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A propos de livres...
temoignage
17 août 2012

L'élimination - Rithy Panh

l__limination_1 lelimination Grasset – janvier 2012 – 336 pages

Quatrième de couverture :
"A treize ans, je perds toute ma famille en quelques semaines. Mon grand frère, parti seul à pied vers notre maison de Phnom Penh. Mon beau-frère médecin, exécuté au bord de la route. Mon père, qui décide de ne plus s'alimenter. Ma mère, qui s'allonge à l'hôpital de Mong, dans le lit où vient de mourir une de ses filles. Mes nièces et mes neveux. Tous emportés par la cruauté et la folie khmère rouge. J'étais sans famille. J'étais sans nom. J'étais sans visage. Ainsi je suis resté vivant, car je n'étais plus rien."

Trente ans après la fin du régime de Pol Pot, qui fit 1.7 millions de morts, l'enfant est devenu un cinéaste réputé. Il décide de questionner un des grands responsables de ce génocide : Duch, qui n'est ni un homme banal ni un démon, mais un organisateur éduqué, un bourreau qui parle, oublie, ment, explique, travaille sa légende.

L'élimination est le récit de cette confrontation hors du commun. Un grand livre sur notre histoire, sur la question du mal, dans la lignée de Si c'est un homme de Primo Levi, et de La nuit d'Elie Wiesel.

Auteurs : Rithy Panh est cinéaste. On lui doit, entre autres, Les gens des rizières, Bophana et S21 – La machine de mort khmère rouge, qui fut un événement, et Duch, le maître des forges de l'enfer. Il a écrit ce livre avec Christophe Bataille, qui est romancier.

Christophe Bataille, né en 1971, est l’auteur de plusieurs romans, parmi lesquels Annam (1993) et J’envie la félicité des bêtes (2002), Quartier général du bruit (2006). Il est éditeur chez Grasset depuis 1997.

Mon avis : (lu en août 2012)
Avant de recevoir ce livre pour le Jury Elle 2013, j'avais déjà entendu parler de ce livre et vu une interview de l'auteur. J'étais donc très curieuse de le découvrir.
Rithy Panh est avant tout un cinéaste, il a réalisé en 2003 le film documentaire S21, la machine de mort Khmère rouge où il filme la rencontre entre deux des sept rescapés de ce centre de détention situé au cœur de Phnom Penh où près de 17 000 prisonniers ont été torturés, interrogés puis exécutés entre 1975 et 1979 et de leurs anciens bourreaux. Pour avoir un autre point vue sur ce génocide, en 2011, Rithy Pahn réalise un documentaire sur Dutch qui a dirigé le centre S21. Il l'a rencontré et filmé des centaines d'heures dans sa cellule pour tenter de cerner ce communiste acteur du génocide cambodgien, pour essayer de comprendre pourquoi il est devenu bourreau. C'est à la suite de cette rencontre que Rithy Pahn a ressenti le besoin d'écrire ce livre où il raconte en parallèle sa rencontre avec Dutch et son enfance sous le joug des Khmers rouges trente-cinq ans plus tôt. Cela l'amène aussi à quelques réflexions sur l'homme capable de devenir inhumain.
Dutch est un personnage ambiguë et glaçant, il reconnaît ses crimes mais veut les justifier, il se définit comme un « technicien de la révolution ». Jamais, il n'a un mot de compassion ou de pardon pour ses trop nombreuses victimes. « Méchanceté et cruauté ne font pas partie de l'idéologie. C'est l'idéologie qui commande. Mes hommes ont pratiqué l'idéologie. »  
Rithy Pahn est lui-même un rescapé du génocide commis par les Khmers Rouges sur presque un tiers de la population cambodgienne. Il avait une dizaine d'année le 17 avril 1975, lorsque les Khmers rouges sont entrés dans Phnom Penh et que sa vie a été à jamais bouleversé.

Ayant lu il y a un an sur le même sujet le livre Le portail de François Bizot, cela m'a permis d'en apprendre encore plus sur ce moment d'Histoire mais je n'ai pas pu m'empêcher de comparer les deux livres et regretter que Rithy Panh soit beaucoup dans la retenue et laisse une distance avec son lecteur, mais c'est sans doute conforme à sa personnalité et à sa culture. J'ai eu également l'occasion de voir plusieurs interviews à propos du livre et Rithy Panh est plus touchant dans son témoignage oral que à l'écrit, c'est vrai qu'il est avant tout un cinéaste. Aussi après la lecture de ce livre je suis vraiment curieuse de découvrir ses films S21 et Dutch, le maître des forges de l'enfer.

C'est un témoignage très fort à la fois terrible et passionnant qui ne peut pas laisser indifférent. En cours de lecture, j'ai noté de nombreux passages qui m'ont frappé et que j'ai voulu relire en rédigeant ce billet.

Autres avis : CanelJostein, Mimi, Clara, Constance

Extrait : (début du livre)
Kaing Guek Eav, dit Duch, fut le responsable du centre de torture et d'exécution S21, dans Phnom Penh, de 1975 à 1979. Il explique avoir choisi ce nom de guérilla en souvenir d'un livre de son enfance, où le petit Duch était un enfant sage.
12 380 personnes au moins furent torturées dans ce lieu. Les suppliciés qui avaient avoué étaient exécutés dans le « champ de la mort » de Choeung Ek, à quinze kilomètres au sud-est de Phnom Penh - également sous la responsabilité de Duch. A S21, nul n'échappe à la torture. Nul n'échappe à la mort.
Dans sa prison du tribunal pénal parrainé par l'ONU (en fait CETC, soit « Chambres extraordinaires au sein des tribunaux cambodgiens »), Duch me dit de sa voix douce : « A S21, c'est la fin. Plus la peine de prier, ce sont déjà des cadavres. Sont-ils hommes ou animaux ? C'est une autre histoire. » J'observe son visage de vieil homme, ses grands yeux presque rêveurs, sa main gauche abîmée. Je devine la cruauté et la folie de ses trente ans. Je comprends qu'il ait pu fasciner, mais je n'ai pas peur. Je suis en paix.

