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A propos de livres...
2 septembre 2010

Le Délégué – Didier Desbrugères

Livre lu dans le cadre du partenariat Blog-o-Book et  Gaïa

le_d_l_gu_ Gaïa – août 2010 – 304 pages

Quatrième de couverture :
Dans une vaste République jamais nommée, un homme s'apprête à prendre ses fonctions de Délégué. Un voyage en train de dix jours, en troisième classe, doit l'emmener jusqu'au bout de la steppe, au bourg de Lurna. Alors le Délégué Josef Strauber pourra servir dignement l'Administration, remplir la mission qu'on lui a confiée et jouir des avantages de son rang.
Mais le cours des choses ne s'accordera pas à ses aspirations profondes. Lurna, village autrefois brûlé, lui réserve un non-accueil. Josef S. est un homme seul. Porté à la réflexion, la lecture et la contemplation, il n'est pas effrayé par la rudesse de la vie qui l'attend ou la compagnie fruste d'une gouvernante flanquée de son petit garçon. Lorsque surgit le doute, ou que pointe la résignation, quelle flamme vacillera la première ? Celle de sa droiture ou celle de sa raison ?

Auteur : Didier Desbrugères est né en 1960 et vit en Bretagne. Esprit éclectique, il s’est essayé à la peinture et à la sculpture sans jamais rompre ni avec la lecture ni avec l’écriture, pôles magné­tiques de son existence. Il a tenu une galerie d’art tout en menant une carrière professionnelle dans l’aéronautique et en poursuivant son apprentissage de l’écriture. Le Délégué est son premier roman.

Mon avis : (lu en août 2010)
J'ai eu beaucoup de mal à lire ce livre. Cette lecture a été laborieuse en partie du fait que l'écriture du livre est très dense, le premier chapitre s'achève à la page 124, le second chapitre à la page 240... L'écriture est très littéraire, il y a beaucoup de détails et de descriptions.

Cela commence par un très long voyage en train. Josef Strauber (ou S.) doit aller prendre ses nouvelles fonctions de Délégué dans la ville lointaine de Lurna. Il voyage en troisième classe, c'est bruyant et plein d'odeurs et ils rencontre de nombreux personnages. Lors d'un arrêt pour se ravitailler dans une toute petite gare Yépan qui n'est même pas mentionnée sur sa carte, S. va rencontrer Britov qui va lui faire comprendre que son futur rôle ne sera pas aussi facile qu'il l'imagine.

La deuxième partie se passe à Luna, S. découvre qu'il n'est pas vraiment attendu car cela fait plus d'une génération qu'il n'y a plus de Délégué dans cette région éloignée. On lui donne la maison de l'ancien Délégué qui se trouve être en mauvais état et à l'écart du village actuel. Mona et son fils André âgé de sept ans, sont là pour tenir la maison. S. se retrouve donc isolé, cherchant à définir son rôle de Délégué. Il semble subir sa vie.

J'ai du mal à définir ce livre, est-ce un conte ? Une fable ? Ce voyage représente-t-il notre chemin de la vie avec ses rêves, ses désirs, ses joies mais aussi la réalité, les renoncements et les malheurs.

J'avoue ne pas avoir aimé ce livre, j'ai été vraiment hermétique à ce premier roman. J'ai pas su comprendre qu'elles étaient les intentions de l'auteur. Dommage.

Merci cependant à Blog-O-Book et aux Éditions Gaïa pour m'avoir permis de découvrir ce livre.

Extrait : (début du livre)
La lumière tombe des fenêtres à meneaux. Rongée par l'humidité comme une fresque d'église, l'immense carte de la République habille les quatre murs de la salle des Délégués, enjambe portes et fenêtres, et empiète par endroits sur les corniches du plafond. Elle date. Sans doute la doit-on à un artiste de second ordre. Elle est peinte à la détrempe. Des vignettes aux couleurs crayeuses, aux prétentions réalistes, distribuent villes, fleuves, montagnes et plaines. L'étendue du territoire étourdit et sa diversité étonne. Édifices coiffés de coupoles ou de bulbes, flèches gothiques, portes monumentales parées de bas-reliefs de céramique, figures monolithiques arrachées à la roche. Tous les mythes, toutes les croyances cohabitent. La République expose sa domination universelle.
Lettre de nomination en main, Josef Strauber parcourt des yeux l'interminable itinéraire pour rejoindre son poste ; encore la Providence l'a-t-elle favorisé, car le bourg de Lurna n'est pas le plus éloigné de la capitale. Loin s'en faut. Néanmoins, selon son estimation, plusieurs semaines de voyage l'attendent. De fait, l'étendue de la République est telle qu'il est inconcevable de penser réunir, ne serait-ce qu'une fois par décennie, l'ensemble des Délégués. Pas même par zone, ni par région. Si bien que la salle vaste et dénudée ne sert jamais. C'est pour cette même raison que les autorités gouvernementales ont inlassablement favorisé l'amélioration des moyens de communication. Le service des agents de liaison, assimilé à un corps militaire, appartient à l'élite de la République. Il est envié des nations voisines. L'esprit d'innovation technique l'anime. Grâce à lui, les Délégués sont reliés aux organes centraux.

Livre 3/7 pour le Challenge du 1% littéraire 1pourcent2010

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26 août 2010

Une affaire conjugale – Éliette Abécassis

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« Ce livre a été chroniqué dans le cadre d’un partenariat avec le site Chroniquesdelarentreelitteraire.com
et dans le cadre de l’organisation du Grand Prix Littéraire du Web Cultura. »

une_affaire_conjugale Albin Michel – août 20110 – 336 pages

Présentation de l'éditeur :
Entre Agathe, parolière de chansons, et Jérôme, dirigeant d'une start-up, c'était le grand amour. Huit ans de mariage et deux jumeaux plus tard, tout a changé : elle écrit de moins en moins, happée par l'éducation des enfants ; il s'absente de plus en plus et la délaisse pour ses maîtresses. Bafouée, rabaissée, Agathe s'interroge : aura-t-elle le courage de demander le divorce ? Commence alors un chassé-croisé entre les époux qui se déchirent jusque devant les enfants, déterminés l'un et l'autre à en obtenir la garde, et, accessoirement, à triompher de l'autre. Agathe aura-t-elle gain de cause ? Pourra-t-elle surmonter la dévastation de son monde et de ses idéaux ? Aura-t-elle droit à une deuxième chance ?
Juste, drôle, émouvant et cinglant, ce roman délibérément ancré dans le monde contemporain, dévoile les dessous du divorce.

Auteur : Normalienne, agrégée de philo, Eliette Abécassis alterne textes intimistes (Mon père, Un heureux événement), thrillers (la trilogie de Qumran), sagas (Sépharade) et essais (Petite métaphysique du meurtre, Le Livre des Passeurs, Le Corset invisible). Elle collabore par ailleurs régulièrement à des journaux (Le Monde des Religions, Le Figaro littéraire, Elle) et travaille pour le cinéma (Kadosh, bientôt Un heureux événement).

