, je piloterai. On part de la place Rouge, on enquille plein ouest vers Smolensk, Minsk et Varsovie. Et tu sais quoi ?
— Non, dit-il.
— Cette année ce sont les deux cents ans de la Retraite de Russie, dis-je.
— Pas possible ?
— Pourquoi ne pas faire offrande de ces quatre mille kilomètres aux soldats de Napoléon ? À leurs fantômes. À leur sacrifice. En France, tout le monde se fout des Grognards. Ils sont tous occupés avec le calendrier maya. Ils parlent de la “fin du monde” sans voir que le monde est déjà mort.
— Pas faux, dit Gras.
— C’est à nous de saluer la Grande Armée, dis-je. Il y a deux siècles, des mecs rêvaient d’autre chose que du haut débit. Ils étaient prêts à mourir pour voir scintiller les bulbes de Moscou.
— Mais ça a été une effroyable boucherie ! dit-il.
— Et après ? Ce sera un voyage de mémoire. On frôlera aussi quelques catastrophes, je te le promets.
— Alors d’accord. »
Il s’écoula un moment. Priscilla nous rejoignit à la proue. Elle était de tous nos voyages. Avec ses boîtiers photos, ses huiles essentielles et ses gestes de yogi. On la mit au courant du projet. Un soleil cyanosé rôdait à l’horizon. La mer était d’acier. La queue d’un grand rorqual barattait ce mercure. Soudain, Priscilla :
« Pourquoi répéter la Retraite exactement ?
À bâbord, une baleine expira une fleur de vapeur. Le nuage resta en suspens dans la clarté.
— Pour le panache, chérie, pour le panache. »

Déjà lu du même auteur :

92853010 Dans les forêts de Sibérie

4 novembre 2015

Le pays où l'on arrive jamais - André Dhôtel

Lu en partenariat avec avec les éditions Flammarion jeunesse

le pays où Flammarion jeunesse - octobre 2015 - 317 pages

Illustrations Julia Wauters

Quatrième de couverture : 
Dans quel monde je suis tombé ? Moi, que ma tante vouait à la routine, j'ai été emporté par un cheval pie, envoyé ici par un coiffeur baroque, et voilà que je joue aux dames avec le fils d'un collectionneur de moustaches de chat, qui est immensément riche.

Auteur : André Dhôtel, né le 1er septembre 1900 à Attigny (Ardennes) et mort le 22 juillet 1991 à Paris, est un écrivain français, à la fois romancier, conteur et poète, ainsi qu'un scénariste. Connu du grand public par le roman Le Pays où l'on n'arrive jamais, prix Femina 1955, il est l'auteur d'une œuvre abondante et singulière, où s'exprime un merveilleux proche du quotidien, dans lequel le rapport à la nature joue un grand rôle.

Illustratrice : Julia Wauters, née en 1982 en Haute-Normandie, est une illustratrice-auteur et sérigraphe française. Elle vit et travaille à Nantes.

Mon avis : (relu en octobre 2015)
Ce livre n'est pas une nouveauté pour le texte puisqu'il a été écrit en 1955 par l'auteur et a obtenu le Prix Fémina 1955. 
Gaspard grandit dans un petit village des Ardennes, Lominval, ses parents forains l'ont confié à sa tante. Un jour, il rencontre un enfant de son âge qui se cache : ce dernier a fugué pour retrouver son pays et sa mère. Gaspard l'aide à fuir, puis il part à sa recherche. En chemin, Gaspard rencontre un cheval pie sauvage qui accepte de le prendre sur sa croupe. Gaspard est persuadé que ce cheval va le conduire vers l'enfant fugitif et ensuite les emmener vers le Grand Pays...
Un voyage initiatique à travers les Ardennes françaises et belges emporte Gaspard vers des rencontres nombreuses et riches. Un récit d'aventure plein de poésie et d'imaginaire. Gaspard découvrira l'amitié, l'amour et retrouvera ses parents et vivra des aventures merveilleuses et pleine de surprises.
Le plus de cette édition sont les illustrations de Julia Wauters. Elles utilisent la technique de la sérigraphie sur textile, une technique très intéressante qui donne un rendu plus évolué que les pochoirs. Cela donne également au livre un petit côté rétro.

Merci Brigitte, Chloé et les éditions Flammarion jeunesse pour cette belle redécouverte.

