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A propos de livres...
10 avril 2010

Victoria et les Staveney – Doris Lessing

victoria_et_les_staveney Flammarion – mars 2010 – 150 pages

traduit de l'anglais Philippe Giraudon

Présentation de l'éditeur

Victoria n'a jamais oublié sa rencontre, à l'âge de neuf ans, avec une riche famille blanche, les Staveney. Ce souvenir entêtant la poussera, des années plus tard, à entamer une liaison avec leur fils, Thomas. De cette histoire naîtra Mary, petite fille à la peau claire et au sourire radieux. En adoration devant l'enfant, les Staveney proposent de l'accueillir chez eux de plus en plus souvent. Victoria, toute à la réalisation de la chance que représenterait une telle éducation pour sa fille, n'imagine pas quelles conséquences aura sa décision. La grande dame des lettres anglaises revient sur ses thèmes de prédilection : le racisme, l'hypocrisie, l'ambition. Un regard sans concession et d'une incroyable modernité sur notre époque.

Auteur : Doris Lessing est née en Perse en 1919 et a vécu une grande partie de son enfance au Zimbabwe. Devenue célèbre dès son premier livre, Vaincue par la brousse (1950), elle est aussitôt apparue comme un écrivain engagé aux idées libérales. Prix Nobel de Littérature en 2007, elle est l'auteur d'une quarantaine d'ouvrages, parmi lesquels le célèbre Carnet d'or (Prix Médicis étranger), mais aussi Mémoires d'une survivante. Flammarion a notamment publié Le Rêve le plus doux (2004), Les Grand-mères (2005), Un enfant de l'amour (2007), et Alfred et Emily (2008).

Mon avis : (lu en avril 2010)

C'est le premier livre que je lis de cette auteur, Prix Nobel 2007. Ce livre est très court, je l'ai lu en moins d'une heure. C'est une histoire d'amour, de racisme et d'hypocrisie.

A l'âge de 9 ans, Victoria, une orpheline à la peau noire, rencontre les Staveney, une riche famille blanche et passe une nuit dans leur maison aussi belle que dans un conte de fée. Dix ans plus tard, elle retrouve Thomas Staveney son camarade de classe de l'époque et fils de la famille. Ils eurent une liaison le temps d'un été dont naîtra Mary. Victoria commence par la cacher avant de la présenter aux Staveney lorsqu'elle sera âgée de 6 ans, elle espère que grâce à cela Mary pourra bénéficier d'une meilleure éducation. Mais le bon accueil des Staveney pour Mary n'est pas sans conséquences...

Même si les Staveney sont d'un milieu avec des idées larges, il y a encore un grand fossé entre les idées et la réalité d'accepter les différences. J'ai trouvé très sympa cette histoire, mais j'ai malgré tout eu une impression d inachevé.

J'ai appris qu'à l'origine ce texte est une nouvelle extraite d'un recueil de quatre nouvelles "The grandmothers" (The Grandmothers , Victoria and the Staveneys, The Reason for It, A Love Child), paru en 2003. Deux autres des nouvelles sont déjà parues en français :

les_grand_m_res_ Les grand-mères (2005) et l_enfant_de_l_amour_ Un enfant de l'amour (2007)

Extrait : (début du livre)

La cour de récréation était déjà plongée dans une ombre glacée. En arrivant au portail, les gens regardaient dans la direction d'où s'élevaient les voix de deux groupes d'enfants. Il était malaisé de distinguer qui était qui. Une sorte d'instinct permettait aux enfants du groupe le plus important de reconnaître leurs proches parmi les arrivants, et ils se précipitaient vers eux, seuls ou par paires, afin qu'on les ramène à la maison. Deux enfants restaient isolés au milieu du terrain, lequel était entouré de hauts murs surmontés de tessons de verre. Ils faisaient beaucoup de bruit. Un petit garçon se démenait, distribuait des coups de pied à l'aveuglette, en hurlant :

- Il a oublié. J'avais bien dit à maman qu'il oublierait !

Une fillette essayait de le calmer et de le consoler. Lui était grand pour son âge, tandis qu'elle était fluette, la tête hérissée de nattes raides dont les rubans roses pendaient, amollis par l'humidité froide. Elle était plus vieille que lui, mais non plus grande. Malgré tout, forte de ses deux années supplémentaires, elle le réprimandait :

- Allons, Thomas, ne fais pas ça. Inutile de brailler, ils vont venir.

Mais lui refusait de se calmer.

- Laisse-moi, laisse-moi ! Je ne veux pas ! Il a oublié !

Plusieurs personnes arrivèrent en même temps au portail. Parmi elles, un grand garçon blond d'une douzaine d'années, qui se mit à scruter les ténèbres. Il aperçut Thomas, son frère, qu'il venait chercher, tandis que d'autres parents tendaient déjà les bras et s'avançaient. Il y eut un instant de tumulte et de désordre. Edward, le grand blond, attrapa par la main le petit Thomas, lequel continua de se débattre en se plaignant :

- Tu m'as oublié, oui, tu m'as oublié !

Edward observa les autres enfants qui disparaissaient dans la rue, puis il se retourna et s'éloigna avec Thomas.

Il faisait froid. Victoria n'était pas assez vêtue. Elle frissonnait, à présent que l'enfant récalcitrant ne la contraignait plus à s'activer. Les bras serrés autour de son corps, elle se mit à pleurer en silence. Le concierge de l'école émergea de l'obscurité, rabattit la grille du portail et la verrouilla. Lui non plus ne vit pas la fillette. Avec son pantalon marron foncé et sa veste noire, elle n'était qu'une tache plus sombre dans l'obscurité tourmentée de la cour où le vent se levait.

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9 avril 2010

Le Club Jane Austen - Karen Joy Fowler

Livre lu dans le cadre du partenariat Blog-o-Book - La Table Ronde

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La Table Ronde – octobre 2005 – 335 pages

Folio – avril 2007 – 384 pages

traduit de l’anglais (États-Unis) par Sylvie Doizelet

Présentation de l'éditeur :

Un de ces livres rares qui nous rappelle ce qu'est le bonheur de lire. " New York Times Book Review.

" La conversation de ce club est tour à tour enjouée, intelligente et anodine. Mais ce n'est pas tout : les protagonistes dégustent des desserts hautes calories, sirotent des margaritas et s'évadent dans leurs rêveries. Comme Jane Austen, Fowler est un esprit subversif et une fine observatrice des relations humaines. " Publisher's Weekly.

" Cinq femmes et un homme se réunissent régulièrement pour discuter de l'œuvre de l'une des plus grandes romancières anglaises. Ça se passe en Californie, au début du XXIe siècle, et ce sont des gens normaux, ni heureux, ni malheureux chacun avec une blessure et tous hantés par l'amour. A eux seuls ils forment le Club Jane Austen éternel et avec eux Karen Joy Fowler compose un roman qui est si réussi, si délicat, si plein d'esprit que les admirateurs d'Emma et d'Orgueil et préjugés vont défaillir de bonheur. " Washington Post.

Auteur : Auteur américaine, née en 1950 d'un père psychologue et d'une mère professeur des écoles, Karen Joy Fowler est bercée par une littérature aussi riche que variée (de 'l'Iliade' d'Homer à 'Winnie l'ourson'). En 1968, elle rejoint l'université de Berkeley ou elle va développer un intérêt particulier pour les grandes causes. Anti-guerre activiste, c'est lors d'une manifestation qu'elle rencontre son mari. Lors de son parcours universitaire, elle découvre les cultures de l'Inde et de l'Asie. Car découvrir le fonctionnement du monde par les hommes la fascine. Après avoir eu deux enfants, lors de son trentième anniversaire, elle décide de devenir écrivain.