Mon avis : (lu en août 2010)
En quatrième de couverture, la phrase qui résume le livre "Pour bien faire les choses, il faudrait commencer par divorcer. Et se marier ensuite".
C’est une histoire de couple assez courante de nos jours. Après huit ans de mariage et la naissance de jumeaux, Agathe découvre que son mari Jérôme ne l’aime plus. Elle commence par le surveiller en fouillant son portable, son ordinateur, ses mails. Convaincue qu’il la trompe, une seule solution : le divorce.
Agathe résume ainsi : « Telle était l’histoire. Si je devais en faire un pitch, je dirais ceci : j’ai rencontré un homme. Je suis tombée amoureuse de lui, nous nous sommes mariés, nous avons eu des enfants. Aujourd’hui, cet homme est devenu mon pire ennemi. »
Nous suivons donc pas à pas le processus du divorce entre ce couple de quarantenaires, c’est un vrai parcours du combattant. On découvre alors le vrai visage de son conjoint, les masques tombent et il faut désormais lutter pour se protéger.
Il y a l’annonce aux enfants, Sacha et Max ont six ans et ils ne comprennent bien ce qui arrive, ils se croient coupables. «J'aurais préféré ne pas savoir. Maintenant je sais. Et la tristesse est dans mon cœur. Et je ne pourrai plus jamais l'enlever de mon cœur.»
Il faut réunir des témoignages auprès des proches, des amis, des connaissances.
Il faut continuer à vivre dans le même appartement tout en faisant la guerre. « La tension était à son comble. Je sortais tous les matins pour accompagner les enfants à l'école avec ma valise. La nuit, je me couchais avec mon ordinateur, mon téléphone, mon agenda, tous les documents nécessaires pour le divorce, ceux que je lui avais pris et les miens, qu'il n'avait pas pu me prendre. Je dormais en chien de fusil, au beau milieu de mes affaires. »
Et la préparation du dossier qui est longue et coûteuse… « L’équipe du divorce était maintenant au complet. J’étais devenue à moi seule une PME qui employait une dizaine de personnes : un avocat, un notaire, un avoué, un expert-comptable, un détective, un coach de divorce et une psychiatre, sans compter les assistants et les secrétaires. J’avais vidé mon compte en banque, mais j’avais quand même fini par réunir toutes les pièces nécessaires à mon dossier. »

Avec ironie, sans aucune concession et avec férocité, Eliette Abécassis décortique et analyse les sentiments et les trahisons des deux protagonistes.
Le livre se lit facilement, j’ai suivi cette prise d’armes entre Agathe et Jérôme avec à la fois sourire, compassion et parfois colère. Il y a un même un certain suspens quand à la conclusion de l’histoire.
Un petit bémol sur le personnage de Jérôme qui est souvent décrit comme « un vrai salaud ».

Extrait : (début du livre)
Il n'y a pas de vol entre époux.
La serrure toute simple, ancienne, ne devait pas poser de problème. Elle avait été lubrifiée, sans doute pour pouvoir être fermée à clef facilement. Avec un rayon de roue, pris sur un vieux vélo, je fis rebondir le crochet, en appliquant une pression régulière sur les goupilles. Je me concentrais sur le geste et non sur l'ouverture. Mes mains étaient correctement positionnées : certaines articulations immobiles, d'autres en mouvement. Pendant que le majeur et l'annulaire fournissaient un point d'appui, l'index manipulait le rayon. Il fallait visualiser la serrure pour en venir à bout. À force de tâtonnements, je commençais à m'en faire une image précise. Je remarquai qu'une seule goupille bloquait l'ouverture des deux plaques. Grâce au crochet, je forçai sur la serrure en poussant sur la plaque du bas.
Tout en maintenant la pression, je consultai ma montre : il ne devait pas revenir avant deux heures. Même s'il ne m'avait jamais fait la surprise de rentrer plus tôt, je redoutais une arrivée intempestive. Les oreilles dressées comme un chien pour entendre la porte d'entrée s'ouvrir, j'étais prête à bondir à la minute même où il surgirait. La serrure semblait de plus en plus réceptive. Je la sentis prête, cette fois, à céder. Je tentais de rester calme. Encore un tout petit effort. Enfin, j'entendis le déclic. La porte s'ouvrit.

Le bureau était dans un désordre indescriptible. Il y régnait une odeur de cendre froide, d’alcool, de haschisch, et un air de fin du monde. Un bric-à-brac encombrait la pièce : ordinateurs de plusieurs générations, scanner, imprimante, chaussettes, caleçons, livres, photos, séries de câbles et de fils, vieux emballages. Partout, des cadavres de bouteilles de bière, des mégots de cigarettes. Je consultai à nouveau ma montre : dix minutes avaient passé. Avec mon Iphone, je pris une photographie de l’ensemble de la pièce, puis d’une série de détails. J’avais préparé un sac en plastique pour collecter les pièces à conviction. A l’aide d’une spatule, j’y fis tomber les miettes de haschisch qui parsemaient son bureau. Puis je m’installai sur son siège, devant l’ordinateur. L’écran affichait la page d’accueil de son profil sur Facebook. Je me mis au travail. Tandis que je cliquais sur la fenêtre des messages reçus, je branchai un disque dur externe pour faire une copie de ses fichiers. L’ordinateur indiqua que l’opération prendrait une heure quarante-sept minutes. Je sentis mes pupilles se dilater et de nouveau la sueur sur mes paumes : j’avais à peine le temps. Je me hâtai. J’ouvris ses tiroirs les uns après les autres, photographiai les papiers administratifs, les relevés bancaires, les feuilles de salaire et les factures. Puis je revins devant l’écran de l’ordinateur pour consulter ses messages.
C’est à cet instant, je crois, que ma vie bascula.

Livre 2/7 pour le Challenge du 1% littéraire 1pourcent2010

26 août 2010

Desert Pearl Hotel - Pierre Emmanuel Scherrer

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« Ce livre a été chroniqué dans le cadre d’un partenariat avec le site Chroniquesdelarentreelitteraire.com
et dans le cadre de l’organisation du Grand Prix Littéraire du Web Cultura. »

desert_pearl_hotel La Table Ronde – août 2010 – 246 pages

Présentation de l'éditeur :
Pour Pandora Petersen, il n’y aura pas de Noël en famille. Doris, sa mère, vient d’être enterrée. Ellroy, son père et Tom, son frère, ont regagné l’Idaho. Dans son appartement de Los Angeles, transformé en camp retranché, la jeune femme rumine son chagrin jusqu’à ce qu’elle reçoive une lettre de condoléances glissée dans une gerbe de lys — les fleurs préférées de Doris. Son auteur, un certain Gil Sanders, conseille à Pandora de prendre contact avec Rebecca, une amie de sa mère, qui aurait, laisse-t-il entendre, des révélations à lui faire.
Pandora ne supporte pas de se voir dicter sa conduite. Mais elle ne comprend pas non plus pourquoi cette intime de Doris n’est pas venue à l’enterrement, ne s’est même pas manifestée. Elle finit donc par appeler Rebecca Hamilton, qui l’invite à passer quelques jours chez elle, à Santa Fe.
Au volant de sa Honda délabrée, la jeune femme entame un étrange voyage en forme de jeu de piste. Elle progresse entre grands espaces et sentiment de perte, chaos urbain et souvenirs d’enfance. Messages sybillins, rencontres tour à tour inquiétantes et cocasses ponctuent sa route. De motels miteux en snacks déserts, de serveurs taciturnes en pompistes tatoués, d’embouteillages urbains en tempêtes de neige, elle se rapproche, sans le savoir, d’un secret bien gardé.

