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A propos de livres...

18 janvier 2009

La voleuse de livres - Markus Zusak

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Editeur Oh ! - mars 2007 – 527 pages

Pocket Jeunesse - janvier 2007 - 559 pages

traduit par Marie-France Girod

Prix Millepages Jeunesse décerné par les librairies Millepages.

Résumé :

Allemagne, 1939. La Mort est déjà à l'oeuvre. Liesel Meminger et son jeune frère sont envoyés par leur mère dans une famille d'adoption, à l'abris, en dehors de Munich : le père de Liesel a en effet été emporté par le souffle d'un seul et étrange mot - communisme -, et Liesel a vu la peur d'un destin semblable se dessiner dans les yeux de sa mère. Sur la route, la Mort rôde autour des enfants, réussit à s'emparer du petit garçon mais c'est la petite fille qu'elle veut. Ce sera la première d'une longue série d'approches. Durant l'enterrement de son petit frère, Liesel ramasse un objet singulier pour elle qui ne sait pas lire, un livre, 'Le Manuel du fossoyeur', dont elle pressent qu'il sera son bien le plus précieux, peut-être sa protection. Commence alors entre elle et les mots une étrange histoire d'amour. Poussée par un incoercible besoin de comprendre ce qu'il se passe autour d'elle, Liesel, avec l'aide de Hans, son père adoptif, décide d'apprendre à lire. A mesure que l'histoire avance, la Mort s'empare de nombreuses vies mais Liesel et ses livres continuent à lui échapper.

Auteur : Markus Zusak est né à Sydney en 1975. Il est le benjamin de quatre enfants. Ses parents sont d’origine allemande et autrichienne. Markus Zusak écrit depuis presque toujours. Il a désormais entamé une grande carrière internationale et s’est déjà affirmé comme l’un des romanciers les plus novateurs et les plus poétiques d’aujourd’hui. La Voleuse de livres est parue en septembre 2005 en Australie et à l’automne 2006 aux Etats-Unis où il figure depuis son lancement sur les listes des meilleures ventes. Markus vit toujours à Sydney où il écrit et enseigne l’anglais à l’Université.

Mon avis : (lu en septembre 2007)

Ce livre est vraiment original et passionnant : c'est une histoire étrange et émouvante où il est question d'une fillette, de mots, d'un accordéoniste, d'allemands fanatiques, d'un boxeur juif, de vols...

Le style de narration est particulier, en effet comme le laisse entendre le sous-titre : « quand la mort vous raconte une histoire, vous avez intérêt à l'écouter ».La Mort est la principale narratrice. Mais, rassurez-vous, cette lecture n'a rien de morbide.

La Mort nous raconte comment et pourquoi elle a du travailler sans relâche pendant ce vingtième siècle à cause de la folie des hommes. Elle raconte son labeur quand elle vient prendre dans ses bras, les hommes, les femmes et les enfants qui sont au bout du chemin de la vie.

La Voleuse de livres célèbre également l'amour de la lecture, les liens familiaux, la solidarité humaine. De quoi attendrir la Mort elle-même.

Ce livre est plein de poésie et d'émotions, il fait parti des livres que l'on n'oublie pas.

La Voleuse de livres est destinée à la fois aux adolescents et aux adultes - d'où sa parution simultanée en jeunesse et au rayon adulte.

Extrait :

«Procédons dans l'ordre», dit Hans Hubermann cette nuit-là. Il lava les draps, puis les étendit. «Maintenant, on peut y aller, fit-il en revenant. La classe de minuit peut commencer.»
La poussière dansait dans la lumière jaune.
Liesel était assise sur des draps propres et froids, honteuse et ravie. L'idée qu'elle avait mouillé son lit la taraudait mais, en même temps, elle allait lire. Elle allait lire son livre.
L'excitation s'empara d'elle.
Faisant naître des images d'un génie de la lecture de dix ans.
Si seulement tout était aussi simple !
«Pour être franc, expliqua sans détour Papa, je ne lis pas très bien moi-même.»
Quelle importance, après tout ? C'était peut-être mieux, au contraire. Cela risquerait moins de frustrer la fillette qui, elle, n'en était pas capable.
Néanmoins, au début, quand Hans Hubermann prit le livre et le feuilleta, il n'était pas très à l'aise.
Il vint s'asseoir auprès d'elle sur le lit et s'installa, les jambes pendantes. Il examina de nouveau le livre, puis le posa sur la couverture. «Dis-moi, pourquoi une gentille enfant comme toi veut-elle lire une chose pareille ?»
Liesel haussa de nouveau les épaules. Si l'apprenti fossoyeur avait lu les oeuvres complètes de Goethe ou d'un autre grand écrivain, c'était ce qui se serait trouvé sur son lit maintenant. Elle tenta de l'expliquer. «Eh bien, quand... j'étais assise dans la neige et...» Les mots murmurés glissèrent sur le lit et tombèrent en pluie sur le sol.
Papa sut quoi répondre. Il savait toujours.
Il passa une main ensommeillée dans ses cheveux et déclara : «Promets-moi une chose, Liesel. Si je meurs bientôt, fais en sorte qu'on m'enterre dans les règles de l'art.»
Sérieuse, elle hocha affirmativement la tête."

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18 janvier 2009

Ensemble c’est tout – Anna Gavalda

ensemble_c_est_tout Le Dilettante – mars 2004 – 604 pages

Mot de l'éditeur : L'action se déroule à Paris, au pied de la tour Eiffel très exactement, et couvre une année. Ce livre raconte la rencontre puis les frictions, la tendresse, l'amitié, les coups de gueule, les réconciliations et tout le reste encore, tout ce qui se passe entre quatre personnes vivant sous un même toit. Quatre personnes qui n'avaient rien en commun au départ et qui n'auraient jamais dû se rencontrer. Un aristocrate bègue, une jeune femme épuisée, une vieille mémé têtue et un cuisinier grossier. Tous sont pleins de bleus, pleins de bosses et tous ont un cœur gros comme ça (non, plus gros encore !)... C'est la théorie des dominos à l'envers. Ces quatre-là s'appuient les uns sur les autres mais au lieu de se faire tomber, ils se relèvent. On appelle ça l'amour.

