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A propos de livres...
lecture commune
21 septembre 2011

Une pièce montée – Blandine Le Callet

Lu dans le cadre Swap à 2 PAL swap___2__lLecture commune avec Mrs Pepys
et Astrid

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Stock – janvier 2006 – 320 pages

Livre de poche - avril 2007 – 252 pages

Quatrième de couverture :
" La pièce montée arrive, sur un plateau immense porté par deux serveurs. Vincent voit osciller au rythme de leur marche cette tour de Babel en choux à la crème, surmontée du traditionnel couple de mariés. Il se dit : C'est moi, ce petit bonhomme, tout en haut. C'est moi. Il se demande qui a pu inventer un gâteau aussi ridicule. Cette pyramide grotesque ponctuée de petits grains de sucre argentés, de feuilles de pain azyme vert pistache et de roses en pâte d'amande, cette monstruosité pâtissière sur son socle de nougatine. Et ce couple de mariés perché au sommet, qu'est-ce qu'il symbolise, au juste ? Les épreuves surmontées à deux ? L'ascension périlleuse jusqu'au septième ciel ? La prétention de ceux qui s'imaginent que l'amour va durer
toujours ? "

Auteur : Blandine Le Callet est née en 1969. Une pièce montée est son premier roman.

Mon avis : (lu en septembre 2011)
Avec ce livre se termine nos lectures communes initiées avec le Swap à 2 PAL organisé par Lili Galipette et partagé avec plaisir avec mrs pepys. Ce livre était en commun dans nos PAL respectives avant le début du Swap.
Bérengère et Vincent vont se marier. Bérengère est une jeune fille bon chic bon genre, qui veut un grand mariage. Un mariage devant monsieur le maire et monsieur le curé, avec beaucoup d'invités une belle réception et des belles photos.

Ce livre raconte ce mariage à travers le récit de neuf personnes participant à la fête. Chacun raconte sa journée et ses impressions. Il y a Pauline, 8 ans, nièce de la future mariée et demoiselle d’honneur. Elle trouve injuste que Lucie soit toujours mis derrière sur les photos.
Bertrand, le prêtre, il est fatigué et en proie à des doutes quant à son rôle et sa vocation de prêtre.
Madeleine la grand-mère de la mariée ne supporte pas que ses filles soit toujours derrière elle et l'infantilise. Hélène, la belle sœur, qui se pose des questions sur l'avenir de son couple.
Marie, la sœur de la mariée, la rebelle de la famille, 28 ans et toujours pas mariée. Elle redoute de se retrouver à la table des célibataires.
Vincent, le marié, est pris d’angoisse et de stress prénuptial.
Damien, le dragueur, il fréquente de nombreux mariages et joue à séduire la plus laide de l'assemblée... Il fait un concours avec son copain Yann.

Et pour terminer, Bérangère, la mariée, qui s’occupe plus de la bonne ordonnance de la journée qui doit être parfaite plutôt que de son nouveau mari.
Voilà une galerie de personnages hauts en couleurs qui participent à des scènes amusantes ou attendrissantes. Le lecteur passe sans cesse du rire aux larmes. L'auteur dénonce ainsi le superficiel et l'hypocrisie du paraître. Je me suis beaucoup amusée à lire ce livre.

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Librement adapté du livre, un film a été réalisé par Denys Granier-Deferre en 2009 avec Clémence Poésy, Jérémie Renier, Jean-Pierre Marielle, Danielle Darieux, Christophe Alévêque, Léa Drucker, Julie Depardieu, Julie Gayet, Charlotte de Turckheim, Dominique Lavanant.

Après la lecture du livre, j'ai vu le film qui est plus que « librement adapté », c'est une caricature du livre... On a perdu toute la sensibilité du livre, j'ai été très déçue.

Allons voir maintenant l'avis de Mrs Pepys et d'Astrid.

Extrait : (début du livre)
Pauline
Elle a bien cru qu'on n'y arriverait jamais. Le voyage a été terrible. Elle n'aime pas la nouvelle voiture de papa, à cause de l'odeur du cuir. Elle a failli être malade. Mais on s'habitue, au bout d'un moment.
Les parents n'ont pas arrêté de se disputer. Pas une grosse dispute. Jamais de grosse dispute. Très peu de mots, quelques phrases, sans crier. Ça a duré des heures, tout le temps du voyage, en fait. Elle n'est pas idiote ; elle sait que la dispute a commencé bien avant le départ de Sceaux. On peut dire que ça fait plusieurs semaines, et même plusieurs mois.
De temps en temps, ils font semblant de ne pas se disputer : on va se promener au parc en famille. Pendant deux heures, papa joue avec eux, et maman prend des photos. Ils rient fort, ils sont gais. Ils croient que ça suffit pour qu'elle ne se rende compte de rien. Mais il ne faut pas croire : elle n'est pas idiote.
Elle est très sage. Il faut toujours obéir aux adultes, qui savent ce qui est bien. Parfois, elle trouve que c'est pénible, et même qu'on l'oblige à faire des choses sans intérêt. Mais elle a confiance : les adultes ont toujours raison. Elle obéit sans discuter. D'abord, parce qu'elle veut faire plaisir à maman, qui est tellement contrariée lorsque les enfants sont insupportables. Surtout, parce qu'elle aime bien qu'on ne fasse pas attention à elle, qu'on l'oublie dans son coin. C'est beaucoup plus simple d'être une petite fille sans histoire : on est toujours content d'elle, et on la laisse tranquille.
Tout à l'heure, elle s'est blottie sur la banquette arrière ; elle a attendu que son envie de vomir disparaisse, et elle a écouté la dispute de ses parents, en faisant semblant de dormir. Elle sait que papa a des soucis, et qu'il doit beaucoup travailler parce qu'il a des responsabilités. C'est pour ça qu'il n'est pas souvent à la maison. Mais elle a de la chance d'avoir un papa qui gagne de l'argent. Dans le monde, il y a beaucoup d'enfants malheureux. Il y en a même qui n'ont rien à manger ; il faut penser à eux quand on n'arrive pas à finir son assiette de bœuf bourguignon.
Aujourd'hui est un jour important car elle sera demoiselle d'honneur pour la première fois. Enfin, il y a eu d'autres fois, mais elle était trop petite et elle ne s'en souvient pas. Elle sera demoiselle d'honneur avec Clémence et Hadrien, et tous les cousins. Et il y aura aussi des enfants de l'autre famille. En tout, ils seront douze enfants. Une fois, elle a entendu maman dire à papa "C'est ridicule !" et elle n'a pas compris pourquoi. Après maman a changé d'avis et elle leur a dit que ce serait très mignon, tous ces enfants autour de la mariée.

 

 

 

 

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20 septembre 2011

Le goût des pépins de pommes – Katharina Hagena

Lecture Commune avec
CanelValérie, Enna, AngelbbJules, George, Hebelit

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Éditions Anne Carrière – janvier 2010 – 267 pages

Livre de Poche – avril 2011 – 285 pages

traduit de l’allemand par Bernard Kreiss

Titre original : Der Geschmack von Apfelkernen, 2008

Quatrième de couverture :
A la mort de Bertha, ses trois filles, Inga. Harriet et Christa, et sa petite-fille, Iris, la narratrice, se retrouvent dans leur maison de famille, à Bootshaven, dans le nord de l'Allemagne, pour la lecture du testament. A sa grande surprise, Iris hérite de la maison et doit décider en quelques jours de ce qu'elle va en faire. Bibliothécaire à Fribourg, elle n'envisage pas, dans un premier temps, de la conserver. Mais, à mesure qu'elle redécouvre chaque pièce, chaque parcelle du merveilleux jardin qui l'entoure, ses souvenirs se réveillent, reconstituant l'histoire émouvante, parfois rocambolesque, mais essentiellement tragique, de trois générations de femmes. Katharina Hagena nous livre ici un grand roman sur le thème du souvenir et de l'oubli.

Auteur : Katharina Hagena est née en 1967. Spécialiste de l'œuvre de Joyce, elle enseigne la littérature anglaise et allemande à l'université de Hambourg.

