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A propos de livres...
7 mars 2009

Le livre des questions – Pablo Neruda

le_livre_des_questions Gallimard jeunesse - février 2008 – 180 pages

Illustré par Isidro Ferrer et traduit par Claude Couffon

Présentation : Ce recueil poétique, considéré comme le testament de Pablo Nedura, se présente sous forme de questionnement. Les thèmes sont variés : le temps qui passe, la vie, la mort, la nature, Dieu ou encore la politique. Cet ouvrage est le dernier livre écrit par le grand poète chilien du XX° siècle qui est, aujourd'hui encore, considéré comme le chantre de l'Amérique latine et des idées communistes. Sa poésie, de par sa forme particulière et certains thèmes traités, est parfois difficile d’accès. Les illustrations en noir et blanc, objets graphiques faits de collage de matériaux, sont parfaitement adaptées aux textes. Une vulgarisation de l’écriture qui trouvera écho chez des jeunes déjà très ouverts à la littérature.

L'auteur :
Né le 12 juillet 1904 à Parral au Chili, Pablo Neruda (de son vrai nom Ricardo Neftali Reyes Basoalto) est plusieurs fois consul, puis sénateur. Il reçoit le Prix national de Littérature en 1945. Entré dans la clandestinité en 1948, Prix mondial de la Paix en 1950, il revient au Chili en 1952. Prix Nobel de Littérature en 1971, il meurt à Santiago du Chili le 23 septembre 1973.

L'illustrateur :
Né en 1963, Isidro Ferrer est né à Madrid. Il fait des études de théâtre puis installe son studio graphique à Huesca. Il développe son activité dans le design éditorial, l'affiche, l'illustration, la BD, la direction artistique, le montage d'exposition et l'animation pour la télévision. L'art de Ferrer est basé sur le principe de la construction d'objets : il fabrique ses «objets graphiques» par le collage de matériaux. Il a exposé son oeuvre en Espagne, en France et en Slovaquie.

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Mon avis : (lu en mars 2009)
Je suis tombé sur ce livre à la bibliothèque, je ai trouvé belle sa couverture et son titre m'a interpellé et je l'ai ouvert... Ce livre est le dernier texte écrit par le poète chilien Pablo Neruda pour inviter petits et grands à la poésie. Ce sont 72 poèmes sous forme d'une série de questions sans réponses qui interrogent la nature, les animaux, la vie ou la mort. Ce sont des questions pratiques, drôles, souvent surréalistes et parfois angoissantes. Avec ces questions, Pablo Neruda redevient un enfant et il interroge sans cesse ce qu’il voit et entend, mais un vieil enfant, riche de ses expériences.

Chaque question fait naître des images, vagabonder l’esprit et donne envie d’imaginer des réponses ou de poser d’autres questions.

A chaque page de texte répond une page d’image, conçue par Isidro Ferrer, designer, illustrateur et graphiste madrilène, comme un collage de papiers ou d’objets. Les images n’illustrent pas littéralement le texte mais adoptent son aspect inventif en montrant des formes et des objets dont l’assemblage drôle ou étonnant apprend à les regarder autrement. Ce livre nous invite à partir dans l'imaginaire, à suivre un vent de liberté et à regarder et à penser le monde autrement...

Ce livre a été publié chez Gallimard Jeunesse, mais je pense qu'il est également destiné aux adultes. A découvrir !

Extraits : 

I

Pourquoi les énormes avions ne promènent-ils leurs petits ?

Quel est l'oiseau aux plumes jaunes qui remplit le nid de citrons ?

Pourquoi n'apprend-on aux hélicoptères à butiner sur le soleil ?

Où la pleine lune a-t-elle laissé son sac nocturne de farine ?

XIX

A-t-on compté l'or que possède le territoire du maïs ?

T'a-t-on dit que la brume est verte, à midi, en Patagonie ?

Qui chante là, au fond de l'eau, dans la lagune abandonnée ?

De quoi rit-elle, la pastèque au moment où on l'assassine ?

XX

Est-il vrai que l'ambre contient les pleurs versés par les sirènes ?

Comment s'appelle cette fleur qui vole d'un oiseau à l'autre ?

Ne vaut-il mieux jamais que tard ?

Et pourquoi le fromage a-t-il pour ses exploits choisi la France ?

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7 mars 2009

Les Demeurées - Jeanne Benameur

les_demeur_es Gallimard – juin 2002 – 80 pages

Prix UNICEF 2001

Quatrième de couverture
La mère, La Varienne, c'est l'idiote du village. La petite, c'est Luce. Quelque chose en elle s'est arrêté. Pourtant, à deux, elles forment un bloc d'amour. Invincible. L'école menace cette fusion. L'institutrice, Mademoiselle Solange, veut arracher l'enfant à l'ignorance, car le savoir est obligatoire. Mais peut-on franchir indemne le seuil de ce monde ? L'art de l'épure, quintessence d'émotion, tel est le secret des Demeurées. Jeanne Benameur, en dentellière, pose les mots avec une infinie pudeur et ceux-ci viennent se nouer dans la gorge.

Auteur : Née 1952, en Algérie d'un père tunisien et d'une mère italienne, Jeanne Benameur vit en France depuis l'âge de 5 ans. Elle débute sa carrière d'écrivain avec des livres de jeunesse comme 'Samira des quatre routes' ou 'Adil coeur rebelle', avant d'ouvrir son registre à la littérature pour adulte. Lauréate du prix Unicef en 2001, Jeanne Benameur se distingue sur la scène littéraire avec 'Les Demeurées', l'histoire d'une femme illettrée et de sa fille. Directrice de collection chez Actes Sud junior ainsi qu'aux éditions Thierry Magnier, l'auteur publie son autobiographie, 'Ça t'apprendra à vivre' en 1998. Influencée par ses origines culturelles, Jeanne Benameur s'inspire aussi de son expérience d'enseignante pour évoquer les thèmes de l'enfance (' Présent ?') mais aussi de la sensation et du corps (' Laver les ombres') dans un style pudique et délicat.Elle publie aussi 'Les Mains libres'.