Mon avis : (lu en avril 2010)

J’ai souvent entendu parler en bien de Jane Austen mais je n’ai jamais eu l’occasion de la lire… En acceptant de lire ce livre, je me suis d’abord dit qu’il faudrait peut-être que je lise au moins un livre de cette auteur… mais par lequel commencer ? Finalement faute de temps, j’ai commencé ce livre sans avoir lu du Jane Austen, j’ai quand même lu sur internet l’article qui lui est consacrée sur wikipédia.

Le Club comprend six membres qui se réunissent une fois par mois pour discuter autour des livres de Jane Austen. Celle qui est à l'initiative de ce Club, c'est Jocelyn californienne et célibataire de cinquante ans, elle a invité sa plus vieille amie Sylvia et la fille de celle-ci Allegra. Il y a aussi Bernadette, Pruni une professeur de français et Grigg le seul homme du groupe.

Chaque chapitre présente un des six romans de Jane Austen et également un des membres du Club. Il est question de sentiments, de relations, d'amour et le fait de n'avoir jamais lu Jane Austen ne m'a vraiment pas gêné. Avant de commencer le livre, j'avais lu les résumés des œuvres de Jane Austen que l'on trouve à la fin du livre dans Le guide du lecteur avec également les opinions de son entourage à la parution de ses romans et les questionnaires des membres du Club Jane Austen. J'ai pris beaucoup de plaisir à lire ce livre et il m’aura donné envie de découvrir vraiment Jane Austen et enfin de lire son œuvre !

Merci à Blog-o-Book et aux éditions de la Table ronde de m'avoir permis de découvrir ce livre,

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J'ai appris qu'il existe également un film en DVD datant de 2007 tiré de ce livre, réalisé par Robin Swicord avec Maria Bello, Amy Brenneman, Jimmy Smits, Emily Blunt, Kevin Zegers, Hugh Dancy, Maggie Grace, Marc Blucas, Kathy Baker.

Extrait : Prologue

Chacun de nous possède sa propre Jane Austen.

Celle de Jocelyn a écrit de merveilleux romans sur l'amour et l'art de faire la cour, mais ne s'est jamais mariée. C'est elle qui a eu l'idée du club, et c'est elle qui a choisi les membres. Elle a plus d'idées en une seule matinée que le reste d'entre nous en une semaine, et plus d'énergie aussi. Il est essentiel de réintroduire Jane Austen dans notre vie d'une manière régulière, a dit Jocelyn, nous regardant l'une après l'autre. Nous avons soupçonné un plan secret, mais qui oserait se servir de Jane à des fins malhonnêtes ?

La Jane Austen de Bernadette est un génie comique. Ses personnages, ses dialogues gardent leur drôlerie d'origine, contrairement aux bons mots de Shakespeare, qui ne vous amusent que parce qu'ils sont de Shakespeare et que vous lui devez bien ça.

Bernadette était la plus âgée des membres du club. Elle venait d'atteindre soixante-sept ans. A cette occasion, elle a annoncé que désormais elle se laisserait aller. « Je ne me regarde plus dans la glace, nous a-t-elle dit. Si seulement j'y avais pensé des années plus tôt... »

« Comme un vampire », a-t-elle ajouté et, présenté ainsi, nous nous sommes demandé comment les vampires se débrouillent pour être toujours aussi impeccables. La plupart d'entre eux auraient plutôt dû ressembler à Bernadette.

Un jour, au supermarché, Prudie avait croisé Bernadette en pantoufles, les cheveux en bataille comme si elle ne s'était même pas peignée. Elle achetait des fèves de soja surgelées, des câpres et autres articles qui ne pouvaient être de première nécessité.

Le livre préféré de Bernadette était Orgueil et préjugés. C'est certainement celui que tout le monde préfère, a-t-elle dit à Jocelyn. Elle recommandait de commencer par lui, mais le mari-depuis-trente-deux ans de Sylvia venait juste de demander le divorce et, dans un contexte si récent et si sensible, Jocelyn n'imposerait pas à Sylvia le séduisant M. Darcy. « Nous commencerons avec Emma, a répondu Jocelyn. Car personne après l'avoir lu ne peut avoir envie de se marier. »

Jocelyn et Sylvia s'étaient rencontrées à l'âge de onze ans ; elles avaient une petite cinquantaine à présent. La Jane Austen de Sylvia est une sœur, une fille, une tante. La Jane Austen de Sylvia écrit ses livres dans une salle à manger remplie de monde, les lit à voix haute à sa famille, et reste une fine et impartiale observatrice de ses semblables. La Jane Austen de Sylvia peut aimer et être aimée, mais cela ne trouble pas sa vision, n'émousse pas son jugement.

Il était possible que Sylvia ait été la raison d'être du club, et que Jocelyn ait simplement cherché à l'occuper pendant cette période difficile. Elle en était tout à fait capable. Sylvia était sa plus vieille et plus proche amie.

N'est-ce pas Kipling qui a dit : « Quand tout va mal, rien ne vaut Jane Austen »? Ou quelque chose comme ça.

Livre lu dans le cadre du partenariat

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6 avril 2010

Netherland - Joseph O'Neill

netherland Éditions de l'Olivier - août 2009 – 296 pages

traduit de l'anglais (États-Unis) Anne Wicke

Quatrième de couverture :

Hans et Rachel vivent à New York avec leur jeune fils lorsque surviennent les attentats du 11-Septembre. Quelques jours plus tard, ils se séparent, et Hans se retrouve seul, perdu dans

Manhattan, où il ne se sent plus chez lui. Il fait la connaissance de Chuck, un homme d’affaires survolté qui rêve de lancer le cricket à New York. Sur des terrains de fortune, Hans tente d’échapper à la mélancolie. Le charisme de Chuck draine une foule de joueurs du dimanche, tous venus d’ailleurs – de Trinidad, de Guyane ou de plus loin encore –, tous persuadés que l’Amérique reste le pays des possibles.

Alors que le monde entier ne croit plus en rien, eux continuent d’espérer. Au milieu de ces exilés, Hans retrouve un second souffle. Mais qui est Chuck ? Il faudra des années avant que le mystère qui entoure sa véritable identité finisse par se dissiper.

Ce très beau livre, souvent comparé à Gatsby le Magnifique, est à la fois une parabole sur la fin du rêve américain et un roman d’amour aux résonances poignantes.

Auteur : Né à Cork (Irlande) en 1964, irlandais par son père, Turc et francophone par sa mère, Joseph O'Neil grandit au Mozambique, en Iran et au Pays-Bas avant de devenir avocat d'affaires à Londres puis de s'installer à New York avec son épouse britannique... Cet héritage culturel pour le moins hétéroclite nourrit l'intrigue et l'univers de son troisième roman et premier succès, 'Netherland', un portrait du New York de l'après-11-septembre paru en 2009 en France. Journaliste pour Atlantic Monthly, Joseph O'Neil est également l'auteur de 'Blood-Dark Track : a Family History', une enquête autobiographique sur le passé de ses grands-parents.

Mon avis : (lu en avril 2010)

Pourquoi ai-je choisi ce livre à la bibliothèque ? En premier lieu parce que l'auteur est né en Irlande (suite au swap St Patrick, je suis toujours curieuse de découvrir des auteurs irlandais), ensuite la lecture de la quatrième de couverture m'a donné envie... enfin, les Éditions de l'Olivier sont souvent pour moi gage de qualité.

Le titre est mystérieux, « Netherland », un dictionnaire m'apprend que cela veut dire « Pays-Bas », nom du pays d'origine du narrateur, Hans (dont le nom intégral est Johannus Franciscus Hendrikus van den Broek).