Extrait : (début du livre)
Il y a dans le même pays plusieurs mondes véritablement. Si l'on explore les Ardennes, ce n'est pas une forêt que l'on découvre, mais mille forêts. Dans les contrées situées au nord, jusqu'au Rhin ou jusqu'au port d'Anvers, ce sont des centaines de collines et de plaines chargées de richesses, et l'on peut voir aussi les eaux immenses des canaux, des fleuves, des bras de mer, tandis qu'au cœur des villes, sur des places, souvent désertes, s'élèvent des beffrois qui inspirent autant de terreur que d'admiration.

Très loin de ces splendeurs, Lominval est un village qui prétend au titre de bourg. on y trouve un bureau de poste, un notaire, un médecin et un hôtel pour les touristes, l'hôtel du Grand Cerf, qui a finalement donner le ton à toute l'agglomération. Il n'y avait là, naguère qu'un groupe de maisons rurales, isolé dans une enclave de la forêt des Ardennes. Puis des gens de la ville y sont venus passer leurs vacances, des villas se sont construites, et ainsi, a pris naissance une station provinciale qui garda toujours un caractère sérieux. Lominval est situé en bordure d'un ruisseau, la Flouve, dont les détours baignent des prairies bornées par l'enceinte des bois. Il y règne en toutes saisons un profond silence, et l'on ignore plus qu'ailleurs le monde varié qui se déploie jusqu'à la mer du Nord.

Gaspard Fontarelle naquit à l'hôtel du Grand Cerf. Cette vaste auberge portait une enseigne dorée et ses fenêtres s'ornaient de géraniums ou de balsamines selon la saison. Elle était tenue par la tante de Gaspard, Mlle Gabrielle Berlicaut, femme habile et intraitable.

 

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voir site Julia Wauters

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31 octobre 2015

A la poursuite de ma vie - John Corey Wharey

Lu en partenariat avec les éditions  Casterman

a la poursuite de ma vie Casterman - octobre 2015 - 384 pages

traduit de l'anglais par Antoine Pinchot

Titre original : Noggin, 2014

Quatrième de couverture : 
Travis, 16 ans, est atteint d’une leucémie incurable. Face à l’échéance fatale, un médecin lui propose de suivre un protocole expérimental et révolutionnaire : laisser mourir son corps malade et cryogéniser sa tête, seule partie de son corps épargnée par l’affection, en attendant que la science ait découvert un moyen de la greffer sur le corps d’un donneur. Les chances de succès sont infimes, mais Travis se porte volontaire. Lorsqu’il se réveille dans un corps inconnu au terme d’un long « sommeil » de cinq ans, mais avec la sensation de ne s’être absenté que trois semaines, il peine à reconnaître le monde qui l’entoure. Sa copine Cate et son meilleur ami Kyle ont désormais 22 ans, mais lui, avec un mental intact d’adolescent, a l’impression de les avoir quittées la veille. Ses parents, soucieux de préserver leur fils unique, lui cachent les bouleversements intervenus au sein de leur couple. Enfin, sa résurrection a fait de lui une célébrité médiatique sans qu’il y soit préparé. Très vite, Travis se sent tiraillé entre deux mondes : il appartient au passé, mais se sent prêt à tout pour trouver une place dans le futur qui est le sien désormais. Avec courage et détermination, il n’a d’autre choix que de partir à la poursuite de sa nouvelle vie…

Auteur : John Corey Whaley, né en 1984, est un auteur américain de romans pour jeunes adultes. 

Mon avis :  (lu en octobre 2015)
Travis a 16 ans lorsqu'il meurt d'une leucémie foudroyante. Il a accepté de participer à une expérience un peu particulière de cryogénie. Après sa mort, sa tête est conservée pour être plus tard greffée sur un autre corps. En acceptant cette expérience, Travis espère revivre un jour et peut-être retrouver Cate, sa petite amie, de nombreuses années plus tard. Or les progrès de la médecine ont été plus vite que prévu et finalement c'est seulement 5 ans plus tard que Travis revient à la vie. Pour lui, il a l'impression de se réveiller après quelques jours. Mais le monde autour de lui a continué de vivre. Ses amis ont maintenant 5 ans de plus que lui. Sa petite amie est fiancée... Travis a toujours le caractère d'un adolescent, qu'il n'a pas cessé d'être, contrairement à ses amis qui sont devenus des adultes. Travis a du mal à s'adapter à sa nouvelle vie, il a tendance à regretter sa vie d'avant... Il va lui falloir du temps pour arrêter de se plaindre et arrêter de ressasser le passé plutôt que de regarder vers l'avenir...
Cette histoire est très originale qui nous interroge sur comment vivre dans le corps d'un autre, ou pour les proches comment vivre un deuil avec un infime espoir de voir un proche revivre... 

