Le roman de Yocandra – Zoé Valdès
Lu dans le cadre d'un partenariat Livraddict et JC Lattès
Babel – janvier 1997 – 161 pages
Actes Sud – janvier 1999 – 141 pages
Pocket – mai 1999 – 161 pages
Jean-Claude Lattès – mai 2011 - 331 pages
Jean-Claude Lattès – novembre 2011 – 480 pages
traduit de l’espagnol (Cuba) par Carmen Val Julián et Albert Benssoussan
Titre original : La Nada Cotidiana, 1995, 2006
El Todo Cotidiana, 2010
Quatrième de couverture :
"Yocandra, c'est à la fois moi et une autre.
Yocandra, c'est la muse du poète que j'ai aimé. Yocandra, c'est aussi Jocaste (Yocasta) et Cassandra, la fatalité de la prophétie et des prédictions. Yocandra, c'est surtout Cuba, qui lie pour toujours ma vie d'ici et ma vie de là-bas. Le Néant quotidien, roman catharsis, m'a imposé l'exil. Le Paradis du néant, roman de sérénité, m'a imposé la mémoire. Voilà comment deux livres m'ont sauvé la vie !" Zoé Valdés.
Réunis pour la première fois en un seul opus, voici les deux volets de l'histoire de Yocandra. Avec un savant mélange d'humour féroce, de mélancolie et de tendresse, Zoé Valdés livre ici une oeuvre majeure sur l'exil et le coût de la liberté.
Auteur : Née en 1959 à Cuba, Zoé Valdés vit exilée en France depuis 1995. Poète, scénariste, romancière, elle a vu ses ouvrages traduits dans une quinzaine de langues. Des succès internationaux comme Le Néant quotidien, La Douleur du dollar, La Fiction Fidel ou Danse avec la vieen ont fait l’un des écrivains cubains les plus connus.
Mon avis : (lu en janvier 2012)
Lorsque Livraddict nous a proposé en partenariat avec les éditions JC Lattès ce livre écrit par une cubaine, je n'ai pas hésité un instant. D'une part, j'ai découvert pour la première fois un auteur cubain grâce au Challenge Destination organisé par Evertkhorus et d’autre part mon fils de 16 ans a eu l'opportunité de partir en voyage solidaire à Cuba cet été et il en est revenu avec de nombreux souvenirs à nous raconter.
Ce livre regroupe deux livres Le Néant quotidien initialement publié en 1995 et Le Paradis du néant publié quinze ans plus tard.
Le premier livre est le récit de la vie d'une jeune cubaine de sa naissance le 1er Mai 1959 au années 90. A sa naissance, ses parents lui ont donné le prénom de « Patrie », à l'âge de seize ans, par amour, elle prend le nom de Yocandra. Elle décrit le quotidien difficile de La Havane durant les années castristes, les problèmes de ravitaillements, de logement, l'absence de liberté...
Yocandra est une femme qui ressemble beaucoup à Zoé Valdès, elle aime Cuba mais pas ses dirigeants... « Elle vient d’une île qui avait voulu construire le Paradis, et qui a créé l’Enfer. »
Dans le deuxième livre, Yocandra a quitté Cuba en passant par Miami. Elle a réussi à obtenir un visa pour Paris. Là, elle voudrait oublier Cuba et trouver la liberté. Mais elle loge dans un immeuble où se trouvent également de nombreux artistes et intellectuels cubains. Elle nous décrit son quotidien et les péripéties avec des voisins hauts en couleurs. La vie n'est pas si facile pour une exilée. Sa liberté d'expression n'est pas totale, elle est méfiante et se sait surveillée, elle subit des pressions d'autant qu'elle a laissé à La Havane, sa mère et surtout l'homme qu'elle aime.