Mon avis : (lu en mars 2009)

Les demeurées, ce sont une idiote du village et sa fille, fruit d'un contact éphémère avec un ivrogne de passage. Entre ces deux êtres d'infortune, nulle parole. Leur amour est silencieux, bâti sur leur seule présence l'une à l'autre. Leur vie recluse, solitaire, doit cependant prendre fin lorsque la petite Luce prend le chemin de l'école. Là, le monde l'attend et mademoiselle Solange, l'institutrice, est décidée à rompre l'ignorance, à faire jaillir les mots. La Varienne et sa fille vivent cette intrusion de l'extérieur comme une menace. Ensemble, elles renforceront ce lien primal, instinctif qui les unit : un amour quasi mystique, indéfectible, originel.

Le livre est petit mais l’histoire est belle et grande. C’est l’histoire d’une mère « demeurée » qui donne un amour indéfectible à sa fille Luce. Celle-ci refuse d’apprendre malgré son institutrice qui voudrait l’aider. Ce livre est bouleversant de justesse et de poésie. Les personnages de la mère, de Luce et de Mademoiselle Solange sont attachants et plein d’humanité. La fin est bouleversante et pleine d'espoir. A lire absolument !

Merci aux bloggeuses qui m'ont fait découvrir ce livre... en particulier Bellesahi et Florinette 

Extrait :

"Des mots charriés dans les veines. Les sons se hissent, trébuchent, tombent derrière la lèvre.
Abrutie.
Les eaux usées glissent du seau, éclaboussent.
La conscience est pauvre.
La main s’essuie au tablier de toile grossière.
Abrutie.
Les mots n’ont pas lieu d’être. Ils sont.

C’est le soir. Elle ferme les volets. Elle tire à elle le bois mangé, les ferrailles crues, rivées encore dieu sait comment à ce qui résiste au vent, à l’orage, à son bras las qui tire. Dans la bascule de la lumière, son cœur.
Chaque jour, un saut infime. Chaque jour, et rien.
Elle a perdu.
Elle se tourne vers le noir.
Elle va, le regard qui bute sur le monde.
Comme empesée, ses mains ont des tournures de vieille.

Sans rides, la bouche sans lumière esquissant le sourire qui s’achève dans la chair même de la joue, à l’intérieur les petits bourrelets lisses, serrés sous les canines, jusqu’au sang.
Il n’y a rien à l’intérieur de cette bouche le soir. Rien que des choses sans nom qui tentent, hagardes, la pénible venue au souffle. Rien que le silence qui pétrit et le sang et la chair. Elle reste les yeux fixes.
Abrutie."

5 mars 2009

Comme une mère – Karine Reysset

comme_une_m_re L'Olivier – mars 2008 – 178 pages

Résumé : Elles se retrouvent côté à côte dans la salle des naissances. Elles sont toutes les deux venues
seules. Pour l’une comme pour l’autre, ce jour doit signer un nouveau départ. La très jeune Emilie accouche sous X et croit pouvoir « tout recommencer à zéro », transformer son passé chaotique, un mauvais souvenir. Judith, elle, attend avec une impatience folle et une joie teintée d’inquiétude la naissance de son fils Camille, un miracle après tant d’années de grossesses déçues.
Mais, pour l’une comme pour l’autre, rien ne se passera comme prévu. Judith perd son bébé et, dans un geste de détresse, enlève de la chambre voisine l'enfant promis à l'abandon.
Dès lors, le destin de ces deux femmes est irrémédiablement lié.

L’auteur : Karine Reysset est née en 1974. Elle a grandi entre Arras, Rouen et la banlieue parisienne. Après dix ans passés à Paris, elle s'installe à Saint-Malo. Elle a travaillé durant six ans dans le secteur de l'édition avant de se consacrer pleinement à l'écriture. En 2003, elle publie son premier roman, L'Inattendue, suivi d'En douce en 2004 aux Éditions du Rouergue et de À ta place aux Éditions de l'Olivier en 2006.

Mon avis : (lu en mars 2009)

C'est le premier livre que je lis de cette auteur, et cela m'a beaucoup plu. L'auteur nous raconte l'histoire d'Émilie, jeune de 18 ans qui accouche sous X et de Judith qui accouche le même jour d'un bébé qui ne vivra pas. Cette dernière va enlever Léa, le bébé d'Émilie. L'auteur nous parle alors de l'amour maternelle. Émilie va retrouver son enfant et va essayer de lui donner un avenir grâce à l'amour qu'elle a découvert pour Léa. Judith est seule, elle va vouloir retrouver cette enfant qu'elle a aimé si fort pendant dix jours. C'est un roman simple et plein de délicatesse, avec de superbes descriptions de Saint-Malo, ville où se déroule la plus grande partie du livre, du bord de mer. C'est un livre qui se lit très facilement malgré un sujet douloureux. On est touché par ces deux femmes si fragiles, avec leurs difficultés, leurs doutes...

Extrait : Émilie (page 32)

"- Je la mets dans le lit avec vous ?

Quand Mme Blanchot arrive avec Léa dans son berceau à roulettes, je suis émue que je ne le voudrais. Je flanche carrément.

- Non, à côté, je préfère.

Je ne peux pas. L'entendre, la voir, oui, peut-être, oui, il le faut bien, mais la serrer contre moi, c'est au-dessus de mes forces. Elle risque de rester collée. Elle a beaucoup de cheveux, comme moi à la naissance. Sa peau est belle, ses traits sont fins. Ses petits poings sont fermés. Elle est beaucoup trop mignonne.

- J'ai des choses à te dire...