Biographie de l'auteur
Anna Gavalda est née le 9 décembre 1970. Elle vit dans la région parisienne. Elle a deux enfants très mignons et écrit quand ils sont à l'école. Le reste du temps, elle regarde les gens vivre. Ensemble, c'est tout est son quatrième livre après Je voudrais que quelqu'un m'attende quelque part, Je l'aimais (Le Dilettante) et 35 kilos d'espoir (Bayard jeunesse)

Mon avis : (lu en mai 2004)

J'ai vraiment beaucoup aimé ce livre. Je l'ai lu avec beaucoup de bonheur et j'avais beaucoup de mal à lâcher le livre. C'est une histoire de solidarité entre des personnages « cabossés » par la vie mais si attachants. On voudrait les connaître pour de vrai et faire partie de cette vie qu'ils se construisent doucement "ensemble". Ce livre nous fait du bien. A la fin du livre, j'aurai aimé qu'il ne soit pas fini, tellement cette histoire était belle !

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J'ai également bien aimé le film tiré du livre, même s'il est difficile d'adapter un livre de 600 pages en 1h37. Film réalisé par Claude Berri, avec Audrey Tautou, Guillaume Canet, Laurent Stocker, Françoise Bertin. Sortie le 21 Mars 2007.

Extraits :

1

Paulette Lestafier n’était pas si folle qu’on le disait. Bien sûr qu’elle reconnaissait les jours puisqu’elle n’avait plus que ça à faire désormais. Les compter, les attendre et les oublier. Elle savait très bien que c’était mercredi aujourd’hui. D’ailleurs elle était prête ! Elle avait mis son manteau, pris son panier et réuni ses coupons de réductions. Elle avait même entendu la voiture de la Yvonne au loin… Mais voilà, son chat était devant la porte, il avait faim et c’est en se penchant pour reposer son bol qu’elle était tombée en se cognant la tête contre la première marche de l’escalier. Paulette Lestafier tombait souvent, mais c’était son secret. Il ne fallait pas en parler, à personne. «À personne, tu m’entends? » se menaçait-elle en silence. «Ni à Yvonne, ni au médecin et encore moins à ton garçon…» Il fallait se relever lentement, attendre que les objets redeviennent normaux, se frictionner avec du Synthol et cacher ces maudits bleus. Les bleus de Paulette n’étaient jamais bleus. Ils étaient jaunes, verts ou violacés et restaient longtemps sur son corps. Bien trop longtemps. Plusieurs mois quelquefois… C’était difficile de les cacher. Les bonnes gens lui demandaient pourquoi elle s’habillait toujours comme en plein hiver, pourquoi elle portait des bas et ne quittait jamais son gilet. Le petit, surtout, la tourmentait avec ça :

Alors mémé? C’est quoi ce travail ? Enlève-moi tout ce bazar, tu vas crever de chaud !

Non, Paulette Lestafier n’était pas folle du tout. Elle savait que ses bleus énormes qui ne partaient jamais allaient lui causer bien des ennuis un jour… Elle savait comment finissent les vieilles femmes inutiles comme elle. Celles qui laissent venir le chiendent dans leur potager et se tiennent aux meubles pour ne pas tomber. Les vieilles qui n’arrivent pas à passer un fil dans le chas d’une aiguille et ne se souviennent même plus de comment on monte le son du poste. Celles qui essayent tous les boutons de la télécommande et finissent par débrancher l’appareil en pleurant de rage. Des larmes minuscules et amères. La tête dans les mains devant une télé morte. Alors quoi ? Plus rien ? Plus jamais de bruit dans cette maison ? Plus de voix ? Jamais ? Sous prétexte qu’on a oublié la couleur du bouton ? Il t’avait mis des gommettes pourtant, le petit… Il te les avait collées les gommettes ! Une pour les chaînes, une pour le son et une pour éteindre ! Allons, Paulette ! Cesse de pleurer comme ça et regarde donc les gommettes ! Arrêtez de me crier dessus vous autres… Elles sont parties depuis longtemps, les gommettes… Elles se sont décollées presque tout de suite… Ça fait des mois que je cherche le bouton, que j’entends plus rien, que je vois juste les images avec un tout petit murmure… Criez donc pas comme ça, vous allez me rendre sourde encore en plus…

[...]

4

À quand remontent vos dernières règles ?

Elle était déjà derrière le paravent en train de se battre avec les jambes de son jean. Elle soupira. Elle savait qu’il allait lui poser cette question. Elle le savait. Elle avait prévu son coup pourtant… Elle avait attaché ses cheveux avec une barrette en argent bien lourde et était montée sur cette putain de balance en serrant les poings et en se tassant le plus possible. Elle avait même sautillé un peu pour repousser l’aiguille… Mais non, ça n’avait pas suffi et elle allait avoir droit à sa petite leçon de morale…

Elle l’avait vu à son sourcil tout à l’heure quand il lui avait palpé l’abdomen. Ses côtes, ses hanches trop saillantes, ses seins ridicules et ses cuisses creuses, tout cela le contrariait. Elle finissait de boucler son ceinturon tranquillement. Elle n’avait rien à craindre cette fois-ci. On était à la médecine du travail, plus au collège. Un baratin pour la forme et elle serait dehors.

Alors ?

Elle était assise en face de lui à présent et lui souriait. C’était son arme fatale, sa botte secrète, son petit truc en plumes. Sourire à un interlocuteur qui vous embarrasse, on n’a pas encore trouvé mieux pour passer à autre chose.

Hélas, le bougre était allé à la même école… Il avait posé ses coudes, croisé ses mains et posé par-dessus tout ça un autre sourire désarmant. Elle était bonne pour répondre. Elle aurait dû s’en douter d’ailleurs, il était mignon et elle n’avait pas pu s’empêcher de fermer les yeux quand il avait posé ses mains sur son ventre…

Alors ? Sans mentir, hein ? Sinon, je préfère que vous ne me répondiez pas.