J'ai trouvé le premier livre pas toujours facile à lire, j'ai eu du mal à suivre le fil de la pensée de Zoé Valdès. Le livre semble avoir été écrit d'un jet et les idées et les évènements racontés se bousculent. Je n'ai pas aimé les histoires de cœurs de Yocandra avec le Traite, ou le Nihiliste et les passages assez chauds... Serait ce l'une des caractéristiques de la littérature cubaine ? Mais cette fois-ci, je n'ai pas été prise de court, l'auteur annonce la couleur dès la première ligne du chapitre : « Tout porte à croire que les chapitres VIII de la littérature cubaine sont condamnés à être pornographiques. »
Par contre, j'ai été très intéressé par tous les détails de la vie quotidienne à Cuba, les restrictions, les problèmes d'habitats, les études imposées... Une vie malheureusement sans aucun espoir d'avenir.
J'ai lu les 300 pages du deuxième livre plus facilement que les 140 pages du premier. Le style est beaucoup plus enlevé avec un mélange d'humour et d'émotion. A travers de nombreuses anecdotes Yocandra fait part au lecteur de sa vie d'exilée à Paris. Elle est très attachante et je me suis rendue compte qu'il lui est impossible d'oublier Cuba et de profiter de cette liberté recherchée. J'ai adoré l'immeuble où Yocandra vit et l'ambiance quasi familiale qu'il y règne.
Globalement, j'ai vraiment aimé cet hymne d'amour à Cuba et aux Cubains. Ce livre nous permet à nous occidentaux de mieux comprendre la vie d'une cubaine à Cuba et la vie d'une cubaine en exil.
Un grand Merci à Livraddict et aux éditions JC Lattès pour ce partenariat.
Extrait : (page 18)
Ma mère raconte que c’était le 1er Mai 1959, elle était enceinte de neuf mois, elle savait déjà que j’étais une fille. Elle raconte qu’elle avait marché et marché depuis la Vieille Havane jusqu’à la place de la Révolution pour écouter le Commandant. En plein discours, j’avais commencé à donner des coups dans le bassin de ma mère, à lui rompre les os, et il avait fallu que des gens la portent sur leurs épaules jusqu’à la clinique Quina Reina. Avant de quitter la foule, comme elle passait devant la tribune, le Che avait posé le drapeau cubain sur son ventre, mais c’est à peine si elle s’en était rendu compte, car j’étais insupportable, je lui en faisais voir de toutes les couleurs, et fidel poursuivait sa harangue plus verte que les palmiers. Et moi, je donnais des coups de tête, de coude, de pied en tous sens, en cherchant à quitter son corps.
Son ventre était considérablement descendu jusqu’au pubis, elle dit avoir ressenti comme une explosion d’étoiles. Elle ferma les yeux et savoura la douleur de l’attente. Une fois de plus, elle attendait, et cette fois c’était bien différent. Mon père arriva, il était recouvert d’une terre rouge qu’il répandait partout, il avait gardé son chapeau de paille enfoncé jusqu’aux oreilles et sa machette à la main, on était allé le chercher en pleine récolte de la canne à sucre. Il s’accroupit près du ventre et frémit en découvrant le drapeau qui lui parut un bon présage. Et elle expliqua que c’était le Che qui le lui avait posé et il faillit s’évanouir de fierté, il gonfla la poitrine et eut un sourire satisfait.
Elle dit qu’à ce moment-là elle était moins sûre de vivre les douleurs de l’enfantement. Elle suggéra qu’elle avait peut-être tout simplement mal à l’estomac. Mais après plusieurs contractions, elle avait pensé que ce n’était sans doute pas si anodin, si purement physiologique. Son corps se présentait comme jamais, dans une dimension nouvelle, entre le prodigieusement grand et le prodigieusement petit. Son intimité s’exposait à l’infini, telle une équation mathématique. Elle était tout au bord de la palpitation du néant. Que de vie en elle !
Challenge 5%
Rentrée Littéraire 2011
31/35
Challenge le nez dans les livres
La reine des lectrices : 5/8
Lu dans le cadre du Challenge Petit BAC 2012
"Prénom"