Ma voix s'étrangle, je ne suis pas encore prête. Il faut que je mette de l'ordre dans mes pensées, sinon ça va être de la bouillie de mots, et elle ne va rien comprendre. C'est déjà suffisamment compliqué. Je suis épuisée. De toute façon, elle dort comme un loir. Quand on sera en forme toutes les deux, on pourra discuter. J'ai juste la force de rapprocher le berceau de mon lit. Je lui attrape la main, ça vaut peut-être mieux que tous les discours. Ses doigts s'enroulent autour de mon pouce.

Elle soupire dans son sommeil. Sa poitrine se soulève. Je pose mon autre main dessus. C'est moi qui ai fait ça. Comment ai-je réussi quelque chose d'aussi parfait ? J'ai une crampe, mais je ne retire pas mon doigt. Je me mords les joues pour ne pas pleurer."

Extrait : Judith (page 36)

"Ce que j'ai appris hier, c'est que tu avais vécu cinq minutes, et que ces minutes, tu les avais passées dans mes bras. Où sont-elles ces cinq minutes ? Qui me les a volées ? Où était ton père ? S'il avait été là, je lui aurais demandé de filmer. Et il aurait accepté, même si ses yeux avaient été des trous noirs. La caméra aurait vu pour lui, se serait souvenue pour nous.

J'ai si froid. Je plonge mes mains dans les manches de mon manteau et le bout de mes doigts touche quelque chose de pelucheux. Figée dans la foule, je n'arrive plus à avancer. Comment ai-je pu oublier de te laisser sous sa protection ? Les pas qui me ramènent sont plus faciles, c'est peut-être le vent qui me pousse vers toi, mon petit garçon, mon petit flocon...

Je voulais leur confier mon gri-gri pour qu'ils le mettent au creux de ton épaule, je n'ai pas la force de te voir une nouvelle fois, mais les portes du bureau sont closes, les équipes en réunion. Je suis désemparée, incapable de m'arracher encore à ce lieu où tout commence, où tout finit.

Dans la chambre au bout du couloir, par la porte entrouverte, j'aperçois la jeune fille, celle de la salle de travail. Elle est endormie. Un nouveau-né repose dans un berceau à ses côtés. J'entre sur la pointe des pieds. Je ne peux m'empêcher de les regarder, elles sont belles, chacune à leur manière. Tableau touchant, désarmant, désolant. Le drap découvre le tatouage sur son épaule. C'est encore une enfant. Elle est plutôt jolie avec ses cheveux blond foncé, sa pâleur et ses lèvres boudeuses.

Le bébé est une vraie poupée, un chef-d'œuvre de la nature. Les lèvres bien roses, ourlées en un baiser imaginaire, les mains ouvertes à la caresse, un teint de porcelaine, un nez retroussé, des cheveux abondants couleur miel. Je passe furtivement la main sur son front, sa peau est si douce."

4 mars 2009

Paradis conjugal - Alice Ferney

Paradis_conjugal Albin Michel – août 2008 – 368 pages

Présentation de l'éditeur
Pour la énième fois, Elsa, mère de famille, 4 enfants, regarde le DVD de Chaînes conjugales, le classique de Mankiewicz. La veille, son mari l'a prévenue qu il ne rentrerait pas dans une maison où sa femme regardait en boucle depuis trois mois le même film. L'histoire de 3 amies qui en attendent une 4e. A l'instant d'embarquer pour une croisière, elles reçoivent de la retardataire, une lettre qui gâchera leur journée. Cette dernière les informe malicieusement qu'elle quitte la ville avec le mari de l'une d'entre elles, les projetant pour plusieurs heures dans l'angoisse, les soupçons, la jalousie...
Elsa regarde le film avec deux de ses aînés dont les réparties fusent, corroborant ses appréhensions les plus intimes. Les héroïnes du film lui tendent un miroir, véritable révélateur de sa situation conjugale, dans lequel elle se projette. Elle finit par céder aux larmes, à l'apitoiement, puis au désir de reconquête de ce mari qui ne revient toujours pas...
Comment un film peut être le révélateur d'une situation conjugale, comment peut-on arriver à analyser sa situation à travers une fiction, comprendre que l'amour ne se vit pas à travers les autres mais dans la réalité ? Amour, désamour, non-dits, malentendus, lassitude, désir, peur de la solitude... Alice Ferney explore avec beaucoup d'intelligence, de sensibilité et de subtilité les variations du sentiment amoureux dans le couple, comment s'inventer le pire pour renaître à l'amour.

Biographie de l'auteur
Depuis Le Ventre de la fée (1993), Alice Ferney explore avec talent ces thèmes principaux que sont la féminité, la maternité et le sentiment amoureux. Elle est l'auteur de nombreux succès : L'Elégance des veuves (1995), Grâce et dénuement (1997), La Conversation amoureuse (2000), Dans la guerre (2003) Les Autres (2006), tous parus chez Actes Sud.

Mon avis : (lu en février 2009)
Encore un livre original d'Alice Ferney, mais je ne peux pas dire que j'ai aimé ou pas aimé... J'ai lu le livre avec intérêt : ce livre nous parlent des couples installés dans le quotidien et qui n'expriment plus leur amour. Pour cela, nous suivons avec Elsa et ses deux aînés Noémie(16 ans) et Max (12 ans) une description du film « Chaînes conjugales », scènes par scènes.

Ce livre nous fait réfléchir sur nous-même, sur les apparences et la profondeur des couples... mais après avoir fini le livre, j'ai très envie de voir le film !

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Ce livre fait référence au film américain "Chaînes conjugales" de 1949, réalisé par Joseph L. Mankiewicz avec Jeanne Crain, Linda Darnell, Ann Sothern. Trois amies, Deborah Bishop, Rita Phipps et Laura May Hollingsway, embarquent pour une croisière. Mais au moment de partir, elles reçoivent une lettre d'une relation commune, Addie Ross. Celle-ci les prévient qu'elle part avec le mari de l'une d'entre elles. Mais lequel ?

