L'Abyssin - Jean-Christophe Rufin
Challenge Destination Égypte : 1er septembre 2012
proposé par evertkhorus
Le Livre du mois – janvier 1996 -
Gallimard – mars 1997 – 579 pages
Folio – janvier 1999 - 704 pages
Goncourt du premier roman 1997
Quatrième de couverture :
À l'origine de ce livre, un fait historique : Louis XIV, le Roi-Soleil, est entré en relation avec le plus ténébreux, le plus mythique des grands souverains de l'Orient, le Négus. L'Abyssin est le roman de cette fabuleuse ambassade.
Jean-Baptiste Poncet, jeune médecin des pachas du Caire, sera, par une extraordinaire réunion de circonstances, le héros de cette épopée baroque et poétique à travers les déserts d'Égypte et du Sinaï, les montagnes d'Abyssinie, de la cour du Roi des Rois à celle de Versailles et retour.
Mais qu'on y prenne garde : derrière sa simplicité, sa tendresse, son humour, ce roman d'aventures recèle une fable tragique. Jean-Baptiste est l'homme qui, ayant découvert un nouvel empire et sa civilisation, fera tout pour déjouer les tentatives de ceux qui veulent le convertir : les jésuites, les capucins et tant d'autres. Grâce à lui, l'Éthiopie échappera à toute reconquête étrangère et gardera jusqu'à nos jours sa fierté et son mystère.
L'Abyssin, tout en empruntant sa langue à Diderot et son rythme à Dumas, est un roman bien actuel, une parabole sur la haine du fanatisme, la force de la liberté et la possibilité du bonheur.
Auteur : Jean-Christophe Rufin, né à Bourges dans le Cher le 28 juin 1952, est un médecin, historien, globe trotteur, écrivain et diplomate français. Il a été élu en 2008 à l'Académie française dont il est le plus jeune membre. Ancien président d'Action contre la faim, il a été ambassadeur de France au Sénégal et en Gambie.
Mon avis : (lu en août 2012)
J'ai eu plutôt du mal à choisir un livre pour cette destination, j'ai finalement choisi le premier roman de Jean-Christophe Rufin L'Abyssin qui se déroule en partie en Égypte.
C'est à la fois une roman historique et un roman d'aventure. L’auteur s’est inspiré d’un fait historique : Louis XIV souhaitait rétablir un lien avec le souverain mythique d'Abyssinie, le Negus. L'histoire se déroule donc à la fin du 17ème siècle, en Egypte, Abyssinie et France. Jean-Baptiste Poncet, jeune médecin apothicaire français installé au Caire comme messager du Roi Louis XIV auprès du Négus, il doit échapper aux intrigues rivales entre jésuites et capucins, aux intrigues de Versailles et réussir sa mission pour envisager de pouvoir aimer Alix, la fille du consul… Les personnages sont attachants, et les péripéties de Jean-Baptiste Poncet nous tiennent en haleine tout au long de l'histoire.
J'ai beaucoup aimé l'écriture très agréable à lire de Jean-Christophe Rufin, auteur que je découvrais avec ce livre. Il sait faire de superbes descriptions de paysages qui sont pleines des couleurs et des odeurs de l'Orient, le lecteur ressent parfaitement la chaleur du soleil, les parfums des oasis et les bruits des villes trépidantes d'activités. Un très beau voyage en Egypte, en Ethiopie et dans le temps…
A l'occasion, je lirai d'autres livres de cet auteur.
Extrait : (début du livre)
Le Roi-Soleil était défiguré. Certaine lèpre qui, dans les pays de l'Orient, corrompt les huiles, s'était introduite, jusque sous le vernis et s'y étalait de jour en jour. Louis XIV avait sur la joue gauche, celle que le peintre lui faisait tendre en majesté vers le spectateur, une grosse tache noirâtre, hideuse étoile qui projetait jusqu'à l'oreille ses filaments d'un brun rouillé. En y regardant bien, on remarquait aussi des auréoles sur le corps. Mais à l'exception de celles qui souillaient son bas, ces autres injures n'étaient pas aussi gênantes.
Le tableau ornait le consulat de France du Caire depuis trois ans. Il avait été exécuté dans son atelier parisien sous la surveillance de Hyacinthe Rigaud lui-même, auteur de l'original, puis expédié par bateau. Pour comble de malheur, ni au Caire ni dans d'autres échelles du Levant raisonnablement proches ne se comptait pour l'heure de peintre habile. Le consul, M. de Maillet, était placé devant un choix cruel : laisser voir à tous, dans la grande salle du bâtiment diplomatique, un portrait du Roi qui l'offensait gravement, ou y faire porter des mains inexpertes qui pouvaient le ruiner tout à fait. Le diplomate retourna cette considérable affaire dans sa tête pendant trois mois. Il prit finalement le parti de l'audace et osa la réparation.
