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A propos de livres...
grande-bretagne
14 octobre 2010

L'étrangleur de Cater Street de Anne Perry

Lu dans le cadre du Baby Challenge Polar 2011
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Baby Challenge - Polar Livraddict : 7/20 déjà lus

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10/18 – septembre 1999 – 384 pages

10/18 – avril 2002 – 381 pages

traduit par Annie Hamel et Roxanne Azimi

Quatrième de couverture :
Suffragette avant l'heure, l'indomptable Charlotte Ellison contrarie les manières et codes victoriens et refuse de se laisser prendre aux badinages des jeunes filles de bonne famille et au rituel du tea o'clock.
Revendiquant son droit à la curiosité, elle parcourt avec intérêt les colonnes interdites des journaux dans lesquels s'étalent les faits divers les plus sordides.
Aussi bien le Londres des années 1880 n'a-t-il rien à envier à notre fin de siècle : le danger est partout au coin de la rue et les femmes en sont souvent la proie.
Dans cette nouvelle série " victorienne ", la téméraire Charlotte n'hésite pas à se lancer dans les enquêtes les plus périlleuses pour venir au secours du très séduisant inspecteur Thomas Pitt de Scotland Yard. Charmante Sherlock Holmes en jupons, Charlotte a déjà séduit l'Angleterre et les États-Unis. La voici partie à l'assaut de l'Hexagone.

Auteur : Juliet Hulme, habituellement connue sous son pseudonyme d'Anne Perry est un auteur de romans policiers victoriens. Elle est la fille d'Henry Hulme, astronome, physicien nucléaire et mathématicien qui, en vue de soigner sa tuberculose, l'envoya d'abord dans des sanatoriums aux Antilles puis en Afrique du Sud. Le choix de son père d'accepter en 1948 sa nomination comme recteur de l'Université de Canterbury (Nouvelle-Zélande), a certainement été influencé par la possibilité de faire soigner son enfant. La jeunesse d'Anne Perry fut mouvementée, puisqu'elle fut poursuivie et condamnée, en 1954, pour le meurtre de la mère d'une amie très proche, accompli avec celle-ci. Cet épisode tourmenté de sa vie est directement à l'origine du film 'Créatures célestes' (1994), coécrit et coproduit par son mari Peter Jackson, qui en assurera la réalisation. Son besoin d'écriture semble avoir toujours existé mais il lui faudra attendre une vingtaine d'années avant de voir ses efforts couronnés de succès par la publication en 1979 de 'L' Etrangleur de Cater Street', premier d'une longue série de succès mérités. Sans délaisser sa spécialisation victorienne, elle a toutefois fait quelques incursions dans le domaine de la littérature fantastique et a débuté une nouvelle série policière ayant pour cadre le Paris de la Révolution française. Elle vit aujourd'hui en Ecosse.

Mon avis : (lu en octobre 2010)

Ce roman se déroule à Londres, sous le règne de Victoria. C'est le premier de la série qui met en scène Charlotte Ellison et l'inspecteur Thomas Pitt.

Un série de meurtres mettant en scènes des jeunes femmes étranglées ont lieu dans Cater Street, et affole la famille Ellison et leurs voisins. C’est l'inspecteur Thomas Pitt est chargé de mener l'enquête.

Dans la famille Ellison, il y a trois filles, Sarah, l'aînée est mariée, la plus jeune, Emily, travaille ardemment à se trouver un mari. La dernière, Charlotte, est une fille atypique de la bonne bourgeoisie de Londres, elle refuse les règles rigides et absurdes de la bonne société, elle est trop intelligente et trop directe pour se trouver un mari. L'intrigue est passionnante et bien construite, mais ce roman est également une critique très juste de la société victorienne. Les confrontations entre Charlotte et l'inspecteur Thomas Pitt sont vraiment très amusantes. Les personnages de cette série sont vraiment bien décrits et très attachants. Après cette découverte, je lirai certainement d’autres épisodes pour retrouver Charlotte et Thomas Pitt !

Extrait : (début du livre)
Charlotte Ellison se tenait au milieu du salon désert, le journal à la main. Son père avait commis l'imprudence de le laisser traîner sur la desserte. Il désapprouvait ce genre de lecture, préférant lui fournir des informations qui lui semblaient mieux convenir à l'éducation d'une jeune fille. Cela excluait les scandales, l'ordre politique ou personnel, les controverses de toute nature et, bien entendu, les crimes : tout ce qui, en fait, présentait un intérêt !
Aussi Charlotte devait-elle se procurer les journaux à l'office où Maddock, le majordome, les gardait pour les lire avant de les jeter. Elle avait donc toujours au moins un jour de retard sur le reste des Londoniens.
Quoi qu'il en soit, elle avait un quotidien du 20 avril 1881 entre les mains, donc un journal du jour. La nouvelle la plus remarquable était celle de la mort de Mr Disraeli, la veille. Charlotte se demanda comment réagissait Mr Gladstone. Éprouvait-il une sensation de vide ? Un ennemi juré occupe-t-il une place dans la vie d'un homme qu'un véritable ami ? Certainement, oui. Dans le tissu des émotions, l'ennemi correspond à une erreur dans la trame.

Charlotte entendit des pas dans l'entrée et rangea très vite le journal. Elle n'avait pas oublié la colère de son père, le jour où il l'avait surprise en train de lire un quotidien du soir, trois ans plus tôt. Il s'agissait d'un article sur cette affaire de diffamation entre Mr Whistler et Mr Ruskin. C'était donc différent. Cependant, lorsqu'elle avait émis le désir d'en savoir plus sur la guerre des Zoulous, racontée par des journalistes présents sur les lieux, son père s'était montré tout aussi intraitable. Pour finir, ç'avait été Dominic, le mari de sa soeur, qui l'avait régalée de savoureux récits. Hélas, chaque fois avec un jour de retard !

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5 octobre 2010

En cuisine – Monica Ali

Lu dans le cadre de babelio_masse_critique

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Belfond – août 2010 – 627 pages

traduit de l'anglais par Isabelle Maillet

Quatrième de couverture :
Après l'extraordinaire succès de Sept mers et treize rivières, Monica Ali nous plonge dans le melting-pot des cuisines d'un grand restaurant londonien. Profonde, douce-amère, une œuvre ambitieuse qui dépeint les désarrois d'une société attachée à ses traditions, confrontée à un monde nouveau qu'elle ne comprend pas. Chef des cuisines de l'hôtel Imperial, un palace plus vraiment à la hauteur de sa splendeur d'antan, Gabriel I.ightfoot doit composer chaque jour avec une équipe cosmopolite et chahuteuse, une petite amie chanteuse qui se pose des questions sur leur relation et un père malade qui lui laisse des messages aussi laconiques que culpabilisants sur son répondeur. Une mort va faire voler en éclats son fragile équilibre : le corps d'un des plongeurs est retrouvé dans les sous-sols du restaurant. Une mort solitaire, anonyme, parmi ces travailleurs immigrés interchangeables. Soudain, Gabriel prend conscience que ses cuisines cachent bien des secrets : trafics en tous genres, prostitution, chantages, violence quotidienne... Surgit Lena, une fille de l'Est, mystérieusement liée à la mort du plongeur. Irrésistiblement attiré par cette femme en perdition, Gabriel va prendre une décision qui remettra en question tout ce en quoi il avait cru jusqu'ici...

Auteur : Née en 1967 à Dacca (ex-Pakistan oriental), Monica Ali a émigré en Angleterre à l'âge de trois ans. Sélectionnée par la revue Granta parmi les vingt meilleurs romanciers britanniques de la décennie avant même que son premier roman, Sept mers et treize rivières (2004), ne soit publié, finaliste du Man Booker Prize 2003, lauréate de nombreux prix, Monica Ali est devenue en moins de un an un véritable phénomène dans le paysage littéraire international. Après le recueil de nouvelles Café; Paraiso (2007), En cuisine est son deuxième roman à paraître chez Belfond. Monica Ali vit à Londres avec son mari et leurs deux enfants.