Merci aux éditions Casterman pour cette lecture à la limite du fantastique.

Autre avis : Gambadou

Extrait : (début du livre)
Voilà : j'étais vivant, et puis je suis mort. C'est aussi simple que ça. Sauf que je suis de retour. Ce qui s'est passé dans l'intervalle reste pour moi un peu flou. Tout ce que je peux vous dire, c'est que ma tête a été séparée de mon corps puis placée dans un congélateur de l'hôpital de Denver, dans le Colorado.
Personne n'échappe à la mort. De tous les animaux de la planète, il paraît que l'homme est le seul à se savoir promis à une fin tragique. Seulement, certains sont confrontés à cette échéance beaucoup plus tôt que les autres. Par expérience, je peux témoigner qu'une existence humaine peut passer du paradis à l'enfer en moins de temps qu'il n'en faut pour prononcer les mots "leucémie aiguë lymphoblastique".
L'ancien moi est tombé malade en quelques jours, si rapidement que les médecins, incapables d'endiguer le mal, se sont trouvés réduits à commenter sa gravité et sa vitesse de progression. La chimio, la radiothérapie et les greffes de moelle osseuse n'ont fait qu'accélérer et renforcer le processus.
On dit qu'on ne vit qu'une fois. Je suis la preuve du contraire.

Challenge 3%
rl2015
13/18

11 octobre 2015

La piste noire - Åsa Larsson

Lu en partenariat avec les éditions Albin Michel

9782226318176m Albin Michel - septembre 2015 - 457 pages

traduit du suédois par Caroline Berg

Titre original : Svart Stig, 2006

Quatrième de couverture : 
Au nord de la Suède, au bord d’un lac gelé, un pêcheur découvre dans une cabane abandonnée le cadavre torturé d’une femme. La belle Inna Wattrang était la porte-parole de Mauri Kallis, un célèbre industriel à la tête d’une multinationale minière dont l’ascension et la réussite fascinent le pays. Les indices sont minces et les deux inspecteurs de la PJ de Kiruna font appel à l’ex-avocate Rebecka Martinsson, devenue procureur auxiliaire, pour tenter d’élucider les relations troubles qui semblent unir Kallis à son employée. Mais derrière le meurtre d’Inna se profile un univers de mensonges, de haines et de faux-semblants où le Mal se tient à l’affut comme un corbeau noir…
Secrets de famille, perversions, argent sale… avec cette nouvelle enquête de Rebecka Martinsson, Asa Larson, prix du Meilleur roman policier suédois pour Le Sang versé, sonne le renouveau du polar scandinave.

Auteur : Åsa Larsson a grandi à Kiruna, 145 km au-dessus du cercle polaire Arctique ; où se déroulent également ses romans. Avocate comme son héroïne, elle se consacre désormais à l'écriture. Les cinq tomes de la série autour de Rebecka Martinsson sont en cours de traduction dans 30 pays.

Mon avis : (lu en octobre 2015)
Ce livre est le troisième tome des enquêtes de Rebecka Martinsson. Il n'est pas nécessaire d'avoir lu les deux premiers épisodes pour suivre cette enquête. A la fin de l'épisode précédent, nous avions laissé Rebecka dans un sale état... Pour se remettre, elle a quitté son travail d'avocate et elle vient de reprendre le travail comme procureur auxiliaire. Elle va aider les policiers 
Anna-Maria Mella et Sven-Erik Stålnacke à mener une enquête autour de Mauri Kallis, un célèbre industriel. En effet, le cadavre de sa porte-parole, la belle Inna Wattrang, a été retrouvé dans une cabane de pêcheur au bord d’un lac gelé du nord de la Suède. 
Cette enquête est un vrai puzzle, le lecteur suit plusieurs personnages : suspects, proches des suspects, enquêteurs, dans le présent mais également dans le passé, en Suède mais également en Ouganda,  c'est parfois un peu brouillon mais le rythme est là, et je me suis prise au jeu de réunir toutes ces informations pour assembler le puzzle. 
J'ai pourtant été un peu surprise par la conclusion du livre qui m'a laissé pleine d'interrogations sur la fin de l'enquête... Dans la page de remerciement, il est question d'un quatrième épisode, sans doute y trouverai-je les réponses à mes questions...

