La 5e saison - Mons Kallentoft
Seuil - avril 2013 - 464 pages
traduit du suédois par Lucile Clauss, Emmanuel Curtil
Titre original : Den femte årstiden, 2011
Quatrième de couverture :
Le printemps vient de commencer lorsqu’on trouve le corps d’une femme atrocement mutilée dans la forêt. Les blessures rappellent à Malin Fors l’affaire « Maria Murvall » qu’elle avait suivie dans Hiver. Maria avait été violée et frappée sauvagement dans la forêt, et depuis, elle reste murée dans le silence, à l’asile.
Malin rencontre une psychiatre à l’hôpital qui fait état d’un cas semblable. Soudain, Malin comprend que Maria Murvall n’est qu’une petite pièce d’un terrible puzzle. Si terrible qu’il est impossible d’y mettre des mots. L'enquêtrice met toute son énergie pour résoudre l’énigme. Elle qui avait été obsédée par le sort de Maria Murvall dans Hiver. Parviendra-t-elle à la sortir du silence ?
Cinquième volet des enquêtes de Malin Fors, La 5e Saison séduira les amateurs de Hiver et les autres car l’enquête peut se lire même si on ne connait pas Hiver. Comme toujours dans les livres de Mons Kallentoft, les morts parlent et la nature se déchaine. Malin Fors quant à elle reste ce mélange de force et de fragilité très apprécié des lectrices.
Auteur : Né en 1968, Mons Kallentoft est un journaliste et écrivain suédois dont les livres se sont vendus à plus d'un million d'exemplaires et ont été traduits dans 19 pays.
Mon avis : (lu en mai 2013)
Ce livre est la conclusion de la série Hiver - Eté - Automne - Printemps de Mons Kallentoft. Cette 5ème saison que l'auteur définie ainsi :
« Des nuages sombres et bas. De fines gouttes de pluie s'abattent comme autant de perles grises.
Presque un ciel d'automne.
Sauf que ce n'est pas l'automne. Ni vraiment le printemps, d'ailleurs. Le temps est indéfinissable, comme si le cycle des saisons avait été complétement perturbé, inversé. »
ne nous est pas totalement inconnue !
J'ai plutôt aimé cette série et j'ai aimé cette conclusion. Le personnage de Malin Fors me touche beaucoup et dans ce dernier volet, on l'a sent plus apaisée. Ses qualités d'enquêtrice ne sont plus à démontrer et elle va enfin résoudre une enquête restée en suspens lors de l'épisode Hiver. La boucle est bouclée !
Extrait : (début du livre)
Pourquoi ? Je ne comprends pas.
Mon corps est en feu.
Souffre mille blessures. On m’a écorchée, lacérée, poignardée. J’avance en titubant à travers la forêt. Dans le froid brûlant et la douleur glaçante.
C’est moi.
J’incarne la douleur.
Qu’y a-t-il après ?
Les arbres se penchent sur moi telles des hydres. Leurs têtes enflammées me poursuivent, leurs dents cherchent à me déchiqueter, leur sang empoisonné s’infiltre en moi, tandis qu’un mille-pattes remonte le long de ma cuisse et pénètre mon corps avant de déplier ses tentacules diaboliques.
Je hurle.
Est-ce la fin ? Le sang coule sur mon front, mais je continue d’avancer en trébuchant, je sens les racines jaillir du sol froid et s’enrouler autour de mes chevilles, mes mollets et mes cuisses afin de me faire tomber et me livrer aux langues des hydres, des langues de fil barbelé.
Comment ai-je atterri ici ?
Qui suis-je ?
Pourquoi dois-je mourir maintenant ?
Je suis seule.
Mon corps se dissout.
Quelque chose me poursuit.
La moindre racine, la moindre branche, le moindre souffle de vent froid me déchiquettent, boivent mon sang, dévorent mes intestins, mes reins, mon foie et mon cœur.
Maman.
Tu es là.
Je te vois dans la cuisine, et je t’appelle.
– Maman, maman !
Les branches s’enfoncent en moi. Je suis le froid et la chaleur, il pleut, il neige, il grêle, les hydres hurlent. D’où sortent toutes ces mouches ? Elles veulent pondre leurs oeufs dans mes plaies, déposer des larves dans ce corps qui autrefois était le mien.
Sur les troncs d’arbres, je distingue des visages d’hommes sculptés.
Mon souffle est coupé. Les branches, les aiguilles et les pommes de pin me lacèrent les pieds.
Je veux qu’ils me rattrapent pour que tout s’arrête. Et qu’autre chose, une blancheur, une autre chaleur puissent naître.
J’avance.
Sous la plante de mes pieds, la peau a disparu.
Ne plus rien sentir. Ne plus sentir de branche s’enfoncer en moi.
J’entends des halètements.
L’obscurité.
La solitude.
Un être humain étouffé par sa propre peur.
Un être humain qui refuse d’abandonner, de mourir.
Cet être humain, c’est moi.
Je hurle.
C’est mon dernier cri, la dernière bouffée d’air que je parviens à expulser de mes poumons.
Je suis allongée sur un tapis de racines brûlantes, les branches des arbres s’abaissent vers moi, leurs visages crachent de l’acide sur mes joues et mes yeux, je suis aveugle.
Mais la douleur n’est pas aveugle.
C’est tout ce qui reste à présent.
Avec les masques sculptés des arbres.
Une sensation froide sur mes côtes.
La neige tombe.
Des étoiles blanches tombent sur mon corps nu, l’acier me déchire, mutile mon sexe, mon cri est tout ce qu’il me reste.
Je n’ai même plus la force de hurler.
La forêt est sourde.
Aveugle.
Maman.
J’aimerais que tu ne saches jamais ce qui m’est arrivé.
J’aimerais que tu croies que je suis morte sans peur, sans douleur, entourée de gentilles personnes.
J’aimerais le croire moi-même.
Mais non, quelque chose s’enfonce encore en moi, un bâton affûté, un mille-pattes dont les pattes sont comme mille couteaux qui s’agitent en moi, et je meurs, maman, j’abandonne mon corps aux mouches.
Je me quitte, je vois mon corps nu et détruit qui gît dans une fosse au milieu d’une forêt déserte, et je deviens quelqu’un d’autre, quelqu’un qui plane dans un espace coupé des vivants. Je suis libre, maman, ne suis-je pas libre ?
Je vois quelqu’un s’éloigner de mon corps, le laissant aux vers qui me rongent, et aux arbres qui veulent dévorer la chair que j’habitais.
Quelqu’un sèche le couteau avec des feuilles mortes, puis quitte les lieux.
On m’a tuée, maman, brûlée, déchiquetée, assassinée et violée.
Et je ne suis pas la seule à avoir connu ce destin.
Il faut en finir.
L’hydre doit mourir, bien que sa vie soit éternelle.
Déjà lu du même auteur :
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catégorie "Même pas peur" : 43/12
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