Extrait : (page 16)
Elsa Platte peut encore entendre la phrase, assourdie dans sa mémoire vive, comme si elle s'était cachée sous l'eau lorsqu'il s'était mis à parler. Il ? C'était son mari qui disait : Demain soir et les soirs suivants, prépare-toi à dormir seule. Je ne rentrerai pas. Je ne rentrerai pas dans une maison où ma femme est installée devant la télévision, voit le même film depuis trois mois, ne se lève pas pour me préparer à dîner, et se couche sans me regarder ! Non décidément, l'époux n'est ce soir ni dans le sillage parfumé, ni dans la maison, le lit ou les bras d'Elsa. Elle est seule. C'est la plus triste manière d'être tranquille. Elle peut regarder le film. Elle pense que la perte de l'objet aimé détruit toute la joie de la vie.

Extrait : (page 157)
Autant qu'Elsa Platte le connût, son mari lui semblait doux, pacifique, égal d'humeur, mais peu sensible en vérité. L'un d'ailleurs expliquant l'autre, ou le facilitant : pacifique et sans humeurs parce que pas sensible justement. Non, décidément, elle avait rencontré peu d'hommes aussi intelligents et peu expressifs. Comme si toute l'intelligence se concentrait dans sa forme hypothético-déductive et délaissait le champ intérieur, humain et affectif. Elle avait épousé un cerveau. Un cerveau et un sexe ! Et face à cette unité impassible, Elsa Platte était une fontaine et une éruption. Elle avait ri, parlé et pleuré pour deux en quelque sorte.

Extrait : (page 208)
Joseph Mankiewicz s'amusait à mettre en scène la rouerie féminine, et la complicité des femmes entre elles lorsqu'il s'agit de piéger un homme qui arrange la famille. Car Sadie jouait le jeu, arrêtant juste à temps la mère qui allait faire une gaffe (ton sac est sur la table, ne le cherche pas !). Laisse jouer la petite qui sait y faire, devait penser Sadie. Lora Mae ! Elle menait une partie d'échecs, coup après coup, et cette partie-là, contre un matou séducteur habitué à ce qu'on lui cédât et vivement alléché par de naturels appâts, était facile à mener : Porter Hollingsway, pris dans les filets de l'attirance, était plus prévisible que n'importe quel joueur.

2 mars 2009

Eldorado – Laurent Gaudé

Eldorado_Laurent_Gaud_ Actes Sud – août 2006 – 238 pages

Présentation de l’éditeur
A Catane, le commandant Salvatore Piracci travaille à la surveillance des frontières maritimes. Gardien de la citadelle Europe depuis vingt ans, il sillonne la mer, de la Sicile à la petite île de Lampedusa, pour intercepter les bateaux chargés d’émigrés clandestins qui ont tenté la grande aventure en sacrifiant toute leur misérable fortune… en sacrifiant parfois leur vie, car il n’est pas rare que les embarcations que la frégate du commandant accoste soient devenues des tombeaux flottants, abandonnés par les équipages qui ont promis un passage sûr et se sont sauvés à la faveur de la nuit, laissant hommes, femmes et enfants livrés à la plus abominable des dérives. Un jour, c’est justement une survivante de l’un de ces bateaux de la mort qui aborde le commandant Salvatore Piracci, et cette rencontre va bouleverser sa vie. Touché par l’histoire qu’elle lui raconte, il se laisse peu à peu gagner par le doute, par la compassion, par l’humanité… et entreprend un grand voyage.

Biographie de l'auteur
Romancier et dramaturge né en 1972, Laurent Gaudé a publié chez Actes Sud plusieurs pièces de théâtre et trois romans : Cris (2001), La Mort du roi Tsongor (2002, prix Goncourt des lycéens 2002, prix des Libraires 2003) et Le Soleil des Scorta (prix Populiste, prix Jean-Giono et prix Goncourt 2004).

Mon avis : (lu en octobre 2006)
Cette fois, Laurent Gaudé a choisi un sujet sensible : l'immigration clandestine. On suit l'histoire de ses africains qui tentent au péril de leurs vies de gagner l'Eldorado européen. Le voyage devient une tragédie humaine. Ce livre nous met dans la peau des migrants, mais aussi de ceux chargés de les recevoir comme le commandant Piracci (garde côte italien) qui, depuis vingt ans, sauve les hommes de la noyade pour les conduire vers les centres d'accueil d'où ils seront renvoyés vers leur pays d'origine. Mais un jour, sa rencontre avec une migrante va changer sa vision de la vie. Le style est concis, poétique, efficace. Mais mon seul petit bémol, c'est que j'ai trouvé la fin de l'histoire un peu bâclée.

Extrait : (page 61)
- Pourquoi lui ai-je donné mon arme ?
- Parce qu'elle le voulait, répondit simplement le vieux buraliste. Et comme Salvatore Piracci restait interdit, il ajouta : elle le voulait. De tout son être. Combien de fois dans ta vie, Salvatore, as-tu vraiment demandé quelque chose à quelqu'un ? Nous n'osons plus. Nous espérons. Nous rêvons que ceux qui nous entourent devinent nos désirs, que ce ne soit même pas la peine de les exprimer. Nous nous taisons. Par pudeur. Par crainte. Par habitude. Ou nous demandons mille choses que nous ne voulons pas mais qu'il nous faut, de façon urgente et vaine, pour remplir je ne sais quel vide. Combien de fois as-tu vraiment demandé à quelqu'un ce que tu voulais ?
- Je ne suis pas sûr de l'avoir jamais fait, répondit Salvatore Piracci en souriant.
- Et si tu l'avais fait, continua Angelo, crois-tu vraiment que l'on aurait pu te dire non ?