Auteur : Pierre-Emmanuel Scherrer est né en 1976. Il vit à Toulouse, où il exerce la profession d'avocat. Co-fondateur en 2003 d’Anabase, il part aux États-Unis en 2007 avec son groupe de musique pop pour une traversée d’est en ouest, de New-York à San Francisco. Des chansons naissent de ce voyage, puis Desert Pearl Hotel, son premier roman.

Mon avis : (lu en juillet 2010)
Pandora vivait seule avec sa mère Doris Petersen à Los Angeles. « Une fois par an, on partait avec la Dodge pour retrouver Ellroy. Ellroy, c'est mon père. Il habite dans l'Idaho. On passait Noël en famille. »

Fin décembre 2008, Pandora Petersen vient de perdre sa mère Doris. Elle est déboussolée par ce deuil, elle commence par rester plusieurs semaines cloîtrée dans son appartement à noyer son chagrin dans du Whiskey Irlandais en évoquant les souvenirs du passé avec Doris.

Un jour, Pandora reçoit un bouquet de lys qui sont les fleurs préférées de Doris avec une lettre de condoléances signé d'un inconnu, Gil Sanders. Celui lui suggère de rencontrer Rebecca Hamilton, une amie de sa mère. Pandora se demande pourquoi cette amie n'est même pas venue à l'enterrement et elle décide de lui téléphoner. Celle-ci l'invite à venir passer quelques jours chez elle. Pandora décide donc de partir vers le Nouveau-Mexique dans sa vieille voiture. Elle ressent que ce voyage seule va l'aider à s'apaiser. « Face aux quatre voies de l'interstate, face au ciel qui s'étale comme un écran vide, il n'y a qu'à lire pour comprendre ce qui déconne dans votre vie. Sentir les heures s'empiler dans sa chair, les lombaires, les tendons du pied sur l'accélérateur, tout ça libère des idées. Il n'y a qu'à lâcher les chiens de la pensée. Fatalement ça vous fait revisiter le passé, et vous vous mettez à imaginer l'avenir avec simplicité. Avaler des miles rend libre. »

Elle commence un long voyage sur les routes américaines de Los Angeles à Santa Fe en passant par l'État de l'Idaho. Comme dans un voyage initiatique, aux gré des rencontres et de ses souvenirs, Pandora va au devant d'un secret que sa mère lui a toujours caché.

Un roman qui se lit facilement, l'auteur utilise des phrases courtes et simples qui décrivent de façon précise les actions et le ressenti de Pandora tout au long de ce voyage qui nous fait traverser les États-Unis. Pandora est un personnage touchant et Pierre-Emmanuel Scherrer sait parfaitement faire monter le suspense jusqu'à la conclusion du livre. Une très belle découverte.

La bande originale du roman est disponible sur : www.desertpearlhotel.com

Livre 1/7 pour le Challenge du 1% littéraire 1pourcent2010

25 août 2010

Les trois vies de Babe Ozouf – Didier Decoin

Livre lu dans le cadre du logo_challenge_ABC- (23/26)

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Seuil – avril 1983 – 376 pages

Points - mai 1984 – 376 pages

Points – juin 2001 – 409 pages

Quatrième de couverture
Là-haut, tout au bout de la France, c'est la Hague, terre de granits et de landes fauves, qui poignarde l'une des mers les plus dangereuses du monde.
Babe Ozouf, Catherine et Carole sont filles de la Hague. Leur saga - qui s'étend sur trois générations - est scandée par un même geste, un acte que l'amour inspire: faire naître la lumière et le feu dans la nuit. Par trois fois, ce geste simple et fatal provoquera un naufrage: naufrage de navires et naufrage de trois destins.
Emmenée par deux gendarmes, Babe Ozouf va vivre une mise à l'épreuve qui sera aussi une délivrance. Sa fille Caherine, mariée à quinze ans, connaîtra l'exil, de l'autre côté de l'océan. Et Carole, la fille de Catherine, sera irrésistiblement rappelée vers cette falaise, lieu de rencontre avec la nuit et le brouillard.
Trois hommes traverseront la vie de ces jeunes femmes: Michael Bernstein, le pianiste; le peintre Louis Asfrid et le mystérieux Recruteur qui hante les quais de Liverpool. Ils apprendront que l'amour est aussi ce calme effrayant qui précède et annonce les tempêtes.
« La Hague, dit l'auteur, ne m'a pas inspiré ce roman : elle me l'a imposé. Je l'ai écrit dans la solitude, le tulmute et la passion, à l'image du pays étrange qui l'a fait surgir. »

Auteur : Né le 13 mars 194, fils du cinéaste Henry Decoin, Didier Decoin commence sa carrière comme journaliste. Il passe par des quotidiens comme Le Figaro et France-Soir. Il participe aussi à la création du magazine VSD. Il touche aussi à la radio en intervenant sur Europe 1. Mais le journaliste est passionné d'écriture et entame une carrière de romancier. A tout juste 20 ans, il publie son premier livre intitulé 'Le Procès à l'amour'. Ecrivant plus d'un vingtaine d'ouvrages, il est récompensé en remportant le Prix Goncourt pour 'John l'enfer' en 1977. Membre fondateur de la Société civile des auteurs multimédia – SCAM – il assure aussi la présidence de la Société des gens de lettres de France. En 1995, il devient le Secrétaire général de l'Académie Goncourt. Attiré par le cinéma et la télévision, il devient scénariste pour la fiction de France 2. On lui doit des séries comme 'Les Misérables', 'Le Comte de Monte-Cristo', 'Balzac' et 'Napoléon'. Fort d'un parcours hors du commun, Didier Decoin est aujourd'hui considéré comme un membre précieux de la culture française.

Mon avis : (lu en août 2010)
Voici l'histoire de trois femmes de la Hague, qui s'étend sur trois générations : il y a Babe Ozouf, Catherine et Carole. Chacune d'elles par amour fera naître un feu dans la nuit, un feu qui aura des conséquences malheureuses. Babe, par amour pour le pianiste Michael Berstein, allumera un grand feu qui causera le naufrage d'un navire. Catherine va illuminer sa maison et son jardin de toutes les bougies et lanternes pour se rassurer en l'absence de son mari le peintre Louis Asfrid. Elle sera alors obligée de fuir. Enfin, Carole qui allumera un grand feu pour couler le croiseur lourd Admiral von Severloh.
Toute la magie du récit vient du lieu où se déroule ce roman, la Hague avec ses landes de bruyères sauvages, ses rochers de granit, sa mer froide, ses embruns salés, son brouillard. Les descriptions sont superbes et le lecteur est envoûté autant par ce lieu que par ces trois histoires liées.