Longtemps…

Évidemment, grimaça-t-il, évidemment… Quarante-huit kilos pour un mètre soixante-treize, à ce train-là vous allez bientôt passer entre la colle et le papier…

Le papier de quoi ? fit-elle naïvement.

Euh… de l’affiche…

Ah ! De l’affiche ! Excusez-moi, je ne connaissais pas cette expression…

Il allait répondre quelque chose et puis non. Il s’est baissé pour prendre une ordonnance en soupirant avant de la regarder de nouveau droit dans les yeux :

Vous ne vous nourrissez pas ?

Bien sûr que si je me nourris !

Une grande lassitude l’envahit soudain. Elle en avait marre de tous ces débats sur son poids, elle en avait sa claque. Bientôt vingt-sept ans qu’on lui prenait la tête avec ça. Est-ce qu’on ne pouvait pas parler d’autre chose ? Elle était là, merde ! Elle était vivante. Bien vivante. Aussi active que les autres. Aussi gaie, aussi triste, aussi courageuse, aussi sensible et aussi décourageante que n’importe quelle fille. Il y avait quelqu’un là-dedans ! Il y avait quelqu’un… De grâce, est-ce qu’on ne pouvait pas lui parler d’autre chose aujourd’hui ?

Vous êtes d’accord, n’est-ce pas ? Quarante-huit kilos, ça ne fait pas bien lourd…

Oui, acquiesça-t-elle vaincue, oui… Je suis d’accord… Il y a longtemps que je n’étais pas descendue aussi bas… Je…

Vous?

Non. Rien.

Dites-moi.

Je… J’ai connu des moments plus fastes, je crois…

Il ne réagissait pas.

Vous me le remplissez, ce certificat ?

Oui, oui, je vais vous le faire, répondit-il en s’ébrouant, euh… C’est quoi cette société déjà ?

Laquelle ?

Celle-ci, là où nous sommes, enfin la vôtre…

Touclean.

Pardon?

Touclean.

T majuscule o-u-c-l-i-n-e, épela-t-il.

Non, c-l-e-a-n, rectifia-t-elle. Je sais, ce n’est pas très logique, il aurait mieux valu « Toupropre », mais je pense qu’ils aimaient bien ce côté yankee, vous voyez… C’est plus pro, plus… wondeurfoule drim tim…

Il ne voyait pas.

C’est quoi exactement ?

Pardon?

Cette société ?

Elle s’adossa en tendant ses bras devant elle pour s’étirer et c’est avec une voix d’hôtesse de l’air qu’elle déclina, le plus sérieusement du monde, les tenants et les aboutissants de ses nouvelles fonctions :

Touclean, mesdames et messieurs, répond à toutes vos exigences en matière de propreté. Particuliers, professionnels, bureaux, syndics, cabinets, agences, hôpitaux, habitats, immeubles ou ateliers, Touclean est là pour vous satisfaire. Touclean range, Touclean nettoie, Touclean balaye, Touclean aspire, Touclean cire, Touclean frotte, Touclean désinfecte, Touclean fait briller, Touclean embellit, Touclean assainit et Touclean désodorise. Horaires à votre convenance. Souplesse. Discrétion. Travail soigné et tarifs étudiés. Touclean, des professionnels à votre service !

Elle avait débité cet admirable laïus d’une traite et sans reprendre son souffle. Son petit french docteur en resta tout abasourdi :

C’est un gag ?

Bien sûr que non. D’ailleurs vous allez la voir la dream team, elle est derrière la porte…

Vous faites quoi au juste ?

Je viens de vous le dire.

Non, mais vous… Vous!

Moi? Eh bien, je range, je nettoie, je balaye, j’aspire, je cire et tout le bazar.

Vous êtes femme de mén…?

Ttt…technicienne de surface, je préfère…

Il ne savait pas si c’était du lard ou du cochon.

Pourquoi vous faites ça ?

Elle écarquilla les yeux.

Non, mais je m’entends, pourquoi « ça » ? Pourquoi pas autre chose ?

Pourquoi pas ?

Vous n’avez pas envie d’exercer une activité plus… euh…

Gratifiante ?

Oui.

Non.

Il est resté comme ça encore un moment, le crayon en l’air et la bouche entrouverte puis a regardé le cadran de sa montre pour y lire la date et l’a interrogée sans lever le nez :

Nom?

Fauque.

Prénom?

Camille.

Date de naissance ?

17 février 1977.

Tenez, mademoiselle Fauque, vous êtes apte au travail…

Formidable. Je vous dois combien ?

Rien, c’est… euh… C’est Touclean qui paye.

Aaaah Touclean ! reprit-elle en se levant et dans un grand geste théâtral, me voilà apte à nettoyer des chiottes, c’est merveilleux…

Il la raccompagna jusqu’à la porte. Il ne souriait plus et avait remis son masque de grand ponte consciencieux. En même temps qu’il appuyait sur la poignée, il lui tendit la main :

Quelques kilos quand même ? Pour me faire plaisir…

Elle secoua la tête. Ça ne marchait plus ces trucs-là avec elle. Le chantage et les bons sentiments, elle en avait eu sa dose.

On verra ce qu’on peut faire, elle a dit. On verra…

Samia est entrée après elle. Elle descendit les marches du camion en tâtant sa veste à la recherche d’une cigarette. La grosse Mamadou et Carine étaient assises sur un banc à commenter les passants et à râler parce qu’elles voulaient rentrer chez elles.

Alors ? a rigolé Mamadou, qu’est-ce que tu trafiquais là deu-dans? J’ai mon RER, moi ! Il t’a maraboutée ou quoi ?

Camille s’est assise sur le sol et lui a souri. Pas le même genre. Un sourire transparent, cette fois. Sa Mamadou, elle ne faisait pas sa maligne avec elle, elle était bien trop forte…

Il est sympa ? a demandé Carine en crachant une rognure d’ongle.

Super.

Ah, je le savais bien ! exulta Mamadou, je m’en doutais bien de ça ! Hein que je te l’ai dit à toi et à Sylvie, qu’elle était toute nue là-deu-dans !