Extrait : (page 120)
- L'herbe sera grasse, dit-il, et les arbres chargés de fruits. De l'or coulera au fond des ruisseaux, et des carrières de diamants à ciel ouvert réverbéreront les rayons du soleil. Les forêts frémiront de gibier et les lacs seront poissonneux. Tout sera doux là-bas. Et la vie passera comme une caresse. L'Eldorado, commandant. Ils l'avaient au fond des yeux. Ils l'ont voulu jusqu'à ce que l'embarcation se retourne. En cela, ils ont été plus riches que vous et moi. Nous avons le fond de l'oeil sec, nous autres. Et nos vies sont lentes.

Extrait : (page 126)
Le camion roule. Je sens une force sourde qui monte en moi. Jusqu'à présent je n'avais fait que suivre mon frère, maintenant je pars pour le sauver. Je ne dormirai plus la nuit. Je me nourrirai de ver. Je serai dur à la tâche et infatigable comme une machine. On pourra m'appeler 'esclave', je n'en aurai cure. La fatigue pourra me ronger les traits, je n'en aurai cure.J'ai hâte.
Le camion roule. Nous laissons les faubourgs d'Al-Zuwarah derrière nous pour aller trouver le navire qui nous emmènera en Europe. Dès demain,j'y serai. Dès demain, alors,j'enverrai de l'argent à Jamal. Je me concentre sur cette idée. Je suis une boule dure de volonté et rien ne me fera dévier de ma route. La promiscuité des autres corps ne me gêne pas. Les visages des autres hommes ne me font plus peur. Je n'ai qu'une hâte : que le bateau quitte l'Afrique et que mes mains se mettent à travailler.

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2 mars 2009

La mort du Roi Tsongor – Laurent Gaudé

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Actes Sud - août 2002 – 204 pages

Babel - décembre 2004 - 204 pages

Prix Goncourt des Lycéens 2002

Présentation de l’éditeur
Dans une Antiquité imaginaire, le vieux Tsongor, roi de Massaba, souverain d’un empire immense, s’apprête à marier sa fille. Mais au jour des fiançailles, un deuxième prétendant surgit. La guerre éclate : c’est Troie assiégée, c’est Thèbes livrée à la haine. Le monarque s’éteint; son plus jeune fils s’en va parcourir le continent pour édifier sept tombeaux à l’image de ce que fut le vénéré – et aussi le haïssable – roi Tsongor.
Roman des origines, récit épique et initiatique, le livre de Laurent Gaudé déploie dans une langue enivrante les étendards de la bravoure, la flamboyante beauté des héros, mais aussi l’insidieuse révélation, en eux, de la défaite. Car en chacun doit s’accomplir, de quelque manière, l’apprentissage de la honte.

L'auteur : Romancier et dramaturge, Laurent Gaudé a publié chez Actes Sud plusieurs pièces de théâtre : Combats de possédés (1999), Onysos le furieux (2000), Pluie de cendres (2001), Cendres sur les mains (2002), Le Tigre bleu de l'Euphrate (2002), Salina (2003), Médée Kali (2003), Les Sacrifiées ; et deux romans : Cris (2001) et La Mort du roi Tsongor (2002, prix Goncourt des lycéens 2002, prix des Libraires 2003).

Mon avis : (lu en mars 2005) 
Ce livre est un récit fabuleux où se mêlent l’aventure, l’honneur, la guerre et la folie des hommes. C’est à la fois un conte initiatique et philosophique. Les personnages sont magnifiques et il y beaucoup d’humanité dans ce livre. Le style est fluide, riche et d'une précision incroyable, l'ensemble est poignant et inoubliable. A lire absolument !

Extrait :
D’ordinaire, Katabolonga était le premier à se lever dans le palais. Il arpentait les couloirs vides tandis qu’au-dehors la nuit pesait encore de tout son poids sur les collines. Pas un bruit n’accompagnait sa marche. Il avançait sans croiser personne, de sa chambre à la salle du tabouret d’or. Sa silhouette était celle d’un être vaporeux qui glissait le long des murs. C’était ainsi. Il s’acquittait de sa tâche, en silence, avant que le jour ne se lève.

Mais ce matin-là, il n’était pas seul. Ce matin-là, une agitation fiévreuse régnait dans les couloirs. Des dizaines et des dizaines d’ouvriers et de porteurs allaient et venaient avec précaution, parlant à voix basse pour ne réveiller personne. C’était comme un grand navire de contrebandiers qui déchargeait sa cargaison dans le secret de la nuit. Tout le monde s’affairait en silence. Au palais de Massaba, il n’y avait pas eu de nuit. Le travail n’avait pas cessé.

Depuis plusieurs semaines, Massaba était devenue le cœur anxieux d’une activité de fourmis. Le roi Tsongor allait marier sa fille avec le prince des terres du sel. Des caravanes entières venaient des contrées les plus éloignées pour apporter épices, bétail et tissus. Des architectes avaient été diligentés pour élargir la grande place qui s’étendait devant la porte du palais. Chaque fontaine avait été décorée. De longues colonnes marchandes venaient apporter des sacs innombrables de fleurs. Massaba vivait à un rythme qu’elle n’avait jamais connu. Au fil des jours, sa population avait grossi. Des milliers de tentes, maintenant, se tenaient serrées le long des remparts, dessinant d’immenses faubourgs de tissu multicolores où se mêlaient le cri des enfants qui jouaient dans le sable et les braiements du bétail. Des nomades étaient venus de loin pour être présents en ce jour. Il en arrivait de partout. Ils venaient voir Massaba. Ils venaient assister aux noces de Samilia, la fille du roi Tsongor.

Depuis des semaines, chaque habitant de Massaba, chaque nomade avait déposé, sur la place principale, son offrande à la future mariée. C’était un gigantesque amas de fleurs, d’amulettes, de sacs de céréales et de jarres de vin. C’était une montagne de tissus et de statues sacrées. Chacun voulait offrir à la fille du roi Tsongor un gage d’admiration et une prière de bénédiction.