D'autres lectures autour de l'Égypte :
L’immeuble Yacoubian – Alaa El Aswany
Chicago – Alaa El Aswany
Les Cheveux de Bérénice - Denis Guedj
Taxi – Khaled Al Khamissi
Lu dans le cadre du Challenge Défi Premier roman
500 anecdotes historiques : Pour enfin retenir l'Histoire – Daniel Ichbiah
Lu dans le cadre d'un partenariat Livraddict et Scrineo
Scrineo – février 2012 – 450 pages
Quatrième de couverture :
"Qui m'aime me suive... " "Voici le commencement de la fin." "Honni soit qui mal y pense ". Une anecdote savoureuse est souvent liée à la plupart de ces célèbres phrases. L'auteur propose ici de remonter le cours de l'Histoire à travers ces citations entrées, pour la plupart, dans notre culture et dans le langage courant. Ces mots synonymes de drame, de gloire ou de défaites ont marqué l'Histoire, exprimant ainsi toute l'intensité d'un événement ou reflétant le caractère d'un personnage face à l'adversité ou à un choix difficile. A eux seuls, ils sont de véritables jalons de l'épopée humaine.
L'ambition de ce livre est d'offrir une (re)découverte aisée de l'Histoire grâce aux anecdotes qui accompagnent une phrase célèbre. Chaque citation constitue un point d'entrée vers un récit court mais fascinant, un instantané de l'Histoire riche d'enseignement et en réflexions : Une façon comme une autre de s'approprier les grands événements historiques et d'en retenir l'essentiel.
Auteur : Daniel Ichbiah est l'auteur de plusieurs best-sellers tels que Les 4 vies de Steve Jobs, La saga des jeux video, Bill Gates et la Saga de Microsoft et Enigma. Il est également rédacteur en chef du magazine Comment ça marche ?. Avec le concours de Nicolas Eybalin éditeur, agrégé d'histoire, ancien élève de l'Ecole normale supérieure de Saint-Cloud-Fontenay.
Mon avis : (feuilleté et lu en mars 2012)
Lorsque j'ai reçu le livre, je l'ai trouvé plutôt austère. L'Histoire de l'Antiquité à nos jours est divisée en dix chapitres. Chaque chapitre commence par un petit quiz type QCM avec 3 questions. Puis quelques pages pour résumer les principaux faits de la période. Puis les citations et les anecdotes par ordre chronologique et pour terminer le chapitre des jeux de devinettes pour aller plus loin.
A la fin du livre, après les dix chapitres, il y a un quiz final et un Index avec les œuvres littéraires et films (avec seulement18 œuvres répertoriées) et un Index des Personnages célèbres.
C'est un livre que l'on n'ai pas obligé de lire en continu, pour ma part j'ai commencé par lire les chapitres d'Histoire dont j'avais encore quelques souvenirs et j'ai commencé par la Renaissance. J'ai répondu correctement et facilement au petit quiz type QCM. Le résumé de la période est plutôt bien fait même s'il est très succinct. Les citations sont complétées par un commentaire ou une anecdote qui explore plus précisément les faits et les personnages célèbres de l'époque. Le côté austère du livre s'est confirmé et pour ma part, j'ai exploré le livre en lisant quelques pages par quelques pages, sinon cela devenait vraiment trop indigeste.
Dès l'avant propos, l'auteur nous précise bien que « Ce livre n'a pas la prétention de remplacer un livre d'Histoire ». En lisant ce livre, j'ai appris certaines choses mais dans quelques semaines est-ce que je me souviendrai encore de ce que j'ai appris ? Je pense que ce livre permet de se rafraîchir la mémoire ou de combler quelques manques de connaissance d'Histoire.
Merci à Livraddict et aux éditions Scrineo de m'avoir permis de découvrir ce livre.
La résistance française à Buchenwald - Olivier Lalieu
Lu dans le cadre du partenariat et des éditions Tallendier
Editions Tallandier – mars 2005 –
Editions Tallandier – janvier 2012 – 441 pages
Préface de Jorge Semprun
Quatrième de couverture :
Depuis la Libération, le camp de Buchenwald, symbole de la résistance des déportés dans le système concentrationnaire nazi, est au cœur de polémiques acharnées : quel est le rôle respectif des droits communs et des politiques dans le contrôle de l’administration intérieure du camp ? Et chez ces derniers, quelles sont les conséquences des rivalités entre gaullistes et communistes ? Qu’impliquent les rapports de force permanents entre les différentes communautés nationales ? Et dans quelles circonstances le camp est-il libéré, le 11 avril 1945 ?
Au-delà des passions et des conflits, à partir d’archives et de témoignages inédits et avec le recul serein de l’historien, Olivier Lalieu révèle la véritable histoire de la résistance des déportés français alors que chaque action avait le poids d’une vie.
Auteur : Olivier Lalieu, historien au Mémorial de la Shoah à Paris, est également l’auteur de La Déportation fragmentée. Les anciens déportés parlent de politique (Boutique de l’histoire, 1994) et de nombreux articles ou communications sur la mémoire de la déportation. Jorge Semprun,ancien déporté à Buchenwald, a rédigé la préface de ce livre.
Mon avis : (lu en mars 2012)
J'ai accepté ce partenariat avec Newbook car depuis toujours je me suis intéressée aux témoignages des personnes ayant vécu durant la Seconde Guerre Mondiale.