Mon avis : (lu en septembre 2011)
Voilà un livre que je voulais lire depuis longtemps et que je n'avais toujours pas emprunté à la bibliothèque, j'ai donc sauté sur l'occasion d'une Lecture Commune organisée par Canel pour le sortir des rayons... Et, je vous le dit tout de suite, la lecture a été savoureuse comme une bonne pomme...
A la suite du décès de sa grand-mère, Iris hérite de la maison familiale. Elle décide d'y passer quelques jours et les souvenirs de son enfance ressurgissent. A travers les souvenirs d’Iris, le lecteur découvre trois générations de femmes. Les pommes, les groseilles, la nature, les lieux sont l’occasion de nombreux flash-back, et en conclusion nous aurons l’explication d’une tragédie qui a eu lieu dans le passé et qui est juste évoquée durant tout le livre.
Avec cette lecture, je me suis laissé emporter par mes propres souvenirs, je me suis retrouvée enfant dans les maisons de mes grands-mères, j'ai retrouvé les odeurs, les bruits familiers de la maison, du jardin... Et j'ai ressenti de fortes émotions.
J’ai beaucoup aimé les belles descriptions précises et avec beaucoup de sensibilité des fruits, des fleurs et du paysage faites par l’auteur. Elle évoque les événements les plus sensibles avec justesse, et l’humour est également présent avec quelques situations cocasses.
Un moment de lecture savoureux, avec un peu de nostalgie et de l’émotion !

Et maintenant les avis de Canel, Valérie, Enna, AngelbbJules, George, Hebelit

Extrait : (début du livre)
Tante Anna est morte à seize ans d'une pneumonie qui n'a pas guéri parce que la malade avait le cœur brisé et qu'on ne connaissait pas encore la pénicilline. La mort survint un jour de juillet, en fin d'après-midi. Et l'instant d'après, quand Bertha, la sœur cadette d'Anna, se précipita en larmes dans le jardin, elle constata qu'avec le dernier souffle rauque d'Anna toutes les groseilles rouges étaient devenues blanches. C'était un grand jardin, les nombreux vieux groseilliers ployaient sous les lourdes grappes. Elles auraient dû être cueillies depuis longtemps mais lorsque Anna était tombée malade, personne n'avait plus songé aux baies. Ma grand-mère m'en a souvent parlé car c'est elle, à l'époque, qui a découvert les groseilles endeuillées. Il n'y avait plus depuis lors que des groseilles noires et blanches dans le jardin de grand-mère, et toutes les tentatives ultérieures visant à y réintroduire des groseilliers rouges se sont soldées par un échec, leurs branches ne portaient que des baies blanches. Mais cela ne dérangeait personne, les blanches étaient presque aussi savoureuses que les rouges, quand on les pressait pour en extraire le jus, le tablier n'en souffrait pas trop, et la pâle gelée que l'on obtenait luisait de reflets d'une mystérieuse transparence. Comme « des larmes en conserve », disait ma grand-mère. Et aujourd'hui encore, on trouvait sur les étagères de la cave des bocaux de toutes les tailles avec de la gelée de groseilles de 1981, un été particulièrement riche en larmes, le dernier été de Rosemarie. En quête de cornichons au vinaigre, ma mère est tombée un jour sur un bocal de 1945 contenant les premières larmes d'après-guerre. Elle en a fait cadeau à l'Association pour la sauvegarde des moulins, et lorsque je lui ai demandé pourquoi elle donnait la délicieuse gelée de grand-mère à un écomusée, elle a déclaré que les larmes contenues dans ce bocal étaient trop amères.

Ma grand-mère, Bertha Lünschen, née Deelwater, est morte quelques décennies après tante Anna, mais à ce moment-là, il y avait déjà un certain temps qu'elle ne savait plus qui avait été sa sœur, ni comment elle s'appelait elle-même, ni si c'était l'hiver ou l'été. Elle avait oublié à quoi pouvait servir une chaussure, un brin de laine ou une cuiller. Dix ans lui ont suffi pour s'affranchir de tout souvenir, il semblait que ce fût tâche à sa convenance, aussi facile à mener à bien que de chasser d'un geste négligent les courtes boucles blanches qui avaient tendance à lui encombrer la nuque ou de balayer en un tournemain les miettes invisibles qui jonchaient la table. Davantage que des traits de son visage, je me souviens du bruissement de la peau dure, sèche de sa main sur le bois de la table de la cuisine. Du fait aussi que ses doigts bagués se refermaient résolument sur les miettes, un peu comme s'ils tentaient de saisir au passage les ombres fuyantes qui lui traversaient l'esprit, mais peut-être aussi Bertha voulait-elle simplement, plutôt que de les voir finir sur le sol, les jeter aux moineaux qui prenaient, à folâtrer dans le sable du jardin au début de l'été, un plaisir tel que les petits radis finissaient toujours le ventre à l'air. Plus tard, à la maison de retraite, la table était en formica et la main de grand-mère s'est tue. Avant que la mémoire ne lui fît totalement défaut, Bertha nous coucha sur son testament. Ma mère, Christa, hérita de la terre, tante Inga des valeurs mobilières, tante Harriet de l'argent. Bijoux et meubles, linge et argenterie devaient être partagés entre ma mère et mes tantes. Moi, la petite dernière, j'héritai de la maison. Clair comme de l'eau de roche, tel était le testament de Bertha – une douche froide de vérité. Les valeurs mobilières étaient de peu de valeur, les pâturages de la pénéplaine d'Allemagne du Nord n'avaient d'attrait que pour les vaches, de l'argent il n'y en avait guère, et la maison était vieille.

Lu dans le cadre du Challenge Voisins, voisines
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Allemagne

Lu dans le cadre du Challenge Petit BAC
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"Végétal"

31 août 2011

Le Retour du professeur de danse - Henning Mankell

Lu dans le cadre Swap à 2 PAL swap___2__lLecture commune avec Mrs Pepys

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Seuil – avril 2006 – 409 pages

France Loisirs – 2007 – 622 pages

Points – avril 2007 – 538 pages

traduit du suédois par Anne Gibson

Titre original : Danslärarens återkomst, 2000

Quatrième de couverture :
Le jeune policier Stefan Lindman est sous le choc : il vient d'apprendre qu'il a un cancer, et que son ancien collègue Herbert Molin a été torturé mort. Pour tromper son angoisse, il part à l' autre bout de la Suède enquêter sur le meurtre de Molin. Que signifient les traces sanglantes sur le parquet, comme si le tueur avait dansé un tango avec le corps de sa victime ? Les ombres d'un passé très noir se réveillent. Elles ont frappé, et vont frappé encore. Mais Stefan n'a plus rien à perdre...

Auteur : Henning Mankell, né en Suède en 1948, est devenu mondialement célèbre grâce à ses fameuses enquêtes de l'inspecteur Kurt Wallander : une série de polars qui a commencé en 1991 avec Meurtriers sans visage et s'est vendue à des millions d'exemplaires dans le monde. Gendre d'Ingmar Bergman, dont il a épousé la fille Eva en secondes noces, Mankell a également écrit des livres pour la jeunesse, des romans dont le magnifique Les chaussures italiennes, paru en 2009, des pièces de théâtre. Depuis 1996, l'écrivain partage sa vie entre son pays natal et le Mozambique, où il dirige le Teatro Avenida.

Mon avis : (lu en août 2011)
Merci à Mrs Pepys qui m’a offert ce livre lors du Swap à 2 PAL organisé par Lili Galipette. Cela fait quelques années que je connais Henning Mankell, mais seulement quelques mois pour son œuvre policière. Voilà un roman policier d’Henning Mankell sans Wallander, c’est un jeune policier nommé Stefan Lindman qui mène l’enquête.
En octobre 1999, dans le nord de la Suède, Herbert Molin, policier à la retraite, est retrouvé torturé à mort dans sa maison. Loin de là, Stefan Lindman apprend simultanément l’assassinat de son ancien collègue et qu’il a un cancer. En attendant le début de son traitement et pour oublier la maladie, il préfère partir dans le nord au cœur des forêts profondes du Norrland pour enquêter sur ce meurtre.
L'intrigue est construite avec beaucoup d'intelligence, l'auteur nous plonge dans une enquête haletante et passionnante où les questions, les surprises et les rebondissements sont nombreux. C'est une histoire sombre qui évoque le passé de la Suède durant la Seconde Guerre Mondiale. Le lecteur découvre un passé pas très glorieux de l'histoire de la Suède. A l'époque, il y a eu des volontaires suédois séduits par l'idéologie nazie qui se sont portés volontaires pour combattre au côté des Allemands. Mais aujourd'hui, dans le monde, en Suède comme dans le reste de l'Europe, il existe toujours des groupuscules où l'idéal nazi est encore vivant...
J'ai vraiment beaucoup aimé et dévoré ce roman policier. J'ai voyagé avec Stefan Lindman dans une Suède inquiétante où règne une atmosphère froide et humide de brouillard et de neige. Les paysages sont grandioses, les personnages sont intéressants, attachants ou effrayants...
J'ai encore plusieurs livres de la série Wallander à lire et d'avance je m'en réjouie...
Encore merci à Mrs Pepys pour ce livre, et maintenant allons voir son avis.