Merci Aurore et les éditions Albin Michel pour ce partenariat.

Extrait : (page )
SUR LE LAC de Torneträsk, en cette saison qui n’existe qu’en pays sami et qui se situe entre l’interminable hiver polaire et le printemps tardif, la glace a plus d’un mètre d’épaisseur. Sur le plan d’eau long de soixante-dix kilomètres, s’égrènent des cabanes d’environ quatre mètres carrés, montées sur patins, que les habitants de Kiruna appellent arches et qu’ils attellent derrière leurs motoneiges à la fin de l’hiver pour y venir en villégiature.

Au milieu du plancher se trouve une trappe sous laquelle ils creusent un trou dans l’épaisse couche de glace. Un tube de PVC est relié à la trappe, empêchant le vent glacial de s’engouffrer dans la cabane. Les propriétaires de ces arches s’asseyent au bord de ce trou et ils pêchent, munis d’une canne courte.

Leif Pudas pêchait donc tranquillement en caleçon dans son arche. Il était huit heures et demie du soir. Il avait décapsulé quelques bières, vu qu’on était samedi. Le poêle à pétrole ronronnait. Il faisait bien chaud, plus de 25°. La pêche était bonne aussi, il avait attrapé quinze truites de montagne, petites mais quand même. Il avait aussi mis de côté une lotte pour le chat de sa sœur.
Lorsque lui vint l’envie de pisser, il ne s’en agaça pas, de toute façon il avait trop chaud et il avait besoin de se rafraîchir un peu. Il enfila ses bottes de motoneige et sortit dans le froid et l’obscurité, toujours en caleçon.
Quand il ouvrit la porte, le vent faillit la lui arracher des mains.
La journée avait pourtant été calme et ensoleillée, mais le temps change vite en montagne. La tempête s’acharnait sur la porte tel un chien enragé. Soudain le vent s’arrêta de souffler, il gronda, sembla rassembler ses forces et puis il revint furieusement à l’attaque, au point que Leif Pudas se demanda si les gonds allaient résister. Il dut s’accrocher des deux mains à la poignée pour refermer la porte derrière lui. Il se dit qu’il aurait peut-être dû s’habiller. Et puis merde, il ne fallait pas trois heures pour pisser un coup.
Les rafales étaient chargées de neige. Pas une neige fine et douce, non, une neige à congères, froide et tranchante comme du diamant. Elle courait au ras du sol comme un chat à neuf queues, lui fouettant la peau à un rythme régulier et impitoyable.
Leif Pudas courut se mettre à l’abri derrière son arche et se mit à uriner. Il était protégé du vent mais pas du froid glacial. Ses couilles se rétractèrent en deux petites boules dures comme du bois. Il parvint à pisser quand même, s’attendant quasiment à ce que son urine gèle avant d’atteindre la surface du lac et se transforme en un arc de glace jaune.
Alors qu’il finissait, il entendit un rugissement et, tout à coup, sa cabane se mit à glisser, le heurtant par-derrière. Il faillit tomber. La seconde suivante elle filait à toute allure sur la glace.
Il mit une longue seconde à comprendre ce qui s’était passé. La tempête venait d’emporter son arche. Il regarda le carré de lumière chaude et orangée de la fenêtre s’éloigner dans la nuit polaire.

Challenge 2%
rl2015
9/12

Challenge Voisins Voisines 2015
voisins voisines 2015
Suède

Déjà lu du même auteur :

9782226256096g Le sang versé

6 octobre 2015

L'homme idéal existe, il est québécois - Diane Ducret

Lu en partenariat avec les éditions Albin Michel

l'homme ideal existe

 Albin Michel - septembre 2015 - 192 pages

Quatrième de couverture :
Bonne nouvelle : l’homme idéal existe !
Il ne parle pas : il jase. Il n’embrasse pas : il frenche.
Il ne se déshabille pas : il se criss à poèlle.
Vous l’aurez deviné : il est Québécois.