Ce livre est est le résultat d'un gros travail d'historien très bien documenté, rassemblant une documentation riche et variée avec des archives officielles ou privées, de nombreux témoignages sur la vie du camp du Buchenwald et en particulier sur la Résistance française. Avec un regard objectif de l'historien, Olivier Lalieu nous décrit avec une grande précision l'histoire de la résistance clandestine à Buchenwald.
Le camp de concentration de Buchenwald « Forêt de hêtres » a été créé en 1937 par le régime hitlérien sur la colline d'Ettersberg près de Weimar, en Allemagne. Les nazis y envoyaient des opposants politiques et religieux allemands comme les sociaux-démocrates, les communistes, les syndicalistes, les libéraux, les démocrates, les pacifistes, les religieux catholiques et protestants (ils portent l'insigne du triangle rouge). Au début, les petits chefs du camp étaient constitués de criminels de « Droit Commun » (les triangles verts), une idée des nazis pour mater . Lorsque la plupart des Français arrivent à Buchenwald en 1943 et 1944, les détenus « Politiques », ont réussi à s’imposer sur les détenus « Droit Commun » pour les postes stratégiques du camp. La Résistance française à Buchenwald va se développer grâce à la rencontre deux hommes aux parcours différents mais dont les personnalités affirmées et leurs engagements vont réussir à créer un collectif français CIF (Comité des intérêts français) et cela permet à la communauté française de se faire mieux respecter. La Résistance dans un camp comme Buchenwald est multiple. C'est avant tout avoir le sens collectif. C'est refuser la brutalité envers les autres détenus. C'est entretenir le moral des déportés en organisant des « loisirs » (dessins, musique, théâtre, conférences...) pour oublier la triste réalité du froid, de la misère, des coups, de la mort. C'est avoir des gestes de solidarité, alimentaire ou vestimentaire, C'est entretenir le moral des déportés en organisant des « loisirs » (dessins, musique, théâtre, conférences...) pour oublier la triste réalité du froid, de la misère, des coups, de la mort. C'est aussi faire du sabotage en particulier dans les usines d'armement qui utilisaient comme main-d’œuvre les déportés. Mais c'est aussi participer à « la dramatique question des « Transports » », c'est à dire établir des listes d'affectations à certains kommandos ou de départ vers d'autres camps.
Ce livre très complet m'a beaucoup intéressée même si certains passages m'ont paru un peu long. J'y ai appris beaucoup de choses, le camp y est décrit avec beaucoup de précision, glossaires, carte, plans, annexes, bibliographies et index enrichissent également ce cours d'histoire.
Un grand merci à News Book et aux éditions Tallendier pour m'avoir permis de découvrir ce livre.
Lu dans le cadre du Challenge Petit BAC 2012
"Géographie"
La Méridienne – Denis Guedj
Robert Laffont – septembre 1999 – 308 pages
Pocket – mars 2003 – 414 pages
Points – octobre 2008 – 379 pages
Quatrième de couverture :
Juin 1792. Deux berlines quittent les Tuileries, l’une vers Dunkerque, l’autre vers Barcelone. À leur bord, Pierre Méchain et Jean-Baptiste Delambre, les astronomes et académiciens chargés par l’Assemblée Nationale de mesurer le méridien entre ces deux villes, afin de lui donner “pour tous les hommes, pour tous les temps”, une mesure universelle : le Mètre.
La mesure se révèle une véritable expédition. Bien vite, les saufs-conduits signés par le Roi les rendent suspects. Delambre est destitué par le Comité du salut public. Méchain, quant à lui, subit un terrible accident, est emprisonné en Espagne, puis se terre dans les Pyrénées, hanté par un doute : il se serait trompé dans ses mesures à Barcelone.
Cette traversée du territoire est une traversée de l'Histoire, elle aura duré sept années : le temps que vécut la République. Le 22 juin 1799, l'étalon du mètre est consacré.
Auteur : Né en 1940 à Sétif (Algérie), Denis Guedj est à la fois écrivain, mathématicien, professeur d'histoire et d'épistémologie des sciences (à Paris VIII) et aussi scénariste de cinéma. Écrivain prolifique, il rencontre un succès mondial, traduit en vingt langues, avec Théorème du perroquet (1998) ou les Cheveux de Bérénice (2003). Romancier, auteur de théâtre, comédien mais aussi scénariste, avec ce film de 1978, une fiction documentaire dont le titre, la Vie, t’en as qu’une, résume le fond de sa pensée, de son enseignement. Car Denis Guedj était d’abord un enseignant. Il est mort samedi 24 avril 2010, à l'âge de 69 ans.
Mon avis : (lu en juillet 2010)
La Méridienne est l'autre nom donné au méridien de Paris qui passe par le centre de l'Observatoire de Paris et qui est situé à 2° 20' 14" à l'est de celui de Greenwich. Le méridien de Paris a été défini le 21 juin 1667 par les mathématiciens de l'Académie. Dès lors, le méridien origine pour la France était défini.
Le livre commence le 24 juin 1792, Méchain et Delambre, deux astronomes, quittent Paris, avec pour mission de mesurer le méridien entre Dunkerque et Barcelone afin d'établir une mesure universelle, le mètre soit la dix millionième partie du quart de méridien terrestre.