Hans a la trentaine, il est analyste financier. Il est né et à grandit aux Pays-Bas, à l'âge de 20 ans il est parti travailler à Londres, il a rencontré Rachel et s'est marié avec elle. En 1999, Hans et Rachel sont partis s'installer à New-York, ils ont eu un fils Jack. L'essentiel de l'action du roman se situe quelques mois après les attentats du 11 septembre 2001 : la chute des tours a ébranlé leur couple « Nous avions perdu la capacité de nous parler. L’attaque contre New York avait ôté tout doute à ce sujet. Elle ne s’était jamais sentie aussi seule, aussi mal, aussi loin de chez elle, que durant ses dernières semaines… » Rachel est retourné à Londres avec Jack et Hans vit maintenant seul dans New-York encore traumatisée, il retourne environ deux fois par mois à Londres pour voir son fils. Il va faire par hasard la rencontre de Chuck, originaire de Trinidad, autour d'une passion commune le cricket. L'auteur utilise le criquet comme un symbole de justice et de fraternité entre les hommes et nous offre le portrait d'un New-York multiculturel car en effet, l’équipe de Hans est composé d’hommes originaires de Trinidad, de Guyane, de Jamaïque, d’Inde, du Pakistan et du Skri Lanka, soit trois hindouistes, trois chrétiens, un sikh, quatre musulmans…

En découvrant ce livre, j'ai appris également que Netherland, un an après sa sortie aux États-Unis, avait bénéficié d’une publicité exceptionnelle, en effet, interrogé sur ses lectures par la BBC, Barack Obama avait répondu qu’il était en train de le lire, et qu’il le trouvait « excellent ».

Pour ma part, je ne suis pas aussi enthousiaste concernant ce livre, j'ai bien aimé ce portrait multicolore de New-York, mais le criquet est resté pour moi un sport mystérieux...

Extrait : (début du livre)

La veille de mon départ de Londres pour New York - Rachel m'avait précédé de six semaines -, dans l'après-midi, je me trouvais au travail, à mon bureau, je rassemblais mes affaires, lorsqu'un des grands vice-présidents de la banque, un Anglais d'une cinquantaine d'années, vint me souhaiter bonne chance. J'en fus surpris ; il travaillait dans une autre partie de l'immeuble, dans un autre service, et nous ne nous connaissions que de vue. Néanmoins, il me demanda force détails sur l'endroit où je comptais m'installer (« Watts Street ? À quelle hauteur, dans Watts ? »), puis s'épancha quelques minutes sur les souvenirs de son loft dans Wooster Street et de ses virées au magasin « original » Dean & DeLuca. Il ne cherchait
absolument pas à dissimuler son envie.
« Nous n'y resterons pas longtemps », dis-je en la jouant profil bas sur ma bonne fortune.
Car tel était le plan conçu par ma femme : s'installer à New York un à trois ans puis rentrer.
« Vous pensez ça aujourd'hui, me dit-il. Mais New York, c'est une ville qu'il est très difficile de quitter. Et une fois qu'on la quitte... »
Il ajouta en souriant : « Elle me manque toujours, pourtant, j'en suis parti il y a douze ans. »
Ce fut alors mon tour de sourire - un peu parce que j'étais gêné, en fait, car il avait parlé avec une spontanéité tout américaine.
« Eh bien, nous verrons, dis-je.
- Oui, c'est ça. Vous verrez. »
Son assurance m'agaça, bien qu'il me fît avant tout pitié - comme l'un de ces habitants du Saint-Pétersbourg de jadis, rejeté du mauvais côté de l'Oural par ses fonctions. Mais il s'avère qu'il avait raison, d'une certaine manière. Maintenant que, moi aussi, j'ai quitté cette ville, j'ai bien du mal à me débarrasser de l'impression que la vie a un goût de fenaison et de regain. Ce dernier mot, m'a un jour dit quelqu'un, renvoie dans un premier sens à l'herbe qui repousse dans un champ déjà fauché. Vous pourriez dire, si vous êtes le genre de personne encline aux observations d'ordre général, que New York met l'accent sur la fenaison répétitive effectuée par la mémoire - sur cette sorte d'autopsie déterminée qui a pour effet, on nous le dit et on l'espère sans trop y croire, de faucher le passé herbeux en de maîtrisables proportions. Car il ne cesse de repousser, bien sûr. Rien de tout cela ne signifie que je souhaiterais m'y trouver à nouveau en ce moment ; naturellement, j'aimerais penser que ma propre rétrospection est d'une certaine façon plus importante que celle de ce vieux vice-président. Lorsque j'en fus gratifié, elle ne me parut pas être grand-chose de plus qu'une nostalgie ordinaire. Mais, dans le fond, cela n'existe pas, la nostalgie ordinaire, suis-je tenté de conclure ces temps-ci, pas même si vous sanglotez sur un ongle cassé. Qui sait ce qui est arrivé à ce type, là-bas ? Qui sait ce qui se cache derrière son histoire d'aller acheter du vinaigre balsamique ?
Il en parlait comme d'un élixir, le pauvre crétin.
En tout cas, pendant les deux premières années qui ont suivi mon retour en Angleterre, je fis de mon mieux pour ne pas regarder du côté de New York - où, après tout, j'avais été malheureux pour la première fois de ma vie. Je n'y retournai pas, j'évitai de me demander trop souvent ce qu'il était advenu d'un homme appelé Chuck Ramkissoon, qui avait été mon ami durant mon dernier été passé sur la côte Est et qui était devenu depuis, comme cela arrive fréquemment, une silhouette éphémère. Et puis, un soir, au printemps de cette année 2006, Rachel et moi nous nous trouvons à la maison, à Highbury. Elle est plongée dans un article de journal. Je l'ai déjà lu. Cela parle de la découverte en Colombie d'un groupe tribal de la forêt amazonienne. On dit qu'ils en ont assez de leur vie difficile dans la jungle, même si l'article précise qu'ils n'aiment rien tant que manger du singe, grillé puis bouilli. Une photographie troublante d'un garçon rongeant un petit crâne noirci illustre le propos. La tribu n'a aucune idée de l'existence du pays dans lequel ils se trouvent, la Colombie, aucune idée non plus, et c'est plus dangereux, de l'existence de maladies comme le simple rhume, ou la grippe, contre lesquelles ils n'ont pas de défenses naturelles.
« Coucou, dit Rachel, hé, t'as vu, on parle de ta tribu. »
J'ai encore le sourire aux lèvres lorsque je réponds au téléphone qui sonne. Une journaliste du New York Times demande monsieur van den Broek.
« C'est au sujet de Kham, euh, Khamraj Ramkissoon... précise la journaliste.
- Chuck, dis-je en m'asseyant à la table de la cuisine. C'est Chuck Ramkissoon. »
Elle me dit que les « restes » de Chuck ont été retrouvés dans le Gowanus Canal. Ses poignets étaient menottés et, de toute évidence, il avait été victime d'un meurtre. Je garde le silence. J'ai l'impression que cette femme vient de proférer un mensonge éhonté et que si j'y réfléchis suffisamment une réfutation va me venir.
« Vous le connaissiez bien ? dit sa voix, avant d'ajouter, comme je ne réponds pas : il est écrit quelque part que vous étiez son associé.
- C'est inexact.
- Mais vous travailliez bien ensemble, non ? C'est ce que dit ma note.
- Non. Vous avez été mal informée. C'était juste un ami.