Diane Ducret rhabille le mythe du Prince Charmant.
L’homme idéal ? Satisfaite ou remboursée !

Auteur : Diane Ducret est écrivain et essayiste. Après son premier livre Femmes de dictateur (2011), best-seller traduit dans vingt langues, elle publiera Femmes de dictateur 2 (2012) et La chair interdite (2014). Avec L'homme idéal existe. Il est québécois, elle change de registre où elle ose tout et dit tout haut ce que les autres pensent tout bas, sans censure ni tabous.

Mon avis : (lu en septembre 2015)
J'ai accepté de recevoir ce livre pour deux raisons. La première car je n'avais jamais lu cette auteur que j'ai entendu plusieurs fois à la radio pour ces livres précédents et dont je trouvais très intéressants ses propos. La deuxième car je m'intéresse au Québec... A la réception du livre, lorsque j'ai lu le dossier de presse, j'ai été un peu refroidie avec la phrase de conclusion « Entre Bridget Jones et La femme parfaite est une connasse, le livre est un véritable Bienvenue chez les Ch’tis amoureux – à la sauce québécoise. » (pour ma part, j'ai détesté le livre La femme parfaite est une c...).
Heureusement, le livre de Diane Ducret m'a beaucoup amusé, il se veut léger et divertissant. L'héroïne et narratrice est originaire du Pays Basque et vit à Paris depuis de nombreuses années, elle est déçue en amour. Mais un jour, elle rencontre dans une galerie d'art un homme charmant, Gabriel, après une soirée très agréable autour d'un dîner, ce dernier lui propose de venir passer quelques jours au Québec. Malgré sa phobie pour l'avion, notre héroïne accepte et part pour Montréal. Ce qui met plein de bonne humeur dans cette histoire plutôt banale, c'est la langue. En effet, le lecteur va découvrir de nombreuses expressions québécoises dont le sens peut prêter à confusion. Et de nombreux quiproquos vont émailler la relation de nos deux héros. Le personnage de Gabriel est un garçon cool, simple, direct et sans détour. Il prend la vie du bon côté, avec le sourire et de l'optimiste. Notre narratrice est plus compliquée, elle a tendance à tout analyser, elle a du mal à profiter des bons moments sans chercher la petite bête...
Petit reproche pour la couverture du livre trop simpliste.

Merci Aurore et les éditions Albin Michel pour cette lecture distrayante.

Extrait : 

Challenge 2%
rl2015
8/12
26 septembre 2015

Mentine T 02 : Cette fois c'est l'internat ! - Jo Witek

Lu en partenariat avec les éditions Flammarion Jeunesse

mentine Flammarion Jeunesse - août 2015 - 270 pages

Illustrations de Margaux Motin

Quatrième de couverture : 
Exclue.
Cette sentence est tombée en novembre, à quelques jours de mon anniversaire. J'allais avoir treize ans, j'étais déscolarisé et sur le champ de bataille de ma vie, une survivante : Johanna Estamplade, ma seule amie !
A la rentrée, tout se passe mal pour Mentine, sa meilleure amie Lola révèle qu'elle est surdouée. Révoltée, elle finit par se faire exclure de son établissement. Une seule solution : l'internat.

Auteur : Au départ comédienne et conteuse, Jo Witek se dirige assez vite vers l’écriture. D’abord pour le cinéma, en tant que scénariste et lectrice, puis pour la presse écrite et la littérature. Depuis 2009 elle écrit particulièrement pour les ados, des documentaires et des romans – En un tour de main et Récit intégral (ou presque) d’une coupe de cheveux ratée. Elle est l'auteur de Peur ExpressRêves en noirUn hiver en enferMa vie en chantier et Un jour j'irai chercher mon prince en skate. Elle réside aujourd’hui à Pézenas.