C'est une grande expédition, une traversée de la France du Nord au Sud mais également une traversée de l'Histoire qui durera sept ans, le temps de la République. Cela commence avec la fin de la monarchie et cela s'achève à l'aube du Consulat, la France est en pleine tourmente révolutionnaire. Pour mesurer cette Méridienne, les astronomes vont utiliser la méthode de triangulation (qui s'appuie sur une règle simple de trigonométrie « si on connaît deux angles et un côté d'un triangle, on connaît tous les côtés ») et mesurer une chaîne de triangles entre Dunkerque et Barcelone. Pour cela, ils vont devoir se hisser sur les sommets les plus élevés, monter en hauts des clochers. Voilà, une histoire politique, économique et scientifique qui est vraiment passionnante.
Extrait : (début du livre)
24 juin 1792. Les Tuileries portaient encore les traces de la marée humaine qui venait de les submerger ; des papiers gras, de la crotte, des morceaux de chiffons, des parterres de fleurs piétinées... Un groupe de jardiniers jaugeait les dégâts, ignorant volontairement le jeune arbre que, trois jours plus tôt, un cortège des faubourgs avait planté là malgré l'opposition des gardes du roi. Un bel arbre, qui durera pour le moins jusqu'à la fin du siècle, si rien – la foudre, la hache, le feu ou les parasites – ne vient interrompre sa croissance. Piquée à même le tronc, s'épanouissait une cocarde tricolore.
Au bout de l'allée, devant un pavillon, deux berlines lourdement chargées, garées cul à cul, étaient sur le départ. Identiques à la couleur près, l'une verte, l'autre cuivrée, elles étaient équipées d'une énorme malle arrière à la forme étrange. Autour d'elles était rassemblé un petit groupe : Lavoisier, chimiste réputé, Condorcet philosophe et député de l'Assemblée législative et le Chevalier Borda, physicien. Il y avait également une femme et ses trois enfants.
Tout ce petit monde faisait ses adieux aux citoyens Pierre Méchain et Jean-Baptiste Delambre qui s'apprêtaient à quitter la capitale.
« Alors Méchain, à vous le Sud, à moi le Nord, lança le second.
- Ainsi en a décidé l'Assemblée, répondit le premier.
- Et moi, je reste à Paris », conclut tristement Lavoisier en tendant à chacun d'eux une petite cassette où reposaient lettres de crédit et numéraire en or et argent. Puis ce fut au tour de Broda de remettre aux voyageurs un portefeuille contenant des laissez-passer et des lettres de recommandation signées du roi.
Thérèse Méchain s'efforçait de cacher son inquiétude ; elle se tenait à l'écart, digne et silencieuse. Pourtant, lorsque Delambre s'approcha pour lui faire ses adieux, elle laissa échapper : « Si seulement vous partiez avec lui ! » Condorcet s'approcha pour la réconforter, lui affirmant que, restant en contact permanent avec les deux voyageurs, il lui communiquerait toutes les nouvelles qu'il recevrait d'eux.
Méchain grimpa dans la berline cuivrée, Delambre dans la verte ; leurs regards se croisèrent, leurs yeux brillèrent. Était-ce l'excitation du départ ou bien les reflets des feux de la Saint-Jean qui, les nuits précédentes, avaient illuminé les hauteurs de Montmartre ? Ils se firent signe de la main.
« A Rodez ! A Rodez ! » lancèrent-ils ensemble.
Les deux berlines s'ébranlèrent en même temps, s'éloignant dans des directions opposées.
Les Cheveux de Bérénice - Denis Guedj
Seuil – janvier 2003 – 320 pages
Points – mai 2004 – 400 pages
Points – avril 2007 – 400 pages
Quatrième de couverture :
Dans le ciel d'Alexandrie, entre la Vierge et le Lion, une nouvelle constellation vient de naître, les Cheveux de Bérénice. Pour que, des lointains champs de bataille, son époux Ptolémée Évergète revienne vivant, la reine Bérénice sacrifie sa chevelure à la déesse Isis. L'Égypte, IIIè siècle avant notre ère, rayonne de tous ses feux : le Phare, la Grande Bibliothèque, Mouséion.
« Combien grande est la Terre ? » demande Évergète à Eratosthène, géographe, cartographe, mathématicien, et directeur de la Grande Bibliothèque.
Commence alors la marche de Béton, le bématiste chargé de mesurer le Nil « pas à pas » depuis Alexandrie jusqu'à la première cataracte. Tandis qu'à la cour, débauche et assassinats gangrènent le pouvoir des nouveaux pharaons grecs. Témoin de cette aventure, le nain Obole, véritable carte humaine, qui porte le Nil tatoué sur son dos.
Les Cheveux de Bérénice est l'histoire de la première mesure de la Terre confronté à la démesure de la tragédie qui secoue la dynastie des Ptolémées.