- D'accord, d'accord. »
On entend qu'elle tape sur son clavier, puis, une pause.
« Bon, alors, vous pouvez me dire quelque chose sur son... milieu ?
- Son milieu ? dis-je, suffisamment surpris pour corriger sa prononciation légèrement meuglante du mot.
- Oui, enfin, vous voyez ce que je veux dire, avec qui il traînait, les ennuis dans lesquels il aurait pu se mettre, s'il connaissait des personnages un peu louches... C'est assez inhabituel, ce qui lui est arrivé », ajoute-t-elle avec un petit rire.
Je me rends compte que je suis bouleversé, et même, furieux.
« Oui, je finis par dire. Vous avez une bonne histoire sous le
coude, là. »
Le lendemain, il y a un petit article dans la section « Nouvelles locales ». Il a été établi que le corps de Chuck Ramkissoon gisait depuis plus de deux ans dans l'eau, près de l'entrepôt du Home Depot, parmi les crabes, les pneus de voitures et les caddies de supermarché, jusqu'au jour où un de ces plongeurs en zone urbaine fit une « découverte macabre » alors qu'il filmait un banc de bars rayés. Dans la semaine qui suit paraissent sur le sujet quelques petites choses au compte-gouttes, mais aucune information véritable. Cela semble cependant intéresser les lecteurs et rassurer certains traditionalistes de savoir que le Gowanus Canal peut toujours rejeter la victime d'un meurtre. Tant qu'il y a de la mort, il y a de l'espoir, comme l'a dit un commentateur plein d'esprit.
« Alors, qui est cet homme ? » me demande Rachel, allongée dans le lit à côté de moi, le soir où nous avons appris la nouvelle.
Comme je ne réponds pas immédiatement, elle pose son livre.
« Oh, je suis sûr que je t'en ai déjà parlé. Un joueur de cricket que je connaissais. Un type de Brooklyn.
- Chuck Ramkissoon ? » répète-t-elle.

Sa voix a un ton détaché qui ne me plaît pas. Je me tourne sur une épaule et ferme les yeux.
« Oui, dis-je. Chuck Ramkissoon. »
Chuck et moi, nous nous étions rencontrés pour la première fois en août 2002. Je jouais au cricket dans le Randolph Walker Park, à Staten Island, et Chuck se trouvait là. Il était l'un des deux arbitres indépendants qui proposaient leurs services en échange d'honoraires de cinquante dollars. Le jour était épais comme de la gélatine, avec une atmosphère chaude et vitreuse, sans aucun vent, pas même la brise venant du Kill van Kull qui coule à moins de deux cents mètres de Walker Park, séparant Staten Island du New Jersey. D'assez loin, au sud, montait le grondement sourd du tonnerre. C'était bien là le genre d'après-midi américain à la viscosité barbare qui me faisait vivement regretter les ombres projetées par les mouvements rapides des nuages d'été dans le nord de l'Europe, regretter même ces jours où vous jouiez au cricket en portant deux pull-overs, sous un ciel froid parsemé çà et là d'un pan de bleu - assez grand pour tailler une culotte de gendarme, comme disait ma mère. Selon mes propres critères, Walker Park était un endroit fort médiocre pour jouer au cricket. L'aire de jeu était, je suis sûr que c'est toujours le cas, deux fois plus petite que la taille réglementaire d'un terrain de cricket. Le terrain proprement dit est inégal et l'herbe y est toujours trop haute, même lorsqu'elle est tondue (un jour, en cherchant une balle, j'ai failli tomber sur un canard caché dans l'herbe, ce qui, pour les joueurs, est de très mauvais augure 1) ; et, alors que le vrai cricket, comme certains pourraient le nommer, se joue sur une livrée en pelouse, celle de Walker Park est en terre battue, et non en gazon, et doit être recouverte d'un tapis en fibres de coco ; par ailleurs, la terre en question est de la terre battue de base-ball, pâle et sableuse, elle n'est pas rouge comme celle des terrains de cricket : on ne peut alors compter bien longtemps sur la fiabilité du rebond. Et quand bien même on pourrait parler de fiabilité du rebond, il manquera toujours de variété et de complexité. (En revanche, les livrées faites de vraie terre et d'herbe sont riches de possibilités : elles seules peuvent pleinement mettre au défi et récompenser le répertoire du lanceur, avec ses balles lentes, tournantes, courtes à rebond, ou déviées, et seules ces balles peuvent mettre en action et véritablement à l'épreuve le répertoire du batteur, ses coups défensifs et offensifs, sans parler de son mental.) Il y a un autre problème. De grands arbres - des chênes des marais, des chênes rouges, des gommiers,
des tilleuls américains - longent de manière désordonnée les bordures de Walker Park. Il faut considérer que chaque élément de ces arbres, même la plus petite feuille qui pend, fait partie des limites du terrain, ce qui confère une dimension aléatoire au jeu.
Souvent, il arrive qu'une balle roule entre les troncs. Le joueur de l'équipe au champ qui doit courir après la balle va alors disparaître partiellement, et lorsqu'il réapparaît, la balle à la main, un concours de cris démarre, exigeant de savoir comment les choses se sont exactement passées.

3 avril 2010

Le Monde de Barney – Mordecai Richler

Livre lu dans le cadre du partenariat Blog-o-Book - Livre de Poche

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Albin Michel – janvier 2000 – 558 pages

LGF – janvier 2001 – 603 pages

traduit de l'anglais (Canada) par Bernard Cohen

Quatrième de couverture :

Drôle de vie que celle de Barney !
Barney Panofsky, juif canadien, expatrié dans les années cinquante à Paris, où il a côtoyé la bohème artistique. De retour au pays, il devient importateur de fromages français, puis producteur de télévision.
De ses trois épouses, la première, nymphomane, se suicidera. Il abandonnera la deuxième le jour même de leur mariage. Quant à la troisième, elle le quittera au bout de trente-six ans.
Accusé du meurtre d'un de ses copains, Barney finira solitaire et poivrot, laissant cette autobiographie.
Drôle d'histoire ? Oui. Ecrite d'une plume virtuose, avec un humour et un souffle ahurissants. Et l'un des plus grands romans du Canada anglophone d'aujourd'hui.

Auteur : Mordecai Richler (27 janvier 1931 – 3 juillet 2001) était un auteur et un scénariste canadien. Né et élevé dans le Mile End (rue Saint-Urbain) à Montréal, au Québec, il fréquenta l’Université Sir George Williams (qui fait maintenant partie de l’Université Concordia). Dans les premières années de sa vie, il vécut et écrivit en Angleterre mais revint au Canada en 1972.

Mon avis : (lu en mars 2010)

Cette lecture fut laborieuse. N’étais-je peut-être pas dans de bonnes dispositions pour découvrir ce livre ?

J'ai eu beaucoup de mal à entrer dans ce livre. J'ai mis deux jours à lire les 140 premières pages et devant ces difficultés, j'ai préféré faire une pause avant de le reprendre.

Barney Panofsky a été mis en cause injustement dans une autobiographie écrite par son ennemi Terry McIver, écrivain reconnu. Il décide donc de lui répondre en écrivant ses propres mémoires pour donner sa version en trois chapitres. Chacun d'entre eux évoque ses trois femmes : Clara : une artiste qu'il a rencontré à Paris, Mrs Panofsky II et Miriam, la femme de sa vie et la mère de ses trois enfants. Il a vécu à Paris de façon un peu bohème, il est retourné au Canada où il a été importateur de fromages puis producteur de télévision. Aujourd'hui, il a 70 ans, il boit et fume trop, il commence également à avoir des problèmes de mémoires.

Il y a beaucoup de personnages, les histoires et anecdotes se succèdent sans que le lecteur ne les mettent en relations les unes aux autres. L'auteur passe brutalement du présent au passé et du passé au présent. Et l’auteur le dit lui-même page 373, « Les digressions, ou plutôt ce que je préfère considérer comme les "propos de table de Barney Panofsky", abondent. », ce qui embrouille encore plus l'esprit de son lecteur. En avançant dans le livre, on comprend un peu mieux la chronologie des faits, mais j’avoue avoir vraiment eu du mal à être intéressée par cette histoire.

Merci à Blog-O-Book et Livre de Poche de m’avoir donné l’occasion de lire ce livre.