Mon avis : (lu en octobre 2010)

Ce roman a pour cadre  la cuisine d’un grand restaurant londonien, le personnage principal est le chef de cuisine Gabriel, il a été embauché il y a quelques mois pour redorer le blason de l’ancien palace, mais il avait tout planifié : un an à l’Impérial avant d’ouvrir son propre restaurant à Londres puis son mariage avec sa petite amie Charlie. Mais l'évènement qui ouvre le livre va bouleverser sa vie tranquille. Cet événement, c'est la découverte du corps de Yuri, un des employés à la plonge, dans les caves de l’établissement.

Gabriel va réaliser que pratiquement toute son équipe est constituée de clandestins qui viennent du monde entier d’Inde, d’Afrique ou des pays de l’Est de l’Europe. Il va faire la rencontre de Lena une jeune plongeuse, qui s’était installée avec Yuri dans les catacombes du restaurant. Comme elle est seule et à la rue, Gabe va l’accueillir chez lui. En parallèle, il apprend que son père va mourir d’un cancer. Sa relation avec son père n’ayant jamais été très bonne, il va faire l’effort de renouer avec lui. Mais Gabriel Lightfoot va perdre peu à peu pied, et devenir dépressif.

Malgré des descriptions parfois un peu longue, j’ai plutôt aimé ce livre qui nous plonge dans les coulisses d’un grand restaurant mais aussi dans l’univers des clandestins avec les abus et la misère dans laquelle ils sont obligés de survivre.

Merci à Babelio et aux éditions Belfond pour m’avoir permis de découvrir ce livre.

Extrait : (début du livre)
Avec le recul, il avait le sentiment que la mort de l'Ukrainien marquait le début de la débâcle. Il n'aurait pu affirmer qu'elle en était la cause, ni même que c'était une cause en soi, car les événements qui avaient suivi lui paraissaient à la fois inévitables et imprévisibles ; s'il parvenait aujourd'hui à les assembler pour former une trame susceptible de lui apporter du réconfort, il avait cependant suffisamment changé pour comprendre qu'il s'agissait juste d'une histoire à raconter, et que les histoires sont en général peu fiables. Tout n'en avait pas moins commencé, à son sens, avec la mort de l'Ukrainien puisque, dans la mesure où l'on peut dire d'une existence qu'elle prend parfois un tournant décisif, la sienne était partie en vrille dès le lendemain.

En cette matinée de la fin octobre, Gleeson, le directeur de la restauration, s'assit en face de Gabriel pour leur réunion habituelle. Il semblait avoir perdu son charme professionnel tout d'onctuosité.
«Vous êtes bien conscient que ça s'est produit sur votre secteur, dit-il. Vous en êtes conscient, n'est-ce pas ?»
C’était la première fois que Gabe voyait se lézarder la façade du personnage. Lui-même savait parfaitement que le plongeur ukrainien faisait partie de son « secteur ». Donc, qu’est-ce qui tracassait Gleeson ? Dans ce métier, tant qu’on ne connaît pas toutes les données, mieux vaut ne pas poser de questions. Gabe tapota le col du vase en cristal posé sur la table en déclarant : « Les fleurs en plastique, c’est bon pour les relais routiers et les funérariums. »

Déjà lu du même auteur :

sept_mers_et_treize_rivi_res Sept mers et treize rivières

Livre 11/14 pour le Challenge du 1% littéraire 1pourcent2010

En cuisine par Monica Ali

En cuisine

En cuisine

Monica Ali

Critiques et infos sur Babelio.com

30 septembre 2010

Boomerang – Tatiana de Rosnay

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Éditions Héloïse d'Ormesson – avril 2009 – 376 pages

Livre de Poche - avril 2010 - 375 pages

traduit de l'anglais par Agnès Michaux

Quatrième de couverture :
Sa sœur était sur le point de lui révéler un secret... et c'est l'accident. Elle est grièvement blessée. Seul, l'angoisse au ventre, alors qu'il attend qu'elle sorte du bloc opératoire, Antoine fait le bilan de son existence: sa femme l'a quitté, ses ados lui échappent, son métier l'ennuie et son vieux père le tyrannise. Comment en est-il arrivé là? Et surtout, quelle terrible confidence sa cadette s'apprêtait-elle à lui faire? Rattrapé par le passé, Antoine Rey vacille. Angèle, une affriolante embaumeuse, lui apportera une aide inattendue dans sa recherche de la vérité. Entre suspense, comédie et émotion, Boomerang brosse le portrait d'un homme bouleversant, qui nous fait rire et nous serre le cœur.

Auteur : Née en 1961, Tatiana de Rosnay est franco-anglaise. Elle vit à Paris avec sa famille. Journaliste, elle est l'auteur de neuf romans, dont "La Mémoire des murs" et "Elle s'appelait Sarah" (Prix Chronos, Prix des lecteurs de Corse et Prix des lecteurs-choix des libraires du Livre de Poche).

Mon avis : (lu en septembre 2010)
Pour les 40 ans de Mélanie, Antoine offre à sa sœur un week-end surprise à Noirmoutier. C’est l’île de leur enfance, ils n’y sont pas retournés depuis plus de trente ans, Mélanie avait six ans et Antoine avait dix ans. C’était le dernier été qu’ils ont passé avec leur maman, celle-ci est décédée l’année suivante à l’âge de trente-cinq ans.
Antoine est architecte, divorcé, père de trois enfants dont l’adolescence le dépasse un peu. Mélanie est éditrice et célibataire. Ce week-end à Noirmoutier va faire resurgir les souvenirs du passé. C’est pendant le voyage du retour que Mélanie, alors au volant, commence cette phrase « Antoine, il faut que je te dise quelque chose. J'y ai pensé toute la journée. La nuit dernière, à l'hôtel, tout m'est revenu. C'est à propos… »
Et c’est l’accident.
A l’hôpital, Antoine s’interroge sur la révélation que sa sœur voulait lui faire. Il va également faire connaissance avec la belle et mystérieuse Angèle qui va l’aider à avancer dans sa vie.
Antoine va mener son enquête sur le passé de sa famille tout en gérant le mieux possible sa vie professionnelle, son rôle de père, ses sentiments et ses faiblesses.
Un livre très facile à lire et que l’on ne veut pas lâcher, des personnages attachants et originaux, un livre plein d’émotion qui m’a beaucoup touchée.

Extrait : (début du livre)
La petite salle d'attente est morne. Dans un coin, un ficus aux feuilles poussiéreuses. Six fauteuils en plastique se font face sur un lino fatigué. On m'invite à m'asseoir. Je m'exécute. Mes cuisses tremblent. J'ai les mains moites et la gorge sèche. La tête me lance. Je devrais joindre notre père avant qu'il ne soit trop tard, mais je suis tétanisé. Mon téléphone reste dans la poche de mon jean. Appeler notre père ? Pour lui dire quoi ? Je n'en ai pas le courage.
La lumière est crue. Des tubes de néon barrent le plafond. Les murs sont jaunâtres, craquelés par le temps. Hébété sur mon siège, désarmé, perdu, je rêve d'une cigarette. Je dois lutter contre un haut-le-cœur. Le mauvais café et la brioche pâteuse que j'ai avalés il y a deux heures ne passent pas.
J'entends encore le crissement des pneus. Je revois l'embardée de la voiture. Ce drôle de balancement quand elle s'est brutalement déportée vers la droite pour venir heurter le rail de sécurité. Puis le cri. Son cri. Qui résonne toujours en moi.
Combien de gens ont patienté ici ? Combien ont attendu sur ce même siège d'avoir des nouvelle d'un être cher ? Je ne peux m'empêcher d'imaginer ce dont ces tristes murs ont été témoins. Les secrets qu'ils renferment. Leur mémoire. Les larmes, les cris. Le soulagement et l'espoir, aussi.
Les minutes s'égrènent. Je fixe d'un œil vide la pendule crasseuse au-dessus de la porte. Rien d'autre à faire qu'attendre.