Extrait : (page 21)
Il se réveillait la nuit, cerné par les ombres. Cela avait commencé à l'âge de vingt-deux ans ; maintenant il en avait soixante-seize. Pendant cinquante-quatre années consécutives, il avait été insomniaque. Les ombres ne l'avaient jamais quitté. A certaines périodes, en se bourrant de somnifères, il avait réussi à dormir jusqu'au matin. Mais au réveil, il comprenait que les ombres étaient restées présentes. A son insu.
Cette nuit qui touchait à sa fin ne faisait pas exception à la règle. Il n'était pas nécessaire d'attendre que surgissent les ombres, ou les visiteurs, ainsi qu'il les appelait parfois. Les ombres survenaient en général quelques heures après la tombée du jour. Soudain elles étaient là, comme surgies de nulle part, tout contre lui, avec leurs visages blancs et muets. Après tant d'années, il s'était habitué à elles. Mais il savait qu'il ne pouvait s'y fier. Un jour, elles cesseraient de se taire. Qu'arriverait-il alors ? Il l'ignorait. Passeraient-elles à l'attaque ou se contenteraient-elles de le démasquer ? Il avait essayé de pousser des cris, de frapper l'air pour les chasser. Pendant quelques minutes, il parvenait ainsi à les tenir en respect. Puis elles revenaient et restaient jusqu'à l'aube. Enfin il s'endormait, mais pour quelques heures à peine, car il avait presque chaque matin un travail qui l'attendait.
Toute sa vie adulte, il avait été harassé de fatigue. Il se demandait encore où il avait puisé la force de tenir. Quand il songeait à son existence, il voyait une file interminable de jours traversés avec effort. Il n'avait presque aucun souvenir qui ne fût, d'une manière ou d'une autre, lié à sa fatigue. Il regardait parfois les photographies où il figurait. Il avait toujours le même air hagard, d'un homme à bout de forces. Les ombres avaient également exercé leur revanche les deux fois où il avait tenté de vivre avec une femme ; à tour de rôle, ses deux épouses s'étaient lassées de sa perpétuelle anxiété et du fait qu'il ne pensait qu'à se reposer, les jours où il ne travaillait pas. A la longue, elles avaient pas supporté ces nuits qu'il passait debout, agité, incapable de leur dire pourquoi il ne dormait pas comme un homme normal. Elles l'avaient quitté et il s'était retrouvé seul.

Lu dans le cadre du Défi Scandinavie noire
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Suède : Henning Mankell

Lu dans le cadre du Challenge Voisins, voisines
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Suède

Lu dans le cadre du Challenge Viking Lit'
Viking_Lit

Lu dans le cadre du Challenge Petit BAC
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"Métier" et "Sport/Loisirs"

 

Déjà lu du même auteur :
tea_bag  Tea-Bag  les_chaussures_italiennes  Les chaussures italiennes

meurtriers_sans_visage_p Meurtriers sans visage Les_chiens_de_Riga_2 Les chiens de Riga

l_homme_inquiet L'homme inquiet 

27 juillet 2011

A l'ouest – Olivier Adam

Lu dans le cadre Swap à 2 PAL swap___2__lLecture commune avec Mrs Pepys

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Édition de l'Olivier – mars 2001 – 140 pages

Pocket – septembre 2002 – 140 pages

Pocket – octobre 2007 – 140 pages

Quatrième de couverture :
Antoine a presque dix-neuf ans. Fragile, rêveur, indocile, il sèche le lycée, erre dans le centre commercial de son quartier, et ne fait rien de sa vie. Il cherche l'amour... et les coups. ...
Camille veille sur son grand frère autant qu'elle le peut, et calme ses angoisses en se réfugiant dans la prière. Quant à Marie, leur mère, elle fait ce qu'elle peut. Mais c'est elle, qui, un beau matin, déclenche l'explosion et les conduit à l'ouest. Pas le point cardinal, non, mais cet état second où rien n'a plus vraiment d'importance...

Auteur : Olivier Adam est né en 1974. Après avoir grandi en banlieue et vécu à Paris, il s’est installé à Saint-Malo. Il est l’auteur de nombreux livres dont Passer l’hiver (Goncourt de la nouvelle 2004), Falaises, À l’abri de rien (prix France Télévisons 2007 et prix Jean-Amila-Meckert 2008), Des vents contraires (Prix RTL/Lire 2009).

Mon avis : (lu en juillet 2011)
Dans ce livre nous suivons la vie d'une famille à la dérive : Marie vit dans banlieue parisienne avec ses deux enfants, Antoine et Camille. Antoine a bientôt dix-neuf ans, il fume des joint, boit de l'alcool et sèche les cours du lycée, le soir il traîne dans le quartier. Il voudrait trouver l'amour, mais ne gagne que des coups. Camille a quatre ans de moins que son frère, et elle se fait du soucis pour lui et pour sa mère. Elle se réfugie dans la prière. Au collège, elle est silencieuse, elle s'isole, elle se fait discrète pour ne pas se faire remarquer. Marie est épuisée par sa vie monotone et terne qui se résume à métro, boulot, dodo... Un jour, où ses enfants sont partis un week-end chez leur père, Marie décide sur un coup de tête, de quitter son quotidien pour la maison de son enfance, au bord de la mer...
Comme souvent, Olivier Adam nous raconte une histoire de désespérance. Ici c'est l'histoire de trois personnages qui se sentent perdus, qui ne savent plus où ils en sont. Il se dégage du livre un certain malaise et beaucoup de mélancolie. Ces trois personnages sont attachants et touchants, ils ont chacun leurs problèmes, leurs angoisses. Ils se sont isolés malgré eux.
Ce n'est peut-être pas le meilleur livre d'Olivier Adam que j'ai lu mais j'y ai retrouvé avec plaisir son style et l'atmosphère des bords de mer qu'il sait si bien décrire.

Et maintenant, allons voir ce que Mrs Pepys a pensé de ce livre.

Extrait : (début du livre)
Tout est noir dans la chambre. Les volets sont clos, les rideaux tirés. On ne voit pas le désordre. Les bouteilles, les cendres sur la moquette, les disques éparpillés. Le radio-réveil clignote. Les chiffres s'affichent en vert. Tout à l'heure, comme chaque matin, Marie se tenait derrière la porte. La radio s'est mise en route. Elle a fait demi-tour, rassurée. Antoine a entendu les pas de sa mère dans les escaliers. La porte a claqué. Puis au-dehors, le bruit encore flou de ses talons qui s'éloignent. Antoine a grogné, a envoyé valdinguer l'appareil. Il s'est retourné, enroulé dans ses draps. S'est rendormi.

Maintenant, le silence est tout à fait installé. A peine, au loin, le moteur des voitures, le bus qui ralentit, s'immobilise, ouvre et referme ses portes, repart, le cri des enfants traînant des cartables trop lourds, portant des tenues trop chaudes, la voix d'une femme (Kevin fais attention tu vas te salir), une poubelle que l'on rentre et dont les roues claquent contre le trottoir. La vie du lotissement. Tout ça très menu dans la douleur du crâne.
Antoine se frotte les yeux, s'étire, repousse les draps. Il tend la main vers la droite, tâtonne et rencontre un paquet de cigarettes. Il l'écarte, cherche du bout des doigts le petit cône de papier, le briquet. Joint du matin, chagrin. Joint du soir, espoir. Il l'allume, tire une bouffée. Il reste ainsi à fumer dans le noir quelques minutes. Il se gratte les cheveux, s'étire, enfile un tee-shirt qui sent la sueur. Écrase son mégot au fond d'un verre. Se lève et gagne la salle de bains. Il pisse, puis passe de l'eau sur son visage et sur ses cheveux. Il se regarde dans la glace, tente un sourire. Essaie de détailler les diverses imperfections de sa peau. Ses yeux s'égarent dans la blancheur des murs carrelés. Ses mains tiennent le lavabo. Il se dandine d'avant en arrière. Il ne regarde rien, ne pense à rien. Il reste là cinq minutes. Puis semble revenir à lui, d'un bref clignement de paupière.