Mon avis : (lu en septembre 2015)
Je n'avais pas lu le premier tome des aventures de Mentine, cela ne m'a pas empêchée de lire celui-ci avec beaucoup de plaisir. 
Mentine est à la veille de ses treize ans et elle n'a pas le moral... Elle est en train d'imaginer le discours qu'on lirait à son enterrement... Quel drôle de comportement... mais Mentine adore jouer à cela lorsqu'elle déprime ! Ce début d'histoire est particulier... mais Mentine est une fille spéciale : elle vient de se faire renvoyer de son collège pour « son comportement agressif et blessant envers ses camarades et professeurs ». Cela commence par une dispute avec celle que Mentine considérait comme sa meilleure amie, Lola. Celle-ci s'est mise avec Téo, le plus beau garçon de la classe, et elle lui a raconté le secret de Mentine... Cette dernière cache depuis qu'elle est scolarisée qu'elle est une EIP (Enfant Intellectuellement Précoce). Mentine est tellement furieuse qu'elle se jette sur Lola et lui saute à la gorge comme un furie... Ensuite, c'est tout le collège qui est contre elle, on la traite de tricheuse et seule Johanna est restée son amie... 
Après son renvoi, ses parents décident de l'envoyer en Suisse dans un internat où ils espèrent que Mentine s'épanouiera et apprendra à accepter son QI exceptionnel !
Ce livre est destiné à l'âge collégien, l'histoire est rythmée, pleine d'humour même si les problèmes de Mentine ne le sont pas. Elle est également joliment illustrée par Margaux Motin.

Merci Brigitte, Alicia et les éditions Flammarion Jeunesse pour cette jolie découverte.

Extrait : (début du livre)
Mentine n’avait même pas treize ans. Fauchée en pleine jeunesse, cette brillante adolescente nous a quittés sans prévenir. Elle était si jolie, comme disait la chanson, si vive, si passionnée, drôle et insolente ; la société ne l’a pas supporté. Les élèves du collège Jules-Ferry non plus. Eh oui, chers amis, pour survivre dans la terrible jungle de la puberté, au cœur même de la pousse des poils, des seins, des désirs sauvages et des boutons d’acné, un tour de poitrine de 90 B est plus utile qu’un QI de 150 ! C’est ce drame que nous raconte la courte et fulgurante histoire de Mentine Green. À cinq ans déjà, elle savait lire, à huit, elle s’intéressait aux nébuleuses, au système solaire interne et externe, aux trous noirs et de ver. À onze ans, elle dévorait en masse des cupcakes, ainsi que des romans gothiques de 800 pages. À douze, elle se passionnait pour les sciences naturelles, observant à la loupe les dessous masculins dans les catalogues de sa grand-mère. Oui, elle était de la race des grandes figures de l’humanité ! De la trempe de ceux qui s’interrogent en permanence sur tout et n’importe quoi. Du côté de ceux qui cherchent, trouvent et gagnent des prix Nobel. Pourtant, elle a tout foiré. Un beau massacre. Mentine n’a pas supporté d’être étiquetée EIP, HQI, HP1 , et encore moins « boulette », « grosse tronche », « p’tit génie », « Einstein en string ». Inclassable, déclassée, bannie, moquée, elle a préféré en finir sans obtenir les réponses à ses ultimes questions : « comment penser l’infini ? » et « pourquoi Téo Mallant ne veut-il pas sortir avec moi ? ». Pauvre enfant, elle a vécu son haut potentiel intellectuel comme un cadeau empoisonné ! Elle laisse derrière elle un sentiment de gâchis, celui de la société qui ne sait plus se réjouir des talents hors norme. Adieu, Mentine Green, tu ne manqueras à personne, sauf peut-être à ta famille, à ta meilleure amie et à quelques admirateurs anonymes… 
— Mentine, ça va refroidir ! À table ! Je ne le répéterai pas.
— GRRRR ! Ma mère a le don d’interrompre mes oraisons funèbres. Comme si elle devinait que j’étais en train de m’imaginer morte et que cela lui était insupportable. Ce qui est normal en soi, mais je trouve tout aussi normal de penser à la mort à mon âge. Rien de plus naturel. Personnellement, j’adore faire ça quand je déprime. Imaginer les discours qu’on lirait à mon enterrement. Je ne suis pas mauvaise en la matière. D’ailleurs, je suis certaine que vous étiez sur le point de pleurer vous aussi, n’est-ce pas ? Allez, avouez ! Il n’y a pas de honte à se laisser berner par de beaux discours. C’est la force des mots qui permet de rendre le monde moins moche qu’il en a l’air. Ou parfois l’inverse. Vous l’aurez compris, à ce moment de ma vie, j’étais au fond du trou. J’avais douze ans, onze mois et vingt-sept jours et mes parents venaient d’apprendre que leur chère fille – au QI de vingt points supérieur à celui de Barack Obama –, se faisait renvoyer du collège pour « son comportement agressif et blessant envers ses camarades et professeurs ». Un lynchage complet. Tous contre moi ! Nous y étions. J’étais bannie de la société. Je dois avouer que je l’avais bien cherché, mais mon comportement « agressif et blessant » n’était en réalité qu’une esquive aux coups bas, aux humiliations qu’on m’avait fait subir en ce premier trimestre de troisième. Un trimestre pourri. Le pire de ma vie. Je n’ai pas le choix, il va falloir que je vous le raconte, si je veux que vous compreniez comment j’ai débarqué dans un internat pour grosses tronches, à des centaines de kilomètres de ma famille et, surtout, en plein milieu de l’année scolaire. Bon, je me lance…

