La fabrique du monde - Sophie Van der Linden
Buchet Chastel - août 2013 - 156 pages
Quatrième de couverture :
Et je me vois là, dans tout ça. Une petite chinoise de dix-sept ans, une paysanne, partie à l’usine parce que son grand frère entrait à l’université. Quantité des plus négligeables, petite abeille laborieuse prise au piège de sa ruche. Enfermée là pour une éternité.
De nos jours, en Chine. Mei, jeune ouvrière de dix-sept ans vit, dort et travaille dans son usine. Elle rêve aussi.
Confrontant un souffle romantique à l’âpre réalité, La Fabrique du monde est une plongée intime dans un esprit qui s’éveille à l’amour, à la vie.
Auteur : Née en 1973, Sophie Van der Linden vit à Conflans-Sainte-Honorine (78). Jusqu'à présent, elle n'a publié que des ouvrages de référence sur la littérature pour la jeunesse dont elle est spécialiste (Je cherche un livre pour un enfant, 2011 ; Images des livres pour la jeunesse, 2006). La Fabrique du monde est son premier roman.
Mon avis : (lu en mai 2014)
J'ai découvert ce livre grâce à Emilie du Café Lecture de la Bibliothèque.
Mei est une jeune Chinoise de 17 ans, pour que son grand frère puisse aller à l'université, il faut qu'elle aille travailler à l'usine. Alors, elle vit, travaille et dort dans une usine de textile. Pour s'évader en pensées de l'atelier où elle travaille sans relâche pour honorer les commandes venant de l'Occident, Mei rêve d'une autre vie…
Ayant tenu tête à un contremaître sans pitié, Mei est privée de paye, pour le nouvel an elle ne pourra pas rentrer dans sa famille qu'elle n'a pas vu depuis deux ans... Elle va se retrouver seule dans cette grande usine vide. Enfin pas tout à fait seule... Mei va passer trois jours de rêves, elle va découvrir l'amour...
Avec ce livre nous découvrons la réalité des conditions de travail de ces ouvrières du textile déshumanisées qui n'ont qu'un seul droit travailler sans rien revendiquer. Le constraste est fort avec la parenthèse amoureuse que va vivre Mei pendant quelques jours. Mei est terriblement attachante et émouvante. Un livre qui se lit facilement et auquel on repense plusieurs jours après.
Extrait : (début du livre)
Sortir, en une propulsion due au seul souffle de la liberté. Puis courir, la vie en dépend, toute et à jamais. Droit devant, vers la nature, l’inconnu, à toute force.
Les pieds à nu dérapent sans douleur sur pierres et arbustes tandis que bras et jambes font des mouvements insensés. Dévaler la pente, en fuite, urgemment. Dévaler des heures durant, dévaler à se damner.
Peu à peu le terrain se redresse et se clarifie. Une chaleur et une lumière plus irradiantes que le soleil même freinent la progression et la ralentissent jusqu’à l’arrêt. Aveuglement. Impuissance totale.
Terrassée, écartelée, affaissée toute. Cela aurait dû être la fin.
De la brume sourd de terre. L’intensité baisse, fait rouvrir les yeux. Le décor réapparaît et défile. Premiers arbres, premiers bois. Et la forêt, majestueuse. Ronces et fougères accrochent, entraînent et retiennent, indolores écorchures. Puis le mouvement se fige, brusquement mais souplement. Silence opaque.
La lumière du soleil maintenant filtrée pointe, verticale, dense, pesante. Elle entraîne depuis les frondaisons délicatement ouvragées quantité de matières qui retombent entre les troncs imposants.
Du sol, une odeur s’élève. Une odeur construite, singulièrement parfumée, envoûtante. Si l’on s’en approche, elle se disperse puis revient dans toute sa matérialité, oppressante, écoeurante. Elle semble se frayer un mystérieux chemin jusqu’au cerveau qu’elle enserre et pique de ses dards invisibles, douloureux. Les fleurs se déploient, abondantes, enserrent, font succomber.
Réagir vigoureusement pour les chasser, retrouver le calme souverain du sous-bois.
Ses feuillages, ses fougères, son silence.
Là-bas, entre les arbres, une silhouette humaine, masculine, se détache, dos tourné.
S’approcher sans bruit, sans souffle. Pas à pas, très près. Jusqu’à la nuque. Chaude, palpitante. Éclairée et chauffée par le soleil. Grain de peau mordoré.
La saisir. La mordre et la lécher frénétiquement jusqu’à une surprenante extase. S’approcher encore toute. Se coller, se frotter, se fondre en ce dos.
Pleurer. Crier. Douceur et violence. Frôlements et enfoncements.
Un goût en bouche.
Challenge Petit Bac 2014
"Batiment" (5)
Challenge 7% Rentrée Littéraire 2013
38/42