Après une demi-heure, une infirmière entre dans la pièce. Son visage est long et chevalin. De sa blouse dépassent de maigres bras blancs.
— Monsieur Rey ?
— Oui, dis-je, le souffle court.
— Vous voudrez bien remplir ces papiers. Nous avons besoin de renseignements complémentaires. Elle me tend plusieurs feuilles et un stylo.
— Elle va bien ? tenté-je d'articuler.
Ma voix n'est qu'un faible fil prêt à se rompre. De ses yeux humides, aux cils rares, l'infirmière me lance un regard inexpressif.
— Le docteur va venir.
Elle sort. Elle a le cul plat et mou.
J'étale les feuilles sur mes genoux. Mes doigts ne m'obéissent plus.
Nom, date et lieu de naissance, statut marital, adresse, numéro de sécurité sociale, mutuelle. J'ai les mains qui tremblent tandis que j'écris :
Mélanie Rey, née le 15 août 1967 à Boulogne-Billancourt, célibataire, 49 rue de la Roquette, 75011 Paris
.
Je ne connais pas le numéro de sécurité sociale de ma sœur, ni sa mutuelle, mais je dois pouvoir les trouver dans son sac à main. Où est-il ? Je ne me souviens pas de ce qu'est devenu ce fichu sac. Mais je me rappelle parfaitement la façon dont le corps de Mélanie s'est affalé quand on l'a extraite de la carcasse. Son bras inerte qui pendait dans le vide quand on l'a déposée sur la civière. Et moi ? Pas une mèche de travers, pas un bleu. Pourtant j'étais assis à côté d'elle. Un violent frisson me secoue. Je veux croire que tout cela n'est qu'un cauchemar et que je vais me réveiller.
L'infirmière revient et m'offre un verre d'eau. Je l'avale avec difficulté. L'eau a un goût métallique. Je la remercie. Je n'ai pas le numéro de sécurité sociale de Mélanie. Elle hoche la tête, récupère les papiers et sort.
Les minutes me semblent aussi longues que des heures. La pièce est plongée dans le silence. C'est un petit hôpital dans une petite ville. Aux environs de Nantes. Je ne sais pas vraiment où. Je pue. Pas d'air conditionné. La sueur s'instille de mes aisselles jusqu'au pli de mes cuisses. L'odeur âcre et épaisse de la peur et du désespoir me submerge. Ma tête me lance toujours. Je tente de maîtriser ma respiration. Je ne tiens que quelques minutes. Puis l'atroce sensation d'oppression me gagne à nouveau.

Paris est à plus de trois heures de route. Ne devrais-je pas appeler mon père ? Ou ferais-je mieux d'attendre ? Je n'ai aucune idée de ce que le médecin va me dire. Je jette un coup d'œil à ma montre. Vingt-deux heures trente. Où se trouve notre père à cette heure ? Est-il sorti dîner ? Ou dans son bureau à regarder une chaîne du câble, avec Régine dans le salon d'à côté, probablement au téléphone ou en train de se faire les ongles ?
Je décide de patienter encore un peu. J'ai envie de parler à mon ex-femme. Le nom d'Astrid est toujours le premier qui s'impose dans les moments de détresse. Mais... Elle et Serge, à Malakoff, dans notre maison, dans notre lit, cette manie qu'il a de décrocher, même si c'est son portable à elle qui sonne. Rien que d'y penser... « Salut Antoine, ça va, mon pote ? » C'est plus que je ne peux le supporter. Alors, voilà, je ne vais pas appeler Astrid, même si j'en crève d'envie.

Je suis toujours assis dans ce cagibi étouffant à essayer de garder mon calme. À tenter de dominer la panique qui s'empare de moi. Je pense à mes enfants. Arno, dans la pleine gloire de son adolescence rebelle. Margaux, à peine quatorze ans et déjà si mystérieuse. Lucas, onze ans, gros bébé comparé aux deux autres et à leurs hormones débridées. Impossible de m'imaginer leur annonçant : « Votre tante est morte. Mélanie est morte. Ma sœur est morte. » Ces mots n'ont aucun sens. Je les repousse farouchement.
Une heure supplémentaire d'angoisse pure. Prostré, la tête entre les mains, je me concentre sur ce que j'ai à faire. Demain, c'est lundi et après ce long week-end, il y a tant d'urgences à régler. Rabagny et sa foutue crèche, un chantier que je n'aurais pas dû accepter. Lucie, l'assistante cauchemardesque que je dois me décider à virer. La situation est absurde. Comment puis-je penser à mon boulot alors que Mélanie est entre la vie et la mort ? Pourquoi Mélanie ? Pourquoi elle ? Et pas moi ? Ce voyage, c'était mon idée. Mon cadeau pour son anniversaire. Ses quarante ans qu'elle redoutait tant.
Une femme, qui doit avoir mon âge, entre dans la pièce. Elle porte une blouse verte et le drôle de petit bonnet de papier que mettent les chirurgiens au bloc. Des yeux noisette perspicaces, une chevelure courte et châtain où courent quelques mèches grises. Elle sourit. Les battements de mon cœur s'accélèrent. Je me lève d'un bond.
— C'était limite, monsieur Rey.
Je remarque avec effroi des taches brunes sur sa blouse. Est-ce le sang de Mélanie ?
— Votre sœur va s'en tirer.
Malgré moi, je sens mon visage qui se décompose et je fonds en larmes. Mon nez coule. Je suis gêné de pleurer devant cette femme, mais incapable de me retenir.
— Ça va aller, ne vous en faites pas, me dit le docteur.
Elle me prend fermement le bras. Ses mains sont petites et carrées. Elle m'oblige à me rasseoir et s'installe à côté de moi. Je gémis comme quand j'étais môme. Le chagrin me prend aux tripes, les sanglots sont irrépressibles.
— C'est elle qui conduisait, n'est-ce pas ? Je confirme d'un hochement de tête, en m'essuyant le nez d'un revers de main.
— Nous savons qu'elle n'était pas sous l'emprise de l'alcool. Les analyses le prouvent. Pouvez-vous m'expliquer ce qui s'est passé ?
Je m'efforce de répéter ce que j'ai déjà dit à la police et au SAMU. Ma sœur avait voulu prendre le volant pour la fin du voyage. C'était une bonne conductrice. J'avais parfaitement confiance à ses côtés.
— A-t-elle perdu connaissance ?
Sur son badge, je lis : « Docteur Bénédicte Besson ».
— Non.
À cet instant, un détail me revient. J'ai oublié de le confier aux ambulanciers pour la bonne raison que je ne m'en souviens que maintenant.
Je fixe les traits fins et bronzés du médecin. Mon visage est encore déformé par l'émotion. Je respire profondément.
— Ma sœur voulait me dire quelque chose. Elle s'est tournée vers moi. Et c'est là que tout est arrivé. La voiture a fait une embardée sur l'autoroute. Tout s'est passé si vite.
Le médecin me presse.
— Que voulait-elle vous dire ?

Mélanie. Ses mains sur le volant.
Antoine, il faut que je te dise quelque chose. J'y ai pensé toute la journée. La nuit dernière, à l'hôtel, tout m'est revenu. C'est à propos... Ses yeux. Troublés, inquiets. Puis la voiture quittant la route.

Déjà lu du même auteur :

elle_s_appelait_sarah_p Elle s'appelait Sarah

29 septembre 2010

Miss Charity – Marie-Aude Murail

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MissCharityGRAND École des Loisirs – novembre 2008 – 562 pages

Quatrième de couverture :
Charity est une fille.
Une petite fille.
Elle est comme tous les enfants : débordante de curiosité, assoiffée de contacts humains, de paroles et d'échanges, impatiente de créer et de participer à la vie du monde.
Mais voilà, une petite fille de la bonne société anglaise des années 1880, ça doit se taire et ne pas trop se montrer, sauf à l'église, à la rigueur. Les adultes qui l'entourent ne font pas attention à elle, ses petites sœurs sont mortes. Alors Charity se réfugie au troisième étage de sa maison en compagnie de Tabitha, sa bonne. Pour ne pas devenir folle d'ennui, ou folle tout court, elle élève des souris dans la nursery, dresse un lapin, étudie des champignons au microscope, apprend Shakespeare par cœur et dessine inlassablement des corbeaux par temps de neige, avec l'espoir qu'un jour quelque chose va lui arriver...