Déjà lu du même auteur : 
a_l_abris_de_rien_p A l'abri de rien    falaises Falaises  
 Des_vents_contraires
Des vents contraires  je_vais_bien_ne_t_en_fait_pas_p Je vais bien, ne t'en fais pas
 le_coeur_r_gulier  Un cœur régulier    kyoto_limited_Express  Kyoto Limited Express 

29 juin 2011

A quand les bonnes nouvelles ? - Kate Atkinson

Lu dans le cadre Swap à 2 PAL swap___2__lLecture commune avec Mrs Pepys

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Éditions de Fallois – août 2008 – 366 pages

Livre de Poche – octobre 2009 – 466 pages

traduit de l'anglais par Isabelle Carron

Quatrième de couverture :
Dans un coin paisible du Devon, une petite fille de six ans, Joanna Mason, est témoin d’un épouvantable massacre, dont elle est la seule rescapée. Trente ans plus tard, l’homme qui a été condamné pour ce crime sort de prison. A Edimbourg, Reggie, seize ans, travaille comme nounou chez un médecin, le docteur Hunter. Mais celle-ci disparaît, Reggie est la seule personne qui semble s’en apercevoir...
Enfin, l'inspecteur en chef Louise Monroe retrouve son vieil ami, Jackson Brodie, le détective privé de La Souris Bleue, empêtré dans un mariage malheureux, qui part à la recherche de son fils... Avec humour et maestria, Kate Atkinson brouille les pistes, entremêlant les intrigues et tenant le lecteur en haleine jusqu'aux dernières pages.

Auteur : Kate Atkinson est entrée dans la littérature par la grande porte, en 1996, avec un roman fascinant qui ne ressemblait à rien de connu, Dans les coulisses du musée, qui obtint le Prix Whitbread en Grande-Bretagne et le Prix du Meilleur Livre de l’année en France (« Lire »). Elle a publié depuis quatre autres romans : Dans les replis du temps (1998), Sous l’aile du bizarre (2000), La Souris bleue (2004) qui a obtenu le Prix Westminster du roman anglais, Les choses s’arrangent, mais ça ne va pas mieux (2006), et un recueil de nouvelles : C’est pas la fin du monde (2003). Best-seller en Grande-Bretagne, elle a connu en France des critiques élogieuses et un large public. Elle vit actuellement à Édimbourg.

Mon avis : (lu en juin 2011)
C'est le premier livre que je lis de cette auteur, et pourtant j'ai compris en cours de lecture qu'il était le dernier d'une trilogie mais cela ne m'a pas du tout gêné.
Le livre commence avec le terrible assassinat d'une mère, de deux de ses trois enfants et du chien de la famille, un jour d'été dans la campagne paisible du Devon. Joanna, 6 ans, est le seul témoin, elle réussit à fuir et à se cacher dans un grand champ de blé.
Trente ans plus tard, à Edimbourg, Reggie, 16 ans, est assistante maternelle chez le Docteur Hunter et son mari. Jackson Brodie, détective privé, part à la recherche de son fils...
Au début, j'étais un peu perdue avec tous ces personnages et ses différentes intrigues mais lorsque les premiers liens entre ses différentes histoires paraient j'ai été emportée par ma lecture et à aucun moment je ne me suis ennuyée. Je suis passée par de nombreux sentiments, du rire, aux larmes. La plupart des protagonistes de cette histoire à tiroirs cachent un passé douloureux qui ne les empêchent pas de croire à un avenir meilleur.
J'ai beaucoup aimé la fantaisie de Kate Atkinson qui nous surprend tout au long du livre. Reggie et Joanna sont très attachantes. Quand à Ms MacDonald, le vieux professeur de lettres classiques de Reggie Chase, elle est un haute en couleur avec son « Église de l'Extase à Venir », « un groupe de gens qui croyaient à des trucs incroyables » comme le définit si bien Reggie. Elle m'a souvent bien fait rire.
Après cette lecture vraiment très plaisante, j'ai très envie de lire les deux livres précédents, "La souris bleue" et "Les choses s'arrangent mais ça ne va pas mieux".

Ce livre a été lu dans le cadre du Swap à 2 PAL organisé par Lili Galipette, c'est Mrs Pepys qui a choisi ce livre dans sa PAL et me l'a offert pour cette Lecture Commune. Allons voir son billet... 

Extrait : (page 21)
Il parut surgir de nulle part. Elles le remarquèrent parce que le chien se mit à produire un étrange grondement guttural et bouillonnant, que Joanna n’avait encore jamais entendu. Il marchait à toute vitesse dans leur direction et grossissait à vue d’œil. Il émettait un drôle de halètement. On s’attendait à ce qu’il lance « Bel après-midi » ou « Bonjour » au passage car c’était toujours ce que les gens disaient quand on les croisait sur la petite route ou le sentier, mais il ne dit rien. D’habitude leur mère disait « Belle journée » ou « Il fait une de ces chaleurs, vous ne trouvez pas ? », mais cette fois-ci elle ne dit rien. Au lieu de ça, elle se mit à marcher vite en poussant de toutes ses forces sur la poussette. Elle abandonna les sacs de provision dans l’herbe et Joanna s’apprêtait à en ramasser un mais leur mère dit : « Laisse. » Il y avait dans sa voix, sur son visage, quelque chose qui effraya Joanna. Jessica l'attrapa par la main et dit « Dépêche-toi Joanna », sévèrement, comme une grande personne. Ça rappela à Joanna la fois où leur mère avait jeté la cruche à rayures bleues et blanches à la figure de leur père.
À présent l'homme marchait dans la même direction qu'elles, de l'autre côté de leur mère. Leur mère marchait à toute allure et leur dit : « Allez, vite, on suit. » Elle avait l'air hors d'haleine. Puis le chien courut devant l'homme et se mit à aboyer et à sauter comme pour tenter de lui barrer le chemin. Sans prévenir l'inconnu lui flanqua un coup de pied qui le catapulta en l'air et le fit atterrir dans le blé. Elles ne le voyaient pas, mais entendaient ses gémissements déchirants. Jessica se mit devant l'homme et lui cria quelque chose en le menaçant du doigt et en avalant de grandes goulées d'air, comme si elle n'arrivait plus à respirer par le nez, puis elle courut dans le champ à la suite du chien.
Ça tournait au vilain. Aucun doute là-dessus.

Lu dans le cadre du Challenge Voisins, voisines
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Grande-Bretagne, Écosse

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3 juin 2011

Quatre jours en mars - Jens Christian Grøndahl

Lecture Commune avec Canel
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quatre_jours_en_mars Gallimard – février 2011 – 437 pages

 

traduit du danois par Alain Gnaedig

 

Quatrième de couverture :
Les meilleures années appartiennent-elles toujours au passé ? En est-on responsable ? Ces questions viennent hanter Ingrid Dreyer, architecte et mère divorcée, au cours de quatre jours dramatiques, où plus rien ne se révèle être comme elle le croit. Lorsque son fils adolescent est arrêté pour des actes de violence, lorsque sa relation à un homme plus âgé et marié prend un tour inattendu, elle replonge dans les souvenirs de sa jeunesse solitaire et de son mariage raté, afin de tenter de comprendre pourquoi sa vie commence à ressembler à une impasse. Ingrid Dreyer est-elle condamnée à reproduire les comportements, les lubies et les erreurs de sa mère ou de sa grand-mère, femme de lettres qui a connu jadis son heure de gloire ? Les histoires de ces femmes ne sont-elles que les variations d'un même thème et d'un même drame ? Après "Sous un autre jour" et "Les mains rouges", Jens Christian Grøndahl propose ici un nouveau portrait de femme de notre temps, avec cette profondeur psychologique et cette maîtrise stylistique qui sont la marque du grand écrivain danois.