Auteur : Né en 1940 à Sétif (Algérie), Denis Guedj est à la fois écrivain, mathématicien, professeur d'histoire et d'épistémologie des sciences (à Paris VIII) et aussi scénariste de cinéma. Écrivain prolifique, il rencontre un succès mondial, traduit en vingt langues, avec Théorème du perroquet (1998) ou les Cheveux de Bérénice (2003). Romancier, auteur de théâtre, comédien mais aussi scénariste, avec ce film de 1978, une fiction documentaire dont le titre, la Vie, t’en as qu’une, résume le fond de sa pensée, de son enseignement. Car Denis Guedj était d’abord un enseignant. Il est mort samedi 24 avril 2010, à l'âge de 69 ans.
Mon avis : (lu en 2003 et relu en mai 2010)
Ce livre est à la fois un roman, un livre d'histoire, de mathématique, d'astronomie... Denis Guedj nous entraîne dans l'Égypte de Ptolémée trois siècles avant notre ère.
Le mathématicien Ératosthène, directeur de la Grande Bibliothèque, est chargé par le roi Évergète de mesurer la circonférence de la Terre. La mesure s'effectuera le long d'un méridien : celui d'Alexandrie, le long du Nil entre Syène et Alexandrie.
«Cette mesure effectuée plus de deux siècles avant notre ère attribue à la Terre une circonférence de 39600 kilomètres.
Aujourd'hui, les méthodes les plus précises donnent 40000,07 kilomètres.»
On ne s'ennuie pas un instant, le lecteur découvre la Grande Bibliothèque et le Phare d'Alexandrie, le mathématicien Ératosthène et ses démonstrations très pédagogiques, et son cheminement et ses raisonnements pour faire aboutir son projet de mesure de la Terre. En parallèle le lecteur découvre la cour des Ptolémée et les intrigues autour du pouvoir. Un livre riche en documentation et une épopée passionnante.
Le titre, Les Cheveux de Bérénice, fait allusion à la légende selon laquelle Bérénice, femme d'Évergète, aurait offert sa chevelure à la déesse Isis en échange de la vie de son mari, chevelure disparue de l'autel d'Isis mais retrouvée dans le ciel en tant qu'une constellation. A découvrir !
Extrait : (page 31)
Évergète s'approcha de la carte. Posant son index sur la Diaphragme, il le fit glisser du couchant au levant, égrenant les noms des pays : Celtique, Libye, Italie, Grèce, Macédoine, Thrace. Quand il eut atteint la Perpendiculaire, il s'interrompit. Il venait de traverser la moitié du Monde. Impatient de pour suivre ce voyage virtuel, il continua : Éthiopie, Nubie, Arabie, Médie, Perse, Carmanie, Bactriane, Inde, Cédrosie, Taprobane. Parvenu à l'océan qui mettait un terme aux terres habitées du Levant, son doigt resta en suspens. Lentement, d'un geste large, désignant l'en dehors de la carte : « Et le reste ? Le reste du monde, est-ce beaucoup, est-ce peu en regard de ce que nous connaissons ? » demanda le roi, les yeux brillants d'excitation. S'approchant d'Ératosthène qui, en retrait, respectait le silence de son souverain, il répéta doucement, presque douloureusement, sa demande à cet homme qui lui était si cher et à qui il avait confié l'éducation de son fils aîné, Lagos : « Ce monde habité que tu offres à mon regard et dont pour la première fois je perçois si sûrement les limites, je ne peux m'empêcher de ne le considérer que comme une partie du Monde. Une partie infime ? Une partie considérable ?
- Pour te répondre précisément, il faudrait que je sache combien grande est la Terre.
- Eh bien !
- Tu me demandes, Seigneur, quelle est la grandeur de la Terre ?
- Oui, oui, c'est exactement ce que je te demande, la grandeur de la Terre ENTIERE !
- Tu me demandes, Seigneur, rien de moins que de mesurer la Terre !
- Serait-ce au-delà de tes possibilités ? » demande Évergète d'une voix que la provocation rendit enjouée.
Demande inouïe !
Mesurer le Monde. Non pas le monde habité, mais le monde dans sa totalité. Durant des millénaires, seul avait compté pour chaque homme son territoire. Cette mesure, si je parviens à la mener à bien, signera pour les hommes la sortie de la maison, du village, de la cité. Elle témoignera de la prise en compte de l'unité du monde. Par elle, chaque homme, au-delà de son attachement à sa terre, deviendra habitant de LA Terre. Cette sortie hors de « chez soi », qui se couplera avec une sortie hors de soi, sonnera comme une véritable révolution.
Pris de vertige devant la portée et les conséquences de la tâche qui allait désormais requérir tous ses efforts, Ératosthène frémit. Être le premier homme à prendre la mesure du Monde, quelle gloire ! Mais aussi quelle responsabilité ! Que ses calculs soient erronés, qu'il fasse la Terre plus grande ou plus petite qu'elle n'est, et pendant des siècles les hommes, abusés par son erreur, se feraient une fausse idée du Monde.