Or, en cette nuit-là, les serviteurs du palais avaient été chargés de vider la place de toutes ces offrandes. Il ne devait plus rien rester. Le vieux roi de Massaba voulait que l’esplanade soit décorée et resplendissante. Que tout son parvis soit jonché de roses. Que sa garde d’honneur y prenne place en habit d’apparat. Le prince Kouame allait envoyer ses ambassadeurs, pour déposer aux pieds du roi les présents qu’il offrait. C’était le début de la cérémonie nuptiale, la journée des présents. Tout devait être prêt.

Les serviteurs du palais, toute la nuit, n’avaient cessé de faire des allers-retours, entre la montagne de cadeaux de la place et les salles du palais. Ils transportaient ces centaines de sacs, de fleurs et de bijoux. Ils disposaient le plus harmonieusement possible, en prenant bien soin de ne pas faire de bruit, les amulettes, les statues et les tapisseries dans les différents appartements du palais. Il fallait que la grande place soit vide. Et que le palais, lui, soit riche de ces signes d’affection du peuple. Il fallait que la princesse Samilia se réveille dans un palais aux mille parfums et couleurs. C’était à cela que travaillaient, silencieusement, les longues colonnes de porteurs. Ils devaient finir avant que la princesse et sa suite ne se réveillent. Le temps commençait à manquer. Car ils avaient croisé et reconnu, pour certains d’entre eux, Katabolonga. Ils savaient que si Katabolonga était debout, c’est que le jour n’allait pas tarder à se lever et avec lui, le roi Tsongor. Aussi, au fur et à mesure que Katabolonga avançait dans les couloirs du palais, au fur et à mesure qu’il se rapprochait de la salle du tabouret d’or, l’agitation croissait et les serviteurs se faisaient de plus en plus rapides et affairés.

Katabolonga, lui, n’était touché par aucune anxiété. Il marchait lentement comme à l’accoutumée. Au rythme calme qui était le sien. Il savait qu’il avait le temps. Que le jour ne se lèverait pas tout de suite. Il savait - comme tous les jours depuis des années - qu’il serait prêt, assis au chevet du roi lorsque celui-ci ouvrirait les yeux. Il pensait simplement que c’était la première fois, et certainement la dernière, qu’il croisait tant d’hommes lors de sa marche nocturne et que le bruit de ses pas était accompagné de tant de murmures.

Mais lorsque Katabolonga entra dans la salle du tabouret d’or, il se figea brusquement. L’air qui lui caressait le visage lui murmurait quelque chose qu’il ne parvenait pas à comprendre. Au moment où il avait ouvert la porte, il lui avait semblé, le temps d’un instant, que tout allait finir. Il se reprit. Traversa la pièce pour prendre le tabouret d’or, mais à peine eut-il saisi la relique, qu’il dut la lâcher. Le tremblement qui lui parcourut les bras lui dit, à nouveau, que tout allait finir. Cette fois, il écouta ce sentiment monter en lui. Il écouta et le trouble s’empara de lui. Il écouta. Et il sut qu’aujourd’hui, effectivement, tout allait cesser. Il sut qu’aujourd’hui il tuerait le roi Tsongor. Qu’aujourd’hui était le jour auquel il avait pensé échapper. Il comprit que ce jour était le dernier où le roi se lèverait, le dernier où lui, Katabolonga le sauvage, le suivrait de salle en salle, marchant toujours sur ses pas, veillant sur ses moindres fatigues, écoutant ses soupirs et s’acquittant de la plus honorifique des tâches. Le dernier jour où il serait le porteur du tabouret d’or.

Il se releva. Essayant de faire taire le trouble qui était né en lui. Il saisit le tabouret et parcourut les couloirs du palais. Les mâchoires serrées sur cette conviction obscure qu’aujourd’hui était le jour où il tuerait son ami, le roi Tsongor.

Lorsque Tsongor se leva, il eut immédiatement le sentiment que cette journée serait trop courte pour qu’il puisse s’acquitter de tout ce qu’il avait à faire. Il respira profondément. Il savait que le calme ne lui serait plus offert jusqu’au soir. Il salua Katabolonga qui se tenait à ses côtés. Et ce visage lui fit du bien. Il salua Katabolonga, mais celui-ci, au lieu de lui rendre son salut et de lui présenter son collier royal, comme il le faisait chaque matin, lui murmura à voix basse :
"Tsongor, je veux te parler.
- Je t’écoute, répondit le roi.
- C’est pour aujourd’hui, mon ami", dit Katabolonga.
La voix du porteur avait quelque chose d’étrange, mais Tsongor n’y prêta pas attention. Il dit simplement : "Je sais." Et la journée commença.

Challenge Prix Goncourt des Lycéens
2002
Challenge Goncourt des Lycéens
goncourt_lyceen_enna
chez Enna

2 mars 2009

Le soleil des Scorta – Laurent Gaudé

le_soleil_des_scorta Actes Sud – août 2004 – 250 pages

Prix Goncourt 2004

Présentation de l'éditeur
Sous le soleil écrasant du Sud italien, le sang des Scorta transmet, de père en fils, l'orgueil indomptable, la démence et la rage de vivre de ceux qui, seuls, défient un destin retors. Par l'auteur de La Mort du roi Tsongor (prix Goncourt des lycéens 2002, prix des Libraires 2003).

