Lu dans le cadre des Challenges : challenge_100_ans_article_300x225 et coeur_vs3

le_coeur_des_un_chasseur_solitaire Stock – mars 2007 – 530 pages

traduit de l'anglais (États-Unis) par Frédérique Nathan

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LGF – 1972 – 445 pages

LGF – 1983 – 445 pages

LGF – 1997 – 445 pages

Stock – avril 2000 – 476 pages

LGF – avril 2001 - 445 pages

Quatrième de couverture :

Habitants d'une petite ville du fin fond des États-Unis, les personnages du Cœur est un chasseur solitaire se sentent profondément seuls, abandonnés avec leurs révoltes. Subsistent cependant certains rêves. Pour Mick l'adolescente complexée, celui d'apprendre à jouer du violon qu'elle s'est confectionné, et qu'elle cache sous son lit. Biff, lui, observe ses clients pour échapper à sa vie de couple bien terne. Jake rêve d'un monde plus juste. Le docteur Copeland essaie pour sa part d'œuvrer concrètement à la réalisation de ce monde car sa couleur de peau l'expose à des brimades quotidiennes. Leur rencontre avec John Singer, sourd-muet dont le calme et la courtoisie inspirent confiance, leur permet d'entrevoir la possibilité d'être compris.
Cette édition comprend également l'esquisse de ce grand roman ainsi que l'ensemble des essais et des articles que Carson McCullers a publiés de son vivant. Ces textes précisent les références de ce prodige de la littérature américaine tout en mettant en valeur sa sensibilité et son engagement.

Auteur : Née à Columbus, Georgie le 19 février 1917, dans le vieux Sud des États-Unis, l'adolescente Lula Carson Smith trompe son ennui entre le piano, qu'elle découvre à l'âge de 10 ans, et l'écriture. En 1934, elle délaisse ses ambitions de concertiste pour se rendre à New York. Là, elle se consacre à l'écriture en suivant des cours de création littéraire à la Columbia University. Un an plus tard, elle épouse le caporal James Reeves McCullers. Carson se consacre à l'ébauche du roman 'Le cœur est un chasseur solitaire' (1940) qui est un véritable succès. D'autres œuvres suivront parmi lesquelles 'Reflet dans un œil d'or' (1942) et 'La ballade café triste' (1943). Après avoir divorcé de McCullers, elle se remarie avec celui-ci bien qu'elle entretienne une relation amoureuse avec son amie Annemarie Schwarzenbach. Fascinée par Paris comme tous ceux de la 'Lost Generation', elle s'y rend régulièrement et se promène à Saint-Germain-des-Prés aux côtés de son mari. Malgré leur relation de plus en plus tendue, ils achètent une maison à Bachiviliers en 1952. Un an plus tard, Reeves se suicide et laisse une Carson de plus en plus fébrile. Les problèmes de rhumatismes aigus qu'elle connaît depuis ses 15 ans l'handicapent ; Carson se fragilisera d'année en année pour mourir à seulement 50 ans le 29 septembre 1967.

Mon avis : (lu en janvier 2010)

Livre lu dans le cadre du Challenge Les coups de coeur de la blogosphère proposé par Brize et du Challenge 100 ans de littérature américaine

Ce roman a été écrit en 1940 par une jeune femme de 22 ans, Carson McCullers, c’est son premier roman. L’histoire se situe à la fin des années trente, dans une petite ville du Sud profond des Etats-Unis. L’auteur nous dresse le portrait de personnages attachants qui sont tous les clients du "Café de New York". Biff Brannon est le propriétaire du café, il aime observer ses clients pour oublier sa vie de couple qui ne lui plaît pas. Il aime aider les marginaux, les anormaux de toutes espèces. Jack Blount est un révolté que personne ne veut entendre surtout lorsqu’il est imbibé d’alcool ! Il rêve d’un monde plus juste. Benedict Copeland est le seul médecin noir de la ville, il souffre du mépris des Blancs qu’il subit au quotidien. Et il se bat chaque jour pour sortir son peuple de l’ignorance et de la servitude. Mick Kelly est une jeune fille garçon manqué qui ne rêve que de musique, la nuit Mick rôde dans les rues pour écouter la musique qui s’échappe des fenêtres ouvertes. Mick rêve de devenir un jour une grande musicienne. John Singer est silencieux et énigmatique, il est sourd-muet et lit sur les lèvres. Il a une grande écoute et chacun va lui confier sa révolte, ses espoirs, ses rêves. Mais aucun ne sait pas que toutes les pensées de Singer sont pour son ami Antonapoulos, sourd-muet également, qui est enfermé dans un hôpital psychiatrique.