 

Auteur : Jens Christian Grøndahl est né à Copenhague en 1959. Il est aujourd'hui un auteur vedette au Danemark et ses livres sont traduits dans de nombreux pays. Ses romans parus aux Editions Gallimard l'ont également fait connaître en France.

Mon avis : (lu en mai 2011)
Quatre jours, jeudi, vendredi, samedi et dimanche dans la vie d'Ingrid Dreyer. Elle a quarante-huit ans, elle est architecte, divorcée, mère d'un adolescent de quatorze ans et amoureuse d'un homme marié.
Elle est en voyage professionnel à Stockholm, lorsqu'on lui demande de rentrer d'urgence à Copenhague car son fils Jonas a été arrêté par la police pour avoir participé à des actes de violence contre un jeune Arabe. L'acte de son fils est comme un premier choc. Ingrid va se replonger dans son passé pour essayer de comprendre comment elle en est arrivée là. Elle revoie ses souvenirs de jeunesse, son mariage raté, sa vie amoureuse... Va-t-elle reproduire les mêmes erreurs que sa mère et sa grand-mère ?

Ce livre est très bien écrit, l'histoire est très prenante l'auteur a su parfaitement nous distiller des allers-retours entre présent et passé et petit à petit raconter ce qu'il faut pour que le lecteur comprenne peu à peu qui est Ingrid. La psychologie des différents personnages est très travaillée. Les relations entre les personnages sont subtiles.

J'ai beaucoup aimé cette lecture, je me suis sentie proche d'Ingrid même si ma vie est très différente de la sienne... Elle est touchante dans ses interrogations, son sentiment de culpabilité vis à vis de son fils. Berthe et Ava, sa mère et grand-mère, sont des personnages pas facile à vivre... J'ai également aimé les descriptions des paysages scandinaves, de la ville de Rome, des intérieurs... Une très belle découverte qui me donne envie de lire d'autres livres de cet auteur danois.

Maintenant allons voir l'avis de Canel avec qui je faisais Lecture Commune ! 

Extrait : (début du livre)
Elle a déjà mis une de ses boucles d'oreilles et cherche à se saisir de la seconde lorsque le téléphone sonne. Les pulsations de la tonalité lui semblent aussi étrangères que les meubles anonymes de la chambre. Elle reste devant le miroir. Son rouge à lèvres est trop vif, c'était un essai, d'habitude elle porte une nuance plus pâle. C'est sûrement Morten, son coordinateur de projet, qui, comme toujours, est en avance. Pourtant, il reste encore quelques minutes avant leur rendez-vous dans le hall de l'hôtel. Il sait où se trouve le restaurant. De toute façon, c'est lui qui règle les détails de logistique. Mais aujourd'hui, elle s'est bien débrouillée, encore une fois. La présentation s'est déroulée comme prévu, même les questions des maîtres d'ouvrage sont restées dans le cadre prévu, et elle s'est montrée claire et concentrée. 
Elle s'autorise à continuer de regarder son reflet dans le miroir, puisqu'elle a décidé de faire comme si elle n'était pas là. Le bourdonnement intermittent du téléphone lui donne l'impression d'être surveillée. Elle ferait mieux de mettre sa deuxième boucle d'oreille, de prendre sa pochette, de poser son manteau sur le bras et de sortir dans le couloir silencieux. Elle croise son regard. Ingrid Dreyer, quarante-huit ans. Une femme célibataire, qui a réussi et, aux yeux de certains, encore belle. Du moins, aux yeux de ceux qui lui importent, mais elle a trop maigri. On le voit avec la robe qu'elle a choisie pour la soirée, on voit son âge. Il y a quelque chose à la clavicule et à la peau des bras, mais pas seulement. 
Sa robe est belle, de style Empire, d'un vert passé comme les feuilles de sauge duveteuses. Étonnamment féminine, diront certains, et c'est bien le but recherché. Elle la porte afin de convaincre les représentants de Svensk Energi qu'elle est également une personne, une femme, et même une mère. Lorsque l'on est sur le point de lui confier un chantier d'un demi-milliard, c'est bien le moins que l'on peut attendre. D'ordinaire, elle porte des pantalons, des tailleurs et des T-shirts neutres. Pas de maquillage, pas de bijoux, à la rigueur des escarpins à bride avec des talons hauts, juste pour se différencier, mais lorsque le commanditaire invite, elle peut se permettre de céder à l'autre côté de sa personnalité. Car il est bien là. Son expérience lui dit qu'un soupçon d'humanité vulnérable ne fait que renforcer l'intégrité professionnelle, en tout cas si l'on est de sexe féminin. Le téléphone ne cesse pas de sonner. 
De sa fenêtre du dix-septième étage, elle entrevoit au loin l'archipel comme des pointillés incandescents dans l'eau bleu foncé. Un groupe de hauts immeubles de bureaux lui bouche la vue, mais la façade vitrée de l'un d'eux envoie un reflet de la claire lumière de mars dans sa chambre capitonnée au plafond bas. Elle s'assoit sur le bord du lit et décroche le combiné, toujours une boucle d'oreille à la main. La perle blanche brille dans le soleil du soir. C'est un cadeau de Frank, son amant. Ce n'est pas lui qui appelle. Elle comprend qu'elle l'espérait quand elle entend la voix inconnue se présenter. Cela fait déjà bien des années qu'il lui a donné ces boucles d'oreilles à Rome. Elle se souvient que la première chose qui lui était venue à l'esprit avait été de se demander comment il pouvait dépenser une aussi grosse somme avec sa carte de crédit sans que sa femme ne s'en aperçoive. Elle n'avait pas encore découvert que Frank était un homme qui possédait de nombreux comptes en banque. 
Après coup, cela l'agace de n'avoir pas demandé au brigadier du poste de Station City comment il a réussi à la trouver dans une chambre d'hôtel de Stockholm. Elle allume son portable après avoir raccroché et écoute les messages. Au moins, Jonas a essayé de l'appeler. Elle a la bouche sèche en écoutant sa voix bredouillante d'adolescent de quinze ans, toujours aussi brusque et tranchante. Il a été arrêté. A l'entendre, on a l'impression qu'il appelle pour dire qu'il ne rentrera pas dîner. D'habitude, il ne songe même pas à partager ce genre d'informations pratiques avec sa mère. Elle se demande soudain s'il n'a pas oublié qu'elle allait à Stockholm. Car elle le lui a bien dit, n'est-ce pas ? Oui, bien sûr. Le téléphone sur la table de nuit sonne à nouveau, cette fois-ci, c'est Morten. Mais qu'est-ce qu'elle fait ? Elle répond qu'elle descend tout de suite. 
Elle était restée indifférente au ton décontracté du brigadier et elle avait deviné dans sa voix un accent de reproche enjoué. De fait, Jonas n'avait eu droit qu'à un seul coup de fil, mais comme elle n'avait pas répondu, on lui avait permis d'appeler son grand-père. Le gamin était encore mineur, même si on avait du mal à le croire. Le policier avait déclaré cela comme si l'âge de Jonas était une forme de tromperie eu égard à la pointure considérable de ses chaussures. Elle avait demandé ce qui s'était passé. Là, le brigadier était devenu plus neutre dans son rapport. Jonas avait été arrêté dans une ruelle près de Christiania. Une voiture de patrouille était passée par hasard au moment où Jonas et ses camarades encerclaient un garçon à terre et lui donnaient des coups de pied dans la tête et dans le ventre. 
Jonas avait donné des coups de pied ? 
Sa voix s'était affaiblie et elle avait entendu que le policier avait noté le léger changement de ton, la brève difficulté à respirer. Les jeunes gens n'étaient guère communicatifs, en outre, il était important que la victime n'ait aucun souvenir de qui avait fait quoi. Quoi qu'il en soit, ils n'avaient pas l'âge de la majorité pénale et l'affaire serait du ressort des services sociaux, cependant, elle devrait apprendre à son fils à choisir ses amis avec plus de soin. Plusieurs d'entre eux étaient bien connus de la police, et l'on ne parlait pas ici de graffitis et de petits larcins. Il était question de recel organisé et de trafic de hasch, et ce que l'on avait confisqué cet après-midi n'était pas de la petite bière. Il s'agissait de crans d'arrêt et de coups de poing, et s'il était à sa place, il aurait une discussion sérieuse avec le gamin, quand elle finirait par rentrer de Stockholm. 
Y avait-il quelque chose dans la manière dont il avait dit "finirait par rentrer", ou était-elle hypersensible ? Elle avait demandé si Jonas connaissait la victime. On aurait dit que le policier souriait en donnant sa réponse. Il ne pouvait pas savoir qui son fils connaissait ou non et, de toute façon, il n'avait pas le droit de dévoiler l'identité du jeune homme. Cependant, l'affaire était d'autant plus délétère qu'il s'agissait d'un type dont les origines ethniques n'étaient pas danoises. Il serait donc possible que, à l'avenir, son fils soit obligé de bien regarder dans son dos quand il irait à l'école, au cas où il serait rattrapé par un cimeterre. 
Ingrid avait demandé où il se trouvait. Le brigadier avait demandé si elle pensait à la victime. Dans ce cas, il pouvait la rassurer, les urgences avaient renvoyé le jeune homme chez lui en lui ordonnant de rester tranquille pendant deux ou trois jours. Il s'en était sorti avec une commotion cérébrale et, tant qu'il ne se mettait pas à se cogner le front contre les tapis de la mosquée, il avait une chance de s'en tirer sans séquelles. D'ailleurs, c'était un miracle qu'il n'ait pas été plus gravement touché, car son fils et les autres garçons n'y étaient pas allés de main morte. Le policier avait marqué une pause. Mais en ce qui concernait son rejeton, en ce moment précis, il attendait que son grand-père vienne le chercher. 