Un homme avance sur sa mule dans un paysage pétrifié de chaleur, sous l'implacable soleil des Pouilles, en direction du minuscule village de Montepuccio, où il vient assouvir, au risque d'y perdre la vie, son désir et sa vengeance. Ses fautes de jeunesse - vols, violences, crimes de toutes sortes -, il les a payées de dix-sept ans de prison. Désormais libre, il entend bien, de gré ou de force, faire sienne une femme que dans sa jeunesse il convoitait.
De cette vengeance - on pourrait même dire : de cette scène primitive - va surgir la lignée des Scorta, une famille de "pouilleux" marqués par l'opprobre et la faute originelle, mais qui peu à peu, sur quatre générations, parvient à subsister, à planter ses racines dans un sol fruste, à saisir sa chance, transmettre ses valeurs et s'accorder aux beautés de sa terre natale
L'histoire de la famille Scorta se déroule sur un siècle (1870 à nos jours). Elle prend le double aspect d'un récit "objectif" et linéaire eue viennent scander les soliloques d'un des personnages, Carmela, vieillarde qui, avant de perdre la mémoire, se hâte de confier à l'ancien curé de Montepuccio ce qu'elle n'a pu encore raconter à personne : son voyage à New York avec ses frères, la création du bureau de tabac de Montepuccio, et plus largement sa vision subjective de l'aventure des Scorta.
Car ce roman puissamment sudiste et solaire n'est nullement, au sens où on l'entend couramment, une "saga familiale". Marqué par la force de la parole, par la sincérité des personnages, par l'humilité et l'obstination des gens simples, par la recherche et la connaissance des joies élémentaires, le nouveau livre de Laurent Gaudé entrelace les destins comme les voix d'un hymne étincelant d'humanisme. 

L'auteur vu par l'éditeur
Romancier et dramaturge, Laurent Gaudé a publié chez Actes Sud plusieurs pièces de théâtre : Combats de possédés (1999), Onysos le furieux (2000), Pluie de cendres (2001), Cendres sur les mains (2002), Le Tigre bleu de l'Euphrate (2002), Salina (2003), Médée Kali (2003), Les Sacrifiées ; et deux romans : Cris (2001) et La Mort du roi Tsongor (2002, prix Goncourt des lycéens 2002, prix des Libraires 2003).

Mon avis : (lu en janvier 2005)
Un superbe livre qui nous décrit l'Italie du Sud comme si on y était. On suit l'histoire des Scorta sur plusieurs générations et pendant un siècle : les moments forts, tristes ou heureux. Ce livre est écrit avec des mots simples, beaux et touchants. Les personnages sont émouvants, l'histoire est chaleureuse et palpitante. J'ai beaucoup aimé ce livre.

Extrait :
Sur un chemin de poussière, un âne avançait lentement. Il suivait chaque courbe de la route, avec résignation. Rien ne venait à bout de son obstination. Ni l'air brûlant qu'il respirait. Ni les rocailles pointues sur lesquelles ses sabots s'abîmaient. Il avançait. Et son cavalier semblait une ombre condamnée à un châtiment antique. L'homme ne bougeait pas. Hébété par la chaleur. Laissant à sa monture le soin de les porter tous deux au bout de cette route.

Extrait :
La chaleur du soleil semblait fendre la terre ; Pas un souffle de vent ne faisait frémir les oliviers. Tout était immobile. Le parfum des collines s'était évanoui. La pierre gémissait de chaleur. Le mois d'août pesait sur le massif du Gargano avec l'assurance d'un seigneur. Il était impossible de croire qu'en ces terres, un jour, il avait pu pleuvoir. Que de l'eau ait irrigué les champs et abreuvé les oliviers. Impossible de croire qu'une vie animale ou végétale ait pu trouver, sous ce ciel sec, de quoi se nourrir. Il était deux heures de l'après -midi, et la terre était condamnée à brûler. Sur un chemin de poussière, un âne avançait lentement. Il suivait chaque courbe de la route, avec résignation. Rien ne venait à bout de son obstination. Ni l'air brûlant qu'il respirait. Ni les rocailles pointues sur lesquelles ses sabots s'abîmaient. Il avançait. Et son chevalier semblait une ombre condamnée à un châtiment antique. L'homme ne bougeait pas. Hébété de chaleur. Laissant à sa monture le soin de les porter tous deux au bout de cette route. La bête s'acquittait de sa tâche avec une volonté sourde qui défiait le jour. Lentement, mètre après mètre, sans avoir la force de presser jamais le pas, l'âne engloutissait les kilomètres.

1 mars 2009

L'arithmétique appliquée et impertinente – Jean-Louis Fournier

l_arithm_tique_impertinente Payot – mai 1993 – 218 pages

Quatrième de couverture : "J'ai longtemps cru que l'arithmétique n'avait été inventée que pour résoudre les problèmes de trains qui se croisent et de baignoires qui débordent. C'est quand j'ai été grand que j'ai découvert qu'elle pouvait mieux faire.
Par exemple : m'aider à calculer le poids du cerveau d'un imbécile, le volume du pape, l'envergure de la Joconde, la vitesse d'un hareng, la longueur maximale de Ravaillac. Et puis le nombre de voitures que pourrait contenir Notre Dame transformée en parking, la quantité de caviar qu'un smicard peut acheter avec son salaire... Enfin les questions que toute personne responsable devrait se poser."
Jean-Louis Fournier

Après La Grammaire française et impertinente, le mauvais élève Fournier Jean-Louis récidive avec cette arithmétique qui propose de faux problèmes mais des solutions justes.

Auteur : Jean-Louis Fournier est un écrivain, humoriste et réalisateur de télévision né à Arras le 19 décembre 1938. Il est le créateur, entre autres, de La Noiraude et d'Antivol, l'oiseau qui avait le vertige. Par ailleurs, il fut le complice de Pierre Desproges en réalisant les épisodes de La Minute nécessaire de Monsieur Cyclopède, ainsi que les captations de ses spectacles au Théâtre Grévin (1984) et au Théâtre Fontaine (1986). C'est également à lui que l'on doit l'intitulé de la dépêche AFP annonçant le décès de l'humoriste: "Pierre Desproges est mort d'un cancer. Etonnant non ?". Il adore Ionesco.