Il va te faire monter sur sa balance…

Qui ? Moi ? a crié Mamadou. Moi ? Il croit que je vais monter sur sa balance !

Mamadou devait peser dans les cent kilos au bas mot, elle se frappait les cuisses :

Jamais de la vie ! Si je grimpe là-deu-ssus, je l’écrabouille et lui avec ! Et quoi d’autre encore ?

Il va te faire des piqûres, a lâché Carine.

Des piqûres deu quoi d’abord ?

Mais non, la rassura Camille, mais non, il va juste écouter ton cœur et tes poumons…

Ça, ça va.

Il va te toucher le ventre aussi…

Mais voyons, se renfrognait-elle, mais voyons, bonjour chez lui. S’il touche à mon ventre, je le mange tout cru… C’est bon les petits docteurs blancs… Elle forçait son accent et se frottait le boubou.

Oh oui, c’est du bon miam-miam ça… C’est mes ancêtres qui me l’ont dit. Avec du manioc et des crêtes depoule… Mmm…

Et la Bredart, qu’est-ce qu’il va lui faire à elle ?

18 janvier 2009

80 hommes pour changer le monde - Sylvain Darnil, Mathieu Le Roux

80_hommes_pour_changer_le_monde Lattès - Avril 2005 – 282 pages

Présentation de l'éditeur
Imaginez un monde... Où une banque permet aux trois quarts de ses clients de se sortir de l'extrême pauvreté tout en étant parfaitement rentable... Où un hôpital soigne gratuitement deux patients sur trois et fait des bénéfices... Où les agriculteurs se passent de produits chimiques tout en augmentant leurs rendements... Où les emballages sont biodégradables et nourrissent la terre au lieu de la polluer... Où un entrepreneur de textile qui refuse les délocalisations parvient à doubler son chiffre d'affaires tout en payant ses employés deux fois le salaire minimum... Ce monde existe. Sylvain Darnil et Mathieu le Roux l'ont exploré. Pendant quinze mois, ils ont parcouru la planète à la recherche de ces entrepreneurs exceptionnels. Qu'ils soient architecte, chirurgien, agriculteur ou chimiste, ils ont réinventé leur métier, brisé des préjugés économiques réputés indestructibles. Loin du fatalisme ambiant, ils réussissent à construire le monde auquel ils rêvent au lieu de subir celui qui existe. Ces 80 histoires d'hommes et de femmes prouvent que les initiatives de développement durable ne sont pas des lubies d'écolos babas mais des entreprises qui marchent.

Biographie de l'auteur
Sylvain Darnil est né en 1980 ; après l'ESSCA, il part pour un grand groupe français au Brésil. Mathieu Le Roux est né en 1977; après HEC, il a travaillé au Brésil et aux Etats-Unis. Ensemble ils ont visité trente-huit pays et analysé cent treize initiatives.

Mon avis : (lu en octobre 2007)

Ce livre est vraiment très intéressant et qui redonne de l'espoir dans l'homme et dans le futur de la planète. Tous ces témoignages venant du monde entier sont riches d'enseignements. Ce livre se lit très facilement c'est un ensemble de petites "histoires vraies", de trois pages chacune environ, qui relatent des expériences originales et uniques. Les résultats de ses expériences sont exceptionnels. On voit que le bon sens et l'ingéniosité de certains tordent le cou à beaucoup de préjugés économiques.

A lire absolument pour regarder le monde avec un nouveau regard.

Extraits : voir Site dédié au livre

17 janvier 2009

Toxic Planet, Tome 1 : Milieu naturel - David Ratte

Toxic_planet_1 Edition Paquet - mai 2006 - 55 pages

Mot de l'éditeur :
Voilà! On y est!
À force de scier la branche sur laquelle nous étions assis, elle a fini par tomber. Aujourd'hui la pollution est telle que tout le monde est obligé de porter des masques à gaz en permanence. Sam est un citoyen de ce nouveau monde. Il vit avec une charmante jeune femme dont il n'a pas vu le visage depuis des années. Il faut reconnaître que ça pose quand même quelques petits problèmes au quotidien. Mais il trouve ça normal... Il est habitué Sam... Comme tout le monde. Et puis, surtout, il ne se pose pas trop de questions. «C'est comme ça et puis c'est tout! Et puis d'abord, qu'est ce qu'on y peut?»
À l'usine où il travaille, tout le monde pense comme lui. Sauf Tran. Lui, c'est un écolo, un des derniers... Mais Sam l'aime bien quand même. Il n'est pas dangereux... Enfin, la plupart du temps.

Auteur :  David Ratte est né le 13/08/1970 à Besançon (Doubs), d'une mère franc-comtoise et d'un père guadeloupéen. Passionné de BD depius toujours, il empoigne son premier crayon vers l'âge de 2 ans et ne le lâche plus. Marié et père de deux enfants, il est installé dans le Sud de la France, à Pezenas depuis 10 ans.

Mon avis : (lu en novembre 2007)

Le sujet est grave mais le rire est très souvent présent. Entre cauchemar et réalité, l'auteur a choisi l'humour pour dénoncer le triste d'état de notre planète et nous faire réagir avant qu'il soit trop tard... Ses personnages portent en permanence des masques à gaz, une fumée toxique et verdâtre omniprésente et une nature qui a définitivement abdiqué…

Une façon originale et efficace pour nous sensibiliser aux problèmes écologiques.