Auteur : Marie-Aude Murail est née au Havre en 1954. Elle vit avec son mari et a trois enfants, deux garçons et une fille. Elle a commencé à écrire pour la jeunesse en 1986. Au début, ses romans étaient surtout destinés à des femmes, puis elle s'est mise à écrire pour les jeunes de 7 à 16 ans. Dans ses romans, on peut retrouver énormément de dialogues entre les personnages. Son but est de séduire ses lecteurs grâce à de l'émotion et de l'amour. Le plus souvent, dans ses livres, les histoires se passent dans des milieux urbains et les héros sont des hommes, souvent des ados, motivés par des femmes. Elle a écrit Oh boy (2000), Simple (2004), Maïté coiffure (2004), Miss Charity (2008), Papa et Maman sont dans un bateau (2009).

Mon avis : (lu en septembre 2010)
Ce livre est formidable, il raconte l'histoire de Charity, une petite fille de la bonne société anglaise née en 1880. Charity nous raconte son histoire à partir de ses cinq ans, elle est seule car comme elle nous le raconte « J’aurais dû être assise entre mes deux sœurs. Mais Prudence, ma sœur aînée, avait renoncé à vivre trois heures après être née. Quant à Mercy, venue au monde deux ans plus tard, elle n’avait pas voulu tenter l’aventure plus d’une semaine. » Ses parents ne s'occupent pas d'elle, dès sa petite enfance, c'est Tabitha, sa bonne venue d'Écosse qui s'occupe d'elle, qui lui raconte des histoires qui font peur et qui petit à petit deviendra folle. Pour ne pas sombrer dans la solitude et l'ennui, Charity va grandir, en compagnie  des animaux qu'elle recueille et qu'elle apprivoise, chacun a un nom : sa première souris sera Madame Petitpas, puis il y aura Jack son hérisson, Julius son rat noir, Peter le lapin... Elle les observe et notes ses observations. Puis c'est vers l'âge de dix ans, que Charity aura une gouvernante française, Mlle Blanche Legros, qui lui enseignera le français et qui lui fera découvrir l’aquarelle. Grâce à cela, sa vie va être transformée, Charity aime l'aquarelle et elle a du talent, elle commence donc à peindre ce qu’elle voit autour d’elle : ses animaux, des paysages... Plus tard, elle publiera son premier livre pour enfants avec ses illustrations.

Dans une Angleterre victorienne, Miss Charity raconte l’histoire romancée de Beatrix Potter, mais pas seulement... On y croise également les personnages célèbres que sont Georges Shaw et Oscar Wilde, on y retrouve des références littéraires...

Ce livre nous dévoile des personnages attachants, en particulier Charity que l'on voit peu à peu s’émanciper, gagner sa vie et son indépendance. J'y ait trouvé également de l'humour et beaucoup d'émotions. Malgré ses 562 pages, j'ai dévoré ce livre en moins de 2 jours.
Il ne faut pas oublier également que le livre en lui-même est très beau avec en particulier les nombreuses illustrations et aquarelles de Philippe Dumas.

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Extrait : (page 16)
Ma souris, baptisée par mes soins Madame Petitpas, ne resta pas enfermée dans sa cage. Je laissais souvent la porte ouverte et Madame Petitpas en profitait pour pointer son nez, moustaches auvent. Elle était incroyablement effrontée, s'aventurant sur ma main, sur mon bras, mon épaule, me chatouillant le cou, s'empêtrant dans mes cheveux. J'avais beau la nourrir raisonnablement de légumes verts et de graines pour oiseaux, elle éventrait ma poupée de son ou grignotait le haut de mes bottines. Insensible à mes gronderies, elle s'asseyait sur son derrière, la queue en rond, et faisait sa toilette avec des gestes si drôles et si gracieux qu'il était impossible de se fâcher longtemps. C'était aussi une acrobate-née et elle s'était prise de passion pour ma maison de poupée, entrant par la fenêtre, grimpant l'escalier, ressortant par une lucarne. Elle y faisait des dégâts, rongeant le minuscule mobilier et semant partout ses petites crottes boudinées. Parfois, sa tête moustachue jaillissait de la cheminée puis disparaissait brusquement dans le conduit, comme si on venait de la tirer par la queue.
A quelque temps de là, Madame Petitpas me présenta à une de ses bonnes amies, plus courte et plus dodue, Miss Tutu. Miss Tutu était d'un naturel plus calme et pouvait rester toute une matinée dans la poche de mon tablier. Mais la nuit, je les entendais toutes les deux qui trottaient et couinaient dans la nursery. « C'est une invasion ! », se lamentait Tabitha. Elle ne faisait que commencer.

Déjà lu du même auteur :

Simple Simple  papa_et_maman_sont_dans_un_bateau Papa et Maman sont dans un bateau

29 août 2010

Juliet, Naked – Nick Hornby

juliet__naked 10/18 – mai 2010 – 312 pages

traduit de l'anglais par Christine Barbaste

Quatrième de couverture :
A Gooleness, petite station balnéaire surannée du nord de l'Angleterre, Annie, la quarantaine sonnante, se demande ce qu'elle a fait des quinze dernières années de sa vie... En couple avec Duncan, dont la passion obsessionnelle pour Tucker Crowe, un ex-chanteur des eighties, commence sérieusement à l'agacer, elle s'apprête à faire sa révolution. Un pèlerinage de trop sur les traces de l'idole et surtout la sortie inattendue d'un nouvel album, Juliet, Naked, mettent le feu aux poudres. Mais se réveiller en colère après quinze ans de somnambulisme n'est pas de tout repos ! Annie est loin de se douter que sa vie, plus que jamais, est liée à celle de Crowe qui, de sa retraite américaine, regarde sa vie partir à vau-l'eau... Reste plus qu'à gérer la crise avec humour et plus si affinités...

Auteur : Nick Hornby est né en 1957. Il est devenu un auteur culte outre-Manche avec ses romans : Haute fidélité, A propos d'un gamin, La Bonté : mode d'emploi, Vous descendez ? (finaliste pour le Whitbread Award), Slam et Juliet, Naked. Il a également écrit des ouvrages de non-fiction, Carton jaune, qui obtient le William Hill Sports Book of the Year Award, et 31 songs, finaliste pour le National book Critics Circle Award. En 1999, Nick Hornby s'est vu remettre l'E.M. Forster Award de l'Académie américaine des Arts et Lettres et remporte en 2002 le W.H. Smith Award For Fiction. Il a signé récemment le scénario du film Une Education, réalisé par Lone Sherfig et nominé aux Oscars. Nick Hornby vit et travaille à Highbury, au nord de Londres.

Mon avis : (lu en août 2010)
Un livre plein d'humour et critique sur les fans de... et sur le temps qui passe.
Annie a quarante ans, elle travaille au musée local de Gooleness petite station balnéaire. Son compagnon, Duncan consacre tout son temps à Tucker Crowe, rock star américaine qui a stoppé brutalement et sans explication sa carrière il y a plus de vingt ans. Duncan lui a dédié un site internet et avec une communauté de fans, il imagine des théories les plus farfelues sur la vie de leur idole. Lorsqu'ils partent en vacances, c'est pour visiter aux États-Unis les lieux qui ont vus un jour Tucker Crowe... Annie ressent que Duncan et elle-même ne sont plus trop sur la même longueur d'onde concernant leur couple.
Un jour, Duncan reçoit un album inédit de Tucker Crowe, Juliet Naked, un recueil des démos du précédent album Juliet. L'excitation de Duncan est telle qu'il en fait une critique dithyrambique. Mais Annie n'est pas d'accord et publie une chronique plus négative sur le site de son compagnon. En retour, elle recevra un mail du « vrai » Tucker Crowe, avec qui elle nouera une e-correspondance régulière et secrète puis qu'elle finira par le rencontrer.