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Extrait : (début du livre)
Barbe Ouzouf aimait trop la beauté pour supporter longtemps le prénom qu’on lui avait infligé : à huit ans, elle en fit sauter le r et on la connut désormais sous le nom de Babe. Habitant une région proche des îles anglo-normandes, la Hague, certains prononçaient Babe à l’anglaise, comme un diminutif de baby. Cela lui alla plutôt bien jusqu’à la puberté, ensuite elle prit de la poitrine, des hanches, ses cheveux roux se mirent à pousser au point de lui battre les fesses, elle devint femme, et les gens cessèrent de dire Babe à l’anglaise pour, au contraire, insister sur le a, et même le multiplier comme si Babe s’écrivait Baaabe.
A six heures tous les soirs, elle se baignait sur la grève d’Ecalgrain. En 1893, il n’existait aucun aménagement, juste un sentier pour descendre de la falaise jusqu’au premier lit de galets. En avril, les ajoncs étiraient leurs pousses en travers du passage, et plus d’une fois Babe déchira sa robe à leurs épines, et souvent son jupon, ses cuisses à travers l’étoffe noire.

Elle agit aujourd’hui comme d’habitude, malgré les deux gendarmes à cheval qui l’attendent, qui la surveillent depuis la route de la falaise. L’un d’eux, Jean Le Nackeis, a déjà déroulé la corde rugueuse qui servira tout à l’heure à lier ensemble les poignets de Babe.

Elle n’a jeté qu’un coup d’œil distrait sur cette entrave.
Sur une roche elle pose sa coiffe, sa longue écharpe et ses souliers, en recommandant aux gendarmes de bien veiller à ce que le vent ne les enlève pas ; peu lui importe de retrouver ou non ses affaires quand elle remontera de la grève, parce qu’alors tout lui sera indifférent, mais dans le souci qu’elle manifeste de ne pas abandonner ces quelques accessoires au vent il y a une façon de promesse : « Je reviendrai me livrer, vous avez eu raison de me faire confiance. »

23 août 2010

Un palais dans les dunes – Annie Degroote

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Presses de la Cité – septembre 2008 – 363 pages

Pocket – mars 2010 – 405 pages

Quatrième de couverture :
Sur la Côte d'Opale, durant les Années folles, une modeste fille de pêcheurs est prête à tout pour changer de condition. C'est au Royal Picardy, considéré comme le plus bel hôtel du monde, au Touquet-Paris-Plage, que son destin va basculer... La jeune Laurette vit au port d'Etaples, où ses parents sont simples pêcheurs. A quinze ans, affublée d'un physique ingrat, elle est bien décidée à changer le cours de son existence et à côtoyer le beau monde. Non loin, la superbe station du Touquet, en pleine extension, attire le gotha mondial : souverains britanniques, maharajas et vedettes de l'époque. Grâce à une rencontre providentielle, Laurette entre comme femme de chambre au prestigieux Royal Picardy... Son rêve impossible est-il enfin à portée de main ?
Deux Nord s'entrecroisent ici : l'un, tranquille et travailleur, au cœur d'un port de pêche ; l'autre, théâtre splendide des plaisirs futiles. A chaque page de ce superbe roman vibre l'attachement profond d'Annie Degroote pour cette terre de caractère.

Auteur : Originaire des Flandres, Annie Degroote est devenue un auteur et une personnalité du Nord de premier plan. Elle a publié de nombreux romans aux Presses de la Cité: La Kermesse du diable, Le Cœur en Flandre, L'Oubliée de Salperzvick, Les Filles du Houtland, Le Moulin de la Dérobade, Les Silences du maître drapier, La Splendeur des Vaneyck, Les Amants de la petite reine sont autant d'hommages à l'histoire et aux traditions des Flandres, et L'Etrangère de Saint-Pétersbourg, une évasion dans une autre terre du Nord.

 

Mon avis : (lu en août 2010)
Le Touquet, dans les années 1920, c’est le rendez-vous obligé de la haute société.
Laurette est fille de pêcheurs du village voisin d’Etaples, elle rêve de vivre un conte fée et de rencontrer son prince charmant. C’est l’écrivain anglais George Walter Aston qu’elle voit comme son prince charmant. Il va la sauver de la noyade, puis l’aider à trouver un emploi dans le nouvel hôtel le Royal Picardy « le plus bel hôtel du monde »…
Ce livre nous raconte l’histoire du Touquet Paris-Plage entre les deux guerres. C’est la confrontation entre deux mondes : celui des pêcheurs, travailleurs, simples et dignes et le monde fortuné des plaisirs futiles et de la démesure.
Un livre qui se lit facilement qui rend très bien l’ambiance du Touquet Paris-Plage dans ses années folles. J’ai passé un très bon moment en lisant les aventures de Laurette.

Extrait : (page 15)
Elle était décidée. La fille des voisins au regard sournois s’était moquée d’elle :
« Tu n’as qu’à essayer ! Tu verras bien ! »
Eh bien, oui, elle allait essayer.
Souvent, elle s’imaginait transformée par une bonne et belle fée, telle la marraine de Cendrillon ou celle de Peau d’Ane, du livre offert par sa propre marraine qui, elle, n’avait rien d’une fée.
Elle était à présent bien installée, coincée contre l’épave ancrée dans le sable. Avec la marée montante, soit elle serait vite engloutie et on ne l’appellerait plus « Laurette la laideronnette », soit, comme dans les contes, un prince charmant surgirait, par miracle, et la sauverait. Et la voisine en serait verte de rage.
De nombreux badauds se risquaient jusqu’ici en promenade, pour contempler ce qu’il restait du vapeur, échoué depuis dix ans, en 1915, au retour de Sydney.
Allait-on la sauver ? Elle attendit.
Des nuages s’amoncelaient. Le ciel s’assombrit. Le temps tournait à l’orage. Elle n’avait pas prévu cela. L’eau devint menaçante, la panique s’empara d’elle. Que faisait-elle ici ? Sa mère lui avait bien interdit… Des promeneurs, il en passait, oui, mais à basse mer. Pas à la marée montante, et encore moins par ce temps. Et si certains flânaient dans les parages, ils n’allaient pas s’éterniser et devaient, en cet instant précis, faire demi-tour…

Non, elle ne voulait pas mourir. Mais l’eau froide avait serré la corde et plus elle essayait de la relâcher, moins elle y arrivait. Elle grelotta. Personne à l’horizon. D’ailleurs, on ne voyait plus l’horizon, avec la tempête qui s’annonçait. Personne ne se hasarderait par un temps pareil. Idiote ! Elle n’était qu’une pauvre idiote de quinze ans. Elle allait se noyer. Bêtement, sans l’avoir vraiment voulu. Elle, l’insatiable Laurette, qui avait de trop grands désirs pour sa condition, une soif de vivre comme ces riches. Laurette, la fille de pêcheurs, le vilain petit canard. Elle devait étouffer son orgueil, rabaisser ses prétentions, c’est ce que lui disait sa mère. Qui lui reprochait d’avoir aussi la tête dans les nuages. Dans les rêves. Comment peut-on aspirer à un destin quand on a ce physique ? Petite, fluette, le visage enlaidi par une dentition affreuse et proéminente, un nez busqué et long comme le pauvre Pinocchio. Et elle venait de désobéir, elle aussi.