 Challenge 1%
rl2015
6/6

Déjà lu du même auteur :

un jour j'irai chercher Un jour j'irai chercher mon prince en skate

23 septembre 2015

Si c'est un homme - Primo Levi

Lu en partenariat avec Audiolib

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Audiolib - septembre 2015 - 7h35 - Lu par Raphaël Enthoven

Pocket - janvier 1988 - 213 pages

Robert Lafont -  mars 2002 - 308 pages

traduit de l'italien par Martine Schruoffeneger

Titre original : Sequestoé un uomo, 1958

Quatrième de couverture :
Durant la Seconde Guerre mondiale, Primo Levi, vingt-quatre ans, juif, lutte aux côtés des maquisards antifascistes du Piémont. Capturé en 1943, il se retrouve peu après à Auschwitz, où il demeurera plus d’un an avant d’être libéré par l’armée russe en janvier 1945.
Au camp, il observe tout. Il se souviendra de tout, racontera tout : la promiscuité des blocks-dortoirs, les camarades qu’on y découvre à l’aube, morts de froid et de faim ; les humiliations et le travail quotidiens, sous les coups de trique des kapos; les « sélections » périodiques où l’on sépare les malades des bien-portants pour les envoyer à la mort ; les pendaisons pour l’exemple ; les trains, bourrés de juifs et de tziganes, qu’on dirige dès leur arrivée vers les crématoires…
Et pourtant, dans ce récit, la dignité la plus impressionnante ; aucune haine, aucun excès, aucune exploitation des souffrances personnelles, mais une réflexion morale sur la douleur, sublimée en une vision de la vie.

Paru en 1946, Si c’est un homme est considéré comme un des livres les plus importants du XXe siècle.

Auteur : Né à Turin en 1919, Primo Levi est mort en 1987. On lui doit une quinzaine d’ouvrages – nouvelles, romans, essais– dorénavant tous traduits en français, dont La TrèveLe Système périodique ou La Clé à molette, qui reçut en Italie le prix Strega, l’équivalent du Goncourt.

Lecteur : Raphaël Enthoven est professeur de philosophie sur France-Culture et sur ARTE. Son travail consiste essentiellement à en parler avec simplicité, mais sans jamais la simplifier. Il a lu Mythologies de Roland Barthes avec Michel Vuillermoz (Thélème) et L’Insoutenable Légèreté de l’être de Milan Kundera (Écoutez lire).

Mon avis : (relu en septembre 2015)
Ayant déjà lu ce livre avant la création de ce blog, j'ai accepté de le relire en mode audio. Avant de me lancer dans l'oeuvre proprement dite, j'ai décidé d'écouter les "bonus" : une interview très intéressante de Primo Levi par Philipp Roth et l'interview de Raphaël Enthoven, le lecteur. J'avoue que cette interview est si longue (54 minutes) qu'au bout de vingt minutes, j'ai décroché...
Le livre en lui-même est plus fluide à écouter, paru dix ans après son retour des camps, Primo Levi témoigne de son quotidien là-bas. Ce livre est un témoignage poignant. Il nous décrit dans les moindres détails la vie dans le camp d'Auschwitz de 1943 à janvier 1945. Il donne son ressenti sur la violence des hommes mais également sur la volonté de survivre en gardant un semblant d'humanité. C'est une grande leçon de vie, car Primo Levi raconte tout cela sans aucune haine et sans reproche vis à vis de ceux qui lui ont fait subir cette épreuve. Il expose des faits, seulement ce dont il a été témoin et laisse au lecteur se faire son opinion par lui-même.  
Dans cette version audio, Raphaël Enthoven a su avec beaucoup de sobriété donner toute sa force à ce texte exceptionnel.

