Julliard - mai 2006 - 337 pages
Résumé :
" Le coup parti, le sort en fut jeté. Mon père tomba à la renverse, son misérable tricot sur la figure, le ventre décharné, fripé, grisâtre comme celui d'un poisson crevé... et je vis, tandis que l'honneur de la famille se répandait par terre, je vis ce qu'il ne me fallait surtout pas voir, ce qu'un fils digne, respectable, ce qu'un Bédouin authentique ne doit jamais voir - cette chose ramollie, repoussante, avilissante, ce territoire interdit, tu, sacrilège: le pénis de mon père... Le bout du rouleau! Après cela, il n'y a rien, un vide infini, une chute interminable, le néant... " La descente aux enfers d'un jeune homme broyé par le terrorisme. Fuyant son village, dérivant jusqu'à Bagdad, il se retrouve dans une ville déchirée par une guerre civile féroce. Sans ressources, sans repères, miné par l'humiliation, il devient une proie rêvée pour les islamistes radicaux. Connu et salué dans le monde entier, Yasmina Khadra explore inlassablement l'histoire contemporaine en militant pour le triomphe de l'humanisme. Après Les Hirondelles de Kaboul (Afghanistan) et L'Attentat (Israël; Prix des libraires 2006), Les Sirènes de Bagdad (Irak) est le troisième volet de la trilogie que l'auteur consacre au dialogue de sourds opposant l'Orient et l'Occident. Ce roman situe clairement l'origine de ce malentendu dans les mentalités.
Auteur : Yasmina Khadra (arabe ياسمينة خضراء qui signifie « jasmin vert ») est le pseudonyme de l'écrivain Mohammed Moulessehoul, né le 10 janvier 1955 à Kenadsa dans la wilaya de Bechar dans le Sahara algérien. Diverses raisons l'y poussent, mais la première que donne Moulessehoul est la clandestinité. Elle lui permet de prendre ses distances par rapport à sa vie militaire et de mieux approcher son thème cher : l'intolérance. Il choisit de rendre hommage aux femmes algériennes et à son épouse en particulier, en prenant ses deux prénoms : Yasmina Khadra. Khadra ne révèle son identité masculine qu'en 2001 avec la parution de son roman autobiographique L'Écrivain et son identité tout entière dans L'imposture des mots en 2002. Or à cette époque ses romans ont déjà touché un grand nombre de lecteurs et de critiques. Ses œuvres ont été traduites en plus de trente langues.
Mon avis : (lu en novembre 2006)
C’est une histoire très forte et d’une actualité brûlante, nous sommes à Bagdad, les occupants américains sont présents et l’on découvre comment la guerre et les humiliations qui l'accompagnent peuvent conduire un jeune homme ordinaire à se laisser "séduire" par le terrorisme.
C’est un témoignage sur les souffrances des peuples du Moyen-Orient, Yasmina Khadra nous raconte une réalité. Ce roman nous montre l’envers du décor, ce que l’on ne voit pas à la télévision : le cheminement qui mène à la haine, l'incompréhension, le choc des cultures…
A lire absolument ! Nous nous devons de ne pas ignorer ce qui se passe en Irak.
Extrait : (p.115)
Un soldat m'attrapa par la nuque, un autre me mit un genou dans le bas-ventre.J'étais happé par une tornade, ballotté d'un tumulte à l'autre ; je cauchemardais debout, tel un somnambule pris à partie par des esprits frappeurs.J'avais le vague sentiment qu'on me traînait sur la terrasse, que l'on me bousculait sur les marches de l'escalier ; je ne savais plus si je dégringolais ou si je planais...
Extrait : (p.202)
- Encore autre chose, cousin, me chuchota-t-il. Si tu tiens à te battre, fais-le proprement. Bats-toi pour ton pays, pas contre le monde entier. Fais la part des choses et distingue le bon grain de l'ivraie. Ne tue pas n'importe qui, ne tire pas n'importe comment. Il y a plus d'innocents qui tombent que de salauds. Tu le promets ?
-...
- Tu vois ? Tu fais déjà fausse route. Le monde n'est pas notre ennemi. Rappelle-toi les peuples qui ont protesté contre la guerre préventive, ces millions de gens qui ont marché à Madrid, Rome, Paris, Tokyo, en Amérique du sud, en Asie. Tous étaient et sont encore de notre côté.