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21 août 2010

Les Trois médecins – Martin Winckler

Livre lu dans le cadre du logo_challenge_ABC- (22/26)

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POL – août 2004 – 523 pages

Folio – octobre 2006 – 741 pages

Quatrième de couverture :
Un médecin, ça n'a pas toujours été médecin.
En 1974 – vingt ans avant La Maladie de Sachs - Bruno Sachs entre à la faculté de médecine de Tourmens. Il se lie d’amitié avec André Solal, Basile Bloom et Christophe Gray, trois étudiants voués à la médecine générale. Il ne sait pas qu’au cours des sept années suivantes, ils vont apprendre leur métier mais aussi côtoyer les militants de l’IVG et de la contraception, contester l’enseignement de mandarins hospitaliers plus préoccupés de pouvoir que de soin, et militer pour une médecine plus humaine.
Pour devenir médecins – pour devenir des hommes –, Bruno et ses trois camarades devront vivre plusieurs histoires à la fois : l’histoire d’une formation ; l’histoire d’un grand amour ; l’histoire d’un engagement moral et politique ; l’histoire d’une profonde amitié. Des histoires comiques et tragiques. Des histoires où l’on vit pleinement et où, parfois, l’on meurt.
Comme dans un roman d’aventures.

Auteur : Martin Winckler, de son vrai nom Marc Zaffran, est né en 1955 à Alger. Après son adolescence à Pithiviers (Loiret) et une année à Bloomington (Minnesota), il fait des études de médecine à Tours entre 1973 et 1982. Ses premiers textes paraissent dans Nouvelles Nouvelles et la revue Prescrire au milieu des années 80 et son premier roman, La Vacation (1989). Entre La Maladie de Sachs (1998, adapté au cinéma en 1999 par Michel Deville) et Les Trois Médecins (2004), il a publié une trentaine de romans et d'essais, consacrés au soin et aux arts populaires. En 2001 et 2002, il est le premier écrivain français à prépublier en feuilleton interactif, sur le site de P.O.L, deux grands livres autobiographiques: Légendes et Plumes d'Ange. Médecin à temps partiel et écrivain à temps plein, il anime en outre le Winckler's Webzine, un site personnel très fréquenté (www.martinwinckler.com).

 

Mon avis : (lu en août 2010)
J'avais adoré "La Maladie de Sachs" et j'ai pris vraiment beaucoup de plaisir à retrouver Bruno pendant ses études de médecine. Bruno Sachs est fils de médecin, il va suivre la trace de son père et va faire ses études de médecine à Tourmens. Nous sommes en 1973, et il rencontre André Solal , Basile Bloom et Christophe Gray, trois étudiants en médecine qui deviennent ses amis et ses frères. Par vocation et par amour des autres, ils vont apprendre leur métier, travailler dur, ils veulent une médecine plus juste et plus humaine, ils vont également côtoyer les militants de l'IVG,et de la contraception mais aussi contester la toute puissance des médecins hospitaliers et la toute puissance des labos pharmaceutiques. C'est l'histoire d'une amitié vrai et solide entre quatre hommes avec un grand cœur et qui ont choisi de consacrer leur vie à soigner.

Ce livre est à la fois instructif et divertissant, il se dégage de chacune des pages une formidable humanité. J'ai dévoré ce livre, il est passionnant !

Extrait : (page 19)
Il nous regarde avec ses yeux mauvais, et se met à nous cracher dessus. Il a commencé en disant que nous étions des veaux, des bons à rien, et comme les voix s'élevaient il a réagi immédiatement en criant qu'il lui suffisait de ne pas faire cours pendant un mois pour qu'on soit tous dans la merde, et bien malins ceux qui sauraient ce qu'il nous balancerait au concours ! Alors, évidemment, tout le monde s'est tu, à commencer par les redoublants. Il fulmine, il a l'écume à la bouche, on dirait qu'il va lui sortir de feu par les yeux. Il lève le bras, tend l'index vers nous et vomit : La plupart d'entre vous ne sont que de petits crétins.

Extrait : (page 138)
Et la colère m'emplit quand je pense aux femmes croisées depuis que je suis née, aux femmes qui ont porté grossesse sur grossesse, en espérant que, de temps à autre, une fausse couche les délivrerait ; aux femmes mortes en couches parce que le médecin n'est pas arrivé à temps ; aux femmes déchirées, mutilées par un bébé trop gros sorti trop vite ; aux femmes mortes d'hémorragie parce qu'on ne les a pas surveillées ; aux femmes stériles que l'on a répudiées ; aux femmes à qui on arrache leurs enfants ; aux femmes violées contraintes de mettre au monde l'enfant de leur agresseur ; aux femmes soumises à l'inceste de leur père ou de leur mère ; aux femmes à qui on a refusé une contraception et qui sont mortes d'une grossesse - la grossesse de trop... ; aux femmes aliénées que l'on stérilise 'pour leur bien '; aux femmes que l'on contraint à porter un enfant qu'elles abandonneront à la naissance en le donnant à des étrangers ; aux femmes atteintes de cancer que l'on ampute sans hésiter ; aux femmes qui saignent et à qui un homme fait 'sauter l'utérus 'parce que c'est plus simple [... ].

Extrait : (page 506)
Comment leur dire que soigner, ça ne s'apprend pas le stylo sur la page mais les yeux sur les lèvres et les doigts sur la peau et la bouche à l'oreille et mon corps sur ton corps.
Comment leur dire que soigner, c'est comme vivre, ça n'attend pas qu'on ait appris, ça se fait tout de suite
Comment leur dire que soigner s'apprend avec les autres - tous les autres : ceux qu'on admire, ceux qu'on déteste, ceux qui nous font vomir et ceux qui nous attirent, celles et ceux qui nous font peur et nous maltraitent, ceux qui nous entourent et ceux qui nous sont hostiles, nos amis nos ennemis, nos frères nos sœurs, ceux qui sont assis là autour de nous et que nous ne connaissons pas, et qui ont tous quelque chose à nous dire si seulement nous voulions tendre un peu l'oreille, si seulement nous voulions bien les toucher du doigt.