Des personnages attachants, de l'humour, une histoire très bien racontée font de ce livre une lecture vraiment plaisante. A lire sans hésiter !

Extrait : (début du livre)
Ils étaient venus d'Angleterre jusqu'à Minneapolis pour visiter des toilettes. La vérité pure de ce fait ne frappa Annie qu'une fois sur place : excepté les graffitis sur les murs, dont certains faisaient allusion à l'importance de ces toilettes dans l'histoire de la musique, l'endroit était froid et humide, chichement éclairé, malodorant et parfaitement banal. Les Américains avaient le don pour tirer le meilleur parti de leur héritage, mais là, il n'y avait pas grand-chose à en tirer.
« Annie, tu as l'appareil photo ? demanda Duncan.
- Oui. Mais tu veux faire une photo de quoi ?
- Eh bien, tu sais...
- Non.
- Eh bien... des toilettes.
- Quoi, les... Comment on appelle ça ?
- Les urinoirs. Ouais.
- Tu veux être sur la photo ?
- Je devrai faire semblant de pisser ?
- Si tu veux. »
Duncan se posta donc devant l'un des trois urinoirs, celui du milieu, plaça les mains de façon convaincante devant lui, et sourit à Annie par-dessus son épaule.
« C'est bon ?
- Je ne sais pas si le flash a marché.
- Prends-en une autre. Ce serait idiot d'avoir fait tout ce chemin et de ne pas en avoir une bonne. »

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2 août 2010

Treize petites enveloppes bleues – Maureen Johnson

Livre lu dans le cadre du logo_challenge_ABC- (21/26)

13_petites_enveloppes_bleues Gallimard Jeunesse – janvier 2007 – 347 pages

traduit de l'anglais (États-Unis) par Julie Lopez

Quatrième de couverture :
Règle n° 1 : Tu ne peux emporter que ce qui tiendra dans ton sac à dos.
Règle n° 2 : Tu ne dois emporter ni guides de voyage ou de conversation, ni aucune aide pour les langues étrangères.
Règle n° 3 : Tu ne peux pas prendre d'argent en plus, ni de carte de crédit, de chèques de voyage, etc.
Règle n° 4 : Pas d'expédients électroniques. Ce qui signifie pas d'ordinateur portable, de téléphone portable, de musique, d'appareil photo.
C'est tout ce que tu as besoin de savoir pour l'instant. Rendez-vous à la Quatrième Nouille.
Lorsqu'elle découvre ce message de Peg, sa tante adorée qui vient de mourir, Ginny est loin d'imaginer qu'elle en recevra treize au total et que ces petites enveloppes bleues l'emmèneront loin, bien loin, pour un incroyable voyage à travers l'Europe. Et transformeront à jamais sa vie de jeune fille rangée, timide et sage...
Comme une course au trésor, ce roman nous happe et nous entraîne de rencontres en découvertes, de mésaventures en petites victoires, pour une folle virée pleine d'humour et de charme.

Auteur : Maureen Johnson est née à Philadelphie, en Pennsylvanie. Enfant, elle lisait sans arrêt, comme beaucoup de lecteurs qui finissent par écrire. Elle a étudié la dramaturgie et l'écriture romanesque à l'université de Columbia.
Afin de pouvoir vivre de sa plume, elle a pratiqué bon nombre de petits boulots de New-York à Londres en passant par Las Vegas.
Treize petites enveloppes bleues, son quatrième roman pour adolescents, est le premier publié en France. Elle vit à Nex-York avec son mari.

Mon avis : (lu en juillet 2010)
Voici une histoire originale : dès la première ligne nous découvrons une lettre, la destinataire est Ginny, l'auteur est sa tante Peg décédée récemment et qui était partie sans laisser d'adresse deux ans avant. Tante Peg invite Ginny à faire un sac léger sans superflu, de réserver un aller-simple pour Londres puis de passer prendre un colis à New-York. Dans ce colis, Ginny trouve douze enveloppes bleues numérotées de deux à treize. Elle a pour consigne de les ouvrir les une après les autres, tante Peg lui donne à chaque fois une destination à atteindre et une épreuve à faire. Départ de Londres, son étonnant voyage passera par Rome, Paris, Amsterdam, Athènes... Ginny va suivre scrupuleusement ce que lui demande sa tante et faire de nombreuses rencontres et finir par comprendre pourquoi tante Peg est partie si brutalement sans laisser de nouvelles. J'ai bien aimé ce livre à la fois émouvant et plein d'humour. L'auteur s'est bien documenté sur tous les pays traversés et le lecteur voyage avec plaisir avec Ginny.

Extrait : (début du livre)
"Chère Ginger,

Je n'ai jamais beaucoup aimé les règles. Tu la sais. Alors tu vas sans doute trouver bizarre que cette lettre soit remplie de règles que j'ai établies et que je veux que tu suives.
tu dois te demander : "Les règles de quoi?" Tu as toujours posé de bonnes questions.
Tu te souviens du jeu "Aujourd'hui, j'habite en..." que nous faisions quand tu étais petite et que tu venais me voir à New York? (C'était le "Aujourd'hui, j'habite en Russie" que je préférais, je crois. On jouait toujours à celui-là en hiver. On allait voir la collection d'art russe au Metropolitan Museum, on marchait dan sla neige à Central Park. Ensuite, on allait manger dans ce petit resto russe du village, où il y avait de délicieux légumes marinés et un drôle de caniche sans poils qui restait assis près de la fenêtre et aboyait sur les taxis.)
Je voudrais que nous jouions à ce jeu encore une fois -mais de façon un peu plus littérale. Aujourd'hui, ce sera : "J'habite à Londres". Comme tu le vois, j'ai glissé mille dollars en liquide dans cette enveloppes. de quoi payer un passeport, un aller simple New York-Londres et un sac à dos. (Garde quelques dollars pour le taxi jusqu'à l'aéroport.)
Quand tu auras réservé ton billet, fais ton sac et dit au revoir à tout le monde, je veux que tu ailles à New York. Plus précisément, je veux que tu te rendes à La Quatrième Nouille, le restaurant chinois au-dessous de mon ancien appartement. Quelque chose t'y attend. Ensuite, va directement à l'aéroport.
Tu vas partir pour plusieurs semaines et voyager dans des pays étrangers. Voici les fameuses règles qui vont guider ton voyage :

Règle numéro 1 : Tu ne dois apporter que ce qui tient dans ton sac à dos. N'essaie pas de tricher avec un sac ou un bagage à main.
Règle numéro 2 : Tu ne dois apporter ni guides de voyage, ni guides de conversation, ni aucune aide pour les langues étrangères. Et pas de revues.
Règle numéro 3 : Tu ne peux pas prendre d'argent en plus, ni de carte de crédit, de débit, de chèques de voyage, etc. Je me charge de tout ça.
Règle numéro 4 : Pas d'expédients électroniques. Ce qui signifie pas d'ordinateur portable, de téléphone portable, de musique ni d'appareil photo. Interdiction de téléphoner chez toi et de communiquer avec les Etats-Unis par Internet ou par téléphone. Les cartes postales et les lettres sont acceptées et encouragées.
C'est tout ce que tu as besoin de savoir pour l'instant. rendez-vous à La Quatrième Nouille.

Je t'embrasse,
Ta tante en cavale"

Livre lu dans le cadre du logo_challenge_ABC- (21/26)

31 juillet 2010

Le rêve de Castro – Lucy Wadham

le_r_ve_de_castro Gallimard – avril 2005 – 350 pages

traduit de l'anglais par Patrice Carrer

Quatrième de couverture :
Astrid et Lola, deux sœurs vivant en exil à Paris, sont inextricablement mêlées aux luttes séparatistes basques qui font rage dans leur pays d'origine. Elles attendent la libération de Mikel, l'amant de Lola, qui vient de passer vingt ans en prison pour actes de terrorisme. Mais Mikel, à peine libéré, disparaît. Chacune de leurs côtés, les deux sœurs partent à sa recherche en Espagne...