Mon avis : (dans ma bibliothèque depuis 2000)
Ce livre est divisé en plusieurs chapitres qui traitent de différents thèmes:
- La longueur.
- La surface.
- Le volume.
- Le poids.
- Le poids spécifique
- Le cercle, la sphère.
- La règle de trois.
- Les fractions.
- Le pourcentage.
- Le temps, la vitesse.
- Le prix.
Au début de chaque chapitre, l'auteur donne les définitions, les unités utiles, quelques méthodes de calculs basiques, et tout cela avec humour !
Ensuite des problèmes sont proposés avec la méthode et les outils mathématiques pour trouver la solution !
Puis à la fin de chaque chapitre, les solutions et les corrigés de tous les problèmes !

Bien sûr les problèmes sont très drôles, l'humour peu être grinçant et les jeux de mots sont légions... On apprend donc en s'amusant ! Ce livre est indispensable pour les petits et les grands !

Extraits :
Problème : Le gardien de phare va pisser cinq fois par jour : les WC sont au rez-chaussée, il doit chaque fois descendre 143 marches de 20 cm. Calculez le nombre de kilomètres que le gardien de phare parcourt en une semaine de 7 jours pour aller pisser. 

Comment faire ? Je calcule la longueur totale de l'escalier en multipliant le nombre de marches par leur hauteur. Je multiplie le nombre obtenu par 2 (monter et descendre) puis par 5, et j'obtiens la distance franchie chaque jour par le gardien de phare pour aller pisser. Je multiplie cette distance par le nombre de jours de la semaine, et je convertis le chiffre obtenu en kilomètres.

Problème : Avant d'être écartelé, Ravaillac avait des bras de 70 cm, des jambes de 0,80 m et un tronc de 75 cm de long. Sous l'effet de la traction des chevaux ses membres se sont allongés de 20% et son tronc de 10%. Quelle longueur maximale a-t-il atteint entre l'extrémité des bras et celle des jambes ?
Comment faire ? Je calcule la nouvelle longueur de chaque membre de Ravaillac, soit la longueur initiale plus 20% de celle-ci. Je calcule la nouvelle longueur du tronc de Ravaillac, soit la longueur initiale plus 10% de celle-ci. J'additionne le tout.

1 mars 2009

Grammaire française et impertinente – Jean-Louis Fournier

la_grammaire_impertinente Payot – mai 1992 – 227 pages

Description
Elle montre souvent le mauvais exemple, mais donne toujours la bonne règle ! Voici une grammaire impertinente qui réunit l'ensemble des règles à suivre pour dire et écrire correctement bêtises et grossièretés. Des personnages inhabituels dans un livre de grammaire - un condamné à mort, un gangster, un commandant de bord aveugle... - nous enseignent l'usage des prépositions et des conjonctions et conjuguent avec aisance le subjonctif imparfait des verbes les plus délurés. Ancien écolier que les exemples puisés dans Anatole France ou Pierre Loti n'arrivaient pas à dérider, Jean-Louis Fournier a pensé aux élèves peinant aujourd'hui sur l'orthographe comme lui-même peinait hier. Un manuel que doit également posséder tout instituteur rêvant de voir une petite lueur s'allumer dans le regard blasé des cancres.

Auteur : Jean-Louis Fournier est un écrivain, humoriste et réalisateur de télévision né à Arras le 19 décembre 1938. Il est le créateur, entre autres, de La Noiraude et d'Antivol, l'oiseau qui avait le vertige. Par ailleurs, il fut le complice de Pierre Desproges en réalisant les épisodes de La Minute nécessaire de Monsieur Cyclopède, ainsi que les captations de ses spectacles au Théâtre Grévin (1984) et au Théâtre Fontaine (1986). C'est également à lui que l'on doit l'intitulé de la dépêche AFP annonçant le décès de l'humoriste: "Pierre Desproges est mort d'un cancer. Etonnant non ?". Il adore Ionesco.

Mon avis : (dans ma bibliothèque depuis 2000)
Ce
Jean-Louis Fournier définit lui-même son livre comme "l'ensemble des règles à suivre pour dire et écrire correctement des bêtises, des grossièretés et quelques horreurs... Une grammaire qui donne peut-être le mauvais exemple mais toujours la bonne règle." En effet, les exemples qui sont complètement fous et décalés et qui nous font bien rire. C'est vraiment savoureux à lire ! On s'amuse en apprenant la grammaire. Cette grammaire doit être dans une bibliothèque au même titre que le Bescherelle et le Bled !

Extraits :

La virgule (,) sépare certains éléments à l'intérieur de la phrase. C'est le signe de ponctuation le plus faible. Elle marque une pause assez courte.

Exemple : Pour ne pas briser la glace, les éléphants ont traversé le lac gelé sur la pointe des pieds. Les éléphants, voyant le lac gelé, se sont concertés très rapidement, puis, après une pause assez courte, ont décidé de traverser le lac sur la pointe des pieds.

*

Le sujet : Le sujet est l'être ou la chose dont le verbe exprime l'état ou l'action. On trouve le sujet en mettant qu'est-ce qui ? ou qui est-ce qui ? avant le verbe.

Exemple : Le gai laboureur est incommodé par les pets incessants de son percheron.

Qui est incommodé par les pets incessants du percheron ? Le gai laboureur parce qu'il est juste derrière et il a le nez à hauteur du cul de la bête donc le gai laboureur est bien le sujet.

*

Les adverbes de négation : ils permettent d'exprimer ou d'accentuer une négation. Les deux principaux sont non et ne. Non s'emploie pour renforcer une négation.

Exemple : « Non, je ne suis pas le dernier des cons », déclara-t-il en désignant la longue file qui le suivait.

Pour opposer deux éléments d'une phrase.

Exemple : L'éléphant s'est assis sur le chasseur par distraction, non par méchanceté.

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