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14 janvier 2009

L'homme qui voulait être heureux – Laurent Gounelle

l_homme_qui_voulait__tre_heureux Anne Carrière Editions – février 2008 – 221 pages

Présentation de l'éditeur
Imaginez...
Vous êtes en vacances à Bali et, peu de temps avant votre retour, vous consultez un vieux guérisseur. Sans raison particulière, juste parce que sa grande réputation vous a donné envie de le rencontrer, au cas où...
Son diagnostic est formel : vous êtes en bonne santé, mais vous n'êtes pas heureux.
Porteur d'une sagesse infinie, ce vieil homme semble vous connaître mieux que vous-même. L'éclairage très particulier qu'il apporte à votre vécu va vous entraîner dans l'aventure la plus captivante qui soit : celle de la découverte de soi. Les expériences dans lesquelles il vous conduit vont bouleverser votre vie, en vous donnant les clés d'une existence à la hauteur de vos rêves.
Avec L'homme qui voulait être heureux, c'est tout un monde de possibilités nouvelles qui s'ouvre à nous à la lecture de cette histoire passionnante, où l'on découvre comment se libérer de ce qui nous empêche d'être vraiment heureux.

Biographie de l'auteur
Laurent Gounelle est spécialiste du développement personnel. Depuis quatorze ans, il parcourt le monde à la rencontre de praticiens exceptionnels, qu'ils soient experts américains en neurosciences, shamans péruviens ou sages balinais.

Mon avis : 5/5 (lu en janvier 2009)

Une lecture qui fait beaucoup de bien. Ce livre est riche d'enseignements, il nous amène à nous poser les bonnes questions pour mieux diriger sa vie. On ressort de cette lecture avec de vraies pistes de réflexions et plein d'optimisme.

Une leçon de sagesse à consommer sans modération !

Extraits :

Le vieil homme ( Maître Samtyang)
«
- Une vie réussie est une vie que l'on a menée conformément à ses souhaits, en agissant toujours en accord avec ses valeurs, en donnant le meilleur de soi-même dans ce que l'on fait, en restant en harmonie avec qui l'on est, et, si possible, une vie qui nous a donné l'occasion de nous dépasser, de nous consacrer à autre chose qu'à nous-mêmes et d'apporter quelque chose à l'humanité, même très humblement, même si c'est infime. Une petite plume d'oiseau confiée au vent. Un sourire pour les autres » (p.179)

« - C'est juste pour vous dire que le choix vous appartient.  À certains moments, dans la vie, on n'a pas forcément beaucoup de choix, et ceux-ci sont peut-être douloureux, mais ils existent et, au final, c'est vous qui  déterminez ce que vous vivez: vous avez toujours le choix, et c'est bien de garder à l'esprit cette idée » (p.188)

« Pour moi une nouvelle vie commençait, et dorénavant, ce serait MA vie, fruit de mes décisions, de mes choix, de ma volonté. Adieu les doutes, les hésitations, les peurs d'être jugé, de ne pas être capable, de ne pas être aimé. Je vivrai chaque instant en conscience, en accord avec moi-même et mes valeurs. je resterai altruiste, mais en gardant à l'esprit que le premier cadeau à faire aux autres est mon équilibre. J'accepterai les difficultés comme des épreuves à passer, des cadeaux que m'offrent la vie pour apprendre ce que je dois apprendre afin d'évoluer. Je ne serai plus victime des évènements, mais acteur d'un jeu dont les règles se découvrent au fur et à mesure, et dont la finalité gardera toujours une part de mystère. » (p.216)

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14 janvier 2009

Elle fait des galettes, c’est toute sa vie – Karine Fougeray

Elle_fait_les_galettes__c_est_toute_sa_vie Pocket – février 2005 - 118 pages

Présentation de l'éditeur
" Elle nous nourrit de galettes. C'est sa façon à elle de donner de l'amour. " C'est la Bretagne avec un bistrot sur la cale, une chapelle en haut de la falaise, une grève à marée basse. Avec ses hommes de mer aimés par des femmes à terre, ses jeunes, ses petites vieilles, ses pêcheurs qui n'en sont pas, ses fillettes qui n'aiment pas naviguer. C'est aussi un stage de voile et des chansons de marins. Et ce sont, surtout, des caractères bien trempés... Une promenade inattendue qui vous laissera sur les lèvres un goût d'embruns et de beurre salé.

Biographie de l'auteur
Karine Fougeray est graphiste. Elle est née à Saint-Malo en 1963 où elle passe son enfance et son adolescence. Après 17 années de vie parisienne, elle revient s'installer en Bretagne, de retour dans sa région, l'envie d'écrire la gagne. Son premier ouvrage, Elle fait des galettes, c'est toute sa vie, a paru en 2005 aux éditions Delphine Montalant. Son premier roman est paru en 2008, Ker Violette.
Mon avis : 5/5 (lu en février 2008)

C'est un recueil de 14 nouvelles qui sentent bon la Bretagne mais pas seulement... C'est un hymne à la Bretagne et à la mer, aux gens de mer. Les personnages sont attachants, ils nous semblent familiers. Ce livre est un concentré de simplicité, de tendresse et d'humour mais aussi de dérision et de cruauté.
Moi qui aime la Bretagne et le bord de mer j'ai été ému et j'ai trouvé ce livre savoureux comme des galettes !
Extrait : (p.11)

« Pour la pâte, elle sait parfaitement comment s'y prendre, elle possède le coup de main comme on dit. A huit heures, chaque vendredi matin, le rituel se met en marche. Elle extirpe du placard la bassine en émail et la pose au fond de l'évier. A côté, sur l'égouttoir, elle place le paquet de sarrasin, libère au robinet un mince filet d'eau et fait en sorte que celui-ci ruisselle doucement sur la paroi de céramique blanche. Ses gestes sont si huilés, si répétés, si râpés aux coudes que son chat Mistigri pourrait les mimer s'il était moins gros.

Louise, ma cousine qui commence à avoir des seins, utilise des grands mots en racontant qu'elle monte sa pâte en plusieurs étapes religieuses et éternelles. Elle dit que c'est une messe de quatre heures, une confession d'amoureuse éternellement recommencée du fond de cette bassine cabossée.

Amoureuse de sa bassine, Mémé ? Moi, je vois juste de l'eau, de la farine. De la farine et de l'eau. On n'ose pas lui demander les quantités. On n'ose pas lui demander les proportions. On n'ose pas lui demander d'expliquer.