Auteur : Née à Londres, Lucy Wadham vit aujourd'hui à Paris comme journaliste indépendante. Après L'île du silence (Série Noire n° 2649), dont les droits cinématographiques ont été achetés par John Malkovitch, Le rêve de Castro est son deuxième roman à paraître à la Série Noire.

Mon avis : (lu en juillet 2010)
J'ai pris un peu par hasard ce livre à la bibliothèque en lisant la quatrième de couverture. Il était question de Pays-Basque et connaissant un peu la partie française, j'ai décidé de découvrir ce livre écrit par une anglaise vivant à Paris...
Astrid et Lola sont deux sœurs ayant une relation complexe. Astrid est une chirurgienne brillante qui se donne beaucoup dans son travail. Lola est prof de danse, elle attend des nouvelles de Mikel son petit ami qui a passé vingt ans en prison à la suite d'actes de terrorisme au Pays Basque. Mais Mikel veut oublier son passé et il ne veut pas renouer avec Lola... Celle-ci revient au Pays-Basque espagnol pour le rechercher. Astrid a caché à sa sœur qu'elle avait reçu ses dernières années des lettres de Mikel. Voulant fuir pour un temps sa vie parisienne, Astrid va rejoindre Lola dans leur maison natale durant son voyage en voiture elle va rencontrer Kader qui fuit lui aussi Paris et qui est blessé.
Ce livre se lit assez facilement, une histoire assez palpitante, beaucoup de questions se posent autour des différents personnages rencontrés : Astrid, Kader, Mikel, Lola, Txéma, Itxua et sur ce qui s'est vraiment passé lors de l'arrestation de Mikel. Je me suis également demandée plusieurs fois pendant ma lecture, pourquoi ce livre fait partie de la collection « série noire » et j'ai eu la réponse dans les toutes dernières pages...

Extrait : (page 19)
Étendue sur le côté droit, Lola surveillait les chiffres rouges du réveil ; et pourtant la sonnerie, quand elle retentit, vint percer son propre cœur. Elle sortit un bras de dessous le drap, pour interrompre ce vacarme. Le cœur de Lola était son point faible. D'après Astrid, il émettait un bruit de souffle et, de ce fait, ne serait jamais parfaitement fiable. Astrid lui avait fait cette remarque tout en maintenant le froid stéthoscope contre sa poitrine constellée de taches de rousseur, et Lola avait baissé les yeux vers les longs cils sombres de sa sœur, avec un demi-sourire. C'était le premier diagnostic d'Astrid et Lola était fière de son aînée, même si on ne lui apprenait rien en lui annonçant que son cœur était plus faible que fiable.

Oui, c'est un souffle au cœur, avait repris Astrid, en éloignant son visage de la poitrine de Lola et en enroulant son stéthoscope flambant neuf autour de sa main. Ne t'en fais pas, Lolita. C'est à surveiller, mais ce n'est pas grave.

Et Lola, après avoir reboutonné son chemisier, était allée chercher des bières dans le réfrigérateur, et elles avaient trinqué avec les bouteilles comme pour célébrer l'inauguration de leur nouvelle tâche commune, la surveillance de cœur.

Le réveil indiquait 06:31.

Mikel était libre depuis maintenant une minute. Il lui avait bien fallu ça, rien que pour découvrir le grand ciel de l'aube, le bleu d'un papillon exotique voletant au-dessus de sa tête, pour se retourner vers l'horizon d'une blondeur de bière, pour sortir un paquet de cigarettes de sa poche et tirer une bouffée en homme libre, la première depuis vingt ans.

En fermant les yeux, Lola aperçut son bien-aimé qui se tenait debout sur cette plaine aride, là-bas, le dos tourné aux grands murs de la prison, les jambes écartées, comme toujours. Comme si la terre risquait de se mettre à trembler sous ses pieds à tout moment.

Fume ta cigarette, Mikel. Aspire, l'approuva-t-elle à voix haute. Et elle se retourna sur le ventre et enfouit son large sourire dans l'oreiller.

5 juin 2010

Prodigieuses créatures - Tracy Chevalier

Livre lu dans le cadre du Partenariat  Blog-O-Book et Quai Voltaire /La Table Ronde

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prodigieuses_cr_atures Éditions de la Table Ronde – mai 2010 – 377 pages

traduit par Anouk Neuhoff

Présentation de l'éditeur :
"La foudre m'a frappée toute ma vie. Mais une seule fois pour de vrai" Dans les années 1810, à Lyme Regis, sur la côte du Dorset battue par les vents, Mary Anning découvre ses premiers fossiles et se passionne pour ces "prodigieuses créatures" dont l'existence remet en question toutes les théories sur la création du monde. Très vite, la jeune fille issue d'un milieu modeste se heurte aux préjugés de la communauté scientifique, exclusivement composée d'hommes, qui la cantonne dans un rôle de figuration. Mary Anning trouve heureusement en Elizabeth Philpot une alliée inattendue. Celte vieille fille intelligente et acerbe, fascinée par les fossiles, l'accompagne dans ses explorations. Si leur amitié se double peu à peu d'une rivalité, elle reste, face à l'hostilité générale, leur meilleure arme. Avec une finesse qui rappelle fane Austen, Tracy Chevalier raconte, dans Prodigieuses Créatures, l'histoire d'une femme qui, bravant sa condition et sa classe sociale, fait l'une des plus grandes découvertes du XIXe siècle.

Auteur : Née à Washington en 1962, après des études dans l'Ohio, Tracy Chevalier part en 1984 à Londres pour un séjour de six mois. Amoureuse des livres, elle reste finalement en Angleterre, y fonde une famille et commence à travailler dans l'édition. Pourtant, le virus de l'écriture, déjà côtoyé durant ses études, la rattrape. Après quelques cours d'écriture, Tracy voit ses écrits publiés dans le magazine Fiction, avant que son premier roman, 'La Jeune fille à la perle', ne lui apporte en 1998 un grand succès sur ses terres d'adoption. Confirmation dès lors que ses ouvrages se diffusent à grand échelle. Tracy Chevalier enchaîne, au début des années 2000, avec 'Le Récital des anges', 'La Dame à la licorne' puis 'La Vierge en bleu', et rencontre à chaque fois son public. Elle revient dans les librairies en 2007 avec 'L'Innocence'. Désormais, la sortie de chaque nouveau livre de Tracy Chevalier est un événement.

Mon avis : (lu en juin 2010)
Un superbe roman à deux voix inspiré de l'histoire vraie de deux femmes du XIXe siècle Mary Anning et d’Elizabeth Philpot, elles étaient toutes les deux passionnées par les fossiles. Tout oppose Elisabeth Philpot et Mary Anning, leur milieu social, leur éducation, elles vont pourtant ensemble se passionner pour les "curios", ces prodigieuses créatures et découvrir les premiers fossiles le long des falaises du Dorset.
Mary est issue de la classe ouvrière, elle n'avait que 11 ans lorsqu'elle a découvert son premier ichthyosaure, un reptile marin vieux de 200 millions d'années qui ressemblait à un crocodile. Elle connait mieux que la plupart des scientifiques les fossiles et sans le savoir, ses découvertes vont bousculer les théories de la création.
Elizabeth Philpot est une vieille fille de la classe moyenne, elle a presque 20 ans et plus que Mary. Elle est originaire de Londres, elle a aussi une passion pour les fossiles, en particulier les poissons fossiles. Le lecteur les suit l'une et l'autre au rythme des marées dans cette quête aux poissons fossiles pour l'une et aux « créatures » pour l'autre.