Lu dans le cadre du  Défi Scandinavie blanche
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Danemark

Lu dans le cadre du Challenge Voisins, voisines
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Danemark

Lu dans le cadre du Challenge Viking Lit'
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18 mai 2011

La Boucherie des amants - Gaetaño Bolán

Lu dans le cadre Swap à 2 PAL swap___2__lLecture commune avec Mrs Pepys

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La Dragonne - janvier 2005 -

Livre de poche - janvier 2011 - 90 pages

Quatrième de couverture :
Dans une ville du Chili oppressée par le régime de Pinochet, une boucherie de quartier est le théâtre de curieuses rencontres : des réunions obscures s’y tiennent, des passions s’y nouent… Un enfant aveugle, une institutrice et un boucher fort en gueule composent ainsi le trio majeur de cette fable teintée d’humour et de poésie. Mais derrière l’apparente naïveté s’esquisse une condamnation amère des régimes totalitaires…

Auteur : Gaetaño Bolán est né en 1969 à Arica, au Chili. Il vit aujourd’hui à Valparaiso, après plusieurs années passées en France. Largement salué, « La Boucherie des amants » son premier roman a bénéficié d’un vaste bouche à oreille, et a été récompensé par plusieurs prix littéraires. Son deuxième livre « Treize alligators » est paru en 2009.

Mon avis : (lu en mai 2011)
Ce livre a été écrit en français par cet auteur né au Chili. J'ai découvert ce livre grâce à la blogosphère chez Stephie, Pimprenelle et Canel.
C'est l'histoire de Tom, un enfant chilien, « L'enfant avait le cœur pur et il regardait la nuit » « Il était doux, il était tendre ». Sa mère Antonia est morte à sa naissance et c'est Juan, son père, qui l'élève. Juan est le boucher du village. Tom a des « yeux de nuit », Dolores, son institutrice spécialisé s'occupe bien de lui, elle lui fait la lecture et Tom l'aime comme une maman. Dans ce petit village, on rencontre également des habitants haut en couleur Chico, le coiffeur, Paco, le taxi fan de Madonna. Et chaque soir, « aux environs de minuit, un étrange ballet se faisait à la boucherie : des hommes arrivaient, toujours d'un pas pressé, le plus souvent avec un foulard, ou le col remonté pour masquer en partie leur visage. » Je n'en raconterai pas plus...
J'ai beaucoup aimé ce court roman fait de phrases courtes, d'une grande beauté et avec beaucoup de poésie. C'est un récit simple, émouvant et poignant qui dénonce avec force la dictature de Pinochet. Une belle découverte et un vrai coup de cœur pour moi !

Pour le Swap à 2 PAL organisé par Lili Galipette, je n'ai pas hésité une seconde pour choisir ce livre et l'offrir à Mrs Pepys pour une Lecture Commune. Allons voir son billet... 

Extrait : (début du livre)
L'enfant avait un cœur pur et il regardait la nuit. Personne n'aurait pu dire s'il était triste, ou simplement assoupi. Il était là, posé dans la masse de son petit corps, comme absorbé par le crépuscule. Toujours il sondait le grand noir de l'âme où passent les comètes, il ne savait pas l'âme et ses grandeurs, ses petitesses tout aussi bien, il connaissait seulement l'ombre. Paisible obscurité qui l'enveloppait. Féroces ténèbres qui le mangeaient. Et câline la nuit jamais n'était, ni ne fut. Pourtant ni l'enfant ni sa famille ne se plaignaient : la nuit devait devenir une amie.

L'enfant avait un petit nom, sec et vif comme l'éclat du silex. Tom. Facile à retenir. Plus facile encore à prononcer.Tom ! Où es-tu Tom ? Où files-tu Tom ? Pour dire vrai, Tom n'était pas son vrai nom. On ne pouvait tout de même pas obliger les gens à le prononcer en entier !
[…]
L'enfant Tom était apprécié de tous. Il était doux, il était tendre. Et espiègle avec ça ! Il furetait ici et là, les mains devant lui, comme ouvertes pour attraper le vent, et trottinait benoîtement. Les gens étaient affables avec lui ; sa seule présence suffisait à ramollir les coeurs les plus endurcis. On lui parlait avec une voix posée, en articulant bien. Toute cette gentillesse faisait grimacer les vieilles, qui se tordaient la bouche à bien prononcer « Tom, petit Tom ! ». Et le gamin riait ainsi d'entendre toutes ces grimaces. Il croquait de tout petits fruits, des fraises sauvages par exemple, et demandait aux vieilles :
- On peut donner des fraises aux crocodiles ?
Ou encore :
- Je peux avoir un crocodile à la fraise ?
Les bonnes dames alors, loin d'en être étourdies, lui répondaient avec douceur, articulant de nouveau, et grimaçant à qui mieux mieux...

26 avril 2011

Le policier qui rit - Maj Sjöwall et Per Wahlöö

Lu dans le cadre Swap à 2 PAL swap___2__lLecture commune avec Mrs Pepys

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10/18 – juillet 1985 – 277 pages

Rivages – novembre 2008 – 327 pages

traduit de l'anglais par Michel Deutsch

Quatrième de couverture :
Par une pluvieuse soirée de novembre, tous les passagers d'un autobus sont massacrés au fusil mitrailleur. Jamais la Suède n'avait connu pareille tuerie, et l'opinion publique s'affole. Parmi les neuf victimes, un flic que Beck connaissait. Que faisait-il dans ce bus, à cette heure ? D'après sa compagne, il était surchargé de travail, mais Beck sait bien, lui, qu'il était pratiquement en congé... L'identification des victimes, puis l'étude minutieuse de leur passé, apportent peu à peu des indices. Et comme souvent, derrière la façade lisse des apparences, ce sont des réalités sordides qui émergent. Adapté au cinéma par Stuart Rosenberg en 1973 sous le titre : The laughing policeman (Le flic ricanant).

Auteurs : Per Wahlöö (né le 5 août 1926 à Göteborg et mort le 23 juin 1975 à Stockholm), diplômé de l'Université de Lund en 1946 consacra ses dix premières années de vie professionnelle au journalisme (il fut notamment reporter criminel) tout en publiant à partir de la fin des années 1950 quelques romans relevant pour l'essentiel du genre politique-fiction.
Maj Sjöwall (née le 25 septembre 1935 à Stockholm), était éditrice pour la maison d'édition suédoise Wahlström & Widstradt lorsqu'en 1961 elle rencontra Per Wahlöö qu'elle épousa l'année suivante.
Maj Sjöwall et Per Wahlöö ont écrit, entre 1965 et 1975, une série de dix romans mettant en scène l'enquêteur martin Beck et son équipe. Cette œuvre, influencée par Ed McBain et qui a marqué la littérature policière occidentale, est republiée dans des traductions entièrement revues à partir de l'original suédois.