Un livre sur la solitude des hommes plutôt pessimiste mais surtout plein d’humanité. Une superbe découverte d’un beau roman américain !

Extrait : (page 51)

Mick joignit les mains en forme de coupe les serra fort, et souffla à travers l’interstice entre ses pouces. Ses joues se gonflèrent et on n’entendit d’abord que le bruit de l’air s’engouffrant dans ses poings. Puis un sifflement aigu, perçant, retentit, et au bout de quelques secondes Bubber surgit du coin de la maison.

Elle secoua la sciure des cheveux de Bubber et redressa le bonnet de Ralph. Ralph ne possédait rien de plus beau que ce bonnet. Il était en dentelle et entièrement brodé. Le ruban du menton était bleu d’un côté et blanc de l’autre, et de larges rosettes surmontaient les oreilles. Sa tête était devenue trop grosse pour le bonnet et la broderie s’effilochait ; pourtant, Mick le lui mettait toujours quand elle l’emmenait en promenade. Ralph n’avait pas de véritable landau comme la plupart des bébés, ni de chaussons d’été. Il fallait le trimbaler dans un vieux chariot ringard qu’elle avait reçu pour Noël trois ans auparavant. Mais le beau bonnet lui donnait fière allure.

La rue était déserte : c’était dimanche, en fin de matinée, il faisait très chaud. Le chariot grinçait et bringuebalait. Bubber ne portait pas de chaussures, et le trottoir lui brûlait les pieds. Les ombres courtes des chênes verts donnaient une fausse impression de fraîcheur.

« Monte dans le chariot, dit-elle à Bubber. Et prends Ralph sur tes genoux. – Je peux très bien marcher. »

Le long été donnait toujours la colique à Bubber. Il était sans chemise, et on voyait ses côtes blêmes et saillantes. Le soleil, au lieu de le bronzer, le rendait pâle, et ses petits tétons se détachaient sur son torse comme des raisins secs bleutés.

« Ça ne me dérange pas de te tirer, insista Mick. Monte. – D’accord. »

Mick, nullement pressée d rentrer, traînait lentement le chariot. Elle se mit à parler aux gosses. En fait, c’était à elle-même plutôt qu’aux enfants qu’elle s’adressait.

« C’est curieux, les rêves que j’ai faits ces temps-ci. On dirait que je nage. Mais c’est pas dans l’eau que je nage, je pousse les bras, à travers des grandes foules de gens. La foule est cent fois plus nombreuse que chez Kresses la samedi après-midi. C’est la plus énorme du monde. Et quelquefois je hurle et je nage au travers, en bousculant les gens sur mon passage – et d’autres fois je suis par terre et on me piétine et mes intestins se répandent sur le trottoir. Ça ressemble davantage à un cauchemar qu’à un rêve ordinaire… »

Le dimanche, la maison était pleine de monde parce que les pensionnaires avaient des visites. On froissait des journaux, et il y avait de la fumée de cigare, et des bruits de pas dans l’escalier.

« Certains trucs, on veut simplement les garder pour soi. Pas parce qu’ils sont pas bien, seulement parce qu’on veut que ça reste secret. Il y a deux ou trois choses que je ne voudrais pas que vous sachiez, même vous. »

Bubber sortit quand ils arrivèrent au coin pour l’aider à descendre le chariot sur la chaussée et à le hisser sur le trottoir suivant.

« Il y a une chose pour laquelle je donnerais n’importe quoi. Un piano. Si on avait un piano, je m’exercerais chaque soir et j’apprendrais tous les morceaux du monde. Y a rien que je désire plus. »

Lu dans le cadre du challenge coeur_vs3 proposition de Brize

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Livre lu dans le cadre du Challenge 100 ans de littérature américaine

Voir le_coeur_des_un_chasseur_solitaire_25 (suite) Carson McCullers

A propos de l'édition qui comprend également l'esquisse de ce grand roman ainsi que l'ensemble des essais et des articles que Carson McCullers a publiés de son vivant. Ces textes précisent les références de ce prodige de la littérature américaine tout en mettant en valeur sa sensibilité et son engagement.