En alternance, le lecteur lit le récit de Miss Philpot et celui de Mary Anning. On découvre une belle et véritable histoire d’amitié entre deux femmes, mais aussi la condition des femmes au XIXe siècle en particulier des célibataires ainsi qu'une communauté scientifique qui refuse de prendre au sérieux les femmes et qui minimise leurs découvertes. J'ai été touchée par ces deux héroïnes si sympathiques, passionnées et fortes face aux conventions de l'époque. Tracy Chevalier a su parfaitement décrire l'atmosphère des plages et des paysages du Dorset. A tout moment, je me suis imaginée accompagner Mary et Elizabeth dans leurs longues promenades sur la plage, le long des falaises. L'histoire est captivante et pleine d'émotions, ce livre est un vrai coup de cœur pour moi !

Un très Grand Merci à Blog-O-Book et Quai Voltaire / Éditions de La Table Ronde pour cette très belle découverte.

Pour en savoir plus sur Mary Anning (en français) et sur Elizabeth Philpot (en anglais)

 

Extrait : (page 15)
Mary Anning en impose par ses yeux. Ce détail m'a semblé évident dès notre première rencontre, quand elle n'était qu'une fillette. Ses yeux sont marron comme des boutons, et brillants, et elle a cette manie des chasseurs de fossiles de toujours chercher quelque chose, même dans la rue ou à l'intérieur d'une maison, où il n'y a aucune chance de trouver quoi que ce soit d'intéressant. Cette particularité la fait paraître pleine d'énergie, même lorsqu'elle reste sans bouger. Mes sœurs m'ont dit que moi aussi je jetais des coups d'œil alentour au lieu d'arborer un regard impassible, mais dans leur bouche ce n'est pas un compliment, tandis que dans la mienne, envers Mary, c'en est un.

J'ai remarqué depuis longtemps que les gens ont tendance à en imposer par un trait particulier, une partie du visage ou du corps. Mon frère John, par exemple, en impose par ses sourcils. Non seulement ils forment des touffes proéminentes au-dessus de ses yeux, mais ils constituent la partie la plus mobile de son visage, traduisant le cours de ses pensées tandis que son front se creuse ou bien se lisse. Il est le puîné des cinq enfants Philpot, et le seul fils, ce qui lui a donné la charge de quatre sœurs à la mort de nos parents. Une telle situation animerait les sourcils de n'importe qui, même si enfant, déjà, il était sérieux.

Ma plus jeune sœur, Margaret, en impose par ses mains. Bien que petites, elles ont, proportionnellement, des doigts longs et élégants, et de nous toutes c'est celle qui joue le mieux du piano. Elle est encline à onduler des mains en dansant, et quand elle dort elle étire ses bras au-dessus de sa tête, même lorsqu'il fait froid dans la chambre.

Frances a été la seule sœur Philpot à se marier, et elle en impose par sa poitrine, ceci, je suppose, expliquant cela. Nous, les sœurs Philpot, ne sommes pas connues pour notre beauté. Nous avons une charpente anguleuse et des traits accusés. De plus, la fortune familiale s'est avérée tout juste suffisante pour qu'une seule d'entre nous puisse se marier sans trop de difficultés, et Frances a remporté la course, quittant Red Lion Square pour devenir la femme d'un négociant de l'Essex.

Les personnes que j'ai toujours le plus admirées sont celles qui en imposent par leurs yeux, comme Mary Anning, car elles semblent plus à même de comprendre le monde et ses rouages. C'est par conséquent avec Louise, ma sœur aînée, que je m'entends le mieux. Elle a des yeux gris, comme tous les Philpot, et elle parle peu, mais quand son regard se fixe sur vous, vous y prêtez forcément attention.

J'ai toujours rêvé d'en imposer par mes yeux moi aussi, mais je n'ai pas eu cette chance. J'ai une mâchoire saillante, et quand je serre les dents - plus souvent qu'à mon tour, tant le monde m'indispose -, elle se crispe et s'aiguise comme la lame d'une hache. Lors d'un bal, j'ai surpris un soupirant potentiel à dire qu'il n'osait pas m'inviter à danser de peur de se couper contre ma joue. Je ne me suis jamais véritablement remise de cette observation. On ne s'étonnera pas que je sois une vieille fille, et que je danse si rarement.

J'aurais bien aimé passer de la mâchoire aux yeux, mais j'ai constaté que les gens ne changent pas de trait dominant plus qu'ils ne peuvent modifier leur caractère. Je dois donc m'accommoder de cette forte mâchoire qui rebute tant les gens, taillée dans la pierre comme les fossiles que je ramasse. Du moins le croyais-je.

J'ai rencontré Mary Anning à Lyme Regis, où elle a vécu toute sa vie. Je ne m'attendais certes pas à habiter cette ville. En effet, nous les Philpot avions grandi à Londres, en particulier à Red Lion Square. Si j'avais entendu parler de Lyme - comme on entend parler des stations balnéaires lorsqu'elles deviennent à la mode... -, nous n'y étions jamais allés. Durant l'été, nous nous rendions en général dans des villes du Sussex comme Brighton ou Hastings. Du vivant de notre mère, nous allions sur la côte aussi bien pour l'air pur que pour les baignades, car elle souscrivait aux vues du Dr Richard Russell, qui avait écrit une thèse sur les bienfaits de l'eau iodée : elle était vivifiante quand on s'y baignait et purgative quand on la buvait. Si je refusais d'en ingurgiter, j'acceptais cependant d'y nager. Je me sentais chez moi au bord de la mer, et pourtant je n'avais jamais imaginé que cela deviendrait un jour une réalité.

 

 

28 mai 2010

L’étrange disparition d’Esme Lennox – Maggie O’Farrell

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Belfond – mars 2008 – 231 pages

10/18 – novembre 2009 -

traduit de l’anglais par Michèle Valencia

Quatrième de couverture :
A Edimbourg, un asile ferme ses portes, laissant ses archives et quelques figures oubliées resurgir à la surface du monde. Parmi ces anonymes se trouve Esme, internée depuis plus de soixante ans et oubliée des siens. Une situation intolérable pour Iris qui découvre avec effroi l'existence de cette grand-tante inconnue. Quelles obscures raisons ont pu plonger la jeune Esme, alors âgée de seize ans, dans les abysses de l'isolement ? Quelle souffrance se cache derrière ce visage rêveur, baigné du souvenir d'une enfance douloureuse ? De l'amitié naissante des deux femmes émergent des secrets inavouables ainsi qu'une interrogation commune : peut-on réellement échapper aux fantômes de son passé ?

Auteur : Née en 1972 en Irlande du Nord, Maggie O'Farrell a grandi au pays de Galles et en Ecosse. Depuis le succès de son premier roman, Quand tu es parti, elle se consacre à l'écriture. Maggie O'Farrell a également publié La Maîtresse de mon amant, La Distance entre nous, qui a reçu le prix Somerset Maugham, et L'Etrange disparition d'Esme Lennox, qui a connu un immense succès en Angleterre.

Mon avis : (lu en mai 2010)
Ce livre m’a été conseillé après ma lecture de "
Le testament caché – Sebastian Barry".
Elles sont 3 femmes : Esme, internée depuis soixante et un ans, cinq mois et quatre jours, Kitty, sa sœur ainée qui est atteinte aujourd'hui d'Alzheimer et Iris, la petite fille de Kitty.
A Édimbourg, l'asile de Cauldstone ferme ses portes et contacte Iris à propos de sa grande tante Esme Lennox qui y est pensionnaire depuis plus de soixante ans. Iris n'a jamais entendu parler d'elle jusque-là, elle va donc chercher à comprendre pourquoi Esme a été enfermée à l'âge de 16 ans dans cet asile.
A travers les souvenirs du passé d’Esme et les quelques mots souvent confus de Kitty, Iris va découvrir peu à peu les secrets de sa famille. Maggie O'Farrell décrit avec beaucoup de sensibilité le destin de ses femmes du début du XXème siècle. Le personnage d’Esme est très attachant.

La construction du livre est particulière, en effet, il n'y a pas de chapitre et les trois voix se succèdent et j'ai eu parfois un peu de mal à comprendre qui parlait. Une très belle histoire.