Mon avis : (lu en avril 2011)
Nous avons décidé d'inauguerer nos Lectures Communes pour le Swap à 2 PAL avec ce livre qui faisait parti de nos PAL respectives. Pour ma part, il m'a été offert par Mrs Pepys lors du Swap Frissons en Noir & Blanc organisé par Canel.
C'est la première fois que je lisais ce couple d'auteurs. « Le Policier qui rit » a été écrit en 1968 et a été publié pour la première fois en France en 1970 sous le titre « Le massacre de l'autobus ». C'est le quatrième livre de la série.
Tout commence avec le mitraillage des passagers d'un bus à impériale de Stockholm, tuant huit personnes et en blessant grièvement une neuvième. Des passagers qui, a priori, n'ont rien à voir les uns avec les autres. Pas de témoins, pas d'indices et plus surprenant, parmi les victimes, l'inspecteur Ake Senstrom, jeune collaborateur de Martin Beck. Ce dernier avec son équipe d'enquêteurs va tout d'abord s'intéresser au passé des victimes, cela permet au lecteur de découvrir un certain échantillon de la société suédoise mais aussi le fonctionnement du commissariat et l'avancée pas à pas de l'enquête. L'intrigue est fort bien construite, des pistes nombreuses à explorer.
Avec cette enquête, j'ai découvert l'inspecteur Martin Beck un homme calme, très consciencieux dans son travail et qui mène scrupuleusement son enquête. Côté vie privé, il est marié depuis dix-sept ans, mais il préfère dormir sur le canapé du salon, il a deux enfants.
La météo exécrable de la saison est également présente dans ce livre, « Ce soir-là, il pleuvait à verse sur Stockholm. », « Le temps était abominable. Des nappes d'eau dégringolaient des toits, crépitaient sur les fenêtres, et les rues étaient presque vides. », « Quel temps, songea-t-il avec écœurement en regardant par la fenêtre. Novembre, l'obscurité, la pluie, le froid. L'hiver approchait. Bientôt, ce serait la neige. »
J'ai été très contente de cette découverte suédoise qui m'a beaucoup plu et je lirai volontiers d'autres livres de la série.

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Ce livre a été adapté au cinéma par Stuart Rosenberg en 1973 sous le titre : The Laughing Policeman (en français : Le Flic ricanant ).

Merci à Mrs Pepys de m'avoir offert ce livre et allons voir son avis.

La révélation des colis du Swap à 2 PAL sera pour le 30/04 (samedi prochain !)

Extrait : (début du livre)
C'était le 13 novembre. Ce soir-là, il pleuvait à verse sur Stockholm. Martin Beck et Kollberg étaient plongés dans une partie d'échecs. Ils étaient chez ce dernier, qui habitait un appartement de la banlieue sud, pas bien loin de la station de métro Skärmarbrink. Les derniers jours avaient été plutôt calmes et les deux hommes n'étaient pas de service.
Martin Beck jouait très mal aux échecs mais cela ne le décourageait pas. Kollberg avait une petite fille de deux mois à peine et, aujourd'hui, il lui fallait faire office de baby-sitter. Beck, de son côté, n'avait aucune envie de rentrer chez lui à moins d'une nécessité absolue. Le temps était abominable. Des nappes d'eau dégringolaient des toits, crépitaient sur les fenêtres, et les rues étaient presque vides. Les rares passants qui y déambulaient avaient certainement des raisons impérieuses pour être dehors par une nuit pareille.
[…]
Là-bas, dans l'appartement de Skärmarbrink, Kollberg rangea les pièces dans la boîte de bois et le couvercle à glissière se referma avec un bruit sec. Sa femme était rentrée de faire ses courses. Elle était aussitôt allée se coucher.
- Tu ne t'y mettras jamais, soupira-t-il.
- Il paraît qu'il faut un sens particulier, répondit Martin Beck d'une voix lugubre. Je suppose que ça doit s'appeler le sens de l'échec.
Kollberg changea de sujet :
- Je parie qu'il doit y avoir un drôle de foutoir du côté de Strandvägen.
- Sûrement. Mais pourquoi ?
- Ils devaient remettre une lettre à l'ambassadeur.
Une lettre... Pourquoi ne l'ont-ils pas envoyée par la poste ?
- Cela n'aurait pas fait autant de bruit.
- Effectivement. Mais quand même, c'est d'une telle stupidité qu'on en a honte.
- Oui, approuva Martin Beck.
Il avait mis son manteau et son chapeau. Il était prêt à partir. Kollberg se leva vivement.
- Je descends avec toi.
- Pour quoi faire ?
- Oh ! Histoire de me dégourdir un peu les jambes.
- Par ce temps ?
- J'aime la pluie, dit Kollberg en enfilant un imperméable de popeline bleu marine.
- Ça ne suffit pas que je sois déjà enrhumé ?
Martin Beck et Kollberg étaient policiers. Ils appartenaient à la brigade criminelle. Pour le moment, ils n'avaient rien de spécial à faire et pouvaient s'estimer libres de disposer de leur temps sans mauvaise conscience.
Il n'y avait pas un seul policier dans les rues. C'était en vain que, devant la gare centrale, une vieille dame attendait qu'un agent s'approche d'elle, la salue et, le sourire aux lèvres, la fasse traverser. L'individu qui venait de lancer une brique dans une vitrine n'avait pas à s'inquiéter : aucun hululement de sirène ne viendrait brusquement interrompre ses activités.
La police était occupée.
Une semaine auparavant, le chef de la police avait publiquement déclaré que cette dernière serait contrainte de négliger une grande partie de ses missions pour protéger l'ambassadeur des États-Unis des lettres et autres expressions du mécontentement des gens qui n'aimaient ni Lyndon Johnson ni la guerre du Vietnam.
L'inspecteur Lennart Kollberg n'aimait pas Lyndon Johnson, il n'aimait pas non plus la guerre du Vietnam mais il aimait marcher sous la pluie.
A 23 heures, il pleuvait toujours et on pouvait considérer que la manifestation était dispersée.
A la même heure, huit meurtres et une tentative d'assassinat eurent lieu à Stockholm.

Lu dans le cadre du Défi Scandinavie noire
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Suède : Maj Sjöwall et Per Wahlöö

Lu dans le cadre du Challenge Voisins, voisines
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Suède

Lu dans le cadre du Challenge Viking Lit'
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 Lu dans le cadre du Challenge Petit BAC
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"Métier"

 

28 février 2011

Les Lieux infidèles - Tana French

Lu dans le cadre du partenariat Livraddict et Calmann-Lévy

Lecture Commune avec Canel, Sophie et Valérie
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traduit de l'anglais (Irlande) par François Thibaux

Quatrième de couverture :

Au cours d’une vie,
seuls quelques instants
sont décisifs.

L’existence de Frank Mackey bascula par une nuit de décembre 1983. Il avait dix-neuf ans et attendait Rosie Daly au bout de sa rue, à deux pas du halo brumeux et jaune du réverbère. L’air était froid comme du verre, chargé d’un délicieux parfum de houblon brûlé venu de la brasserie Guinness. Ils avaient prévu de fuir ensemble leur quartier natal dublinois, pour vivre d’amour et de musique à Londres. Mais cette nuit-là, Frank patienta en vain. Rosie ne le rejoignit pas.

Vingt-deux ans plus tard, devenu flic spécialisé dans les missions d’infiltration, Frank vit toujours à Dublin. Il a coupé les ponts avec sa famille et n’a jamais eu de nouvelles de son premier amour. Puis un jour, sa sœur l’appelle, affolée : on a retrouvé la valise de Rosie dans un immeuble désaffecté de Faithful Place. Forcé de revenir chez les siens, Frank revisite son passé, ses blessures de jeunesse, et toutes ses certitudes : Rosie est-elle jamais partie ?

Auteur : Tana French a grandi en Irlande, en Italie, aux États-Unis et au Malawi, et elle vit à Dublin depuis 1990. Elle a été formée comme une actrice professionnelle au Trinity College de Dublin, et a travaillé dans le théâtre, le cinéma. Tana French a fait des débuts fracassants dans la littérature policière avec La Mort dans les bois, couronné par le prix Edgar de la littérature policière, et Comme deux gouttes d’eau.