Livre lu dans le cadre du partenariat logo_bob_partenariat - logo


1 avril 2010

La Vierge en bleu - Tracy Chevalier

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traduit de l'anglais (États-Unis) par Marie-Odile Fortier-Masek

Édition de La Table Ronde – novembre 2004 – 317 pages

Folio – mars 2006 – 427 pages

Présentation de l'éditeur :

Récemment arrivée des États-Unis avec son mari, Ella Turner a du mal à trouver sa place dans cette bourgade de province du sud-ouest de la France. S'y sentant seule et indésirable, elle entreprend des recherches sur ses ancêtres protestants qui eurent à fuir les persécutions. Elle est alors loin d'imaginer que cette quête va bouleverser sa vie. Quatre siècles plus tôt, en pleine guerre de religion, Isabelle du Moulin, surnommée " La Rousse " en raison de sa flamboyante chevelure, risque un procès en sorcellerie pour le culte qu'elle voue à la Vierge Marie. Cependant, l'enfant qu'elle porte ne lui laisse d'autre choix que d'entrer dans l'intolérante famille des Tournier qui a embrassé la Réforme. Séparées par des générations mais unies par un mystérieux héritage, Ella et Isabelle vont renouer les fils du temps à deux voix. Premier roman de l'auteur de La jeune fille à la perle, La Vierge en bleu livre l'histoire tragique et foisonnante des Tournier, sur fond de guerre de religion.

Auteur : Née à Washington, Columbia en 1962, après des études dans l'Ohio, Tracy Chevalier part en 1984 à Londres pour un séjour de six mois. Amoureuse des livres, elle reste finalement en Angleterre, y fonde une famille et commence à travailler dans l'édition. Pourtant, le virus de l'écriture, déjà côtoyé durant ses études, la rattrape. Après quelques cours d'écriture, Tracy voit ses écrits publiés dans le magazine Fiction, avant que son premier roman, 'La Jeune fille à la perle', ne lui apporte en 1998 un grand succès sur ses terres d'adoption. Confirmation dès lors que ses ouvrages se diffusent à grand échelle. Tracy Chevalier enchaîne, au début des années 2000, avec 'Le Récital des anges', 'La Dame à la licorne' puis 'La Vierge en bleu', et rencontre à chaque fois son public. Elle revient dans les librairies en 2007 avec 'L' Innocence'. Désormais, la sortie de chaque nouveau livre de Tracy Chevalier est un événement.

Mon avis : (lu juin 2004 en et relu en mars 2010)

Après avoir découvert et beaucoup aimé "La jeune fille à la perle", j’avais lu et aimé "La Vierge en bleu ". A l’occasion du concours Tracy Chevalier organisé par BoB, j’ai relu ce livre avec toujours autant de plaisir.

Ce livre nous raconte deux histoires en parallèle : au XVIème siècle, dans les Cévennes, Isabelle est enceinte de l'enfant d'Etienne Tournier, le fils de riches paysans protestants. Elle doit l'épouser et vivre avec sa famille. Pourtant, elle est à l'origine catholique et elle a beaucoup d'admiration pour la Vierge Marie. Les guerres de religions faisant rage, la famille Tournier doit fuir et ils se réfugient à Moutier une petite ville suisse. Au XXème siècle, deux américains Ella et Rick viennent s'installer à Lisle-sur-Tarn une petite ville proche de Toulouse. Mal à aise dans ce village et en attendant de reprendre des études pour travailler en France, Ella Turner s'intéresse à ses ancêtres protestants et entreprend des recherches avec l'aide du bibliothécaire. Les deux récits vont se rejoindre lorsqu’Ella découvrira les lieux de ses origines, et un peu plus sur l’histoire de cette famille.

Extrait : (début du livre)

Elle s'appelait Isabelle. Enfant, ses cheveux changeaient de couleur en moins de temps qu'il n'en faut à l'oiseau pour appeler son compagnon.

Cet été-là, le duc de l'Aigle rapporta de Paris une statue de la Vierge à l'Enfant et un pot de peinture destinés à la niche au-dessus du portail de l'église. Le village célébra par une fête l'installation de la statue. Assise au pied d'une échelle, Isabelle regardait Jean Tournier peindre la niche d'un bleu intense, de la couleur d'un ciel vespéral. Au moment où il achevait, le soleil apparut derrière un pan de nuages, rendant le bleu si vif qu'Isabelle croisa les mains sur sa nuque et serra les coudes contre sa poitrine ; ses rayons posèrent sur sa chevelure une auréole mordorée qui y demeura après qu'il eut disparu. A partir de ce jour, on l'appela La Rousse en souvenir de la Vierge Marie.

Quelques années plus tard, ce surnom perdit toute résonance affectueuse, avec l'arrivée au village de M. Marcel, aux mains maculées de tanin, qui s'exprimait avec des paroles empruntées à Calvin. Lors de son premier sermon, dans les bois, bien loin des regards du curé, il déclara que la Vierge Marie leur barrait le chemin de la Vérité.

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22 mars 2010

Park Life – Shuichi Yoshida

Livre lu dans le cadre du logo_challenge_ABC- (15/26)

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Editions Philippe Picquier – septembre 2007 - 95 pages

Picquier poche - janvier 2010 – 128 pages

traduit du japonais par Gérard Siary et Mieko Nakajima-Siary

Présentation de l'éditeur :

Ce petit roman est une bouffée d'air pur dans la vie affairée et raisonnable des citoyens du XXIe siècle que nous sommes. Un air venu du parc de Hibiya à Tôkyô, où l'on pénètre sur les pas d'un jeune employé légèrement excentrique, et soudain " l'exhalaison de terre et d'herbe vous chatouille les narines ". Là, il croise une triathlonienne consommatrice de bains moussants, rencontre un vieil homme qui fait voler un capricieux aérostat rouge, rêve, médite, s'exerce à chambouler la perspective pour voir le monde autrement. Il arrive que s'y nouent des idylles, à peine plus tangibles que le bruissement des pigeons qui s'envolent. Ce récit a le charme des parenthèses qui s'ouvrent parfois dans la vie pour laisser entrer l'enchantement, comme un léger vertige teinté de déraison. La ville n'est pas loin, les buildings cernent l'horizon, mais dans cet espace clos et protégé, se jouent les menues aventures qui donnent son goût unique à l'existence, la petite musique d'un grand parc au cœur d'une immense capitale. Park Lift a été couronné en 2002 du prix Akutagawa, le Goncourt japonais.

Auteur : Né en 1968 à Nagasaki. Après des études de gestion à l'Université Hosei de Tôkyô, Yoshida Shuichi écrit plusieurs romans. En 2002, il a obtenu le Prix Akutagawa pour Park Life, après l'avoir laissé échapper quatre fois.

Mon avis : (lu en mars 2010)

Un livre qui se lit très facilement. L'histoire commence dans le métro lorsqu'un jeune homme (le narrateur) s'adresse par erreur à une inconnue. Il la rencontre un peu plus tard dans le parc Hibiya de Tokyo. Ils vont se revoir au même endroit plusieurs fois pendant leur pause-repas et ils observent les habitués de ce parc qui est une bouffée d'air dans cette ville trépidante. Entre temps, le narrateur nous raconte son quotidien insolite, ainsi que ses souvenirs. C'est frais, exotique mais en lisant la quatrième de couverture, j'attendais plus de ce livre.