Extrait : (page 21)
Au bout de la ville, Esme se tient devant une fenêtre. A sa gauche, un escalier monte ; à sa droite, un autre descend. Son souffle s'accumule sur le verre froid. Dehors, la pluie cingle la vitre et le crépuscule commence à teinter les brèches entre les arbres. Esme observe la route, les deux files de voitures qui se croisent et, en arrière-plan, le lac, avec des canards qui strient sa surface ardoise.
En bas, des voitures sont arrivées et reparties toute la journée. Des gens y montent après avoir franchi la porte de derrière, le moteur est lancé, et les automobiles s’éloignent dans l’allée courbe en faisant crisser le gravier. Au revoir, s’écrient des gens sur le pas de la porte en agitant la main, au revoir.
« Hé là ! » La voix crie au-dessus de sa tête.
Esme se retourne. Un homme se trouve en haut de l’escalier. Le connaît-elle ? Il lui semble familier, mais elle n’en est pas sûre.
« Qu’est-ce que vous fabriquez ? » lâche l’homme d’un ton exaspéré, ce qui est curieux pour quelqu’un qu’elle n’a peut-être jamais vu. Esme ne sait pas quoi répondre, alors elle se tait.
« Ne traînez pas devant la fenêtre comme ça. Venez. »
Esme jette un dernier coup d’œil à l’allée et voit une femme qui occupait le lit voisin du sien plantée à côté d’une voiture marron. Un vieil homme range une valise dans le coffre. La femme pleure et ôte ses gants. L’homme ne la regarde pas. Esme pivote et monte l’escalier.

16 mai 2010

Par un matin d’automne – Robert Goddard

Livre lu dans le cadre d'un partenariat  Blog-O-Book et Sonatine

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Belfond – janvier 1996

Sonatine – mai 2010 – 454 pages

traduit de l'anglais par Marie-José Astre-Démoulin

Quatrième de couverture :
« Je suis tombé sur cet écrivain par le plus grand des hasards. J’ai lu Par un matin d’automne
, et j’ai tout de suite enchaîné sept autres livres du même auteur. Les romans qui vous tiennent éveillé jusqu’au petit jour sont denrée rare. Il me reste quelques Robert Goddard à lire, je vais essayer, si j’y arrive, de prendre mon temps, le plaisir qu’on y trouve est trop jubilatoire pour être gaspillé d’un seul coup. On est emporté par les rebondissements. Dans un style parfait Goddard vous manipule d’une main de maître. » Stephen King
Entre Un long dimanche de fiançailles et Les Âmes grises, un thriller passionnant dans la tourmente de la Première Guerre mondiale

Fin des années 1990. Leonora Galloway entreprend un voyage en France avec sa fille. Toutes deux ont décidé d’aller à Thiepval, près d’Amiens, au mémorial franco-britannique des soldats décédés durant la bataille de la Somme. Le père de Leonora est tombé au combat durant la Première Guerre mondiale, mais la date de sa mort gravée sur les murs du mémorial, le 30 avril 1916, pose problème. Leonora est en effet née près d’un an plus tard.
Ce qu’on pourrait prendre pour un banal adultère de temps de guerre cache en fait une étrange histoire, faite de secrets de famille sur lesquels plane l’ombre d’un meurtre jamais résolu et où chaque mystère en dissimule un autre. Le lecteur est alors transporté en 1914 dans une grande demeure anglaise où va se jouer un drame dont les répercussions marqueront trois générations.
Dans ce livre envoûtant à l’épaisseur romanesque exceptionnelle, Robert Goddard allie le cadre et l’atmosphère des plus grands romans anglais, ceux d’Elizabeth George ou de Ruth Rendell, à un sens du suspense et de la réalité historique remarquables.

« L’un des meilleurs romans qu’on ait lu depuis très longtemps » The Washington Post

Auteur : Robert Goddard vit dans les Cornouailles. Il publie un livre tous les ans depuis 1986. Longtemps souterraine, son œuvre vient d’être redécouverte en Angleterre et aux États-Unis, où elle connaît un succès sans précédent.

Mon avis : (lu en mai 2010)
Ce livre a été écrit en 1988, il a été traduit en français et édité une première fois en 1996. Il est réédité en 2010 aux Éditions Sonatine.
C'est une histoire en trois parties sur fond de Première Guerre Mondiale.
Dès le début du prologue, l'auteur nous annonce le fond du livre : « Aujourd'hui, en ce bout du monde, une page va être tournée sur un rêve, un secret va être dévoilé ». Leonora Galloway, soixante-dix ans, a choisi de se rendre avec sa fille Penelope, trente-cinq ans, dans la Somme, là où se dresse le Mémorial britannique de Thiepval pour lui raconter son histoire. Une histoire que Leonora a mis toute une vie à découvrir.
Dans la première partie, Leonora Galloway revient sur son enfance, elle a été élevée par son grand-père et sa femme Olivia et elle sait peu de choses sur ses parents. Elle sait très tôt qu'ils sont morts tous les deux, son père est mort à la guerre, sa mère est morte peu de temps après sa naissance. Mais le sujet est tabou, ses nombreuses questions restent sans réponse.
La seconde partie, se situe en 1953, le narrateur est Flanklin, un ami du père de Leonora qui réapparait après la mort d'Olivia. Il raconte à Leonora ce qu'il s'est passé durant l'été 1916, à Meongate. Cette partie commence comme un Agatha Christie, avec un meurtre, puis un suicide et peu à peu après de multiples rebondissements nous découvrons certains secrets de la famille. Il reste encore des questions en suspend, la troisième partie va permettre à Leonora de comprendre les derniers secrets de cette histoire de famille et les révéler au lecteur.

Ce livre est passionnant, je l'ai littéralement dévoré... L'écriture est très belle, l' histoire est riche, pleine rebondissements, les personnages sont multiples et très intéressants : beaucoup sont attachants, quelques uns odieux.

Un grand merci à Blog-O-Book et aux Éditions Sonatine pour cette très belle découverte.

Extrait : (page 21)
Les souvenirs d'enfance suivent une logique complexe qui leur est propre et échappe à toute règle. Impossible de les faire se conformer à la version que l'on voudrait leur imposer. Ainsi, je pourrais dire que la richesse qui entoura mon enfance remplaça aisément le sourire de ma mère, que la beauté de la demeure où Lord et Lady Powerstock m'hébergèrent me fit oublier que j'étais une orpheline... Si je le prétendais, chaque souvenir de mes jeunes années viendrait me contredire.
Meongate avait été, dans le passé, la maison bourdonnante de bruits et de rires de l'insouciante famille Hallows. Tout l'art du bien-être dans les pièces spacieuses et le parc paysager, tous les présents de la nature dans les collines douces du Hampshire et les pâtures de la vallée du Meon semblaient réunis pour former le cadre de vie idéal d'un petit enfant.
Pourtant, cela n'était pas suffisant. Tandis que je grandissais à Meongate, au début des années 1920, sa splendeur était depuis longtemps ternie. De nombreuses chambres avaient été condamnées, une partie de son parc mise en fermage. Et les gens gais que j'imaginais se promenant sur les pelouses aujourd'hui désertes ou dans les pièces désormais vides avaient disparu dans un passé hors de ma portée.
Je grandis en sachant que mes parents étaient morts tous les deux, mon père tué dans la Somme, ma mère emportée par une pneumonie quelques jours après ma naissance. On ne me le cachait pas. Au contraire, on me rappelait souvent ces tristes évènements, sans perdre une occasion de me faire comprendre que j'étais responsable de l'ombre qui planait sur leur mémoire. Les raisons de ma culpabilité m'échappaient et j'ignorais si le silence qui régnait autour de la mort de mes parents était dû au chagrin ou à quelque chose de pire. Je n'avais qu'une triste certitude : je n'étais pas la bienvenue à Meongate, je n'y étais pas aimée.

Livre lu dans le cadre d'un partenariat logo_bob_partenariat  et sonatine

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