Livre lu dans le cadre du logo_challenge_ABC- (22/26)

18 août 2010

Tango Massaï – Maxence Fermine

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Albin-Michel – février 2005 – 266 pages

Livre de Poche – juin 2007 – 189 pages

Quatrième de couverture :
Tabora, porte des grands lacs africains, cité sublime et inquiétante qui vit de l'or et des épices. Une armée de rebelles vient d'investir la ville. À sa tête, un homme blanc juché sur un cheval bai. Il se nomme Tango Massaï. Il est venu réclamer la reddition du Sultan et proclamer le droit de vivre libre. Bleu, pourpre, noir : ce sont les trois couleurs d'une mystérieuse pierre précieuse qui l'ont conduit jusqu'ici. Et tandis que la ville s'embrase, au loin résonnent les paroles d'un sorcier : "
Un jour, un serpent de fer accompagné d'une nuée de papillons blancs pénétrera jusqu'aux terres intérieures des Massaï. Et ce jour-là, ce sera la guerre. Il faudra nous préparer à combattre et à vivre des jours de malheur. Avant que ne vienne le lion qui enserrera dans ses griffes le serpent de fer et saura nous délivrer de l'emprise des papillons blancs... "

Auteur : Maxence Fermine est né le 17 mars 1968. Il a vécu à Paris avant de partir travailler dans un bureau d'études en Afrique. Aujourd'hui, il est installé en Haute-Savoie avec sa femme et ses deux filles. Parmi ses nombreux romans, citons l'Apiculteur, Neige, Opium et Amazone.

Mon avis : (lu en août 2010)
Un roman totalement dépaysant, nous nous retrouvons en Afrique à Tabora ville de la région de Tanganyika (au nord-ouest de la Tanzanie). Nous sommes à l’époque coloniale, sous domination britannique. Tabora est située à un carrefour des routes caravanières, c’est un centre de commerce. Tabora est dirigé par le Sultan Sayid al Saada. Avec son armée de rebelle le mystérieux Tango Massaï vient renverser le Sultan et prendre sa place avant de créer un Conseil de sages. Dans la deuxième partie, nous apprendrons qui est Tango Massaï et ce qu’il veut faire de Tabora.
Je n’ai pas été conquise par ce livre. Il se lit très rapidement, cela ressemble à un conte ou une légende africaine. Il est question du colonialisme et ses abus. Je suis déçue par rapport aux autres livres lus de Maxence Fermine et que j’avais beaucoup aimés.

Extrait : (début du livre)
L’armée rebelle arriva à Tabora un soir après la pluie. Elle investit la ville africaine par la porte Nord, en longeant la ligne de chemin de fer qui reliait le centre du pays à la ville de Mwanza, située sur les rives du lac Victoria.
C’était en avril, à l’époque des fortes précipitations que l’on devait à la mousson en provenance de la mer, à plus de huit cents kilomètres à l’est, et dont les effets se percevaient parfois jusqu’à l’intérieur des terres désertiques, soudainement noyées sous des déluges aussi violents que passagers. Le sol, craquelé par des mois de sécheresse – il n’avait pas plu depuis presque un an – n’avait pas eu le temps d’absorber l’eau du ciel et s’était changé en un océan de boue couleur d’argile, un océan formant des marigots où les oiseaux venaient s’ébattre joyeusement.
Trois jours plus tôt, la colonne de guerriers avait quitté les plaines du Serengeti et les étendues herbeuses du nord du pays pour rejoindre la route de Tabora. Elle avait marché vers le sud sans se soucier de la rigueur des éléments, traversant les champs gorgés d’eau, les chemins forestiers devenus d’infâmes bourbiers et les ruisseaux changés en torrents. Elle avait avancé dans un paysage d’une beauté sauvage, désert, aussi tranquille qu’une mer étale, rougie par le soleil, lavée par la pluie et séchée par les vents.

Dans la région des grands lacs, il y avait eu un envol de flamants roses, comme pour saluer son départ. Puis des troupeaux de toutes sortes avaient croisé sa route, des gnous, des antilopes, des impalas, des koudous, des girafes, des lions et des guépards. Enfin, après la plaine sauvage, était venue la présence des hommes.
A l’approche de chaque village, les habitants s’enfuyaient ou allaient se terrer à l’intérieur de leurs cases comme des animaux devant l’imminence d’un danger, laissant à la merci des mercenaires leur maigre patrimoine. Pourtant, l’armée n’avait commis aucun pillage. A peine s’était-elle permis de puiser de l’eau à quelques puits, ou d’exiger un sac de blé ou de mil lorsque cela s’était révélé nécessaire. Mais nulle violence, nul combat n’avait été engagé. L’armée rebelle se voulait, pour l’heure, discrète et pacifique.

Déjà lu du même auteur :

Neige Neige L_apiculteur L'Apiculteur Opium Opium

le_tombeau_d__toiles Le tombeau d'étoiles 

les_carnets_de_guerre_de_Victorien_Mars Les carnets de guerre de Victorien Mars

8 août 2010

Les gens - Philippe Labro

Livre lu dans le cadre du partenariat Blog-o-Book et  Folio

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Gallimard – janvier 2009 – 451 pages

Folio – juin 2010 – 413 pages

Quatrième de couverture : Trois destins parallèles s'entrecroisent, trois vies dont le seul point commun est le manque d'amour : Maria, une jeune orpheline californienne d'une beauté rare, Caroline, une Parisienne trentenaire, enfin Marcus Marcus, célébrité de la télévision, mégalo et parano. Autour d'eux, vont graviter toutes sortes de gens : la femme de l'ambassadeur américain en France, une intraitable executive woman, un détective privé, une coach sans scrupule, des loups et des agneaux... Philippe Labro nous offre, de San Francisco jusqu'aux cercles de pouvoir parisien, une ronde étourdissante. Pour dresser de manière drôle, critique et profondément attachante, un portrait captivant de nos contemporains.

Auteur : Philippe Labro, écrivain, cinéaste, journaliste, a publié aux éditions Gallimard Un Américain peu tranquille (1960), Des feux mal éteints (1967), Des bateaux dans la nuit (1982). En 1986, L'étudiant étranger lui vaut le prix Interallié. En1988, Un été dans l'Ouest obtient le prix Gutenberg des lecteurs. Après Le petit garçon en 1991, Philippe Labro publie Quinze ans en 1993, puis, en 1994, Un début à Paris, qui complète le cycle de ses cinq romans d'apprentissage. En 1996 paraît La traversée, un témoignage sur une expérience de mort approchée, suivi en 1997 par Rendez-vous au Colorado. En 1999, Philippe Labro fait parler Manuella. En 2002 paraît Je connais gins de toutes sortes, recueil de portraits revus et corrigés, en 2003, un nouveau témoignage, Tomber sept fois, se relever huit, traitant de la dépression, en 2006, Franz et Clara, un surprenant roman d'amour, et en 2009 Les gens.

 

Mon avis : (lu en août 2010)
Philippe nous raconte trois histoires, celles de trois personnages qui souffrent chacun de solitude affective. Il y a Maria, orpheline et jeune fille au pair dans une riche famille de San Francisco après s'être enfuie de sa famille d'adoption. Il y a Marcus Marcus, animateur vedette de la télévision, à la fois mystérieux. Dans son émission, "Vous qui aimez la gloire", il interviewe les célébrités, les mettant à nu en osant leurs poser toutes questions, même les plus « vachardes ». Et il y a Caroline, assistante de production cinéma, elle a été assez brutalement congédiée par son amant, elle devenue coach auprès de la nouvelle ambassadrice des États-Unis. Ces trois destins vont se croiser, puis se rencontrer.