A midi, elle remonte des profondeurs de la cave le lourd galetier qui lui vient de sa mère, et qui, du temps de sa mère, lui venait de sa mère à elle. Mistigri lui jette un regard envieux au moment où elle enfonce dans le pot de saindoux le tampon à graisser, lui faisant opérer une légère rotation de gauche à droite pour l'imbiber suffisamment, mais pas trop. Le galetier est déjà chaud et, comme on n'a plus le droit d'être dans ses pattes, on entend sans le voir le grésillement de la graisse animale qui se liquéfie en traînées circulaires et brillantes sur la fonte noire et brûlante.

Elle nous nourrit de galettes. C'est sa façon à elle de donner de l'amour. »

14 janvier 2009

Neige – Maxence Fermine

Neige neige_p
Arlea - novembre 2000 – 128 pages

Points - décembre 2000 - 96 pages

illustrations par Georges Lemoine

Résumé :
À la fin du XIXe siècle, au Japon, le jeune Yuko s'adonne à l'art difficile du haïku. Afin de parfaire sa maîtrise, il décide de se rendre dans le sud du pays, auprès d'un maître avec lequel il se lie d'emblée, sans qu'on sache lequel des deux apporte le plus à l'autre. Dans cette relation faite de respect, de silence et de signes, l'image obsédante d'une femme disparue dans les neiges réunira les deux hommes.

Auteur : Maxence Fermine, né en 1968 à Albertville, est un écrivain français. Il a vécu à Paris puis en Afrique où il a travaillé dans un bureau d'études. Il vit aujourd'hui en Haute-Savoie avec sa femme et ses deux filles

Mon avis : (lu juin 2004)

Ce livre est de la pure poésie. Le livre est court et se lit facilement. Il nous emmène au Japon, le pays des haïkus, petits poèmes de 3 vers et 17 pieds.
Ce petit livre est donc le poème de la neige et l'histoire de son poète Yuko. C'est également une très belle histoire d'amour écrite avec beaucoup de délicatesse.

J'ai vraiment été envouté par la beauté, la pureté de ce livre aussi bien pour le texte que les illustrations. Cette histoire ne peut que vous émouvoir. A lire absolument.

Extrait :
"Yuko vénérait l'art du haïku, la neige et le chiffre sept.
Le chiffre sept est un chiffre magique.
Il tient à la fois de l'équilibre du carré et du vertige du triangle.
Yuko avait dix-sept ans lorsqu'il avait embrassé la carrière de poète.
Il écrivait des poèmes de dix-sept syllabes.
Il possédait sept chats.
Il avait promis à son père d'écrire seulement soixante-dix-sept haïku par hiver.

Le reste de l'année, il resterait à la maison et oublierait la neige."

13 janvier 2009

Aya de Yopougon – Marguerite Abouet

Aya_de_Yopougon_1 Gallimard – novembre 2005 - 112 pages

 

le prix du 1er album au festival d'Angoulême en 2006

 

 

Résumé : Dans les années 1970, la vie était douce en Côte d'Ivoire. Il y avait du travail, les hôpitaux étaient équipés et l'école était obligatoire. J'ai eu la chance de connaître cette époque insouciante, où les jeunes n'avaient pas à choisir leur camp trop vite, et ne se préoccupaient que de la vie courante : les études, les parents, les amours... Et c'est cela que je veux raconter dans Aya, une Afrique sans les clichés de la guerre et de la famine, cette Afrique qui subsiste malgré tout car, comme on dit chez nous, "la vie continue"...

 

 

 

 

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Les auteurs :
Marguerite Abouet
naît à Abidjan en 1971. Elle a douze ans quand ses parents l'envoient avec son grand frère "suivre de longues études" à Paris, où les héberge leur grand-oncle maternel. Après des études moins longues que prévu, elle écrit des romans qu'elle ne fait lire à aucun éditeur, tout en devenant tour à tour punk, super-nounou pour triplés, pour mamies et papis, serveuse, opératrice de saisie, puis assistante juridique dans un cabinet d'avocats. Elle vit aujourd'hui à Romainville et se consacre entièrement à l'écriture. Aya de Yopougon est la première histoire qu'elle destine à la bande dessinée. Avec une voix et un humour inédits, elle y raconte une Afrique bien vivante, loin des caricatures trop souvent répandues. En 2006, elle reçoit avec Clément Oubrerie le prix du Premier album au Festival international de la bande dessinée d'Angoulême.

Clément Oubrerie naît à Paris en 1966. Après le bac, il entame des études d'art à l'école Penninghen, qu'il interrompt pour partir aux États-Unis. Il y passe deux années, exerce toutes sortes de métiers, mais finit dans un pénitencier au Nouveau-Mexique parce que sans papiers. De retour en France, il illustre des ouvrages pour la jeunesse - une quarantaine à ce jour - et co-fonde La Station, un studio d'animation avec lequel il prépare actuellement un long-métrage signé Anna Gavalda. Il trouve aussi le temps de jouer de la batterie avec un groupe de funk et de voyager, notamment en Côte d'Ivoire. Son talent singulier donne vie avec esprit et authenticité au récit de Marguerite Abouet.

 

Mon avis : (lu en avril 2008)

C'est une BD pleine d'humour et de tendresse. Nous voilà transporté en Afrique, nous suivons la vie quotidienne de 3 jeunes filles de Yopougon (quartier populaire d'Abidjan, en Côte d'Ivoire). Il y a Aya, toujours sérieuse, et ses deux copines Adjoua et Bintou : ces deux-là ne pensent qu’à gazer dans les maquis avec des galériens (elles adorent aller danser dans les restaurants bon marché et en plein air avec de jeunes gens qui ont du temps à perdre). On y parle de drague, de contraception, des ruses pour échapper à la vigilance parfois pesante d'un père...

On y voit une Afrique pleine d'optimisme et de joie. C'est vraiment très dépaysant.