Merci Chloé et les éditions Audiolib pour cette lecture indispensable !

Extrait : (début du livre)
Vous qui vivez en toute quiétude
Bien au chaud dans vos maisons,
Vous qui trouvez le soir en rentrant
La table mise et des visages amis,
Considérez si c’est un homme
Que celui qui peine dans la boue,
Qui ne connaît pas de repos,
Qui se bat pour un quignon de pain,
Qui meurt pour un oui pour un non.
Considérez si c’est une femme
Que celle qui a perdu son nom et ses cheveux
Et jusqu’à la force de se souvenir,
Les yeux vides et le sein froid
Comme une grenouille en hiver.
N’oubliez pas que cela fut,
Non, ne l’oubliez pas :
Gravez ces mots dans votre cœur.
Pensez-y chez vous, dans la rue,
En vous couchant, en vous levant ; 
Répétez-les à vos enfants.
Ou que votre maison s’écroule,
Que la maladie vous accable,
Que vos enfants se détournent de vous.

J’AVAIS été fait prisonnier par la Milice fasciste le 13 décembre 1943. J’avais vingt-quatre ans, peu de jugement, aucune expérience et une propension marquée, encouragée par le régime de ségrégation que m’avaient imposé quatre ans de lois raciales, à vivre dans un monde quasiment irréel, peuplé d’honnêtes figures cartésiennes, d’amitiés masculines sincères et d’amitiés féminines inconsistantes. Je cultivais à part moi un sentiment de révolte abstrait et modéré.
Ce n’était pas sans mal que je m’étais décidé à choisir la route de la montagne et à contribuer à mettre sur pied ce qui, dans mon esprit et dans celui de quelques amis guère plus expérimentés que moi, était censé devenir une bande de partisans affiliée à Giustizia e Libertà. Nous manquions de contacts, d’armes, d’argent, et de l’expérience nécessaire pour nous procurer tout cela ; nous manquions d’hommes capables, et nous étions en revanche envahis par une foule d’individus de tous bords, plus ou moins sincères, qui montaient de la plaine dans l’espoir de trouver auprès de nous une organisation inexistante, des cadres, des armes, ou même un peu de protection, un refuge, un feu où se chauffer, une paire de chaussures.
A cette époque on ne m’avait pas encore enseigné la doctrine que je devais plus tard apprendre si rapidement au Lager, et selon laquelle le premier devoir de l’homme est de savoir utiliser les moyens appropriés pour arriver au but qu’il s’est prescrit, et tant pis pour lui s’il se trompe ; en vertu de quoi il me faut bien considérer comme pure justice ce qui arriva ensuite. Trois cents miliciens fascistes, partis en pleine nuit pour surprendre un autre groupe de partisans installé dans une vallée voisine, et autrement important et dangereux que le nôtre, firent irruption dans notre refuge à la pâle clarté d’une aube de neige, et m’emmenèrent avec eux dans la vallée comme suspect.
Au cours des interrogatoires qui suivirent, je préférai déclarer ma condition de « citoyen italien de race juive », pensant que c’était là le seul moyen de justifier ma présence en ces lieux, trop écartés pour un simple « réfugié », et estimant (à tort, comme je le vis par la suite) qu’avouer mon activité politique, c’était me condamner à la torture et à une mort certaine. En tant que juif, on m’envoya à Fossoli, près de Modène, dans un camp d’internement d’abord destiné aux prisonniers de guerre anglais et américains, qui accueillait désormais tous ceux – et ils étaient nombreux – qui n’avaient pas l’heur de plaire au gouvernement de la toute nouvelle république fasciste.
Lors de mon arrivée, fin janvier 1944, il y avait dans ce camp environ cent cinquante juifs italiens, mais au bout de quelques semaines on en comptait plus de six cents. C’étaient pour la plupart des familles entières qui avaient été capturées par les fascistes ou les nazis, à la suite d’une imprudence ou d’une dénonciation. Un petit nombre d’entre eux s’étaient spontanément constitués prisonniers, pour échapper au cauchemar d’une vie errante, par manque de ressources, ou encore pour ne pas se séparer d’un conjoint arrêté, et même, absurdement, « pour être en règle avec la loi ».

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