Quelques années auparavant, pour préparer mon film S21 - La machine de mort khmère rouge, j'ai mené de longs entretiens avec des gardiens, des tortionnaires, des exécuteurs, des photographes, des infirmiers, des chauffeurs qui travaillaient sous les ordres de cet homme. Très peu ont fait l'objet de poursuites judiciaires. Tous sont libres. Assis dans une ancienne cellule, au cœur du centre S21 devenu un musée, l'un d'eux me lance : « Les prisonniers ? C'est comme un bout de bois. » Il rit nerveusement.
A la même table, devant le portrait de Pol Pot, un autre m'explique : « Les prisonniers n'ont aucun droit. Ils sont moitié homme, moitié cadavre. Ce ne sont pas des hommes. Ce ne sont pas des cadavres. Ce sont comme des animaux sans âme. On n'a pas peur de leur faire du mal. On n'a pas peur pour notre karma. » A Dutch aussi, je demande s'il cauchemarde, la nuit, d'avoir fait électrocuter, frapper avec des câbles électriques, planter des aiguilles sous les ongles, d'avoir fait manger des excréments, d'avoir consigné des aveux qui sont des mensonges, d'avoir fait égorger ces femmes et ces hommes, les yeux bandés au bord de la fosse, dans le grondement du groupe électrogène. Il réfléchit puis me répond, les yeux baissés : « Non. » Plus tard, je filme son rire.  

Grand_Prix_des_Lectrices_2013
Sélection document
Jury Septembre

Autre livre sur le même sujet :

le_portail_folio Le portail - François Bizot

 

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23 mai 2012

Les disparus de Shangri-la - Mitchell Zuckoff

Partenariat avec les éditions Flammarion

les_disparus_de_Shangri_la Flammarion – avril 2012 – 319 pages

traduit de l'anglais (États-Unis) par Christophe Magny

Quatrième de couverture :
13 mai 1945, Nouvelle-Guinée néerlandaise : quelques semaines avant la fin de la guerre du Pacifique, un avion américain s'écrase dans une vallée totalement inexplorée, inconnue des cartes, entourée de montagnes imprenables et tapissées d'une jungle épaisse. Sur les vingt-quatre passagers, combien réchapperont à l'accident? Et comment survivront-ils, grièvement blessés, privés de nourriture et de soins, invisibles des secours qui survolent la vallée, sans défense face aux combattants japonais cachés dans les parages et surtout aux populations indigènes, réputées cannibales ?
C'est cet épisode méconnu de l'histoire que nous raconte Mitchell Zuckoff d'une plume alerte, au terme d'une longue enquête - documents d'archives, lettres et photographies d'époque à l'appui. 
Car, dans ce formidable récit d'aventures, tout est véridique : la découverte d'un monde perdu, idyllique et hostile à la fois, la confrontation avec des tribus vierges de tout contact avec la civilisation, l'héroïsme des rescapés et leur bouleversant témoignage.

Auteur : Mitchell Zuckoff est journaliste et professeur de journalisme à Boston University. Il publie des reportages dans des magazines à grand tirage comme The New Yorker et Fortune, ainsi que dans le quotidien The Boston Globe. Il est l'auteur de plusieurs livres, dont des biographies de Charles Ponzi (Ponzi's Scheme : The True Story of a Financial Legend, New York, Random House, 2005) et de Robert Altman (Robert Altman : The Oral Biography, New York, Alfred A. Knopf, 2009).

Site du livre 

Mon avis : (lu en mai 2012)
Dans ce livre, Mitchell Zuckoff nous raconte une histoire vraie qui a eu lieu à la fin de la Seconde Guerre Mondiale en Nouvelle-Guinée néerlandaise. En 1944, des pilotes américains découvre lors d'un vol de reconnaissance une vallée cachée dans une région montagneuse et luxuriante. Cette vallée est baptisée ”Shangri-La”, depuis les airs ils aperçoivent des jardins, des habitations et une population primitive. L'endroit est inaccessible, il est seulement possible de la survoler. 
Le 13 mai 1945, vingt-quatre militaires hommes et femmes sont invités à embarquer à bord du Gremlin Special, surnom donné à cet avion pour survoler Shangri-La. Au cours du vol, l'avion se crash en pleine jungle et une aventure incroyable commence pour les rescapés. Il va falloir survivre, dans des conditions d'hygiène difficile, se faire repérer par d'éventuel secours, ne pas se faire massacrer par les populations autochtones qui n'ont encore jamais rencontré de blancs...
Le sauvetage est difficile à organiser puisque l'endroit est inaccessible, loin de tout, en altitude, entouré de jungle avec la présence de soldats japonais au alentour...
A partir de témoignages des rescapés, des sauveteurs et de leurs proches, d'une enquête très documentée avec également de nombreuses photos de l'époque, l'auteur nous raconte une histoire incroyable. A la fin du livre, il y a près de 50 pages de notes. Au début de ma lecture, je m’y référais mais ce n’étais pas très pratique car pour chaque chapitre d’une dizaine de pages, il y a environ trente notes, le plus souvent faisant référence à la source ou avec le mot mystérieux Ibid. J’ai fini par aller voir sa signification : Abréviation utilisée dans les notes bibliographiques pour faire référence à un ouvrage déjà cité dans une note précédente. (Merci Wikipedia)

Un livre passionnant qui raconte une histoire vraie et qui se lit comme un roman d’aventure.

Un grand Merci à Virginie et aux éditions Flammarion pour ce partenariat.

Autre avis + concours pour gagner le livre

Les disparus de Shangri-la
(Présentation de l'auteur en V.O)

Extrait du Site du livre 

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24/50 : Missouri
(Etat d'origine de John McCollom, l'un des rescapés) 

  Lu dans le cadre du Challenge Petit BAC 2012
logo_Petit_BAC_2012
"Géographie"

 

10 janvier 2012

Tout, tout de suite – Morgan Sportès

tout_tout_de_suite Fayard – août 2011 – 378 pages

Prix Interallié 2011

Quatrième de couverture :
Vous qui entrez ici, laissez toute espérance. Ce livre est une autopsie: celle de nos sociétés saisies par la barbarie.
En 2006, après des mois de coups tordus et d’opérations avortées, une petite bande de banlieue enlève un jeune homme. La rançon
exigée ne correspond en rien au milieu plutôt modeste dont ce dernier est issu. Mais le choix de ses agresseurs s’est porté sur lui
parce que, en tant que Juif, il est supposé riche. Séquestré vingt-quatre jours, soumis à des brutalités, il est finalement assassiné.
Les auteurs de ce forfait sont chômeurs, livreurs de pizzas, lycéens, délinquants. Certains ont des enfants, d’autres sont encore mineurs. Mais la bande est soudée par cette obsession morbide: «Tout, tout de suite.»
Morgan Sportès a reconstitué pièce par pièce leur acte de démence. Sans s’autoriser le moindre jugement, il s’attache à restituer leurs dialogues confondants d’inconscience, à retracer leur parcours de fast-foods en cybercafés, de la cave glaciale où ils retiennent leur otage aux cabines téléphoniques d’où ils vocifèrent leurs menaces, dans une guerre psychologique avec la famille de la victime au désespoir et des policiers que cette affaire, devenue hautement «politique», met sur les dents.