A la fin de la BD : un « bonus ivoirien » avec l’indispensable lexique, les conseils pour le porté du pagne, le roulement du « tassaba », la recette du Gnamankoudji (jus de gingembre aux vertus aphrodisiaques) et le secret de la délicieuse sauce arachide (pour faire rentrer et garder le mari à la maison)…

 

 

 

11 janvier 2009

Grâce et dénuement – Alice Ferney

Grace_et_d_nuement Actes Sud – janvier 1997 – 296 pages

 

prix Culture et Bibliothèques pour tous

 

Quatrième de couverture :
Dans un décor de banlieue, une libraire est saisie d'un désir presque fou : celui d'initier à la lecture des enfants gitans privés de scolarité. Elle se heurte d'abord à la méfiance, à la raillerie et au mépris qu'inspirent les gadjé. Mais elle finit par amadouer les petits illettrés, en même temps qu'elle entrevoit le destin d'une famille sur laquelle règne une veuve mère de cinq fils. Dans ce troisième roman, récompensé par le prix " Culture et bibliothèques pour tous ", Alice Ferney excelle à faire entendre les voix intérieures de ses personnages, leurs sentiments inavoués, leurs désirs brimés, leurs solitaires affrontements avec la fatalité.

L'auteur vu par l'éditeur :
Alice Ferney vit à Paris et enseigne à Orléans. Elle est l'auteur de Le ventre de la fée (Actes Sud, 1993), L'élégance des veuves (Actes Sud, 1995 ; Babel, 1997 ; J'ai lu, 2001) et La conversation amoureuse (Actes Sud, 2000). Elle a obtenu le prix Culture et Bibliothèques 1997 pour tous pour Grâce et dénuement (Actes Sud, 1997 ; Babel, 2000).

Mon avis : (lu en février 2004)

Ce livre a été pour moi un vrai coup de cœur ! C'est un très beau livre sur la rencontre d'Esther avec une famille de Gitans. Esther vient tous les mercredis lire un conte à de petits enfants gitans. Ces moments de lecture sont un bonheur rare pour les enfants.

On y découvre un monde différent avec ses joies et ses peines, ses rires et ses pleurs...Une belle leçon de vie qui nous fait porter un autre regard sur les "gitans". L'auteur nous amène à découvrir la véritable vie des gens du voyage. Elle nous fait entrer dans l’intimité de leur misère absolue, de leur vie hors du temps, de leur rejet par tous et, par réaction, de leur rejet des autres. Une belle leçon d'humanité...

Il existe réellement des Esther qui font un travail identique dans des milieux défavorisés à travers les Bibliothèques de rue du mouvement ATD Quart Monde et d'autres associations.

Extrait :

                                  1

Rares sont les gitans qui acceptent d’être tenus pour pauvres, et nombreux pourtant ceux qui le sont. Ainsi en allait-il des fils de la vieille Angéline. Ils ne possédaient que leur caravane et leur sang. Mais c’était un sang jeune qui flambait sous la peau, un flux pourpre de vitalité qui avait séduit des femmes et engendré sans compter. Aussi, comme leur mère qui avait connu le temps des chevaux et des roulottes, ils auraient craché par terre à l’idée d’être plaints. […]

                                  2

Ils étaient des gitans français qui n’avaient pas quitté le sol de ce pays depuis quatre cents ans. Mais ils ne possédaient pas les papiers qui d’ordinaire disent que l’on existe : un carnet de voyage signalait leur vie nomade. Elle n’était cependant qu’un souvenir de la vieille. Les lois et les règles modernes avaient compliqué le passage d’une ville à une autre et ils s’étaient sédentarisés, comme la plupart des Gitans. […]

La vieille n’avait pas encore soixante ans. Mais, si la vérité est bonne à dire, elle portait bien son surnom. Son visage était fendu de rides si profondes et nombreuses qu’on aurait dit une maladie de peau. A la regarder de près ; on avait mal à sa place. Elle ne souffrait pourtant de rien et les ans difficiles, qui l’avaient précocément vieillie, ne l’avaient pas tuée. Elle en conservait un orgueil sympathique. Elle était en vie, envers et contre le monde et le froid, elle avait un furieux désir de continuer à voir ce spectacle de la terre, du vent, du feu sous les nuages, des nuages même, et des nouveaux venus qu’elle avait engendrés dans cette bourrasque. […]

                                  5

Esther Duvaux avait été infirmière pendant dix ans avant de devenir bibliothécaire. L’accompagnement des mourants, par lequel elle avait fini sa première carrière, avait donné la mesure de son courage et de sa douceur. Cette expérience ne l’avait pas endurcie, un rien lui tirait des yeux une rivière : elle avait le don des larmes. Pourtant cette tonalité primordiale s’accompagnait chez elle d’une vitalité fervente. Elle mettait en œuvre ce que d’autres eussent jugé utopique. Si jamais gadjé pouvait gagner la confiance de la vieille (ce dont il est possible de douter), elle était celle- là. Elle n’était pas venue vers les gitans par pitié. Elle était venue avec un projet. On aurait dit que c’était elle qui avait besoin d’eux. Angéline l’avait deviné. Sacrée fille ! avait-elle pensé, tu n’as pas peur de venir me parler. Mais elle n’avait rien dit. Elle avait écouté la jeune femme. Esther expliquait en quoi consistait son idée : elle lirait des histoires aux enfants qui ne disposaient pas de livres chez eux. La vieille faisait la moue. Sa dignité n’aimait pas se laisser dire qu’elle manquait de quelque chose, même si elle savait que c’était vrai (des livres, elle n’en avait jamais eu). Tu donnes des livres ? demanda la vieille. Non, dit Esther, je les lis et je les rapporte où je les ai empruntés. Esther répondait à toutes les questions. Son visage commençait juste à cesser d’être lisse. La perspicacité de la vieille traversait cette enveloppe qui prenait de l’âge. Pourquoi tu fais ça ? dit Angéline. Je crois que la vie a besoin des livres, dit Esther, je crois que la vie ne suffit pas. La vieille secoua la tête. J’allons réfléchir, dit-elle. […]

 

11 janvier 2009

L'élégance des veuves – Alice Ferney

l__l_gance_des_veuves Actes sud – 1995 – 126 pages

Quatrième de couverture
" Le spectacle se donne sans fin. Car l'instinct fait germer la chair, le désir la pousse, la harcèle quand elle s'y refuse, jusqu'à tant qu'elle cède, s'affale, se colle à une autre, et que s'assure la pérennité des lignées amoureuses. " Cela se produit de multiples fois, sans relâche, cela s'enchaîne avec beaucoup de naturel et de grâce. Un cycle sans fin pousse les femmes à se marier, à enfanter, puis à mourir. Ainsi va le temps, secoué par le rythme des naissances et des morts, quand le besoin de transmettre l'emporte sur le désespoir de la perte d'un être cher. Un long fil de désir passe au travers des générations. Ce court roman d'une douce gravité est un hymne à la vie et au pouvoir fécondant de la femme.

