Sonatine - octobre 2009 – 471 pages
traduction de l'anglais (États-Unis) par Julie Sibony
Présentation de l'éditeur :
Lorsque Ethan Muller, propriétaire d'une galerie, met la main sur une série de dessins d'une qualité exceptionnelle, il sait qu'il va enfin pouvoir se faire un nom dans l'univers impitoyable des marchands d'art. Leur mystérieux auteur, Victor Crack, a disparu corps et âme, après avoir vécu reclus près de quarante ans à New York dans un appartement miteux. Dès que les dessins sont rendus publics, la critique est unanime : c'est le travail d'un génie. La mécanique se dérègle le jour où un flic à la retraite reconnaît sur certains portraits les visages d'enfants victimes, des années plus tôt, d'un mystérieux tueur en série. Ethan se lance alors dans une enquête qui va bien vite virer à l'obsession. C'est le début d'une spirale infernale à l'intensité dramatique et au coup de théâtre final dignes des plus grands thrillers. Bien loin des polars calibrés habituels, Jesse Kellerman, styliste hors pair, nous offre ici un roman d'une indéniable qualité littéraire qui, doublée d'une intrigue machiavélique, place d'emblée le livre au niveau des plus grandes réussites du genre, tels Mystic River, de Dennis Lehane, ou L'Analyste, de John Katzenbach.
Auteur : Jesse Kellerman est né en 1978. Il est le fils des écrivains Jonathan et Faye Kellerman. Les Visages est son premier roman publié en France.
Mon avis : (lu en février 2010)
J’avais lu beaucoup d’avis positif sur ce livre sur la blogosphère (Amanda Meyre, Canel, Cathulu et Cuné) et lorsque je l’ai vu à la bibliothèque, je n’ai pas hésité…
Ce roman policier se déroule dans le milieu des galeries d’arts.
Ethan Muller, jeune galeriste en vogue découvre des cartons de dessins qui semblent vraiment géniaux. L’auteur de ses dessins, Victor Crack, a mystérieusement disparu après avoir vécu près de quarante ans dans un appartement misérable de New York. Ethan organise une exposition qui est un très grand succès. Lee McGrath, un flic retraité et malade, reconnait sur certains dessins les visages de jeunes enfants assassinés. Ethan veut comprendre qui est Victor Crack et pourquoi ces dessins. Il va donc mener l’enquête avec l’aide de Samantha la fille de Lee McGrath.
Régulièrement le récit est entrecoupé par des interludes qui dévoilent peu à peu les secrets d’une histoire familiale depuis 1847 jusqu’à aujourd’hui.
A travers cette histoire, on découvre un peu le milieu de l'art. L’intrigue est parfaitement construite, avec du suspens et les personnages sont attachants. En conclusion, c’est un livre qui se lit facilement et que j’ai beaucoup aimé. A lire !
Extrait : (début du livre)
Au début, je me suis mal comporté. Je ne vais pas vous mentir, alors autant jouer cartes sur table dès maintenant : si j’aimerais croire que je me suis racheté par la suite, il ne fait aucun doute que mes intentions, du moins au début, ont manqué quelque peu de noblesse. Et encore, c’est un euphémisme. Alors puisqu’il faut être honnête, soyons honnête : j’étais motivé par l’appât du gain et surtout par le narcissisme ; un sentiment de toute-puissance profondément enraciné dans mes gènes et dont je semble incapable de me débarrasser, bien qu’il me fasse parfois honte. Déformation professionnelle, j’imagine, mais aussi une des raisons qui m’ont poussé à tourner la page. « Connais-toi toi-même. »
Et merde. Je m’étais promis de faire un effort pour ne pas parler comme un sale con prétentieux. Il faut que je fasse plus roman noir ; en tout cas j’aimerais bien. Mais je ne crois pas que ce soit mon truc. D’écrire par petites phrases hachées. D’employer des métaphores graveleuses pour décrire des blondes sensuelles (mon héroïne est brune, pas spécialement du genre sensuel ; elle n’a pas les cheveux noir de jais lâchés en une crinière dégoulinante ; ils sont châtain clair et la plupart du temps pragmatiquement attachés en arrière – des queues-de-cheval soignées ou des chignons improvisés – ou bien juste coincés derrière les oreilles). Je n’y arrive pas, alors pourquoi me forcer ?
Nous n’avons chacun qu’une histoire à raconter et nous devons le faire comme ça nous vient naturellement. Je ne porte pas de flingue ; je ne suis pas coutumier des bagarres ou des courses-poursuites en voiture. Tout ce que je peux faire, c’est dire la vérité, et, en vérité, je suis peut-être bien un sale con prétentieux. Peu importe. Je n’en mourrai pas.
« C’est comme ça », ainsi qu’aime à le répéter Samantha.
Je ne suis pas tout à fait d’accord. Une maxime qui me conviendrai mieux – pour ma vie en général, mon travail et cette histoire en particulier – serait plutôt : « C’est comme ça, sauf quand c’est autrement, c'est-à-dire la plupart du temps. » Je ne connais toujours pas toute la vérité, et je doute que je la connaisse un jour.
Mais je m’emballe.
Je veux simplement dire que, ayant vécu longtemps dans un monde d’illusions, un genre de bal costumé géant où chaque phrase est soulignée de clins d’œil entendus et entourée de moult guillemets, c’est un soulagement que de pouvoir m’exprimer sincèrement. Et si ma sincérité ne sonne pas comme celle de Philip Marlowe, tant pis. C’est comme ça. Ce livre est peut-être un roman policier, mais, moi, je ne suis pas un policier. Je m’appelle Ethan Muller, j’ai 33 ans, et avant je travaillais dans l’art.