Le cercle littéraire des amateurs d'épluchures de patates - de Mary Ann Shaffer, Annie Barrows
NIL – avril 2009 – 396 pages
traduit de l'américain par Aline Azoulay
Présentation de l'éditeur
Janvier 1946. Londres se relève douloureusement des drames de la Seconde Guerre mondiale et Juliet, jeune écrivaine anglaise, est à la recherche du sujet de son prochain roman. Comment pourrait-elle imaginer que la lettre d'un inconnu, un natif de l'île de Guernesey, va le lui fournir ? Au fil de ses échanges avec son nouveau correspondant, Juliet pénètre son monde et celui de ses amis - un monde insoupçonné, délicieusement excentrique. Celui d'un club de lecture créé pendant la guerre pour échapper aux foudres d'une patrouille allemande un soir où, bravant le couvre-feu, ses membres venaient de déguster un cochon grillé (et une tourte aux épluchures de patates...) délices bien évidemment strictement prohibés par l'occupant. Jamais à court d'imagination, le Cercle littéraire des amateurs d'épluchures de patates déborde de charme, de drôlerie, de tendresse, d'humanité Juliet est conquise. Peu à peu, elle élargit sa correspondance avec plusieurs membres du Cercle et même d'autres habitants de Guernesey , découvrant l'histoire de l'île, les goûts (littéraires et autres) de chacun, l'impact de l'Occupation allemande sur leurs vies... Jusqu'au jour où elle comprend qu'elle tient avec le Cercle le sujet de son prochain roman. Alors elle répond à l'invitation chaleureuse de ses nouveaux amis et se rend à Guernesey. Ce qu'elle va trouver là-bas changera sa vie à jamais.
Biographie de l'auteur
Mary Ann Shaffer est née en 1934 en Virginie-Occidentale. C'est lors d'un séjour à Londres, en 1976, qu'elle commence à s'intéresser à Guernesey. Sur un coup de tête, elle prend l'avion pour gagner cette petite île oubliée où elle reste coincée à cause d'un épais brouillard. Elle se plonge alors dans un ouvrage sur Jersey qu'elle dévore : ainsi naît fascination pour les îles anglo-normandes. Des années plus tard, encouragée à écrire un livre par son propre cercle littéraire, Mary Ann Shaffer pense naturellement à Guernesey. Le Cercle littéraire des amateurs d'épluchures de patates est son premier roman, écrit avec sa nièce, Annie Barrows, elle-même auteur de livres pour enfants. Mary Ann Shaffer est malheureusement décédée en février 2008 peu de temps après avoir su que son livre allait être publié et traduit en plusieurs langues.
Mon avis : 5/5 (lu en juillet 2009)
J'attendais avec impatience de lire ce livre qui m'avait été conseillé aussi bien à la bibliothèque que dans les blogs. Je me réservais ce livre pour commencer mes vacances, je n'ai pas été déçu au contraire, c'est pour moi un grand coup de cœur ! Au début, cela m'a rappelé le livre d'Hélène Hanff "84 Charing Cross Road" dans sa forme de correspondance, mais il est très différent. A travers un échange de correspondance entre Juliet, ses amis et surtout les membres du fameux "Cercle des amateurs de littérature et de tourte aux épluchures de patates de Guernesey", j'ai découvert la vie quotidienne des habitants de Guernesey durant l'occupation Allemande. Les personnages sont formidables hauts en couleur et très attachants. A travers les nombreuses anecdotes dont le ton peut être grave ou plein d'humour, on imagine parfaitement l'ambiance de l'île et chacun des îliens. J'ai dévoré ce livre comme une «tourte» mais j'ai regretté ma gourmandise, car j'aurai tellement aimé en avoir plus !
Extrait : (page 216)
De Micah Daniels à Juliet 15 mai 1946
Chère Miss Ashton,
Isola m'a donné votre adresse parce qu'elle est persuadée que vous aimeriez voir ma liste.
Si vous deviez m'emmener à Paris, aujourd'hui, et me déposer dans un bon restaurant français, avec des nappes en dentelle blanche, des bougies aux murs et des couverts en argent tout autour des assiettes, eh bien, je vous dirais que tout cela n'est rien, absolument rien, comparé à ma caisse du Vega.
Au cas où vous ne sauriez pas de quoi il s'agit : le Vega est le premier navire de la Croix-Rouge à avoir accosté à Guernesey. C'était le 27 décembre 1944. Il contenait des vivres pour nous tous. Il y a eu cinq autres bateaux après celui-là. Sans eux, nous n'aurions pas pu nous maintenir en vie jusqu'à la fin de la guerre.
Oui, je dis bien nous maintenir en vie ! Cela faisait des années que nous n'avions pas vu de telles denrées. En dehors des bandits du marché noir, personne n'avait plus le moindre grain de sucre. Nos réserves en farine étaient épuisées depuis le 1er décembre 1944. Les Allemands étaient aussi affamés que nous. Il fallait les voir avec leurs ventres gonflés, sans rien à manger pour se réchauffer le corps.
J'étais si fatigué des patates bouillies et des navets que je n'aurais pas tarder à m'allonger et à me laisser mourir si le Vega n'était pas venu à notre secours. Mr Churchill refusait d'autoriser les navires de la Croix-Rouge à nous apporter des vivres, parce qu'il craignait que les Allemands ne se nourrissent avec. Ça peut vous paraître futé comme plan, d'affamer les méchants ! Mais pas à moi. Tout ce que ça me dit, c'est qu'il se foutait qu'on meure tous avec eux.