Un livre qui pourrait être un film de Claude Lelouch... mais qui n'est pas totalement réussi... Le livre est un peu long à démarrer, la psychologie des personnages est très bien analysée, c'est bien écrit, mais je n'ai pas été convaincue, malgré cela je l'ai lu avec plaisir.

Merci à Blog-O-Book et Folio pour ce partenariat, qui m'a fait passé un moment agréable.

Extrait : (page 380)
Les gens, ils s'en moquaient bien, en effet, des minuscules convulsions au sein d'une bulle professionnelle.

Il existe des centaines de milliers d'univers, les myriades de segments les plus divers d'une société dont le degré de civilisation se mesure au nombre de contradictions qu'elle comporte. Ces univers sont séparés, inconnus les uns aux autres, indifférents les uns aux autres. Mais quelque chose les unit, le seul lien commun qui tisse cette carte inimaginable, cette toile arachnéenne aussi bien nationale que mondiale et que domine la peur, comme l'espoir. Tous sont soudés par la puissance de ce qui a révolutionné les mœurs : l'image, et sa transmission immédiate.
Les gens, c'était tout le monde et c'était n'importe qui. Souvent, ils ne savaient plus très bien où ils en étaient, les gens. On leur expliquait que la banquise arctique fondait, que les ours polaires allaient mourir, que des inondations géantes feraient disparaître des îles, puis des villes et peut-être des continents, et que le poumon d'oxygène du monde continuerait d'être déforesté, que l'asphyxie les gagnerait tous un jour, et sinon eux, du moins leurs enfants ou leurs petits-enfants, ou leurs arrière-petits-enfants. Et pourtant, ils continuaient de faire des enfants, les gens. Ils continuaient d'aimer, construire, inventer, créer, soigner, rechercher, enseigner, lutter.

6 août 2010

Les vieilles – Pascale Gautier

les_vieilles Éditions Joëlle Losfeld – janvier 2010 – 193 pages

Quatrième de couverture :
Il y en a une qui prie, une autre qui est en prison, une autre encore qui parle à son chat, et certaines qui regardent les voisines de haut en buvant leur thé infect. Leurs maris ont tous disparu. Elles sont vieilles, certes, mais savent qu'elles pourraient bien rester en vie une ou deux décennies encore, dans ce pays où il n'est plus rare de devenir centenaire. Alors elles passent leur temps chez te coiffeur, à boire et à jouer au Scrabble, à essayer de comprendre comment fonctionne un téléphone, à commenter les faits divers, à critiquer leur progéniture qui ne vient pas assez, à s'offusquer de l'évolution des mœurs... Elles savent que le monde bouge, et qu'elles devraient changer leurs habitudes, mais comment faire, à leur âge? Aussi, l'arrivée de Nicole, une " jeunesse " qui entame tout juste sa retraite, et l'annonce d'une catastrophe imminente, vont perturber leur quotidien. Ce nouveau roman de Pascale Gautier est irrésistible par sa fraîcheur, sa volonté de prendre avec humour le contre-pied de certaines idées reçues sur la vieillesse. On y retrouve avec délectation la causticité et la liberté de ton qui caractérisent ses précédents textes.

Auteur : Pascale Gautier est directrice littéraire aux Editions Buchet-Chastel. Ses romans ont été reconnus comme des textes singuliers et littérairement exigeants. Parmi eux Trois grains de beauté, qui a reçu le Grand Prix SGDL du roman, et Fol accès de gaîté.

Mon avis : (lu en août 2010)
Cette histoire se passe dans la ville du Trou, là où il fait beau 365 jours par an, la plupart des habitants sont des personnes âgées. Il y a Madame Rousse, elle est sourde et elle pousse le son de sa télé si fort qu'elle dérange tout l’immeuble, Mme Daspet qui ne pense qu’à s’envoyer en l’air, Madame Rouby qui a peur des voleurs, Madame Chiffe qui est dépendante de Dieu et qui aime également déclamer des poèmes, la vieille mère de Paul qui est toujours désagréable avec sa famille et il y a également Nicole la jeunette de 60 ans. Elle était postière à Moisy, une ville du Nord, elle a passé sa vie de célibataire à s'occuper de ses vieux parents. Le seul homme, ou presque, c’est Pierre Martin, il a 90 ans et se prépare pour le marathon de Londres, il est « auréolé de gloire dans son short bleu ». Un livre distrayant et drôle qui veut nous faire réfléchir à la place des personnes âgées dans notre société.
La dernière partie du livre m’a surprise, je n’ai pas compris pourquoi l’histoire frisait la science fiction… avec l’annonce de l’arrivée de l’astéroïde « Bonvent » pour le dimanche suivant sur la terre. Les différents personnages ont des réactions si peu crédibles que je n’ai pas aimé la conclusion de ce livre.

Extrait : (début du livre)
La télé est à fond. L’immeuble entier en profite. C’est Mme Rousse qui est sourde comme un pot. Elle est gentille à part ça, Mme Rousse. Elle est vieille depuis si longtemps ! Tous les mardis, elle va au salon de coiffure « chez Josée ». Un salon minuscule, à l’abri des intempéries et des métamorphoses. Josée aux cheveux rouges coiffe avec application une kyrielle d’octogénaires qui viennent chez elle parce qu’elles se sentent en confiance et parce qu’elles sont toujours venues là. Mme Rouby expliquait ça l’autre jour pendant que Josée lui faisait sa permanente. Quand on est toujours allée chez quelqu’un, on a du mal à changer, c’est bête, mais c’est comme ça. Mme Rousse, donc, a les cheveux en casque permanenté bleu-violet. Aujourd’hui est le jour des amies. Elle a acheté une tarte aux pommes à la pâtisserie Miale, sorti les assiettes à dessert en porcelaine de Limoges et préparé le thé. Elle ne sait pas qui viendra. C’est chaque fois la surprise. La salle à manger de Mme Rousse est de toute beauté. Des rideaux roses tricotés main ornent les trois fenêtres qui donnent sur la rue Jean-Eymard. Une tapisserie bleu azur décorée d’oiseaux blancs qui volent dans tous les sens couvre les murs. Un lustre façon bronze qui doit peser trois tonnes reste bizarrement accroché au plafond et menace la table en bois massif qui est pile dessous. Mme Rousse est une amie des arts. Chaque année, le 15 août, des artistes locaux à la retraite exposent leurs œuvres à la salle des fêtes. Chaque année, Mme Rousse achète une toile et la fixe sur la tapisserie aux oiseaux blancs. Cela fait un mélange de couleurs idéal pour vous donner la migraine. La télé est sise sur le petit meuble qui jouxte la table en bois massif. Impossible de la rater. C’est ce qui agace Mme Rouby. On ne s’entend pas chez Mme Rousse, il y a toujours le poste qui braille. Mme Rousse n’en a cure, le bruit la berce. Enfant, elle vivait au bord d’une nationale où des hordes de camions, nuit et jour sans jamais s’arrêter, bombaient comme des malades. Elle se souvient encore de ce huit tonnes qui avait heurté la maison des voisins, pété le mur et foncé dans la cuisine et les cabinets avec un bruit de ferraille extraordinaire. Elle avait été éblouie par cette fanfare sauvage. La télé, à son âge, c’est pour le plaisir. Même Mitsou pense comme elle. D’ailleurs, il est passé où, celui-là ? Elle s’est installée sur sa chaise et attend. Les publicités s’en donnent à cœur joie. On dirait des cigales qui, dans le bois, sur un arbre, font entendre leur voix charmante. Mme Rousse entend leur doux bourdonnement et ne s’étonne même plus. « Sauvez un cochon, mangez un chat ! » Pourquoi pas, finalement. La pendule à coucou que ses enfants lui ont offerte pour Noël sonne avec virulence. Sur l’écran, des Chinois castagnent des Tibétains. Elle en voit un qui saute à bas de son char et fonce droit sur l’ennemi. Prompt, il lance sa javeline : elle fend et le casque et l’os ; la cervelle est toute fricassée. Le Chinois bondit et achève le quidam ; il lui coupe les mains, lui tranche le col, et l’envoie rouler, tout comme un billot, à travers la foule. C’est dégoûtant. Puis elle voit un Tibétain féroce foncer sur le Chinois qui se prend pour un héros. De sa dague, il le frappe à l’épaule, lui tranche le bras droit. Le bras tombe à terre, sanglant, et dans ses yeux du Chinois entre en maître la mort rouge. Ça sonne. Et comme elle n’entend rien. Ça entre. Voici Mme Rouby, essoufflée, qui marche à petits pas. Puis qui se fige devant la télé. D’autres Chinois torturent à petits feux d’autres Tibétains. C’est horrible et c’est en direct.
« Madame Rousse, je ne peux pas boire mon thé devant ça !
- Vous êtes trop sensible, madame Rouby. »
Heureusement, les publicités reprennent et s’en donnent à cœur joie. On dirait des cigales qui, dans le bois, sur un arbre, font entendre leur voix charmante. Mme Rouby s’assied. Mme Rousse prépare le thé.