Indigence intellectuelle et morale au milieu de l’indigence architecturale et culturelle: il n’y a pas de mot pour décrire l’effroyable
vide que la société a laissé se creuser en son sein, et qui menace de l’aspirer tout entière. Pas de mot. Il fallait un roman.

Auteur : Morgan Sportès est né en 1947 à Alger. Ses livres sont traduits en de nombreuses langues (espagnol, italien, portugais, grec, japonais, thaï, allemand, russe, polonais, chinois…). L'Appât a également été porté à l’écran par Bertrand Tavernier.

Mon avis : (lu en janvier 2012)
Difficile de définir ce livre comme un roman. Bien que Morgan Sportès ait changé les noms des personnages, ce livre est une description détaillée d'un triste fait divers de 2006 : l'enlèvement, la séquestration, la torture et l'assassinat d'Ilan Halimi par le Gang des Barbares. 
L'auteur nous fait un récit détaillé, très documentés des faits, il présente tous les protagonistes et les prémices de cette triste histoire. Il nous décrit avec précision leurs parcours, leurs actes, leurs dires et leurs réflexions. Il ne porte aucun jugement, il énonce froidement les faits, seulement les faits.

J'avais suivi sans plus l'affaire en 2006 et ce livre m'a ouvert les yeux sur un monde de jeunes sans repère, sans morale, sans éducation. Ils ont pourtant des parents qui travaillent, des frères et sœurs qui font des études. Eux ne pensent qu'à l'argent facile et pour cela ils sont près à faire n'importe quoi, rien ne les arrêtent.

Cette histoire est un vrai gâchis, cela commence par des premiers essais de kidnapping ratés, puis l'enlèvement d'Elie simple vendeur de téléphones choisi par hasard ayant comme seul tort d'être Juif (donc certainement riche). Le cerveau de la bande, Yacef avait prévu de séquestrer Elie trois jours le temps d'obtenir la rançon. Mais les évènements ne se passeront pas comme il l'avait prévu, la police conseille à la famille de faire durer les négociations, l'otage va rester séquestré vingt-quatre jours dans des conditions inhumaines. Et à bout d'argument pour récupérer la « fameuse rançon », lâché par tous ces complices, Yacef décide enfin de libérer l'otage et de nettoyer toutes traces de ses méfaits comme dans les séries américaines... A plusieurs reprises, l'un ou l'autre des protagonistes auraient pu arrêter la machine infernale et inexorable de la folie meurtrière, les complices étaient trop faibles, la police avait mal cerné la psychologie de la bande...

Ce livre est passionnant, coup de poing qui fait froid dans le dos.

Extrait : (page 282)
Que devient Elie dans cette affaire ? Une chose. Un objet de négoce. Entre l'Etat et un petit voyou. Une sorte de fétiche aussi, sur lequel Yacef, pour passer sa rage, frappe et s'acharne. Une poupée de magie noire qu'on crible d'épingles. Un trésor encore, enterré au fond d'une cave. Un capital dont le récent « propriétaire » enrage de ne pouvoir tirer profit. Cette « marchandise », en effet, ne trouve pas à se « vendre ». Sa cote baisse donc. Mais, avec cette cote, c'est la cote même de Yacef qui s'écroule : à ses yeux à lui, comme à ceux des types de sa bande. Lui, le caïd, ne serait-il qu'un charlot ? Ceux de Bobigny, déjà, le laissent choir. Sniper a des doutes et crève de trouille. Il n’y a plus que les « petits » qui soient fidèles. Encore que l’un d’entre eux ait déserté, Tête de Craie, qu’il faudra remplacer… Yacef est un général sans armée, ou presque. Il avait suscité toutes sortes de rêves. Ces rêves s'écroulent, comme ceux de la Perrette du pot au lait : le pot au lait en l'occurrence est un jeune homme de 23 ans, crevant de froid, pieds et poings liés, nu, au fond d'une cave obscure.
La police craignait qu'en payant une part, ne serait-ce que minime, de la rançon, elle dévaluerait l'otage et augmenterait le risque qu'on le supprime comme témoin gênant susceptible d'identifier ses ravisseurs. Ainsi prêtait-elle à ceux-ci une rationalité : économique du moins. Mais si le ravisseur n'était qu'un fou dont toute résistance rencontrée accroît la rage ?

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Challenge 5%
Rentrée Littéraire 2011
RL2011b
30/35

Vidéo : Emission de la Grande Librairie
(13/10/2011 - Morgan Sportès : 3'15 à 19')

27 octobre 2011

Mots de tête – Dominique Resch

 Lu dans le cadre de de Critique en Masse de Babelio
en partenariat avec les éditions Autrement

mots_de_t_te Autrement – août 2011 – 152 pages

Quatrième de couverture :
"Prof n'est pas un vrai métier. C'est une discipline sportive. Une épreuve d'endurance. Un marathon où le plus teigneux gagne à la fin."
Chaque jour, je retrouve Tonio, Nadir, Jérémy et les autres. Chaque jour, dans ce lycée des quartiers Nord de Marseille, je m'apprête à vivre l'inattendu : les rencontres OM/PSG qui rythment la vie et le moral de la classe, les samoussas préparés par Hafoussouate qui réveillent mes papilles, l'arrivée du nouveau surveillant en béton armé qui chancelle au bout d'une semaine, Tonio qui perturbe allègrement la répétition de Cyrano de Bergerac, et cette course à vélo où les élèves foncent à folle allure dans un décor de cinéma...
En une vingtaine de séquences étonnantes, drôles et plus vraies que nature, l'auteur dévoile son goût passionné pour l'enseignement grâce à un regard à la fois lucide et attendri.

Auteur : Dominique Resch est professeur de français, d'histoire-géographie et d'éducation civique dans un lycée professionnel des quartiers Nord de Marseille.