Extrait : (page 8)

En empruntant cet escalier un peu sombre, on débouche derrière l'îlot de police du parc. Si, pour y pénétrer, on enjambe la barrière basse à côté des toilettes publiques, on respire un autre air que dans l'enceinte du métro, l'exhalaison de terre et d'herbe vous chatouille les narines. Une fois entré, j'ai marché le plus possible tête baissée. Tout en m'efforçant de ne pas regarder au loin, j'ai avancé dans le sentier qui entoure la mare de Shinji, passé les allées de ginkgos et le petit kiosque à musique, et pénétré dans le square au grand jet d'eau. Les pigeons s'y acharnent à donner des coups de bec dans la nourriture. Veillant à ne pas leur marcher dessus, j'ai traversé le square pour aller m'asseoir confortablement à l'un des bancs autour du jet d'eau. Il ne faut surtout pas relever trop vite la tête. J'ai d'abord desserré ma cravate, siroté une gorgée du café en canette que j'avais acheté dans une boutique du métro. Juste avant de relever la tête, il vaut mieux fermer les yeux, même quelques secondes. Après avoir respiré lentement et profondément, j'ai levé la tête d'un seul trait et écarquillé les yeux. Quand j'écarquille soudain les yeux, le grand jet d'eau, les arbres d'un vert foncé et l'Hôtel Impérial, qui présentent respectivement un paysage proche, à mi-distance et éloigné, font brusquement irruption dans mon champ visuel en chamboulant la perspective. C'est dur pour mes yeux habitués aux étroites voies souterraines. La tête me tourne. Je savoure un léger état de transe.

Livre lu dans le cadre du logo_challenge_ABC- (15/26)

19 mars 2010

Le bon larron – Hannah Tinti

le_bon_larron Gallimard – novembre 2009 – 375 pages

traduit de l'anglais (États-Unis) par Mona de Pracontal

Présentation de l'éditeur :

A douze ans, Ren le manchot n'a connu que l'orphelinat et, tout en rêvant d'une famille, appréhende les dangers du monde extérieur. Voici que survient Benjamin Nab, qui se prétend son grand frère et le prend sous son aile. Mais dit-il la vérité ? Du jour au lendemain, Ren se retrouve plongé dans une cour des Miracles, un monde de voleurs, de marginaux, de grands escrocs et de nantis maléfiques. Parmi les villes minières et les ports baleiniers de Nouvelle-Angleterre, il ne cesse de vouloir percer le mystère de ses origines... Hannah Tinti ressuscite ici, avec vigueur et malice, l'Amérique du dix-neuvième siècle, celle de Melville et de Mark Twain, tout en donnant à son jeune protagoniste une épaisseur et une vitalité dignes de Dickens. Ce conte foisonnant, au rythme trépidant, ne recule jamais devant les péripéties feuilletonnesques les plus échevelées, nous offrant avec Ren un inoubliable héros. L'élan romanesque qui l'anime, le plaisir contagieux du récit procurent un bonheur de lecture que l'on croyait perdu depuis l'âge d'or de la fiction. On connaissait Hannah Tinti nouvelliste hors pair. Avec ce livre, une romancière est née.

Auteur : Hannah Tinti est née à Boston en 1972 et a grandi à Salem. Elle vit maintenant à New York. Bête à croquer, son premier livre, a reçu un accueil enthousiaste de la critique et a été traduit dans seize pays. Le bon larron, son premier roman, a reçu de nombreux prix.

Mon avis : (lu en mars 2010)

C'est grâce à Amanda que j'ai découvert ce livre tout d'abord "on the radio : Gang des LIT" puis avec son article.

A douze ans, la vie de Ren c’est l’orphelinat catholique Saint-Anthony, il attend depuis toujours le jour où l’on viendra le chercher pour vivre dans une famille. Mais son bras en moins décourage les fermiers du coin à l’adopter car ceux-ci recherchent un enfant capable de travailler au champ. Un jour pourtant, Benjamin Nab, qui se fait passer pour son grand frère, vient le chercher. En fait, Benjamin est un escroc qui va utiliser Ren pour apitoyer ses victimes. Il a comme complice Tom, ancien instituteur et alcoolique. Ren étant déjà un voleur né va apprécier cette nouvelle vie. Les deux compères commercialisent des élixirs miraculeux, ils pillent des cimetières, détroussent des cadavres… Nous assisterons au retour à la vie d’un mort, nous rencontrerons un nain vivant sur les toits et qui descend chaque soir se nourrir en passant par la cheminée… Des aventures rocambolesques qui se succèdent, des personnages hauts en couleurs… Et Ren qui est à la recherche de ses origines. Cette histoire c'est l'Amérique au XIXème siècle, on retrouve à la fois l’atmosphère d'Oliver Twist de Dickens et les péripéties de Tom Sawyer et Huckleberry Finn de Mark Twain.

J’ai pris vraiment beaucoup de plaisir à lire ce livre.

Extrait : (début du livre)

L'homme arriva après la prière du matin. La rumeur se répandit rapidement, et les garçons de l'orphelinat Saint-Anthony jouèrent des coudes pour l'entrevoir pendant qu'il dételait son cheval et le menait à l'abreuvoir. Son visage était difficile à distinguer, sous le chapeau rabattu si bas que le bord lui touchait presque le nez. Il attacha les rênes à un poteau, puis resta près de sa monture à lui flatter l'encolure tandis qu'elle buvait. L'homme attendait, les enfants regardaient, et quand la jument releva enfin la tête ils le virent se pencher, caresser les naseaux de la bête et l'embrasser. Puis il s'essuya la bouche d'un revers de main, retira son chapeau et se dirigea vers le monastère, de l'autre côté de la cour.

Il était fréquent que des hommes viennent chercher des enfants. Parfois en quête de main-d'œuvre à bon marché, parfois pour s'acheter une bonne conscience. Les frères de Saint-Anthony alignaient les orphelins, et les hommes, allant et venant le long de la rangée, les jaugeaient. On pouvait facilement deviner ce qu'ils recherchaient en suivant leur regard. En général, celui-ci se portait sur les garçons de presque quatorze ans, les plus grands, les plus remuants, les plus forts. Ensuite il s'abaissait sur les gamins qui rampaient à peine, les petits deux-ans titubants - encore purs et innocents. Ce qui laissait les entre-deux - les gamins qui avaient perdu leurs boucles et leur gras de bébé, mais qui n'étaient pas encore assez grands pour se montrer utiles. Ceux-là avaient en général mauvais caractère, et presque rien d'autre à offrir que leur ventre vide et des poux. Ren en faisait partie.

Il n'avait aucun souvenir d'un début – d'une mère ou d'un père, d'une sœur ou d'un frère. Sa vie était tout entière contenue ici, à Saint-Anthony, et ses souvenirs commençaient au milieu des choses : l'odeur des draps bouillis et de la lessive ; le goût du porridge trop clair ; ce qu'il avait ressenti lorsqu'il avait fait tomber une brique sur une dalle de pierre et regardé les fragments rouges se disperser, s'était servi de ces éclats pour écrire sur le mur du monastère, puis avait reçu une gifle en punition et été forcé d'essuyer les traces avec un chiffon froid et mouillé.

Le nom de Ren était cousu dans le col de sa chemise de nuit : trois lettres brodées au fil bleu foncé. Le tissu était un lin de bonne qualité et Ren avait porté la chemise jusqu'à l'âge de deux ans ou presque. Après, les frères la lui avaient retirée pour la donner à un plus petit. Ren avait appris à surveiller Edward, puis James, puis Nicholas – et à les coincer dans la cour. Il plaquait au sol le gamin qui se débattait, puis il examinait attentivement les lettres délavées, en se demandant à quoi ressemblait la main qui les avait brodées. Le R et le E étaient cousus hardiment, au point croisé, mais le N était plus grêle et penchait vers la droite, comme si la personne qui maniait l'aiguille s'était dépêchée de finir. Une fois usée, la chemise avait été découpée en bandage. Frère Joseph avait donné à Ren le bout de col qui portait les lettres et, la nuit, le garçon le mettait sous son oreiller.