Et puis, un jour qu'il était mieux luné, il a décidé qu'on pouvait manger. Et au mois de décembre 1944, il a dit à la Croix-Rouge : « Bon, d'accord, allez-y, nourrissez-les. »
Les cales du Vega contenaient DEUX CAISSES de vivres pour chaque homme, chaque femme et chaque enfant de Guernesey, Miss Ashton ! Et il y avait d'autres trucs aussi : des clous, des graines à semer, des bougies, de l'huile, des allumettes, des vêtements et des chaussures. Et même un peu de layette pour les nouveau-nés.
Il y avait de la farine et du tabac – Moïse a beau nous rabattre les oreilles de sa manne, il n'a jamais rien vu de tel ! Je vais vous dire tout ce qu'il y avait dans mon carton. J'ai tout noté, pour que ça demeure gravé dans ma mémoire.
J'ai donné mes prunes – des prunes, vous imaginez !
A ma mort, je veux léguer tout mon argent à la Croix-rouge. Je leur ai écrit pour les prévenir.
Mais j'aimerais vous dire autre chose. Les Allemands sont ce qu'ils sont, mais il faut rendre à César ce qui lui appartient. Ils ont déchargé toutes les caisses du Vega et n'ont rien gardé pour eux. Leur commandant les avait prévenus : «Ces vivres sont pour les habitants de l'île, pas pour vous. Volez-en ne serait-ce qu'un gramme et je vous ferai fusiller.» Ensuite, il leur a donné une cuillère à chacun : ils avaient le droit de ramasser et de manger tout ce qui tomberait des paquets percés.
Ils faisaient vraiment peine à voir, ces soldats. Ils volaient dans nos jardins, frappaient à nos portes pour demander des restes. Une fois, j'ai vu l'un d'eux attraper un chat, l'envoyer la tête la première contre un mur, le découper et le cacher dans sa veste. Je l'ai suivi jusqu'à un champ, où il a dépecé l'animal, puis l'a fait bouillir dans sa gamelle et l'a mangé.
Un bien triste spectacle. Ça m'a soulevé le cœur, et en même temps je me suis dit : « Voilà le IIIème Reich d'Hitler qui dîne dehors. » J'ai honte de l'avouer à présent, mais j'ai été pris d'un fou rire à me tenir les côtes.
C'est tout ce que j'avais à dire. Je vous souhaite bonne chance pour votre livre.
Sincèrement, Micah Daniels.
Les Naufragés de l'île Tromelin – Irène Frain
Michel Lafon – février 2009 – 371 pages
Grand prix du roman historique en 2009
Présentation de l'éditeur
Un minuscule bloc perdu dans l'océan Indien. Cerné par les déferlantes, harcelé par les ouragans. C'est là qu'échouent, en 1761, les rescapés du naufrage de L'Utile, un navire français qui transportait une cargaison clandestine d'esclaves. Les Blancs de l'équipage et les Noirs de la cale vont devoir cohabiter, trouver de l'eau, de la nourriture, de quoi faire un feu, survivre. Ensemble, ils construisent un bateau pour s'enfuir. Faute de place, on n'embarque pas les esclaves, mais on jure solennellement de revenir les chercher. Quinze ans plus tard, on retrouvera huit survivants : sept femmes et un bébé. Que s'est-il passé sur l'île ? À quel point cette histoire a-t-elle ébranlé les consciences ? Ému et révolté par ce drame, Condorcet entreprendra son combat pour l'abolition de l'esclavage.
Auteur : Née à Lorient en 1950, femme de lettres française, Irène Frain, de son vrai nom Irène Frain le Pohon, se consacre totalement à l'écriture après la publication de son roman 'Le Nabab’ pour lequel elle obtient le prix des Maisons de la presse en 1982. L'auteur, qui se dit fortement marquée par son origine bretonne, est agrégée de lettres classiques en 1972. Le début de sa carrière est marqué par son rôle de professeur qu'elle tient au Lycée et à la Sorbonne. En 1976, la jeune femme publie son premier ouvrage 'Quand les Bretons peuplaient les mers'. S'ensuit 'Les Contes du cheval bleu les jours de grand vent'. Très vite, elle se rend compte qu'elle est faite pour écrire. Son roman 'Le Nabab', écrit d'après la vie de René Madec, la lance pleinement dans l'écriture. Forte de cette reconnaissance, elle publie une vingtaine d'ouvrages dont 'Secret de famille' qui reçoit le prix RTL Grand public 1989. On notera aussi sa collaboration avec l'illustrateur André Juillard pour son roman 'La Vallée des hommes perdus'. Dotée d'une carrière bien remplie, Irène Frain est aujourd'hui une femme de lettres reconnue par le monde de la littérature.
Mon avis : (lu en juillet 2009)
C'est la rencontre d'Irène Frain avec Max Guérout, capitaine de vaisseau passionné d'archéologie, qui est à l'origine de ce livre. Il nous raconte une histoire vraie, bouleversante et passionnante : des faits réels peu glorieux pour les autorités de l'époque.