Mon avis : (lu en octobre 2011)
Ce livre est écrit par un professeur de lycée professionnel en banlieue de Marseille. Il raconte son quotidien dans de courts chapitres. Une vingtaine d'épisodes, drôles ou attendrissants qui nous raconte la réalité de l'enseignement dans un cours de français ou d'histoire-géo en lycée professionnel.
Les anecdotes sont variées, parfois effrayantes comme celle où un coup de feu est tiré dans la classe, amusantes quand le professeur apprend à Tonio à respecter sa mère ou à Loïc à respecter les homosexuels, Dominique Resch donne également son palmarès des « bons mots » de ces élèves...
Ce livre se lit très facilement et l'on sent l'attachement du professeur pour ses élèves. J'ai passé un très bon moment de lecture.

Merci Babelio et les éditions Autrement pour ce partenariat.

Extrait : (début du livre)
Je connais tout.
La superficie du Groenland au centimètre carré près, le poids de l'armure de Bayard au gramme près et le temps de digestion de la loutre des Pyrénées à la seconde près.
Tout.
Je sais absolument tout.
Si un conflit vient à éclater entre l'Irlande de Nord et la Corée du Sud, non seulement je sais exactement c'est la faute à qui mais en plus je sais qui va avoir gain de cause et de quel côté est Dieu.
Tout.
Normal je suis prof.

Si le prof doute, sortez les sarbacanes et envoyez les boulettes. Du coup, pas de problème : je connais tout. Je maîtrise tout. Je parle comme un livre ouvert. Et je ne doute jamais de rien.
Jamais.
Un prof qui doute, c'est une cible. On raconte n'importe quoi aux apprentis profs quand ils apprennent le métier : quelqu'un qui enseigne aurait le droit de douter, voire de se tromper comme tout le monde... Bien sûr que non. Tout le monde a le droit de commettre des erreurs – même les médecins -, mais pas les profs. S'aider d'un dictionnaire ou de n'importe quel bouquin afin de pouvoir répondre à la question un peu pointue d'un élève, c'est la meilleure façon de devenir, oui, une cible. Le prof doit parler comme un livre ouvert parce qu'il a la science infuse. C'est simple. En classe, en cas de doute, je préfère mille fois inventer n'importe quoi que vérifier ma réponse par une aide extérieure. Le prof qui pompe, c'est zéro. Déjà qu'il lui arrive d'être noté par un inspecteur (ça, c'est pas clair), s'il se met à tricher, ce n'est plus possible.

 

 

Challenge 2%
Rentrée Littéraire 2011
RL2011b
13/14

 

Challenge le nez dans les livres
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La Lectrice : 2/2

 

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14 octobre 2011

A voir à la Télé : Mardi prochain...

Joseph l’insoumis film de Caroline Glorion

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Mardi 18 octobre 2011 à 20h35 sur France 3

Avec Jacques Weber, Anouk Grinberg, Nicolas Louis, Salomé Stevenin, Laurence Côte et une cinquantaine d’acteurs non professionnels, dont beaucoup ont vécu ou vivent encore dans la pauvreté. 
A travers ce téléfilm de Caroline Glorion, produit par France Télévisions, c’est une partie de la vie de
Joseph Wresinski, fondateur d’ATD Quart Monde, qui nous est racontée.  

Récompensé par le Pyrénées d'Or de la Meilleure Fiction Unitaire au Festival des Créations Télévisuelles de Luchon en 2011

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Joseph Wresinski naît dans une famille très pauvre, en 1917. Ordonné prêtre en 1946, il exerce pendant dix ans dans des paroisses ouvrières et rurales de l’Aisne, avant de rejoindre un bidonville à Noisy-le-Grand. Un peu plus de 250 familles y sont rassemblées, dans la plus grande misère, un choc pour le père Joseph.
Il décide de s’installer avec les familles avec un objectif : changer la façon d’aborder la lutte contre la grande pauvreté en proposant une alliance entre les très pauvres et les autres citoyens.

Peu connu du grand public, le père Joseph, décédé en 1988, fonde en 1957 l’association “Aide à toute détresse”, qui devient l’organisation non gouvernementale ATD Quart Monde. Elle agit actuellement dans une trentaine de pays et vise à garantir l’accès des plus pauvres à l’exercice de leurs droits.

 

Un making of du film a également été réalisé : 


Joseph l'Insoumis, l'aventure cinématographique par EditionsQuartMonde

logo_site 
Site ATD Quart Monde

 

Après le diffusion du film, à 22h10 sur France 3, l'émission Ce soir (ou jamais !) :
Frédéric Taddéï et ses invités reviennent sur ce film et les thèmes abordés.
Dans les années 60, la misère était visible aux yeux de tous dans les bidonvilles.
Aujourd'hui, 50 ans après, la précarité et la pauvreté, loin d'avoir disparues, sont de plus en plus sensibles. L'indignation du père Wresinski a-t-elle été vaine ?
Pourquoi la misère subsiste-t-elle au coeur de l'un des pays les plus riches du monde ?

 

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27 août 2011

Dépasser son ombre - Anthony Fagnot

Lu dans le cadre du partenariat bibliofolie_2011_logo_1501 et Éditions Dubuisson

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Publiart – décembre 2004 -

Éditions Dubuisson – avril 2011 – 410 pages

Quatrième de couverture :
Partir... Qui n'a jamais pensé à partir, loin du stress et de la folie des Hommes. Le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle s'est imposé à moi, comme une évidence. Je suis parti seul, au pied des montagnes françaises, un matin de printemps. Enfin, je n'étais pas vraiment seul. Comme j'ai un peu peur des ours, j'avais décidé d'emmener le mien. On ne sait jamais. Comme vous, peut-être, je suis un adulte. Mais ce compagnon est un petit bout de ce que je suis resté d'enfant. Et croyez-moi, ensemble, nous avons vu des choses qui tiennent de la magie. La vraie, celle qui écarquille les yeux. Si le cœur vous en dit, on vous emmène avec nous. Ouvrir ce livre, c'est déjà un peu se mettre en chemin. Alors bon voyage...