Mon avis : (lu en février 2011)
C'est pour moi le premier livre que je lis de cette auteur que j'étais curieuse de découvrir.
A l'âge de dix-neuf ans, Francis Mackey décide de fuir son quartier de Dublin avec sa petite amie Rosie pour aller vivre à Londres. Or le soir de leur fuite, Francis attend en vain Rosie, elle n'est pas là au rendez-vous, elle a laissé un mot « Je sais que ça va être un choc et j'en suis désolé. Jamais je n'ai eu l'intention d'être malhonnête. Simplement, j'y ai beaucoup réfléchi. C'est le seul moyen pour moi d'avoir une chance de mener l'existence que je veux. J'aimerais le faire sans blesser/désespérer/décevoir. Ce serait bien que la perspective de ma nouvelle vie en Angleterre adoucisse un peu le chagrin de mon départ. Mais si c'est impossible, je comprendrai. Je jure de revenir un jour. En attendant, mille et mille baisers, Rosie. » La mort dans l'âme, Francis a poursuivi ses projets seul : il a quitté sa famille et son quartier de Faithful Place, il est devenu policier, il s'est marié et a eu une petite fille Holly. Et voilà que vingt-deux ans plus tard, sa sœur Jackie lui téléphone car des ouvriers ont retrouvé la valise de Rosie lors de travaux dans une vieille maison abandonnée. Francis est donc obligé de retourner vers son passé pour découvrir la vérité. Lui qui était parti pour oublier ce passé et sa famille qui lui faisait honte et qu'il considère peu fréquentable, un père au chômage, violent et alcoolique, une mère autoritaire et ses frères et sœurs.
L'enquête est confié à un de ses collègues mais il va quand même mener son enquête en parallèle. Je n'en dirais pas plus long sur l'intrigue pour ne rien dévoiler...

A travers cette histoire nous découvrons une famille plutôt spéciale où les relations entre les membres sont assez compliquées. Nous découvrons également une atmosphère dublinoise dans ce quartier de Faithful Place à la fois pauvre, populaire et chaleureux où l'on boit parfois plus que de raison et où le silence est la règle...
L'intrigue est pleines de rebondissements, le lecteur se met à soupçonner tour à tour chacun des protagonistes de l'histoire. J'ai vraiment beaucoup aimé ce roman policier.

Un grand Merci à Livraddict et aux éditions Calmann-Lévy pour m'avoir permis de découvrir cette auteur dont je lirai sans aucun doute d'autres de ses livres.

Et maintenant, allons voir ce qu'en pense Canel, Sophie et Valérie.

Extrait : (début du livre)
Au cours d'une vie, seuls quelques instants sont décisifs. La plupart d'entre nous les oublient aussitôt, jusqu'à ce qu'ils ressurgissent sans crier gare bien des années plus tard et, avec le recul, prennent tout leur sens : celui où l'on a décidé ou non d'aborder cette fille, de ralentir dans ce virage sans visibilité, de s'arrêter pour acheter ce préservatif. Je peux dire que j'ai eu de la chance. Confronté à l'un d'eux, je l'ai reconnu pour ce qu'il était. J'ai su immédiatement que mon destin se jouait à ce moment précis, lors de cette nuit d'hiver, alors que je patientais dans l'ombre en haut de Faithful Place.
J'avais dix-neuf ans. J'étais assez mûr pour vouloir prendre le monde à bras-le-corps, assez jeune pour agir comme un imbécile. Cette nuit-là, dès que mes deux frères ont commencé à ronfler, je me suis glissé hors de notre chambre, mon sac à dos sur les épaules et mes Doc à la main. Une latte craqua. Dans la chambre des filles, l'une de mes sœurs murmura dans son sommeil. Mes les dieux étaient avec moi. Rien n'aurait pu m'arrêter. Mes parents ne se retournèrent même pas sur leur canapé-lit lorsque je traversai le salon, les touchant presque. Le feu mourait avec un petit bruit sec, projetait dans le noir une faible lueur rouge. J'avais fourré dans mon sac tout ce que je possédais : jeans, T-shirts, un transistor d'occasion, cent livres sterling et mon extrait de naissance. A l'époque, il n'en fallait pas davantage pour gagner l'Angleterre. Rosie avait les billets du ferry.
Je l'ai attendue au bout de la rue, dans l'obscurité, à deux pas du halo brumeux et jaune du réverbère.

Lecture Commune avec Canel, Sophie et Valérie
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Lu dans le cadre du Challenge Voisins, voisines
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Irlande

25 février 2011

Kyoto Limited Express - Olivier Adam

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Lecture commune avec Nymphette, Anne, achille49, mrs pepys, Sharon 

kyoto_limited_Express Points – octobre 2010 - 156 pages

Quatrième de couverture :
Pour Simon Steiner, revenir à Kyoto, c'est retrouver les lieux du bonheur enfui. Sa vie ne se ressemble plus, pourtant ici tout demeure inchangé. Il déambule, entre mélancolie et ravissement, dans la douceur apaisante des souvenirs et des paysages. Un pèlerinage japonais sur la trace des absentes, au fil des temples, des ruelles et des bars.

Auteur : Olivier Adam, né en 1974, est l'un des auteurs les plus doués de sa génération. Certains de ses romans ont été adaptés au cinéma. Passer l'hiver, Falaises, A l'abri de rien et Des vents contraires.

Photographies : Arnaud Auzouy est né en 1976. Après des études de cinéma, il devient caméraman. Passionné de photographie, il découvre le Japon en 2006. Il y séjourne à plusieurs reprises. Kyoto Limited Express est son premier livre.

Mon avis : (lu en février 2011)
Voilà roman inédit d’Olivier Adam en dialogue avec 76 photos en couleur d’Arnaud Auzouy. Le texte d'Olivier Adam en page de gauche, et les superbes photos d’Arnaud Auzouy en page de droite.
Olivier Adam nous raconte le retour à Kyoto de Simon Steiner. Trois ans auparavant, Simon y a vécu avec sa femme Marie et sa fille Chloé. Mais maintenant, tout est différent : Chloé a disparu avec « ses quatre ans pour toujours » et Marie l'a quitté.
L'écriture est belle, simple, puissante, pleine de poésie. Simon est plein de mélancolie. Les descriptions de Kyoto sont très belles, tout comme les photos qui subliment parfaitement le texte. J'ai pris beaucoup de plaisir à suivre les pas de Simon pour découvrir la ville de Kyoto magnifique et envoûtante.
J'aime beaucoup l'auteur Olivier Adam et dans ce livre inédit il fait même un petit clin d'œil (page 109) à son dernier livre Un cœur régulier qui se passe également au Japon. Bonne lecture !

Et maintenant, aller voir les avis de Nymphette, Anne, achille49, mrs pepys

Extrait : (début du livre)
Depuis combien de temps suis-je ici ? Des jours, des semaines, des mois. Peu importe. Dans cette ville le temps s'écoule sans forme ni contour, les jours se mêlent jusqu'à se confondre, fluides et désarmés. Il y a trois ans, lors de mon premier séjour ici, dès les premiers instants j'avais été saisi. Un sentiment de familiarité. D'accord immédiat. De Kyoto je n'avais rien découvert. J'avais tout reconnu. Comme si la ville, sa géographie, sa lumière, la texture de l'air, l'écoulement du temps étaient inscrits en moi depuis longtemps, depuis toujours. Parfois, au pied des collines, se devinaient un temple ou un sanctuaire, gardés par des animaux, des esprits, toutes ces créatures qui avaient émerveillé Chloé à l'époque, lui avaient donné l'illusion d'évoluer dans un de ces films qu'elle adorait. Miyazaki, Takahata. Elle entendait respirer les camphriers immenses du Shoren-in, elle touchait leurs racines à fleur de terre et ils lui murmuraient des secrets bien gardés, des trucs d'enfant, merveilleux et un peu mièvres. Je les regardais avec elle et je ne pouvais pas m'empêcher de me dire à mon tour que quelque chose les habitait, aujourd'hui encore assis sur le bois du temple, contemplant l'un d'eux, veillant immense et frissonnant sur le jardin de mousse aux reflets roux, je crois le voir frémir, j'entends battre son cœur, profond et doux, accordé au mien, délivré tant que je le fixe.

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Site d'Arnaud Auzouy

Lecture commune avec Nymphette, Anne, achille49, mrs pepys, Sharon  
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Livre 35/35 pour le Challenge du 5% littéraire1pourcent2010

Lu dans le cadre du Challenge Petit BAC
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"Géographie"

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