Auteur : Alice Ferney est née le 21 novembre 1967 à Paris. Elle a fait des études de commerce à l'ESSEC et est titulaire d'un doctorat en sciences économiques. Elle enseigne aujourd'hui à l'université d'Orléans. Elle est mariée et a trois enfants. Adepte du roman classique, dont elle exploite avec brio la veine introspective.
Ses thèmes de prédilection sont la féminité, la différence des sexes, la maternité, le sentiment amoureux. Grâce et Dénuement lui a valu le prix Culture et Bibliothèques pour tous.

Mon avis : (lu en janvier 2004 et relu en janvier 2009)

Voici un portrait sensible de femmes, de mères ou d'épouses.

Ce livre nous fait prendre conscience des souffrances qu'on pu endurer les femmes au début du vingtième siècle. Ce roman est court et facile à lire, l'écriture est limpide, nous nous retrouvons comme observateur à distance mais cependant perspicace et tout en poésie.

C'est le premier livre que je lisais de cette auteur et je l'ai trouvé vraiment émouvant. Et j'ai vite lu du même auteur Grâce et dénuement.

Extrait : (p.21)

La mort de Jules transforma Valentine. En perdant l’enfant à peine donné elle avait cru connaître la souffrance. Ce n’était pas grand chose à côté de la peine d’être veuve. Pourtant elle ne renonça pas. Elle était séparée de Jules qui était sa vie, elle devint la vie de Jules. Pas un jour elle ne l’oublia, les traits de son visage, la couleur de ses cheveux, la manière qu’il avait de lui sourire, tout resta gravé en elle, et parfois elle pâlissait de le voir avec tant de netteté. Elle ne perdit ni la douleur de soudain le savoir mort (et cet instant de l’apprendre, elle le vécut bien d’autres fois sa vie durant), ni le bonheur de l’aimer. Elle s’enroula autour de ce passé comme un lierre, elle en fit la source de sa chaleur. Et diffusa cette chaleur à ses enfants, qu’elle avait pris grand soin à ne pas endeuiller. Les petits étaient restés gais et avaient vite cessés de réclamer leur père. Dans leurs élans et leurs rires elle puisait une raison de poursuivre sans Jules ce qu’avec lui elle avait commencé. Elle n’était plus que mère.
Mais à Valentine était promise une vie où la trajectoire parfaite des premières années est altérée peu à peu, où tout ce qui a été gagné est repris et détruit.
L’armée lui avait valu un mari, elle lui coûta deux fils, les jumeaux de l’amour naissant, ses premiers-nés. Un bordereau aux couleurs nationales fit office de message, de condoléances, de mise en bière, de funérailles et de deuil. Le monde était bousculé Valentine ne sut jamais quel était le visage de ses garçons dans la mort. C’était une juste cause, Dieu nous envoyait des épreuves, personne dans cette famille n’acceptait les complaintes, Valentine cette fois encore garda en elle tous ses mots. Elle se laissait aller la nuit, seule dans le grand lit, à la place de Jules où elle s’était mise à dormir, comme si elle avait été la défunte, comme si cette peine du veuvage lui avait été épargnée et qu’il était seul à pleurer une épouse et deux fils. Mais les larmes ravinaient ses joues, glissaient derrière l’oreille et filaient dans les boucles de ses cheveux. On eût dit alors une morte. Morte elle ne l’était pourtant pas, et il lui arrivait le soir venu de s’en étonner. Car elle l’était du moins à une forme de joie, une tranquillité de l’esprit : chaque fois qu’elle regardait ses enfants, elle se demandait quelles souffrances étaient tapies dans l’avenir.
Elle aurait jugé indigne cependant de répandre dans sa maison le trouble qu ‘elle ressentait. Elle avait encore cinq enfants, une cuisinière, une femme de chambre, et se sentait une obligation de sourire et de vivre. Valentine était une femme de devoir, elle continua de coiffer des cheveux, d’embrasser des fronts, de calmer des pleurs, d’inventer des jeux. Adrien et Henri partirent en pension dans un collège. Elle écrivit les lettres qu’il fallait, envoya les colis qu’ils attendaient, prépara les fêtes des retours. Ses filles avaient grandi, elle cousit les robes dont elles rêvaient, s’amusa de leur coquetterie, se souvint d’elle-même à cet âge. Elle tricota des chandails, d’horribles caleçons de bain, des chaussettes chaudes, des socquettes de coton. Elle fit des listes de courses, les menus de la semaine, les comptes du mois, paya les gages, organisa les vacances, jamais elle ne manqua la fête d’un anniversaire, ni la splendeur de Noël et du réveillon où venaient les grands-mères. Elle accepta même de parler de Jules, de le partager avec d’autres qui ne comprenaient rien.
Elle poursuivit comme si personne ne manquait. Comme si le calme était revenu dans son âme et, qu’au moment de se coucher, elle n’avait pas ce pincement au cœur, cette envie soudaine d’éclater en sanglots, de parler à un homme. Elle vécut dans ses relations particulières que l’on a avec ceux que l’on protège. Refusant de songer que le sort est injuste, qu’il ne rend rien, qu’aux hommes il prend tout et ricane et continue de détruire leurs belles cathédrales, les œuvres de leurs vies, les dentelles précieuses qu’ils tissent avec leurs larmes. Et ce sort-là continua de soustraire à Valentine ceux qui restaient.

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