17 mars 2010

Sang impur – Hugo Hamilton

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Phebus – septembre 2004 – 279 pages

Points – janvier 2007 – 346 pages

traduit de l’anglais (Irlande) par Katia Holmes

Prix Fémina étranger 2004

Présentation de l'éditeur :

Issue de l'union d'une Berlinoise antinazie avec un nationaliste irlandais, une portée de gamins grandit dans les quartiers misérables du Dublin des années 1960. Talochés par un père dont les échecs affligent tout la famille, les petits Hamilton essuient au dehors les insultes du voisinage. Mais auprès de leur douce mère, Hugo, Franz et Maria apprennent le bonheur d'être en vie, de s'aimer et de se serrer fort contre les siens.

Auteur : Hugo Hamilton est né à Dublin en 1953 d'un mère allemande et d'un père irlandais. Il accède à la consécration avec son roman autobiographique Sang impur, récompensé en France par le prix Femina étranger en 2004.

Mon avis : (lu en mars 2010)

Ce livre est un roman autobiographique, il raconte l’enfance de l’auteur à Dublin dans les années 1960. Sa mère est allemande et son père est un irlandais pur et dur. A la maison, les langues autorisées sont l’allemand et l’irlandais. Avec son frère, Hugo portait des Lederhosen (culotte de cuir) et des pulls irlandais. A l’école il doit parler anglais et les autres élèves le traite de nazi. Le père ne veut rien dire et oublier son passé (un père engagé et mort dans la marine anglaise), il est intransigeant avec lui-même et sa famille. Il refuse la moindre allusion à la langue anglaise. Il n’hésite pas à corriger ses enfants avec une baguette. Il refuse même d’utiliser son patronyme Hamilton, lui préférant sa forme « à l’irlandaise » et imprononçable "O hUrmoltaigh". Il tente de monter sans grande réussite une entreprise pour vendre des crucifix importés d’Allemagne, puis des chapeaux en papier et des pétards allemands ou alors des bonbons faits maison… puis il se lancera dans l'apiculture.

Au contraire, la mère est douce, elle préfère raconter des histoires ou mettre de la musique allemande pour résoudre les conflits, elle raconte l’Allemagne et son enfance avec la montée du nazisme et la Seconde Guerre Mondiale. En cachette, du père, elle rédige sur une vieille machine à écrire ses souvenirs. Elle aime également faire de bons gâteaux.

Hugo Hamilton nous touche beaucoup avec ce récit tendre, naïf et juste d’un petit garçon rêveur mais aussi turbulent qui ne sait pas trop qui il est. Est-il allemand ? Est-il nazi ? Est-il irlandais ? « Nous n'avons pas qu'une seule langue, qu'une seule histoire. Nous dormons en allemand et nous rêvons en irlandais. Nous rions en irlandais et nous pleurons en allemand... »

Il supporte la dureté de son père grâce aux câlins de sa mère. « Je suis à la fois le plus gentil et le plus culotté, elle dit, parce que c’est moi qui reçoit le plus de claques de mon père, et moi qui ait le plus de câlins de sa part à elle, pour réparer. »

Durant cette lecture, je suis passée par beaucoup d’émotions, du rire aux larmes. Une très belle découverte !

Un grand MERCI à Françoise qui m’a offert ce livre à l’occasion du Swap Saint Patrick organisé par Canel.

Extrait : (page 23)

Je sais qu'ils ne veulent pas de nous ici. Je peux les voir passer de la fenêtre de la chambre des parents, ils viennent du terrain de football qui est près de notre rue et ils redescendent vers les magasins. Ils ont des bâtons, ils fument des mégots de cigarette et ils crachent par terre. Je les entends rire. C'est juste une question de temps : on sera bien obligés de sortir et ils seront là à attendre. Ils découvriront qui on est. Ils nous diront de repartir là d'où on vient.
On n'a rien à craindre, dit mon père : nous sommes les nouveaux Irlandais. Pour partie originaires d'Irlande, pour partie d'ailleurs - mi-Irlandais, mi-Allemands. Nous sommes les gens tachetés, il explique, les brack people, 'les bigarrés'. Un mot qui vient de la langue irlandaise, du 'gaélique' comme ils l'appellent quelquefois. Mon père a été instituteur à un moment donné, avant de devenir ingénieur, et brack est un mot que les Irlandais ont apporté avec eux quand ils sont passés à l'anglais. Ca veut dire tacheté, pommelé, chiné, moucheté, coloré. Une truite est brack, un cheval tacheté aussi. Un barm brack est un pain avec des raisins dedans - un nom emprunté aux mots irlandais bairin breac. Ainsi, nous sommes les Irlandais tachetés, les Irlandais bigarrés. Un pain brack irlandais maison, truffé de raisins allemands.

8 mars 2010

La Ferme des Neshov – Anne Birkefeld Ragde

Livre lu dans le cadre du logo_challenge_ABC- (14/26)

la_ferme_des_Neshov Balland – janvier 2010 – 379 pages

traduit du norvégien par Jean Renaud

Présentation de l'éditeur :

« À la ferme, de toute façon, tout ce qui était beau était mis de côté pour des jours qui ne viendraient jamais. »

Trois frères que tout sépare se retrouvent dans la ferme familiale à la mort de leur mère. Tous sont confrontés à un moment de leur vie où ils doivent faire un choix important. Tor, l’aîné, doit se décider : poursuivre son élevage de porcs ou laisser sa fille reprendre la ferme et quitter alors sa vie d’assistante vétérinaire à Oslo. Que va devenir la ferme des Neshov ? Arriveront-ils à surmonter leur différence pour recréer des liens familiaux mis à rude épreuve depuis si longtemps ? Anne B. Ragde met en scène les destins entrecroisés des membres de la famile Neshov et signe une saga d’une grande finesse psychologique où le chagrin et la douleur se mêlent à l’humour, la chaleur et l’amour.

Saluée par la critique et les lecteurs, la saga d’Anne B. Ragde est le phénomène incontournable de la scène littéraire norvégienne. Traduit dans plus de 15 langues, La Ferme des Neshov a obtenu le Prix des Libraires et des Lecteurs. Après le succès de La Terre des mensonges, Anne B. Ragde poursuit avec La Ferme des Neshov une formidable saga norvégienne.

Auteur : Anne B. Ragde, née en 1957, a fait ses débuts en littérature en 1986 avec le livre pour la jeunesse Hallo! Her er jo! Depuis, elle a écrit plusieurs livres pour la jeunesse, dont une biographie de Sigrid Undset pour laquelle elle a reçu le Prix Brage. Son premier roman pour adulte En tiger for en engel a été publié en 1990. D’autres romans ont suivis, tout comme des polars et des recueils de nouvelles. La Terre des mensonges (dont le titre original est Berlinerpoplene), paru en 2004 a été traduit dans plus de vingt langues et a obtenu le obtenu les prix littéraires Riksmål et Booksellers' prize. La Ferme des Neshov a reçu le Prix des libraires et prix des lecteurs en Norvège.

 

Mon avis : (lu en mars 2010)

J'ai retrouvé avec beaucoup de plaisir la suite de La Terre des mensonges. J'ai retrouvé les membres de la famille Neshov : les trois frères Tor l’éleveur de porcs, Margido le croque-mort et Erlend, décorateur à Copenhague et Krumme son compagnon, Torunn, la fille de Tor, aide-vétérinaire à Oslo. Ils s'étaient retrouvés lors de la mort de leur mère, ils avaient faits connaissance, un secret de famille avait été dévoilée. Après ses quelques jours ensemble, chacun va retourner à sa vie quotidienne. Les liens familiaux ont été secoués et quelle sera l'avenir de la ferme des Neshov ? Le livre se lit aussi facilement que le premier, les personnages évoluent, le lecteur les suit de Trondheim à Copenhague en passant par Oslo. Le livre se conclu avec un épisode dramatique alors j'attends avec impatience la sortie du prochain et dernier livre de cette trilogie.