Auteur : Après avoir suivi des études littéraires à Amiens, Antony Fagnot entre dans la police en avril 1997. D'abord Gardien de la Paix, une formation interne lui permet de devenir Agent de la Police Scientifique à St-Maur-des-Fossés puis à Alfortville. Ce jeune homme passionné et rêveur exerce son métier avec amour, même s'il est très tôt confronté à des situations difficiles. Il va alors développer un appétit insatiable de la vie, de ses « petits bonheurs » qui nous échappent trop souvent, et se mettre en quête d'authenticité. L'envie de se rapprocher des valeurs essentielles ne va plus le quitter, avec une idée en tête : partir loin des contraintes et des chaînes de notre Société. À la recherche de lui-même, à la rencontre des autres. Il décide donc de partir pour 31 jours de marche, seul, sur le chemin de St-Jacques-de-Compostelle. Une aventure humaine extraordinaire, que le jeune auteur souhaite partager au travers de ce livre. L'ouvrage est récompensé par des prix littéraires, dont la médaille d'argent de la société « Arts-Sciences-Lettres » de l'Académie Française.

Mon avis : (lu en août 2011)
Lorsque ce livre a été proposé pour un partenariat par Bibliofolie, j'avais très envie de le découvrir. J'ai déjà lu plusieurs livres autour du thème de la route de Saint-Jacques-de-Compostelle et chaque voyage est différent et passionnant... "Dépasser son ombre" ne fait pas exception pas à la règle. Et ne voulant pas lâcher le livre, je l'ai dévoré en un après-midi et une soirée !

Anthony nous raconte sa route vers Saint-Jacques-de-Compostelle au jour le jour (un chapitre par jour) avec beaucoup d'humour et de poésie. Il nous parle de ses rencontres avec d'autres marcheurs qui partagent avec lui le voyage, leurs histoires, leurs douleurs... Anthony n'est pas parti seul, il a comme compagnon un petit ourson en peluche que ses parents lui avaient offert pour son premier Noël, 28 ans plus tôt et qu'il n'a jamais quitté. La veille de son départ, il se sent coupable de devoir l'abandonner et décide donc de l'emmener comme ambassadeur auprès des vrais ours qu'il pourrait rencontrer dans les montagnes des Pyrénées...
Anthony n'est pas parti pour Saint-Jacques-de-Compostelle pour des raisons religieuses, mais pour échapper à son quotidien et réfléchir sur sa vie. N'ayant pu prendre un congé de seulement quarante jours, il va commencer son chemin à Saint-Jean-Pied-de-Port aux pieds des Pyrénées début mai 2004. Trente et un jours plus tard, il arrivera émerveillé et transformé à Santiago.
J'ai beaucoup aimé ce livre, Anthony nous embarque à sa suite sur le Chemin, tous nos sens sont en éveil : les odeurs, les paysages, les émotions, ses rencontres sont décrites avec beaucoup simplicité et d'humour. Un livre inoubliable.
A la fin du livre, il y a quelques photographies des pélerins rencontrés par Anthony en compagnie du petit ourson bleu. Et pour cette nouvelle édition, quelques pages écrites en janvier 2007 donnent aux lecteurs des nouvelles des différents pèlerins, devenus amis, rencontrés sur le Chemin et Anthony nous parle également de l'après Chemin de Compostelle, son retour à la vie normale. Chaque jour, il repense au Chemin, il n'hésite pas à le partager avec ceux qu'il rencontre...
La dernière page est plus triste, en effet, Anthony est décédé le 8 avril 2009, sa famille continue à le faire vivre en partageant avec les lecteurs la magie du chemin qu'il a tant aimé. Son chemin d'Homme... et comme Anthony l'a écrit « La fin d'un chemin n'est rien d'autre que le commencement d'un autre... »

Un grand MERCI à Bibliofolie et aux Éditions Dubuisson pour m'avoir permis de découvrir ce superbe témoignage qui m'a beaucoup touché.

Site (2007) et blog (2009) dédiés au livre et à l'auteur.

Extrait : (Avant-propos)
En fait, à bien y réfléchir, je ne me rappelle plus exactement l’élément précis qui m’a poussé à partir. De plus, je le reconnais humblement, je suis un peu paresseux, et une telle aventure nécessitant inévitablement un peu de courage, il a fallu que la décision soit guidée par un sentiment d’une force gigantesque. La routine, sans doute, professionnelle et personnelle. Cette platitude monochrome m’avait plongé dans une sédentarité dont la banalité n’avait d’égal que le manque de saveur. Plus d’une fois je me suis senti à deux doigts de « tout plaquer », comme on dit. Beaucoup d’entre nous y pensent, me semble-t-il, sans jamais l’oser.
Prendre quelques affaires, un peu d’argent et un aller simple pour n’importe quelle destination où il n’y a pas de chaînes, d’horaires, de codes et de ces contraintes en tous genres. Mais voilà, comme un arbre, j’ai des racines, profondes et essentielles. Elles sont quatre. Deux grandes m’ont fait naître et deux adorables petites ont grandi avec moi.
Alors pour elles, il faut continuer. Par amour pour cette famille incroyablement unie et qui m’a toujours soutenu dans les nombreux moments difficiles, et que je ne me vois pas quitter. Et pourtant…

D'autres livres ou film sur Saint-Jacques de Compostelle :

en_avant_route En avant, route ! - Alix de Saint-André

Le pèlerin de Compostelle - Paulo Coehlo

st_jacques_la_mecque Un film : Saint-Jacques... La Mecque - Coline Serreau

 

 

1 juillet 2011

La Parenthèse – Élodie Durand

la_parenth_se Delcourt – mai 2010 – 221 pages

Prix de la première œuvre à Angoulême 2011  

Quatrième de couverture : 
« On est où là ? Il est quelle heure ? On est où là ? Il est quelle heure ?
Là où je suis...
Je ne vois rien. Je ne sens rien. Je ne peux plus parler...
Je ne peux plus entendre... »

La Parenthèse est un témoignage, une bataille contre l'adversité. Le récit d'une mémoire abîmée par le temps et par la maladie...

Auteur : Élodie Durand a étudié à l'école des arts décoratifs de Strasbourg, et a suivi les cours d'illustration de Claude Lapointe, Christian Heinrich et Joseph Béhé. Elle a obtenu en 2003 le DNSEP Communication "illustration" avec les félicitations du jury. Parmi les projets présentés lors du diplôme, il y avait déjà une ébauche de La Parenthèse. Avant de se lancer dans ce long récit, Elodie a publié ses premières histoires en bande dessinée : "Préavis", collectif Canicule chez l'Institut Pacôme ; "Les Moitiés", collectif Pommes d'amour chez Delcourt, collection Mirages. Elle travaille également pour la presse enfantine et l'édition jeunesse (Actes Sud, Milan, Bayard...).