L’Utile, navire de la Compagnie française des Indes orientales est parti de Bayonne le 17 novembre 1760 avec un équipages de 143 hommes. Après un arrêt à Madagascar pour charger une cargaison clandestine de 160 esclaves, le navire fait naufrage sur l’île de Sable (île de Tromelin), le 31 juillet 1761. Il y aura 122 rescapés dans l'équipage ainsi que 88 esclaves, mais durant les premiers jours 28 esclaves vont mourir de soif. Les hommes creuseront un puits et trouveront de l'eau saumâtre mais potable. Avec les restes de l'épave de L'Utile, les marins vont construire un bateau avec l'aide des esclaves. Mais le bateau de trente-deux pieds de long par douze pieds de large ne pourra embarquer que les français et le 27 septembre, ils quittent l'île en abandonnant les malgaches avec 3 mois de vivres et la promesse de revenir les chercher. Mais le gouverneur de l'Ile de France (île Maurice actuelle) refuse d'honorer la promesse faite. Et ce n'est que quinze ans plus tard, le 29 novembre 1776 que La Dauphine et le capitaine Tromelin, récupéra les survivants : sept femmes et un bébé de huit mois.
J’ai trouvé formidable le travail de nombreuses personnes (archivistes, archéologues) qui se sont plongés dans les archives pour retrouver ce qu’il s’est vraiment passé en 1761. Le récit fait revivre avec une incroyable vérité les personnages de cette aventure humaine extraordinaire. Nous revivons avec eux toutes les péripéties et après avoir fermé ce livre je n'ai eu qu'une envie, c'est vouloir partager ce morceau d'histoire de France avec mes proches ou d'autres lecteurs. A lire absolument !
L'île de Tromelin, autrefois appelée île de Sable, est l'une des terres les plus isolées de l'océan Indien. Elle est située à 450 km à l'est de Madagascar et à environ 560 km au nord de Maurice. Elle est longue d'environ 1700 m et large d'environ 700 m et d'une superficie à peine supérieure à 1 km². Elle est entourée de fonds de l'ordre de 4000 mètres. Ses coordonnées sont : 15°53' de latitude Sud et 54°31' de longitude Est. L'île Tromelin fait partie des Terres Australes et Antarctiques Françaises (TAAF).
Depuis plus de quarante ans, l'île abrite une importante station météorologique, les météorologistes, qui y travaillent, sont les seules personnes qui vivent sur l'île. Il y a une piste d'atterrissage pour avions. La flore y est assez pauvre. Classée réserve naturelle, Tromelin abrite des tortues de mer et et de nombreux oiseaux de mer : Frégates, fous masqués, fous à pied rouge, huîtriers, parfois sternes et paille-en-queue.
Pour plus de détails sur le livre, voir le site suivant : http://www.lesnaufragesdeliletromelin.fr
Vidéo sur la mission archéologique : "L'Utile 1761 esclaves oubliés" réalisée par l’Inrap (Institut National de recherches archéologiques préventives)
vestiges du campement des esclaves oubliés
Extrait : (début du livre)
L’île est le sommet émergé d’un vieux volcan sous-marin. Il s’est éteint il y a des millénaires. La lave a bouché l’orifice de sa cheminée. Comme il se trouvait à fleur d’eau, les coraux l’on vite colonisé.
Sous les vagues, les pentes du volcan sont très raides. A deux encablures de l’île, l’abîme commence. Et les grandes houles, les courants sans fin. Il faut vraiment jouer de malchance pour se retrouver sur ce bloc de corail cerné par les déferlantes. Ou n’avoir peur de rien.
Pour pouvoir en repartir, il faudra aussi compter sur l’inconscience. A moins de chercher son salut dans l’énergie du désespoir. Nul ne s’est jamais installé ici. L’île est sans mémoire. Seuls les ouragans laissent leur trace dans les sables. Le reste va vite se perdre dans le vent, le tonnerre des lames qui, sans relâche, harcèlent les récifs. Nuit et jour, la mer bat. Elle flanche rarement. Même lorsqu’il fait beau. Quand elle consent à se calmer, c’est presque toujours dans les heures qui précèdent un cyclone. Ensuite, elle se déchaîne comme jamais, jette à l’assaut de l’île des vagues géantes qui l’engloutissent aux neuf dixièmes. Elle ne reflue qu’une fois l’ouragan passé. Pour recommencer comme avant. Même pouls méchant, têtu, mêmes lames qui frappent, fracassent et brisent, déferlent er redéferlent, frappent encore, roulent et cassent, broient, éparpillent, émiettent, s’acharnent contre cette minuscule plaque de corail perdue au cœur de l’océan.
Mais l’île est ultra dure, elle tient. La seule victoire que la mer ait jamais remportée sur elle, c’est d’empêcher les madrépores de former un rempart assez haut pour casser l’élan des déferlantes. Ici, pas de couronne de coraux, pas de lagon à l’abri des houles accourues du pôle Sud, longues et féroces – depuis l’Antarctique, elles n’ont trouvé aucun obstacle. A quelques mètres du rivage, rien qu’un long récif frangeant que la mer mouline peu à peu en sable. Mais là encore, rien à voir avec la fine et douce farine des atolls des mers du Sud. Celui-ci est grenu, grumeleux, râpeux.