Extrait : (page 21)

Un heure plus tard, la petite voiture de location était pleine à craquer. C'était une Golf, Krumme l'avait louée à l'aéroport de Vaernes et ils allaient la rendre au même endroit. Torunn rentra en trombe dans le petit salon voir le grand-père, après avoir enfilé manteau et bottines. Elle voulait donner l'impression qu'ils étaient pressés maintenant. Elle avait longtemps retardé le moment de dire au revoir, fait comme si c'était une simple tasse de café qu'ils avaient bue, en dépit des allées et venues fébriles d'Erlend entre le premier étage et la voiture dans la cour, pour descendre toutes sortes de choses qu'il voulait emporter à la dernière minute.

Le grand-père était assis devant une tasse sans soucoupe, des miettes sur la table et sur les genoux – elle lui avait donné une part de gâteau fourré aux amandes. Il portait son dentier, en haut comme en bas, la télé était éteinte, elle jeta un rapide coup d'œil aux plantes vertes sur le rebord de la fenêtre, celles qu'Erlend avait achetées, et fut intimement persuadée qu'elles seraient crevées d'ici quinze jours. Ou bien complètement desséchées, ou bien trop arrosées. Elle était également persuadée qu'il ne se raserait pas avant longtemps. Ni ne changerait de caleçon. Comment vont-ils se débrouiller ? se demanda-t-elle. Et moi qui m'en vais. Mais elle pensa aussitôt qu'Erlend aussi s'en allait, et il était quand même plus proche d'eux, pour autant qu'on puisse établir une telle hiérarchie. Erlend était le frère cadet, elle était la fille : qui des deux devait avoir davantage mauvaise conscience ? Mais Margido habitait de l'autre côté de la colline, à lui maintenant de venir en aide à sa famille à Neshov ! Il y serait obligé, en tant que frère. La question était de savoir comment il pourrait s'y prendre et si Tor le laisserait faire, alors qu'il s'était tenu à l'écart de la ferme pendant sept ans.

- C'est le départ ? Demanda le grand-père.

- Oui.

Elle se pencha et appuya sa joue contre la sienne. Ça piquait. Il sentait le vieillard, les vieux habit, le renfermé, le gâteau aux amandes et le café. Elle l'embrassait pour la première fois, il parvint à lever le bras assez haut pour lui toucher la joue.

- Au revoir, murmura-t-elle.

Qu'aurait-elle pu lui dire d'autres ? Rien qu'elle puisse promettre.

- Porte-toi bien !

Livre lu dans le cadre du logo_challenge_ABC- (14/26)

6 mars 2010

Paddy Clarke ha ha ha – Roddy Doyle

Livre lu dans le cadre du partenariat Blog-o-Book et les Éditions Robert Laffont

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Robert Laffont – novembre 1994 – 307 pages

10x18 – octobre 2005 – 307 pages

Robert Laffont – février 2010 – 398 pages

traduit de l'anglais (Irlande) par Léon Mercadet

Présentation de l'éditeur :

Dublin à la fin des années 60. Paddy Clarke est un garnement de dix ans à l'imagination débordante qui n'adore rien tant que de jouer des tours pendables à ceux qui l'entourent. Il rêve de devenir missionnaire, adore les Indiens, résiste aux coups durs mais a le coeur fendu quand ses parents se disputent. Ses ruses de Sioux n'empêcheront pas son père de quitter le foyer conjugal. Cruauté enfantine oblige, ses copains d'école se mettent à le boycotter : " Ha Ha Ha ". L'histoire de Paddy Clarke, ce petit frère de Huck Finn et de Holden Caulfield, a valu à son auteur, le grand Roddy Doyle, le prestigieux Booker Prize.

Auteur : Né à Dublin en 1958, Roddy Doyle s’est imposé dès ses premiers pas comme l’un des auteurs majeurs de la littérature irlandaise contemporaine. Le grand public le découvre grâce à sa célèbre trilogie de Barrytown (The Commitments, The Snapper, The Van) publiée dans la collection « Pavillons » en 1996 (réédités en « Pavillons poche » en 2009) et portée à l’écran par Alan Parker et Stephen Frears. Il reçoit la consécration avec Paddy Clarke Ha Ha Ha, qui obtient le Booker Prize en 1993. Ce prix et les ventes exceptionnelles de ce roman lui permettent d’abandonner son travail d’enseignant et de se consacrer entièrement à l’écriture. 

Mon avis : (lu en mars 2010)

Ce livre m'a été proposé par BoB au moment où je participais au Swap Saint Patrick organisé par Canel, j'ai eu aucune hésitation à le choisir. Et c'est avec plaisir que j'ai découvert ce livre à la fois plein d'humour et de réalisme qui raconte l'histoire de Paddy Clarke est un garçon de 10 ans qui vit à Barrytown, un quartier à la périphérie du Dublin dans les années 1960. Il est l'aîné de la famille, Sinbad est son petit frère, il y a aussi Catherine et Deirdre ses petites sœurs. Il nous raconte l'école, les copains : Kevin, Liam et Aidan. Il est très imaginatif dans ses jeux, ses bêtises. Il a soif d'apprendre et il pose beaucoup de questions. Il adore Geronimo, imagine devenir missionnaire, oblige ses copains à jouer les lépreux et il terrorise son petit frère Sinbad. A la maison, il se rend compte que ces parents se disputent, il va essayer par tous les moyens de faire cesser ces disputes : en ramenant de l'école de bonnes notes, en sollicitant son père pour réciter ses leçons... Paddy est inquiet et guette les discutions entre ses parents, il se lève la nuit pour les espionner. Mais rien n'y fait, un jour son père quitte la maison et à l'école Paddy devient le centre d'un boycott de la part des autres écoliers.

Un livre qui est un retour en enfance et qui m'a fait penser à la fois au Petit Nicolas ou à la Guerre des Boutons, un livre drôle et réaliste avec des personnages très attachants.

Un petit défaut cependant, il n'y a aucun chapitre et les histoires s'enchaînent. Il est un peu difficile de s'interrompre dans sa lecture... Cela reste pourtant une très belle découverte !

Un grand merci à logo_bob_partenariat et robert_laffont de m'avoir permis de découvrir ce livre.

Extrait : (page 20)

Aux allumettes, je préférais la loupe. On passait des après-midi entiers à brûler des petits tas d'herbe sèche. J'aimais voir l'herbe changer de couleur. J'aimais quand la flamme se faufilait dans les herbes. C'était plus facile avec une loupe. Plus facile, mais il fallait être doué. Si le soleil sortait assez longtemps, on pouvait découper une feuille de papier sans la toucher, il suffisait de poser une pierre à chaque coin pour l'empêcher de s'envoler. On faisait la course : allumer, souffler, éteindre, allumer, souffler. Celui qui finissait de couper sa feuille le premier avait le droit de brûler la main de l'autre. On dessinait un bonhomme sur la feuille et le feu perçait des trous dedans ; dans ses mains et ses pieds, comme Jésus. On lui dessinait des cheveux longs. On gardait le zizi pour la fin.

On a taillé des routes dans les orties. Maman m'a demandé ce que j'allais faire dehors avec mon duffle-coat et mes gants par ce beau temps.

- On va couper les orties.

C'étaient des grandes orties ; des orties géantes. Les boutons des brûlures étaient colossaux, ça grattait sans fin même quand ça ne brûlait plus. Les orties occupaient tout un coin du champ derrière les boutiques. Rien d'autre ne poussait là, rien que les orties. On a fauché à grands revers de bâton et il a encore fallu les piétiner. Le jus des orties giclait. On ouvrait des routes droit à travers, chacun la nôtre à cause des bâtons qui moulinaient. Quand on est rentré à la maison, les routes s'étaient rejointes et il ne restait plus une ortie debout. Les bâtons étaient tout verts et j'avais deux brûlures sur la figure : j'avais enlevé mon passe-montagne parce qu'il me grattait la tête.

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