Mon avis : (lu en juin 2011)
J’ai emprunté cette bande dessinée à la Bibliothèque sur le conseil d’Émilie, j’avoue être plutôt ignare en matière de BD et les conseils sont toujours bienvenus…

Judith a 20ans, et elle va se retrouver face à la maladie. Cela commence avec des petits malaises avec pertes de mémoire. Au début, la maladie se nomme épilepsie, mais celle-ci n’est que le symptôme d’une autre maladie : une tumeur. Et pour conséquence de nombreux effets secondaires : le premier est la perte de la mémoire, il y aura ensuite les pertes d’équilibres, puis du sommeil intense... Sa vie, ainsi que celle de ses proches, va être bouleversée.
Élodie Durand a utilisé son deuxième prénom pour raconter sa propre histoire, un témoignage fort et poignant. Dix ans après, elle nous dévoile tout en douceur et tout en pudeur cette Parenthèse de sa vie.

Le dessin est en noir et blanc, sont inclus également des dessins réalisés par l’auteure pendant la période de ses crises. Le lecteur comprend mieux les différents états d'angoisse, de peur, de solitude et de vide dans lesquels se trouve plongé Judith. Ces dessins sont particulièrement touchants. A découvrir sans hésiter !


Extrait :

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10 mai 2011

Confessions d'une taupe à Pôle Emploi - Gaël Guiselin, Aude Rossigneux

confessions_d_une_taupe___pole_emploi Calmann-Lévy – mars 2010 – 150 pages

Quatrième de couverture :
Un témoignage décapant et explosif, un état des lieux accablant sur Pôle emploi.
Et si Pôle emploi empêchait de retrouver du travail ? Alors que la crise économique a fait exploser le compteur du chômage, rien ne va plus. Agents débordés, déprimés, manque d’information et de formation, culte de la rentabilité et privatisation des missions : la fusion ANPE-Assédic est très difficile.
Le leitmotiv ? Faire du chiffre. Temps réduit pour chaque demandeur d’emploi, radiation pour des broutilles… Globalement, Pôle emploi semble considérer tout demandeur comme un fraudeur en puissance, un suspect permanent. Plus grave, les réformes se succèdent à un rythme tel que les agents n’ont pas le temps de les assimiler. Que dire alors des demandeurs !
Conseiller de Pôle emploi, et ancien chômeur de longue durée, Gaël Guiselin a une chance : il connaît les deux côtés du guichet. Dans ce livre coup de gueule, il fait un état des lieux accablant mais donne également des ficelles pour ne pas se faire broyer par la machine administrative. Un petit livre salutaire.

Auteurs : Gaël Guiselin est le pseudonyme d’un conseiller du Pôle emploi. Diplômé de l’enseignement supérieur, Gaël Guiselin a réussi le concours de l’ANPE quelques jours avant avant la fin de ses droits.
Aude Rossigneux est journaliste. Elle a notamment été la rédactrice en chef de Ripostes, feu l’émission politique de Serge Moati sur France 5.

Mon avis : (lu en mai 2011)
J'ai pris par curiosité ce livre à la bibliothèque, comme j'ai la chance de ne pas connaître Pôle-emploi j'étais intéressée de découvrir ce témoignage. L'auteur nous raconte la fusion de l'ANPE et des ASSEDIC et la nouvelle organisation interne du Pôle emploi. Une organisation pleine de promesses en théorie et qui pratiquement n'a pas les moyens nécessaires pour fonctionner. On découvre le parcours du combattant du chômeur et face à eux les agents de pôle emploi qui malgré les aberrations du système essaye du mieux possible d'aider leurs trop nombreux « clients ».

Certaines situations nous font rire, d'autres nous révoltent ou nous attristent... Ce livre m'a fait découvrir un monde que je ne connaissais pas et m'a fait vraiment prendre conscience des difficultés que peuvent rencontrer les chômeurs...

 

Extrait : (page 13)
A l'origine de ce livre, il y avait l'idée d'écrire une sorte de guide de survie du demandeur d'emploi en temps de crise. Car ma mission de conseiller ne s'arrête pas à la sortie de l'agence. Nous sommes sans cesse interpellés, parfois dans des lieux insolites, au supermarché, entre deux cageots de bananes et le stand fruits secs, à un dîner chez des amis où l'on nous apostrophe : «J'ai raté mon rendez-vous, comment je fais ?». Au baptême d'un neveu : «Si je démissionne j'ai droit à quoi ?». A la sortie de l'école où un père me hèle : «Un de mes employés vient me lâcher, vous auriez pas quelqu'un ?»
Au départ, donc, l'envie d'expliquer, de donner des conseils. Mais, à l'arrivée, le besoin de témoigner. Témoigner pour que les gens comprennent qu'un conseiller est lui-même bien souvent un ancien demandeur d'emploi. De ma période de chômage, je garde le souvenir de la peur qui me tenaillait le ventre lorsque je me rendais à un entretien, lorsque je me disais : «Et si je n'avais pas fait ce qu'il fallait ? Et si pour une raison quelconque on me coupe mes indemnités ? Et si on me propose un travail que je ne souhaite pas ? Et si, et si, et si...» Ecrire pour que l'on sache que quand nous parlons de demandeurs d'emploi, nous savons de quoi il retourne. Nous parlons de nous mêmes, d'un voisin, d'un cousin, de notre compagne, ou d'un de nos parents.
Ecrire pour rappeler que la précarité, nous aussi la connaissons. Et que, lorsqu'un demandeur en entretien s'exclame «Ah non, cette annonce, ça ne va pas aller ! Vous avez vu le salaire ? Vous travailleriez, vous, pour une somme pareille ?», la réponse est oui. Avec un bac +6, et sept ans d'ancienneté, je touche 1370€ net par mois.
Après plusieurs grèves et un malaise qui a fait la une des journaux, la direction nous a soumis en novembre 2009 un questionnaire dont les résultats ont pour objectif d'aider à améliorer nos conditions de travail. Rendus publics début janvier 2010, ils sont édifiants : 71,2% des agents qui ont accepté de répondre affirment se trouver dans une «situation de travail tendue» ; 86% du personnel parle d'une «dégradation» des conditions de travail ; près de 89% estiment n'avoir pas été préparés à la fusion et seuls 33% pensent pouvoir trouver un soutien auprès de leur supérieur en cas de problème.
Raconter, parce que, comme beaucoup d'agents, je n'en peux plus de cette tentation de jeter Pôle emploi avec l'eau du bain de la fusion. Parce que j'en ai marre que des employeurs s'imaginent qu'«en France les gens ne veulent pas bosser» et que «les smicards préfèrent resyer au chômage». Parce que ce n'est plus possible d'entendre dire que si Pôle emploi va mal c'est seulement «la faute à la crise».