3 août 2010

Il n'y a pas beaucoup d'étoiles ce soir – Sylvie Testud

il_n_y_a_pas_beaucoup  Fayard – août 2003 – 225 pages

Quatrième de couverture :
Énervée. Affamée. Exténuée. Terrorisée. En retard. Frigorifiée. Les journées, pour Sylvie Testud, sont une succession de moments intenses. Elle nous emmène à une interview au Plaza, sur un tournage en japonais, acheter du plâtre au BHV, faire l'amour devant vingt personnes pendant huit heures, essayer des robes chez Chanel pour les Césars, tout en refusant d'embrasser un serpent ou de sauter par la fenêtre... Le quotidien d'une actrice, en somme. Sauf que Sylvie Testud fait montre d'un regard ultra-lucide. Comment entre-t-on dans un rôle ? Comment apprend-on à l'aimer, comment le quitte-t-on, comment dire non, comment dire oui ? Où est la limite entre la vie qu'on vit et la vie qu'on joue ? Et si notre existence était un interminable casting ?
Décalée, d'une voix qui ne ressemble à aucune autre, drôle et sans concession, Sylvie Testud éteint les feux trompeurs de la rampe, et l'on découvre qu'Il n'y a pas beaucoup d'étoiles ce soir

Auteur : Sylvie Testud est comédienne. Révélée dans Karnaval, elle a obtenu en 2001 le César du meilleur espoir féminin pour Les Blessures assassines. Ses derniers films : Stupeur et tremblements d'après le roman d'Amélie Nothomb, Filles uniques et Vivre me tue.

Mon avis : (lu en août 2010)
Un livre plein d'humour agréable et rapide à lire. Sylvie Testud nous raconte l'envers du décor de la vie d'une actrice au théâtre ou lors des tournages. Nous découvrons ses débuts, son quotidien, ses peurs, ses joies... Son style est vivant, plein de fraîcheur... J'ai passé un très bon moment en compagnie de ce livre.

Extrait : (page 129)
Je suis nominée aux Césars !
C’est ça qu’elle hurle ? Parce que mon agent hurle dans le téléphone.
Ben oui. Je suis nominée aux Césars en tant que meilleur espoir.
- C’est français ça comme mot « nominée » ? Je me demande.
Ce sont les directeurs de castings qui proposent des filles et des garçons comme espoir et après les gens du cinéma doivent voter qui est le meilleur et la meilleure espoir de l’année. Celui et celle qui remporteront le plus de voix seront immédiatement émus meilleur espoir.
Tous les acteurs et actrices vont aux Césars. La cérémonie est retransmise en direct à la télévision ! Sur Canal+ en clair.
- Mon grand-père pourra suivre la cérémonie si c’est en clair.
Oh le pauvre, il va pleurer… Et ma grand-mère aussi elle va pleurer…
Et ma mère ? Et mes sœurs ? Et… Tous, ils vont pleurer c’est certain.
- Il faut que tu trouves une robe. Me dit mon agent. Où veux-tu aller ?
Saint-Laurent ? Chanel ? Versace ? Armani ? Lolita Lempicka ?
- Oh putain ! Mais elle a pété les plombs mon agent ! Je pense.
Je n’ai pas le fric pour m’offrir une robe chez Saint-Laurent moi !
- Ne t’inquiète pas. Elle rit. Ils te prêtent une robe pour la cérémonie.
Quoi ? Je vais me pointer chez Chanel ou Saint-Laurent et ils vont me prêter une robe ? Elle est complètement à la masse mon agent. Je commence à me dire.
- Il y a des gens qui s’occupent de la presse. Ils te prêtent une robe « couture » pour des occasions comme les Césars, Cannes…
- Ah bon ? L’attachée de presse va me prêter une robe ? C’est possible ça ? Je demande.
- Je vais téléphoner et tu auras des rendez-vous. Tu pourras choisir la robe que tu veux porter pour la cérémonie. J’entends dans le téléphone.
« Je pourrai choisir la robe que je veux porter pour la cérémonie des Césars »… Mon agent est un être très puissant. Sur un simple coup de fil, elle obtient que « je peux choisir la robe que je veux porter pour la cérémonie des Césars ».
Je n’en reviens pas…
Mais… Ça veut dire alors que toutes ces grandes actrices toujours bien habillées, dans des robes fourreau, dans des robes dos nu, dans des robes « couture » quoi, elles ne les achètent pas ? Les robes ne sont pas à elles ? On leur prête des robes pour la cérémonie ?

Un miroir se brise. Une fleur se fane. Un oiseau est abattu en plein vol, un mythe se casse.
Les actrices françaises portent des robes prêtées ?
Mais c’est fou ça !
- Réfléchis. Rappelle-moi. Je te prendrai les rendez-vous. Continue mon agent puissant.
Je raccroche le téléphone. Les bras m’en tombent. On prête des robes aux actrices.
Les actrices en France n’ont pas de robe de « cérémonie des Césars ».

Déjà lu du même auteur : Gamines Gamines

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