 Lu dans le cadre du Challenge Petit BAC
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"Animal"

20 avril 2011

Derniers fragments d’un long voyage – Christiane Singer

Lu durant le Read-A-Thon Avril 2011RAT_9_10_04_2011

derniers_fragment_d_un_long_voyage Albin Michel – avril 2007 – 135 pages

Quatrième de couverture :
Le 1er septembre, un jeune médecin annonce à Christiane Singer qu'elle a encore six mois au plus devant elle. Le 1er mars, Christiane Singer clôt le carnet de bord de ce long voyage. " Le voyage - ce voyage-là du moins - est pour moi terminé. A partir de demain, mieux : à partir de cet instant, tout est neuf. Je poursuis mon chemin. Demain, comme tous les jours d'ici ou d'ailleurs, sur ce versant ou sur l'autre, est désormais mon jour de naissance. "

Auteur : Née à Marseille en 1943, romancière et essayiste au charisme étonnant, Christiane Singer place la dimension intérieure et spirituelle propre à chacun et l'éthique de soi au coeur de son oeuvre. Ses parents étant originaires d'Europe Centrale, elle vit en Suisse et en Allemagne avant de s'établir près de Vienne. Lectrice à l'Université de Bâle et chargée de cours à celle de Fribourg, Christiane Singer suit également l'enseignement de Graf Karlfried Dürckheim, un des disciples de Jung. De sensibilité chrétienne, elle se fait connaître dès l'âge de 22 ans avec son livre 'Les Cahiers d'une hypocrite' qui paraît en 1965. Auteur d'une vingtaine d'ouvrages, elle gagne le prix des libraires en 1978 pour 'La Mort viennoise' qui prend pour sujet la peste qui a ravagé Vienne en 1679. Le prix Camus récompense 'Histoire d'âme' en 1988 et 'La Divine tragédie' sorti en 2006 est salué par la critique. Atteinte d'un cancer qui lui ôtera la vie, Christiane Singer rédige le récit 'Derniers fragments d'un long voyage' qui, à travers la douloureuse épreuve de la maladie, conte un bouleversant hymne à la vie. Décédée à Vienne, Autriche le 04 avril 2007.

Mon avis : (lu en avril 2011)
C'est un collègue de travail qui m'a prêté ce livre qu'il avait beaucoup aimé. Je ne connaissais pas cette auteur, j'ai trouvé ce livre bouleversant et très courageux.
L'histoire est difficile, car l'auteur Christiane apprend qu'elle va mourir, un jeune médecin le lui dit « Vous avez encore six mois au plus devant vous », elle décide donc raconter ces six mois.

Ce récit n'a rien de triste ou de déprimant, c'est une magnifique leçon de courage et de force spirituelle. Christiane parle avec beaucoup de pudeur de sa douleur physique, on retient surtout son immense message d'amour et d'espoir. Elle parle de sa foi, des ses proches qui sont des forces pour supporter ces moments douloureux.
Six mois plus tard, elle écrira : « Derniers fragments d'un long voyage. Voilà. Le carnet de bord est clos. Le voyage – ce voyage-là du moins – est pour moi terminé. A partir de demain, mieux : à partir de cet instant, tout est neuf. Je poursuis mon chemin. »

Un témoignage magnifique et fort qui ne laisse pas indifférent.

Extrait : (début du livre)
28 août 2006
Ces jours qui viennent vont sans doute me révéler l'origine médicale de mon mauvais état. A l'avenant ! Il y a un soulagement à savoir à quoi s'en tenir sur un plan restreint du moins.
Voilà trois semaines que je cherche ce carnet. Aujourd’hui comme posé par d'invisibles mains, le voilà derrière mon lit ! Quelles retrouvailles !
Ce qu'il y a à vivre, il va falloir le vivre.

Un jour plus tard
J'ai eu l'aventure de connaître après une minuscule anesthésie une heure d'amnésie une heure d'amnésie totale : de l'instant où Giorgio est venu me chercher à l'hôpital jusqu'à celui où je me suis effondrée sur mon lit à Rastenberg : un vide total. Il m'a tout raconté en détail : j'ai même fait les courses et rempli mon grand panier avec une conscience aiguë et précise, parlé gaiement à la caissière.
L'étrange sensation qu'un temps viendra où toute notre existence disparaîtra dans pareille fissure.
Ensuite j'ai somnolé indéfiniment. Beaucoup d'âmes amicales m'ont appelée, se préoccupant de moi.
Chaque fois que je me levais, je tombais aussitôt d'épuisement. M. m'a conseillé de faire une vraie soupe de bœuf et de boire le liquide ; je l'ai fait avec l'aide de V. et j'ai senti les forces revenir ; mémoire des temps bénis, de ces maladies enfantines qu'on nous accordait encore le temps de traverser avec, à nos côtés, une mère qui connaissait les gestes pour guérir.
Giorgio me dit ce soir que cette mininarcose m'a délivrée d'une programmation triste et que je lui parais libre.

1er septembre, trois jours plus tard
après une cascade d'évènements
La journée qui a suivi a été lugubre. Je n'ai fait que me faire pitié. Comme si je n'avais jamais eu de pratique bouddhiste de toute ma vie ! J'adhère à ma vie comme si je n'avais jamais connu la moindre distance. Mon potentiel de ressentiment me sidère.
Et alors ?
Entre-temps hospitalisée à Krems, je rencontre un maître dans ma voisine de chambre. Au dernier stade d'un cancer généralisé, elle a une énergie extraordinaire.
Aïe ! Aïe ! Aïe !

15h25
Verdict :
« Vous sacrifierez un coq à Esculape ! » lança joyeusement Socrate lorsqu'on lui annonça le verdict : sa condamnation à mort. (Il était d'usage alors pour une guérison inespérée de sacrifier un coq à Esculape.) Je ne raffole pas de l'idée de considérer la Vie en soi comme une maladie dont il faille guérir. Mais impossible de ne pas trouver du panache – une indéniable grandezza – à la repartie du vieux philosophe.

« Vous avez encore six mois au plus devant vous », me dit le jeune médecin. Ou s'adresse-t-il plutôt au cliché d'un mètre carré qu'il tient en main ? Une fois que ces mots ont été prononcés, toute la brume se trouve dissoute. C'est un climat qui me convient. Je ne veux pas me prendre en pitié, j'ai été si richement dotée. Ma vie est pleine à ras bord.
Encore six mois au plus devant vous !

18 avril 2011

Danbé – Aya Cissoko et Marie Desplechin

Lu en partenariat avec Blog-O-Book et Calmann-Lévy

Lu durant le Read-A-Thon Avril 2011RAT_9_10_04_2011

danb_ Calmann-Lévy – février 2011 – 192 pages

Quatrième de couverture :
« J’aimerais que celle ou celui qui lira ce petit livre mesure ce qu’il a de déchirant. Il est mon au revoir à ceux que je laisse sur le quai. (…) Il est mon au revoir à mon enfance de petite fille noire en collants verts, qui dévale en criant les jardins de Ménilmontant. »

Quand Marie Desplechin rencontre Aya Cissoko, elle est touchée par la singularité de son histoire. Née de parents maliens, Aya a connu une petite enfance habitée de souvenirs délicieux, qui prend fin avec la disparition de son père et de sa petite sœur dans un incendie. Élevée par sa mère dans le respect du danbé, la dignité en malinké, Aya apprend à surmonter les épreuves et trouve dans la boxe un refuge.

Auteurs : Aya Cissoko, trente et un ans, championne du monde de boxe anglaise en 2006, est aujourd’hui étudiante à l’Institut d’études politiques de Paris.
Marie Desplechin a écrit une trentaine de livres pour la jeunesse, et une dizaine pour les plus grands. Elle a publié avec Lydie Violet un récit intitulé La Vie sauve, qui a reçu en 2005 le prix Médicis Essai.

Mon avis : (lu en avril 2011)
Ce livre est un récit autobiographique qu'Aya Cissoko a écrit avec Marie Desplechin.
Dès le début du livre Aya nous parle de son père Sagui venu du Mali en France pour travailler puis de sa mère Massiré arrivée en France à l'âge de 20 ans. Le couple aura bientôt quatre enfants : Issa, le fils aîné, puis deux filles Aya et Moussa et un dernier garçon Massou. La vie n'est pas facile, Sagui n'a pas toujours de travail mais la joie règne dans cette famille. Et survient le drame, dans la nuit du 27 au 28 novembre 1986, un incendie ravage l'immeuble, Sagui, le père, et Moussa, la petite sœur, vont mourir. « le feu a  été allumé pour tuer ».
Massiré refuse de repartir vivre au pays comme lui demande la communauté malienne de Paris, et elle s’installe avec ses trois enfants au 140 rue de Ménilmontant. C’est là que Massou, le petit dernier, mourra à son tour, d’une méningite soignée au Doliprane par les médecins moins d'un an après son père et sa sœur. Aya a neuf ans, elle écrit « je suis dans une solitude désespérée » .
Aya est une bonne élève et lorsque sa mère l'inscrira dans un club de sport, elle choisira la boxe. Elle va trouver dans la boxe un refuge et malgré quelques mauvaises fréquentations, elle va tracer sa route : elle devient championne du monde de boxe française en 1999 puis en 2003. En 2006, elle gagne le Championnat du monde de boxe anglaise. Une grave blessure la contraint à abandonner sa carrière sportive et Aya se lance un nouveau défi, reprendre des études. Elle obtient alors une bourse pour suivre une formation à l'Institut d'études politiques de Paris.

Le titre du livre danbé signifie « dignité » en malinké. C'est le code de conduite que Massiré apprend à Aya à respecter pour aller de l'avant dans son existence. Cette mère est admirable et Aya est battante et courageuse.

Voilà un livre plein d'espoir, plein d'amour, un témoignage fort et poignant. J'ai lu ce livre facilement et d'une traite, j'ai été émue par ce beau récit, Aya est une très belle personne.
Merci à Marie Desplechin d'avoir accompagnée Aya Cissoko dans l'écriture de ce livre.

Un grand merci à Blog-O-Book et Calmann-Lévy pour ce partenariat.

Extrait : (page 20)
Quand elle suit son mari tout neuf, Massiré Dansira est donc l'une des premières à quitter le village. Elle y acquiert le statut prestigieux d'aînée. Ma mère, l'aînée, ne parlera jamais à ses proches autrement qu'en bambara. Elle ne s'habillera jamais autrement qu'en jupe longue de wax. Et elle ne laissera plus jamais à quiconque le soin de décider de sa vie. Mais pour le moment, officiellement, elle a vingt ans. Elle vient d'arriver en France. On est en 1976. Au calendrier grégorien. Au village, c'est l'an 1354 de l'Hégire.

Je garde la nostalgie des journées qui n'en finissent pas, de leur matière légère, cotonneuse, des jeux de cache-cache dans les terrains vagues. Mon enfance est une période d'une extrême douceur. Un an après son mariage, Massiré a donné naissance à son premier fils, Issa. Je suis née un an après, en 1978. La petite fille qui me suit, en 1981, porte le nom de Massou. Deux ans plus tard naît un petit garçon, Moussa. Nous vivons tous les six dans quinze mètres carrés, peut-être vingt, au 22 de la rue de Tlemcen à Paris, à proximité du cimetière du Père-Lachaise. Notre immeuble compte sept étages et cinquante-cinq studios. Huit logements par palier, répartis autour de la cage d'un escalier de bois. Nous, c'est le studio 45, au sixième. Même s'ils le voulaient, les habitants du 22 sont trop à l'étroit pour s'ignorer. Personne ne ferme sa porte. Les enfants passent d'un appartement à un autre. Quand Massiré ne peut pas s'occuper de nous, c'est la voisine du cinquième qui nous donne à manger, ou alors celle du premier.
La pièce que nous habitons est meublée d'un grand lit à deux places, d'un petit lit pliable, et d'un lit à barreaux où peut dormir un bébé. Je dors avec Moussa et mes parents dans le grand lit. Massou est dans le lit à barreaux. La nuit tombée, on ouvre pour Issa le lit pliant qu'on place contre la porte. L'espace est si petit, si encombré, que les enfants doivent se percher quand mon père fait sa prière. Sagui garde un lien très étroit à la religion, il fait ses ablutions et prie cinq fois par jour. Il sort alors son tapis de prières et nous grimpons sur le lit. Les prières ne durent pas très longtemps. Il a tôt fait de ranger son tapis et nous pouvons redescendre.

 

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 Semaine Marie Desplechin  du 18 au 24 avril 2011

 

 

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